Déclaration de M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, sur le soutien du gouvernemet à la construction, les mesures gouvernementales en faveur des logements sociaux, notamment le volet logement de la loi Solidarité et Renouvellement Urbains, Paris, le 5 décembre 2000.

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Circonstance : Clôture du 54ème congrès annuel de la FNAIM, à Paris, le 5 décembre 2000

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Comme vous l'avez souligné, c'est la quatrième fois consécutive que je suis parmi vous pour conclure vos travaux et c'est pour moi un plaisir toujours renouvelé.
Je le dis avec d'autant plus de conviction, qu'il est toujours utile pour un ministre d'entendre des représentants professionnels exprimer leur avis sans détour, qu'il soit positif - c'est évidemment ce que nous préférons - mais tout autant sinon plus s'il comporte des réserves ou des attentes. C'est cela qui permet de développer un dialogue loyal et fructueux.
Je vous remercie sincèrement de vos propos qui nous confortent dans les choix que nous avons opérés pour développer et amélioration le parc privé ancien et qui nous encouragent, nous stimulent à poursuivre dans cette voie avec vous.
J'y vois un témoignage de relations, claires sur les responsabilités de chacun, sereines, adultes entre des partenaires habitués à se parler, s'écouter et se respecter.
Depuis 3 ans ½, nous avons, en effet, beaucoup travaillé ensemble.
Tout au long de cette période, nous nous sommes attachés à conduire une politique équilibrée et pérenne visant à développer toutes les composantes de l'offre de logements, en locatif comme en accession, dans le parc public comme dans le parc privé, dans le neuf comme l'ancien, et, chacun en convient, jamais l'ancien n'avait bénéficié d'autant de mesures en si peu de temps !
De l'abaissement du taux de TVA de 20,6 % à 5,5 % sur tous les travaux dans les logements existants, au régime dit micro-foncier qui cumule le double avantage de l'allègement fiscal et à la simplification, et à la diminution des droits de mutation qui se situent désormais dans la moyenne des pays européens c'est à une révolution tranquille que nous sommes parvenus.
Je citerai également, pour ce qui est des aides budgétaires, l'augmentation des crédits de l'ANAH et de la PAH en 1997 et leur regroupement prochain -sans réduction au prétexte que la TVA a diminué- dans la grande ANAH, pour être plus efficaces encore, en particulier dans les copropriétés.
Cet effort fiscal (30 milliards en année pleine) est sans précédent, et le logement a donc largement bénéficié dès 1999 des marges de manuvre (on a parfois employé un autre terme "cagnotte"). Ainsi, la tendance qui prévalait depuis des décennies, et qui faisait du logement l'un des biens les plus taxés (car facilement identifiable) a été inversée, pour la première fois depuis très longtemps.
J'ajoute que les mécanismes de solvabilisation des locataires -et donc de sécurisation du versement des loyers- ont été sensiblement améliorés avec l'actualisation régulière du barème des allocations-logement ou la création des F. S. L. et le seront plus encore avec la grande réforme des aides personnelles au logement qui sera mise en uvre en deux étapes dès le 1er janvier 2001 et qui représentera 6,5 milliards de francs.
Je m'attarderai, juste un instant sur le statut du bailleur privé, puisque vous avez exprimé à ce sujet quelques attentes.
Le gouvernement a, vous le savez, choisi de privilégier un dispositif stable et juste, pour soutenir dans la durée ce secteur, de préférence à des mesures conjoncturelles, dont l'effet économique est certes réel, mais par définition non durable.
Il est bien sûr trop tôt pour en faire un bilan, même si après la surchauffe de l'année passée, les premiers résultats sont plutôt encourageants, notamment dans le neuf. Dans l'ancien, les conditions d'accès au dispositif, liées au changement de locataire, conduisent nécessairement à une montée en régime progressive. Un élargissement au cas du renouvellement de bail avec le locataire en place permettrait d'accélérer cela, sans toucher au dispositif, nous en sommes conscients et nous souhaitons rapidement faire évoluer les choses sur ce point.
Je connais bien votre autre souhait d'évolution, une ouverture au cas de location à des ascendants ou descendants. Une telle mesure suppose bien sûr un encadrement précis, sous peine de réduire à néant la contrepartie sociale de l'avantage fiscal qui en fonde la légitimité et l'existence même. Sachez que nous sommes en ce moment même en train d'y travailler, avec un bon espoir d'aboutir dès la loi de finances pour 2001.
Mais d'ores et déjà, je ne peux que me féliciter des mesures prises et, avec vous, de leurs conséquences sur la bonne santé de l'immobilier, qu'il s'agisse de la construction (300 000 logements environ, chiffre mythique dont beaucoup de ministres en charge du logement ont rêvé), ou des transactions (près de 600 000 logements vendus en 1999, chiffre qui devrait à nouveau être atteint en 2000).
J'ai déjà eu l'occasion de dire que la seule menace qui pourrait peser sur cette bonne conjoncture -après la stabilisation des taux observée- ce serait une inflation des prix immobiliers, des prix fonciers, des travaux qui désolvabiliserait la clientèle. Il appartient à tous les professionnels, et notamment aux professionnels du conseil que vous êtes, de prendre leurs responsabilités - je sais que nombreux le font déjà - et veiller à ce que cette bonne conjoncture soit durable et non éphémère.
Les professionnels comme nos concitoyens en seront les bénéficiaires : plus de confort, plus d'espaces, plus de choix s'offrant à eux, et une activité de vos agences témoignant de cette bonne santé du marché que nous souhaitons tous.
Je voudrais également me réjouir avec vous, du démarrage, longtemps attendu, enfin survenu depuis quelques semaines, du LOCAPASS, ce dispositif mis en place, en application de la Convention conclue entre l'UESL et le Gouvernement le 3 août 1998, par le 1% logement et qui prend en charge, en particulier pour les jeunes, la garantie de loyer et la caution initiale. Vous avez contribué à sa mise en place et à sa simplification nécessaire, il vous appartient d'en tirer le meilleur parti et de le faire connaître.
A côté de ces motifs de satisfaction, je ne voudrais pas pour autant, vous l'avez fait vous-même, éluder les points plus délicats, et notamment à mon sens la faiblesse de la place prise par le logement social dans cette dynamique de reconquête. Ceci m'amène à évoquer rapidement la loi Solidarité et Renouvellement Urbains adoptée le 21 novembre et dont la publication devrait intervenir dans quelques jours.
Porteuse d'un projet global pour l'avenir des villes et des agglomérations, dans et autour desquelles vivent aujourd'hui près de 80 % des français, la loi SRU, qui comporte désormais 209 articles, vise à redonner plus de cohérence au développement des agglomérations, à insuffler plus de mixité sociale en matière d'habitat et à engager le renouvellement urbain des villes et des quartiers, et à ce titre elle vous concerne directement.
Conçus voici plus de 30 ans, nos lois et règlements en matière d'urbanisme ne s'étaient pas adaptés aux évolutions rapides de la ville. Ainsi, le droit de l'urbanisme restait marqué par les objectifs des années 60 qui étaient d'assurer d'abord la croissance urbaine et il n'assurait pas de cohérence au niveau de l'agglomération entre les projets de chaque commune. Aujourd'hui, il importe d'organiser le fonctionnement des agglomérations et, dans une logique de développement durable, de favoriser la meilleure utilisation possible de l'espace et de valoriser les efforts de revitalisation de certains centres au lieu de les compromettre par des implantations périphériques intempestives.
Les schémas de cohérence territoriale répondront à ces nécessités : à travers eux, les élus définiront en commun la manière dont l'agglomération au sens large doit évoluer : quelles doivent être les priorités en matière d'habitat ? comment organiser le développement commercial ou les zones d'activités ? quelle politique de circulation, de déplacements urbains mener à l'échelle du bassin de vie et d'emploi ? : ce sera au schéma de cohérence territoriale, élaboré par les élus, de le dire dans un document simple, souple et régulièrement adapté.
La transformation des plans d'occupation des sols en plans locaux d'urbanisme -qui deviendront, tout en conservant leurs finalités actuelles, l'expression du projet de développement de la commune- et l'évolution des cartes communales - qui permettront aux maires de délivrer les permis de construire, ce qui leur était auparavant interdit- complètent cette réforme de l'urbanisme.
En matière de logement social, notre postulat est simple mais précis : mettre fin à la ségrégation spatiale et aux stigmates de la discrimination et de la dégradation de certains quartiers et créer les conditions d'une meilleure mixité sociale sur le territoire communal afin de créer, par la production de logements diversifiés, les conditions d'une plus grande diversité sociale.
Pour que le droit au logement soit respecté partout, il faut que le logement social ne soit exclu nulle part. En effet, on ne peut parler de diversité de l'habitat sans parler de rééquilibrage du logement social. Au nom de quoi cette offre serait-elle réservée exclusivement à certaines villes ou quartiers et exclue des autres villes ou quartiers, et les habitants des HLM concentrés dans certains quartiers et interdits de séjour dans les autres ? Je pense à ma ville, vous pouvez penser à beaucoup d'autres, où dans les mêmes rues anciennes alternent hôtels particuliers et immeubles plus modestes : pendant des siècles ces cohabitations ont assuré un équilibre à nos villes.
C'est l'objectif fort que la loi SRU affirme : la reconstruction d'un équilibre interne à nos villes.
Cet objectif devra être atteint d'une manière progressive -sur deux décennies- mais l'effort doit commencer dès maintenant.
Monsieur le Président, il ne vous a pas échappé, à la lecture attentive de l'article 55 de la loi SRU, que le logement locatif social tel que nous l'entendons ne veut pas dire seulement logement public, mais qu'il englobe les logements privés conventionnés, avec des loyers et des plafonds de ressources correspondant à ce conventionnement; il y a donc bien prise en compte équitable du privé et du public, même si aujourd'hui, nous constatons bien sûr que le parc conventionné est à plus de 90 % public.
Mais, avec l'ANAH conventionnée, avec le nouveau produit, "le PLUS+", qui va remplacer le PLS et le PLACFF, et qui est ouvert au privé, nous ne verrions que des avantages à ce que le secteur privé, qui est le bienvenu, occupe une part plus importante dans ce développement.
Il faut, vous le sentez bien, sortir des oppositions stériles, parc public / parc privé. Nous nous connaissons trop bien, Monsieur le Président, pour que vous puissiez craindre qu'il soit donné trop d'importance à l'un au détriment de l'autre.
Dans une économie où des logements produits sont aidés par la collectivité -ce n'est pas un vu mais un constat-, peut-on parler d'économie administrée quand il s'agit des HLM et de mesures de soutien quand il s'agit du parc privé ? Chacun participe à sa manière à la satisfaction des besoins de l'ensemble de nos concitoyens.
Et, dans un pays où les conditions de logement ne cessent de s'améliorer comme le montre la dernière enquête INSEE, mais où les besoins et les attentes progressent tout aussi vite, il reste encore beaucoup à faire pour toujours mieux satisfaire les besoins du grand nombre.
La loi SRU vous le savez, vise également à élargir le champ du droit au logement par des outils plus efficaces de lutte contre l'insalubrité et le péril et par la reconnaissance d'un droit au logement décent. Fruit d'un travail approfondi entre le gouvernement, le Conseil National de l'Habitat, auquel la FNAIM à participé, et les parlementaires, adopté à l'unanimité dans chacune des deux assemblées, ce nouveau droit permettra à un locataire assigné à résidence dans un logement sans confort élémentaire d'exiger, devant le juge si nécessaire, que son logement soit doté des éléments minimum de décence, dignes du 3ème millénaire. Il s'agit d'une avancée essentielle vers une meilleure qualité de vie pour tous et ensemble, en réussissant dans cette voie, nous mettrons hors d'état de nuire ces marchands de sommeil qui portent aussi atteinte à l'immense masse des propriétaires-bailleurs parfaitement honorables !
Les immeubles en copropriété de plus en plus nombreux ont fait l'objet d'un traitement important dans cette loi comme vous l'avez souligné. Dans le souci d'éviter les situations de blocages qui peuvent, dans certains cas, nuire gravement au fonctionnement des copropriétés, les règles de majorité ont été rendues plus simples, l'objectif étant que les décisions indispensables puissent être prises facilement.
Par ailleurs, afin d'assurer l'information des nouveaux acquéreurs et de prévenir les difficultés, chaque copropriété disposera désormais d'un carnet d'entretien, tenu à jour par le syndic et qui recensera l'ensemble des travaux réalisés sur l'immeuble et leur date.
Cette loi, véritable projet de société, associée aux différentes mesures d'aides à la production de logements déjà prises, fixe donc le cadre d'un développement durable et équilibré de nos villes et agglomérations pour les années et les décennies à venir.
Après cette étape importante, il nous faut maintenant nous attacher à améliorer les modalités d'intervention des acteurs de l'immobilier. Nous n'avons pas été inactifs ces dernières années, mais, j'en suis d'accord avec vous, beaucoup est encore à faire, et je me réjouis, Monsieur le Président, que des acteurs du secteur privé puissent reconnaître des vertus à la loi et à la définition de règles claires, alors que la tendance est hélas trop souvent dans une partie de l'opinion à vouloir tout déréglementer par principe.
Mais il est clair que les évolutions des marchés de l'immobilier, les exigences des consommateurs, les nécessaires garanties à apporter aux accédants à la propriété ainsi qu'aux bailleurs et aux locataires conduisent en effet à revoir, j'en suis convaincu, les conditions d'exercice de vos activités.
Le développement de l'offre de bien immobiliers sur Internet accélère, sans aucun doute, les processus d'évolution mais n'en modifient pas les finalités. La mobilité des personnes accroît leurs besoins de sécurité dans les transactions concernant leur logement. Et ces besoins d'informations claires, de conseils avisés et de garanties fiables, les professionnels doivent pouvoir les apporter efficacement avec une déontologie forte.
Expertise de la valeur du bien, de sa superficie, diagnostic sur l'état du bâti (amiante, termite, plomb, état d'entretien), recherche d'acquéreur ou de locataire, conseil juridique, toutes ces fonctions ne peuvent être offertes que par des professionnels compétents munis de garanties et dotés de modes de rémunération propres à chaque mission. C'est là qu'est votre valeur ajoutée, c'est cette valeur ajoutée qui doit être pleinement reconnue.
Je sais que les professionnels sont prêts à ces évolutions. Je sais également que les services du ministère de la justice ont déjà commencé à réfléchir aux conséquences de la directive du 8 juin 2000 sur le commerce en ligne, et que l'étude de l'ANIL qui vous a été exposée hier, contribuera à cette réflexion.
J'ai pour ma part proposé à Madame la Garde des Sceaux, Madame LEBRANCHU, d'ouvrir en commun ce chantier d'une importance capitale pour l'activité du secteur du logement. Ce sera à mon avis le grand chantier de l'année qui s'annonce : conforter et mettre en uvre les réformes engagées mais aussi continuer à aller de l'avant, accompagner et anticiper les mutations pour répondre toujours mieux aux attentes de la société.
Nous avons donc, Monsieur le Président, encore bien des travaux à mener, des chantiers à ouvrir. Je suis certain de pouvoir compter sur la force de proposition et d'innovation de la FNAIM pour avancer, comme vous pouvez compter sur ma propre détermination à faire aboutir les réformes indispensables.
Je suis convaincu que chacun trouvera avantage à ce partenariat : les pouvoirs publics, garants du droit au logement, et de la diversité de l'offre, les professionnels, experts et moteurs de l'activité immobilière, enfin nos concitoyens, dont le logement est une condition indispensable à leur l'épanouissement.
Plein succès aux agents immobiliers et à la FNAIM !
Merci de votre attention.

(source http://www.equipement.gouv.fr, le 7 décembre 2000)