Déclaration de Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, notamment l'assainissement des comptes, la politique familiale, le système de retraite, l'indemnisation des victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles et le système de santé, à l'Assemblée Nationale le 24 octobre 2000.

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Circonstance : Présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale à l'Assemblée Nationale, le 24 octobre 2000

Texte intégral

Monsieur le Président,
Madame et Messieurs les rapporteurs,
Mesdames, Messieurs les députés
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale constitue un temps fort de l'action du gouvernement et de la discussion parlementaire, parce qu'il touche à la vie quotidienne des Français, et, représente des enjeux sociaux, économiques et financiers de premier plan.
Jusqu'à une période récente, les problèmes de sécurité sociale ont été traités dans l'urgence financière. Les plans de redressement ont succédé aux plans d'économies pour combler le trop célèbre "trou" de la sécurité sociale.
La cause de ces déficits tenait d'abord au recul de la croissance qui a frappé notre économie dans la première moitié des années 90. Elle tenait aussi à des décisions macroéconomiques inadaptées qui, entre 1993 et 1997, n'ont fait qu'approfondir la crise en croyant y porter remède : je veux parler des hausses massives et successives de prélèvements frappant les ménages, y compris les plus modestes, qui ont handicapé le pouvoir d'achat, freiné la consommation, accru le chômage.
Les efforts entrepris depuis 1997 ont permis dès 1999 d'inverser cette tendance.
Est-il besoin de rappeler que l'un des succès de ce gouvernement est d'avoir inversé cette spirale, d'avoir redonné confiance aux français. Depuis 1997, l'économie française est sur un rythme de croissance moyen de 3 % et vous le savez, les prévisions économiques du Gouvernement pour 2001 sont de 3,3 %. Depuis 1997, le chômage a reculé de 800000 personnes. Jamais un recul aussi important n'avait été observé. C'est comme si l'équivalent d'une grande agglomération de notre pays s'était remis à produire, à consommer, peut-être aussi tout simplement à vivre.
Le recul du chômage a été obtenu par le redémarrage de la croissance, mais aussi par la réduction négociée du temps de travail, par les emplois-jeunes.
Parce que la croissance est là, parce que le chômage recule, parce que l'exclusion marque le pas, nous pouvons aujourd'hui porter un autre regard sur notre sécurité sociale.
Nous sommes sortis de l'urgence financière. Après les lourds déficits de 1996 (54 MdsF) et de 1997 (33 MdsF), nous avons renoué avec l'équilibre en 1999. Notre sécurité sociale sera en excédent de 16,2 MdsF en 2000 et de 18,9 MdsF en 2001, selon les prévisions du projet de loi qui vous est soumis. Si je me réfère à l'ensemble des administrations sociales, l'excédent atteint alors 0,5 % de la richesse nationale en 2001. Les comptes sociaux contribuent désormais à la maîtrise des déficits et au désendettement du pays.
Mais l'assainissement des comptes n'est pas une fin en soi. C'est un moyen permettant d'améliorer notre système de protection sociale. Le projet de loi qui vous est proposé comporte des mesures favorables aux familles, aux retraités ; il améliore sur plusieurs points importants la couverture maladie. Il approfondit aussi la réforme du financement de la sécurité sociale, à travers la diversification de ses ressources et la réforme de la CSG. C'est parce que les comptes sont aujourd'hui assainis que nous vous proposons de mieux faire contribuer notre sécurité sociale à l'amélioration de la vie quotidienne des Français et à la préparation de l'avenir.
Enfin, plusieurs dispositions de ce projet de loi approfondissent la politique de réformes structurelles qui a été engagée et qui commence à porter ses fruits.
Mieux répondre aux aspirations des français, améliorer notre protection sociale, renforcer la qualité de notre système de santé, amplifier les réformes structurelles, tout en préservant l'équilibre, tels sont les principaux axes de la politique que je compte conduire à travers ce projet de loi et au-delà.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, qui vous est présenté, s'inscrit pleinement dans ces perspectives.
Il comporte de nouvelles avancées sociales au profit des familles et des retraités, qui bénéficieront ainsi des fruits de la croissance retrouvée. Il autorise une progression plus rapide que l'an dernier des dépenses de santé, gage d'une amélioration de la qualité des soins et de la couverture maladie de nos concitoyens.
1. Nous vous proposons de mieux aider les familles en renforçant l'aide à la petite enfance et l'aide au logement
Lorsque nous sommes arrivés en 1997, la branche famille accusait un déficit de 14,5 MdsF. Grâce aux mesures de redressement qui ont été prises, elle est redevenue excédentaire depuis 1999.
Ces marges de manuvre nous permettent de mener une politique familiale de grande ampleur. Je rappellerai les principales mesures prises par le Gouvernement ces dernières années :
*tout d'abord, l'extension de 18 à 19 ans puis à 20 ans de l'ensemble des prestations familiales,
*l'extension à 21 ans en 2000 du complément familial et des aides au logement, *l'amélioration des loyers plafonds pour l'allocation de logement familiale,
*l'extension à toutes les familles d'un enfant de l'allocation de rentrée scolaire, la forte progression du budget du fonds national d'action sociale (FNAS) afin d'aider les modes de garde collectifs (1 MdsF en 1999, 700 Millions en 2000).
Cette année encore, les actions décidées en faveur des familles à la Conférence de la famille du 15 juin dernier montrent la volonté du Gouvernement d'accélérer la rénovation de la politique familiale, et de mieux prendre en compte les préoccupations des familles.
Un effort financier de grande ampleur -plus de 1 0 MdsF- sera réalisé, en cherchant à apporter des réponses aux problèmes concrets que se posent souvent les familles.
Deux axes principaux ont été privilégiés : les mesures en faveur de la petite enfance et les aides au logement.
Le projet de loi comprend ainsi plusieurs avancées importantes. Je pense notamment à la création de l'allocation de présence parentale qui permettra aux parents d'enfants atteints de maladies très graves de demeurer à leurs côtés ; je pense à la création d'un fonds d'investissement pour les crèches, doté d'1,5 MdF, qui viendra soutenir les initiatives prises dans ce domaine, notamment par les collectivités locales. Je pense enfin à la réforme de l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée, qui améliore, dans un souci de justice sociale, la situation des familles modestes.
Par ailleurs, les aides au logement, qui sont financées à la fois par l'Etat et par la Sécurité Sociale, seront réformées, simplifiées et améliorées, permettant ainsi de donner une portée pratique à ce droit au logement qui est une des priorités de l'action du Gouvernement.
2. Nous voulons associer les retraités aux fruits de la croissance et préparer l'avenir des régimes de retraite
Nous avons trouvé la branche vieillesse en déficit de 5 MdsF en 1997. Elle renoue dorénavant avec les excédents : 3,7 MdsF en 1999 et 3,4 MdsF en 2000 avant versement au fonds de réserve des retraites.
Alors que la croissance est là, notre objectif est double : faire profiter les retraités des fruits de la croissance, d'une part ; préparer l'avenir de nos régimes de retraite, d'autre part.
Associer les retraités aux fruits de la croissance, en premier lieu.
Pour 2001, le Gouvernement vous propose de revaloriser les pensions de 2,2 % alors que l'inflation prévisionnelle est de 1,2 %. Ce coup de pouce porte à 1,3 % le gain de pouvoir d'achat des retraités par rapport à l'inflation depuis 1997.
Par ailleurs, pour les retraités les plus modestes qui ne sont pas imposables à l'impôt sur le revenu, le Gouvernement souhaite leur accorder un gain de pouvoir d'achat supplémentaire. Il vous propose, à cette fin, de supprimer la contribution au remboursement de la dette sociale (0,5 %) frappant les petites retraites. Cette mesure devrait concerner près de 5 millions de retraités.
Préparer l'avenir de nos systèmes de retraite, en second lieu
Conformément à ce que le Premier ministre a annoncé, le Gouvernement veille à la préparation de l'avenir. Le présent projet de loi comporte plusieurs dispositions destinées à accroître les ressources du fonds de réserve des retraites qui doit permettre de mieux faire face aux conséquences des évolutions démographiques de long terme.
Créé en 1998, le fonds de réserve s'est vu affecter des ressources nouvelles dès 1999 : excédents de la CNAV et du fonds de solidarité vieillesse, la moitié du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine, contributions des Caisses d'Epargne et de la Caisse des Dépôts et Consignations, auxquels s'ajoute la majeure partie du produit de la vente des licences de téléphonie mobile de troisième génération. Fin 2001, le fonds de réserve disposera de plus de 50 milliards de francs.
Les ressources du fonds s'accroissent donc conformément aux engagements pris par le Gouvernement.
Avec les sources de financement actuelles, le fonds de réserve devrait disposer de 1.000 milliards de francs en 2020, dont 300 milliards proviendront des intérêts financiers. Cette somme correspond à la moitié des déficits prévisionnels des régimes de retraite entre 2020 et 2040.
3. Nous mettons en place une meilleure indemnisation des victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles
Depuis que ce gouvernement est en place, nous avons fait un important travail pour améliorer la reconnaissance et la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles. Je pense au raccourcissement des délais de réponse des caisses, à la réforme du tableau des maladies professionnelles, aux garanties sur les délais de réponse aux victimes.
Nous avons déjà pris un certain nombre de mesures particulières en faveur des victimes de l'amiante, comme le dispositif de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de l'amiante.
Cette année, nous allons au-delà. Nous savons tous les souffrances qu'endurent les victimes de l'amiante et le drame que vivent ceux qui leur sont proches. Il nous apparaît fondamental d'accorder à ces victimes une juste réparation.
Le gouvernement a donc décidé de créer un fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, financé par les employeurs, via la branche accidents du travail et par le budget de l'Etat. Il sera doté de 2 MdsF dès 2001.
Le drame de l'amiante appelait une réponse rapide et forte. Ce drame a également démontré les limites de la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles en matière d'indemnisation ou de lourdeur des procédures. C'est pourquoi je compte demander au président de la commission spécialisée du Conseil supérieur de prévention des risques professionnels, en charge des maladies professionnelles, de lancer dans les plus brefs délais une réflexion large sur la réparation des risques professionnels, en concertation étroite avec l'ensemble des partenaires concernés.
4. Nous voulons améliorer encore la qualité de notre système de santé tout en maîtrisant correctement l'évolution des dépenses.
L'objectif pour 2001 qui vous est proposé a été fixé en ayant pour but de renforcer l'efficacité de notre système de santé, tout en tenant compte à la fois de l'impact des politiques structurelles que nous avons lancées et du cadre économique et financier de la Nation.
Le gouvernement a retenu un objectif national de dépenses d'assurance maladie 2001 de 693,3 MdsF, en progression de 3,5 % par rapport à 2000.
Cette progression autorisée est plus rapide que celle qui vous avait été proposée pour 2000. Elle est cohérente avec la situation économique et financière générale de notre pays et permet de financer de nouvelles avancées dans la qualité de notre système de santé et de la couverture maladie.
En autorisant une évolution plus rapide des dépenses, dans le cadre d'un objectif qu'il souhaite voir respecté, le Gouvernement a entendu adresser un message clair aux acteurs de notre système de santé. J'en appelle ici à leur sens des responsabilités.
Quels sont les principaux objectifs pour 2001 que nous vous proposons ?
Tout d'abord, répondre aux priorités de santé publique. Je pense, notamment, au plan "cancer" et au plan "greffes". Je souhaite, en particulier, que l'effort en faveur du dépistage systématique de certains cancers à risques soit amplifié. Nous souhaitons également répondre efficacement aux progrès de la connaissance médicale, notamment en matière de réduction des risques sanitaires. Je pense en particulier à la maladie de Creutzfeid-Jacob et à son nouveau variant.
Un effort particulier sera fait, comme les années précédentes, en faveur des établissements médico-sociaux, pour accompagner le développement du nombre de places pour les personnes handicapées et la médicalisation des établissements pour personnes âgées dépendantes. Ce secteur verra ses crédits progresser de 5,8 %.
Les budgets hospitaliers pourront progresser de 3,3 %. C'est ce même taux qui est retenu pour les cliniques privées.
Les soins de ville, enfin, pourront progresser de 3 %. Cet objectif, les caisses d'assurance maladie et les professionnels de santé devront le gérer de façon responsable en s'inscrivant dans la volonté d'infléchir durablement les tendances en matière de dépenses de ville. Les outils structurels de maîtrise des dépenses et d'amélioration de la qualité des soins existent. Il faut qu'ils s'en saisissent.
Nous avons également fixé l'objectif pour 2001 en tenant compte de l'évolution des dépenses telle qu'elle est observée cette année.
En 2000, le dépassement de l'ONDAM devrait atteindre 1,6 % par rapport à l'objectif fixé de 658,3 MdsF, en prenant en compte les reports de dépenses de la fin 1999. Le dépassement pour 2000 s'élèvera donc à 11 MdsF.
Au total, cette année, les dépenses d'assurance maladie devraient se situer sur un rythme un peu supérieur à 4 %.
Quelles sont les causes de ce dépassement ?
Ce sont les soins délivrés en ville qui sont, cette année encore, responsables du dépassement : le médicament à hauteur de 6,2 MdsF, les honoraires de certaines professions de ville pour 3,8MdsF, les indemnités journalières pour 1,7 MdF et les divers produits médicaux, ceux inscrits au TIPS, pour 1,6 MdF.
En revanche, pour les hôpitaux, les objectifs ont été tenus. Quant aux dépenses des cliniques privées et les établissements médico-sociaux, elles progresseront en 2000 de 2,2 % et de 4,9 %, conformément, là aussi, aux objectifs qui leur avaient été impartis.
Si les dépenses de santé ont évolué plus vite que prévu, elles sont pourtant restées en deçà de l'évolution de la richesse nationale. La plupart des pays voisins du nôtre ont également connu une évolution rapide de leurs dépenses de santé. Il faut sans doute y voir l'effet de la reprise économique. Chacun sait que la santé est ce que les économistes appellent un "bien supérieur" qui évolue d'autant plus vite que la richesse collective s'accroît.
Pour autant, je voudrais souligner que la part de nos dépenses de santé dans la richesse nationale est restée stable, depuis 1997 autour de 10 % du PIB, alors qu'elle continuait à augmenter fortement chez certains de nos partenaires, qu'il s'agisse des Etats-Unis, de l'Allemagne ou du Royaume-Uni.
Je suis attachée à ce que notre système de santé soit préservé. Parce qu'il conjugue une grande liberté laissée aux acteurs, une grande exigence de solidarité, une recherche permanente de la qualité des soins, c'est sans doute un des meilleurs systèmes au monde. A la lueur des expériences étrangères, nous savons d'ailleurs qu'il n'existe pas de système permettant d'assurer une maîtrise parfaite des dépenses, à l'exception du système anglais. Dans ce dernier pays, la maîtrise systématique des dépenses avait d'ailleurs conduit ces dernières années à de tels rationnements des soins que le Gouvernement travailliste de Tony BLAIR s'efforce à l'heure actuelle de moderniser en profondeur ce système.
Pour autant, la maîtrise des dépenses de santé est une nécessité et elle suppose la responsabilité de chacun des acteurs, qu'il s'agisse de l'Etat au premier chef, mais aussi des caisses d'assurance maladie, des praticiens libéraux et des malades eux-mêmes.
Il me paraît, à cet égard, plus que jamais nécessaire que les objectifs votés par le Parlement soient respectés. C'est en maîtrisant mieux les dépenses que nous trouverons les marges de manuvre permettant de couvrir de nouveaux besoins et d'améliorer le niveau de protection de nos concitoyens. Chaque franc dépensé doit l'être à bon escient. Les dépenses qui ne répondent pas aux besoins réels, ce sont des cotisations en trop ou des dépenses justifiées en moins.
Il nous faut donc poursuivre l'effort entrepris en matière de réformes structurelles.
C'est tout d'abord le cas à l'hôpital, dans lequel nous menons une politique active de recomposition du tissu hospitalier autour de trois priorités : la réduction des inégalités dans l'accès aux soins, l'adaptation de l'offre de soins aux besoins de la population et la promotion de la qualité et la sécurité des soins.
En particulier, la réflexion pour fonder la tarification des établissements de santé sur les pathologies traitées est engagée, à la suite des dispositions que vous avez votées l'an dernier. Nous devons disposer de données d'activité hospitalière fiables et rapidement disponibles. A cette fin, nous vous proposons de créer une agence technique de l'information sur l'hospitalisation.
Cette réorganisation améliore la qualité de la prestation offerte à la population. En effet, elle permet aux établissements de santé de mieux prendre en compte les priorités de santé publique définies par le gouvernement. Ainsi, la réorganisation des urgences répond-elle à une nécessité. Le gouvernement a renforcé les moyens des services d'urgence, qui doivent développer leur coopération avec les médecins de ville.
En matière de sécurité sanitaire, des mesures importantes seront prises en 2001 pour améliorer la qualité des procédures de désinfection et de stérilisation et développer l'utilisation de dispositifs médicaux à usage unique.
Le gouvernement accompagne de manière significative ce mouvement de recomposition de l'offre hospitalière par le fonds de modernisation sociale des établissements de santé (FMES) dont la création est proposée dans le projet de loi.
Les réformes structurelles doivent également s'appliquer à la dépense de médicaments.
Ces dépenses progressent de 6 à 7 % en 2000, soit une évolution très proche de celle de l'année précédente. La France ne constitue pas, dans ce domaine, une exception puisque la plupart des pays occidentaux connaissent une évolution encore plus rapide de ces dépenses, mais le niveau de notre consommation médicale est plus élevé que dans nombre de pays voisins.
Plusieurs réformes engagées porteront leurs fruits dès 2001 et plus encore les années suivantes.
Le développement des génériques s'amorce. Il n'était pas normal que ces médicaments, dont le principe actif est aussi efficace que celui de leur princeps, mais qui sont 30 % moins coûteux, soient moins utilisés en France que dans d'autres pays. Nous ferons dans les prochains jours avec les pharmaciens un bilan précis de la progression des médicaments génériques et des économies dont la sécurité sociale a bénéficié.
La politique conventionnelle menée par le Comité économique des produits de santé porte elle aussi ses fruits. Le Comité a entrepris des campagnes d'harmonisation des prix sur certaines spécialités.
L'année 2000 marque une nouvelle étape. La procédure de réévaluation des médicaments est pratiquement achevée aujourd'hui. Au total, près de 2 663 spécialités ont été évaluées par la Commission de la transparence, soit plus des deux tiers des spécialités pharmaceutiques françaises ; 60 % ont été classées en service médical rendu (SMR) majeur ou important, 15 % en SMR modéré ou faible, 25 % en SMR insuffisant.
Nous avons, sans tarder, tiré les conséquences de cette évaluation en ajustant le taux de remboursement de certaines spécialités. Parallèlement, le Comité économique a conduit avec les laboratoires concernés des négociations pour faire baisser les prix des spécialités dont le SMR a été jugé insuffisant.
Les spécialités dont le service médical rendu a été jugé insuffisant ne seront, à terme, plus remboursées. Ceci ne doit cependant pas se faire dans la précipitation. Il importe de donner aux patients, aux proscripteurs mais aussi aux laboratoires, le temps de s'adapter aux changements qui s'annoncent. A l'issue d'une période transitoire de trois ans (2000, 2001, 2002), les médicaments à SMR insuffisant sortiront du remboursement.
Certains articles du projet de loi accompagnent cette évolution, notamment en facilitant le recours à la publicité pour les médicaments qui ne seront plus pris en charge par l'assurance maladie.
Il faut aussi apporter aux médecins une autre information que celle dont ils disposent aujourd'hui et qui, nous le savons tous, est essentiellement diffusée par l'industrie pharmaceutique. Il suffit pour s'en convaincre, de rappeler que les dépenses de promotion pharmaceutique des laboratoires dépassent 12 MdsF. Aujourd'hui nous souhaitons apporter une information neutre, validée scientifiquement, sur le bon usage du médicament. Un groupe confraternel d'information des proscripteurs sera prochainement mis en place. Dès cette année, nous lui donnerons les moyens de fonctionner. A cette fin, nous vous proposons de créer un fonds de promotion de l'information médicale alimenté par une fraction de la taxe sur la promotion pharmaceutique.
Enfin, nous vous proposons de modifier la contribution de l'industrie pharmaceutique que l'on appelle la " clause de sauvegarde ". Son mode de calcul a aujourd'hui besoin d'être revu, car il comporte des effets de seuil peu lisibles. Nous avons retenu un mode de calcul plus simple, linéaire, avec pour objectif de récupérer 70 % du dépassement.
Comme les gestionnaires de la CNAM l'ont souhaité, la régulation de ces dépenses repose depuis la LFSS 2000 sur une large délégation de gestion aux caisses d'assurance maladie. Elles doivent ainsi gérer, de façon concertée et négociée, les dépenses d'honoraires, de biologie et de transport sanitaire. Dans ces secteurs aussi, la maîtrise structurelle doit s'appliquer. Pour la première fois, la CNAM a pris des mesures de redressement cet été.
Les professionnels demandaient la possibilité de s'engager avec les caisses sur des actions permettant de sortir d'une régulation qui serait purement financière. Nous leur avons donné les outils pour ce faire. Il faut maintenant que ces mécanismes fonctionnent.
Il en va ainsi des réseaux et plus largement des actions améliorant la qualité des soins. Le fonds d'aide à la qualité des soins de ville, créé à cet effet, a commencé à fonctionner.
Parallèlement à la concrétisation des réformes structurelles, nous voulons poursuivre une politique déterminée d'amélioration de la couverture maladie de nos concitoyens.
La couverture maladie universelle : d'ores et déjà, plus de 4,7 millions de personnes ont pu accéder l'accès à ce nouveau droit, soit beaucoup plus que les 2,8 millions de l'ancienne aide médicale. Je me félicite à ce propos de la mobilisation de l'ensemble des acteurs : professionnels de santé, caisses d'assurance maladie, collectivités locales, organismes de couverture complémentaire et associations humanitaires et, bien sûr, du rôle du conseil de surveillance auquel participent certains d'entre vous.
Nous allons avoir dans les jours qui viennent un débat sur les effets de seuils. J'espère que nous pourrons y apporter des réponses. Nous avons dégagé 10 MdsF pour l'hôpital sur trois ans, dont 2 MdsF dès cette année pour répondre aux remplacements. Nous améliorons l'équipement sanitaire de la France en appareils d'imagerie à résonance magnétique (IRM).
Nous favorisons la vaccination des personnes âgées contre la grippe, nous facilitons l'accès des femmes à la contraception, nous développons la prise en charge des prothèses auditives pour les sourds.
Nous mettons en uvre un ambitieux programme de lutte contre le cancer qui propose pour la première fois une approche intégrée organisant la mobilisation de tous les acteurs, de la recherche à la prise en charge des personnes malades et de leurs familles. Ce plan représente un engagement de 1,8 MdsF.
Nous améliorons par ailleurs la nomenclature des actes des professionnels exerçant en ville : mieux adaptée aux évolutions de la pratique, elle autorise le remboursement de nouveaux actes. C'est ainsi que nous avons travaillé avec les infirmières dont la nomenclature a été revue à trois reprises. L'introduction du PSI, voulue par les caisses et les Fédération nationale des infirmiers, constitue un progrès pour les personnes dépendantes en renforçant l'autonomie des professionnels. De même, pour les masseurs kinésithérapeutes, un grand pas a été franchi avec la publication de la nouvelle nomenclature, très attendue par la profession.
Sur les soins dentaires, dont l'attente des conclusions de Michel Yahiel, deux nouveaux actes vont être admis au remboursement anticipant sur la refonte complète de la prise en charge.
Enfin, les non salariés non agricoles bénéficient d'une amélioration de la couverture maladie. Il y a aura donc désormais un socle commun entre le régime général, les régimes des exploitants agricoles et des salariés agricoles et ceux des professions indépendantes.
5. Nous entendons franchir une nouvelle étape en matière de réforme du financement de la sécurité sociale.
Le projet de loi qui vous est soumis comporte une mesure importante d'allégement de la CSG et du CRDS pour les ménages modestes.
Le Gouvernement vous propose en effet d'instituer une ristourne dégressive de CSG et de CRDS, comprise en 1 et 1,3 fois le SMIC, ce dernier seuil étant porté à 1,4 fois par amendement conformément à la demande de la majorité.
Cette mesure se déploiera au cours des trois prochaines années et représentera, au terme de ces trois ans, l'équivalent d'un 13ème mois pour les smicards.
A travers cette mesure le Gouvernement poursuit trois objectifs :
- Tout d'abord, réduire l'écart entre salaire brut et salaire net. C'est une préoccupation que partagent beaucoup d'entre vous et sans doute pas seulement dans la majorité. En 2003, le SMIC net sera relevé de 540 F par mois.
- Ensuite, accroître le pouvoir d'achat. Beaucoup d'inexactitudes sont entendues sur ce sujet. Au total depuis 1997, le pouvoir d'achat par tête s'est accru de 1,1 % par an en moyenne. En particulier, la suppression des 4,8 points de cotisations maladies auxquels se sont substitué 4,1 points de CSG a permis de distribuer du pouvoir d'achat aux salariés. Au total, depuis 1997, le SMIC net s'est déjà accru de l'équivalent d'un 13ème mois. Avec la mesure proposée ici, c'est donc un avantage du même ordre en terme de gain de pouvoir d'achat qui sera consentis aux smicards d'ici 2003.
- Enfin, troisième objectif, lutter contre les " trappes à inactivité ". Cette mesure renforce en effet l'attrait du revenu d'activité par rapport aux minima sociaux et complète ainsi une série de mesures déjà prises par le Gouvernement pour rendre financièrement moins pénalisant le retour à l'emploi, qu'il s'agisse de la réforme des dégrèvements de taxe d'habitation, de la réforme des aides au logement ou de la mise en place de l'intéressement des Rmistes, qui permet le cumul d'un revenu d'activité et de l'allocation pendant 1 an.
- En conclusion, à travers ces trois objectifs essentiels, cette mesure vise, vous l'aurez compris, un seul but : l'emploi.
Nous pouvons nous réjouir de la poursuite de l'assainissement financier de la Sécurité sociale. Le redressement des comptes est d'abord le fruit des réformes structurelles que nous avons patiemment engagées, et qui doivent se poursuivre. C'est ce qui nous permettra de continuer à faire progresser les acquis sociaux et, par la mise en réserve d'une partie de ces excédents, de garantir l'avenir de notre système de retraite et au-delà de notre protection sociale.
C'est pourquoi, le Gouvernement attend avec intérêt et confiance le débat qui va s'engager et vous demande d'approuver le présent projet de loi.
(source http://www.sante.gouv.fr, le 27 octobre 2000)