Déclaration de M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche, sur la politique agricole en montagne, Clermont-Ferrand le 5 février 2001.

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Circonstance : Conseil national de la montagne, à Clermont-Ferrand le 5 février 2001

Texte intégral

Monsieur le Premier ministre,
Mesdames et messieurs les ministres,
Monsieur le président,
Mesdames et messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
Lors du conseil d'Ax-les-Thermes, j' avais présenté les différents axes sur lesquels je souhaitais fonder la relance de la politique de soutien à l'agriculture de montagne. Je vous annonçais, notamment, un renforcement de nos moyens d'intervention pour compenser les handicaps naturels, et plus précisément :
- un quasi-doublement de l'enveloppe consacrée aux bâtiments d'élevage et à la mécanisation ;
- une revalorisation des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) ;
- un renforcement des soutiens aux cultures primées en montagne sèche et aux Groupements agricoles d'exploitation en commun
En 2000, les crédits correspondants ont été effectivement mis en place au niveau prévu, voire un peu au-delà.
Dans la durée, la montagne a été privilégiée comme une priorité forte du Gouvernement dans l'élaboration des contrats de plan Etat-Région. Pour les seuls investissements agricoles en zone de montagne et l'appui aux actions entreprises en zones défavorisées, une dotation de 58 MF a été réservée. De même, dans le cadre des conventions inter régionales de massifs, 298 MF seront consacrés à l'agriculture de montagne.
Enfin, et c'est le point essentiel, le soutien à l'agriculture de montagne se situe effectivement au coeur des priorités du plan de développement rural national (PDRN) : les crédits consacrés à la montagne au titre du PDRN s'élèveront pour l'ensemble des 7 années du plan, à près de 45 milliards de francs, provenant à parts à peu près égales de l'Union européenne et de l'Etat. Ces crédits, d'un montant considérable, porteront, notamment, sur le financement des ICHN, des CTE, de l'installation des jeunes agriculteurs, des bâtiments et de la mécanisation en montagne et sur l'équipement du domaine pastoral.
A Ax-les thermes, je vous proposais également que nous puissions engager ensemble un processus de travail et de concertation. Un groupe de travail sur la politique agricole de la montagne a été installé début 1999. En deux ans, il s'est réuni à 27 reprises initialement constitué pour une durée limitée, il a trouvé une telle place que j'ai décidé de le pérenniser.
Ce groupe a ainsi eu à connaître des grands dossiers qui ont marqué l'évolution de la politique de la montagne. Je souhaiterais revenir sur les plus importants d'entre eux .
Les Indemnités compensatrices des handicaps naturels
Les ICHN constituent le socle des soutiens spécifiques consacrés à la politique de la montagne. Son régime a été réformé à l'occasion de la négociation du PDRN, à l'été dernier : les ICHN sont désormais versées en fonction des hectares de superficie fourragère de l'exploitation et non plus en fonction du nombre des UGB. Trois principes directeurs ont guidé cette réforme :
- Valoriser l'occupation et l'entretien des espaces montagnards,
- Assurer un découplage entre cette indemnité et les logiques d'aide à la production, afin de mieux garantir la pérennité du dispositif,
- Alléger les formalités administratives pour les bénéficiaires.
Le respect des bonnes pratiques agricoles devient une condition essentielle pour bénéficier des ICHN. A la demande de l'Union européenne, ces bonnes pratiques sont déterminées essentiellement en fonction du chargement en UGB de l'exploitation. Ce dernier point, introduit par la Commission, m'a conduit à faire vérifier que cet aspect de la réforme n'aboutirait pas à des effets contraires à nos objectifs.
L'analyse de l'impact de cette modification a effectivement montré que le dispositif tendait à exclure, en proportion non négligeable, des agriculteurs antérieurement bénéficiaires. Ce n'était pas acceptable. Les discussions avec la Commission européenne ont donc repris au deuxième semestre de l'année 2000 et ont permis d'adopter le principe d'adaptations nécessaires à une application harmonieuse du dispositif.
La France a ainsi demandé un ajustement du dispositif visant à ce que les marges d'éligibilité soient assouplies dans certaines zones de montagne, de telle sorte que des éleveurs ayant des systèmes d'exploitation peu intensifs ainsi que ceux situés dans des zones à potentialités plus importantes, puissent continuer à bénéficier de ce soutien. Cette révision du PDRN, notifiée en décembre, devrait être examinée par le comité des structures agricoles (comité STAR) avant la mise en uvre du nouveau dispositif, en avril.
Les bâtiments et la mécanisation en montagne
Les conditions d'attribution de ces aides seront très prochainement rénovées, à l'issue d'une concertation avec les représentants professionnels agricoles. Parmi d'autres aménagements, la rénovation des bâtiments et la construction neuve seront désormais financées dans les mêmes conditions. Pour 2001, compte tenu des disponibilités financières exceptionnelles induites par les retours communautaires, l'enveloppe budgétaire affectée à ces actions pourra atteindre 120 MF, au lieu de 90 MF en 2000.
La qualité en montagne
Le décret tant attendu du 15 décembre 2000 relatif à l'utilisation du terme " montagne " est paru. Ce dispositif attendu par les représentants professionnels agricoles permettra de mieux valoriser les produits agricoles et alimentaires, qui bénéficient d'une forte image auprès des consommateurs.
Les CTE
A ce jour, plus de 20% des CTE sont conclus en zone de montagne, soit une proportion supérieure au poids des exploitations de montagne dans l'agriculture française. Cela confirme, à mes yeux, l'importance que représente le contrat territorial d'exploitation pour l'agriculture de montagne, agriculture par excellence multifonctionnelle et fondée sur la recherche de la qualité.
Afin de conforter l'élevage extensif ainsi que la production de produits de qualité, un contrat territorial d'exploitation type " système herbager " vient d'être élaboré. Il se centre autour de deux objectifs simples prioritaires :
- Premier objectif : la qualité des produits : l'adhésion à une démarche qualité sera soutenue financièrement par une aide au démarrage sur les trois premières années. Cela veut dire qu'il ne sera pas nécessaire de réaliser des investissements lourds pour valider le volet socio-économique du CTE.
- Deuxième objectif, la gestion des surfaces en herbe : les éleveurs s'engageront sur des mesures de gestion extensive des prairies et des parcours par la fauche ou le pâturage.
Ce CTE simple, centré sur deux mesures prioritaires, a été élaboré en liaison avec les représentants de la filière. Mis en oeuvre par des porteurs de projets collectifs - groupements de producteurs, coopératives et leurs fédérations - il devrait pouvoir correspondre aux attentes d'un grand nombre d'élevages extensifs de montagne.
Je souhaiterais terminer mon propos en évoquant deux nouveaux chantiers que je vais engager dans les prochains mois : créer une nouvelle dynamique forestière de montagne et définir les éléments d'un plan de soutien au pastoralisme.
Une nouvelle dynamique forestière doit être développée dans les zones de montagne en visant un double objectif :
- premier objectif, conforter la rentabilité de l'exploitation de la forêt et du bois en favorisant le regroupement de gestion des parcelles forestières, en améliorant la desserte des massifs et en renforçant l'organisation interprofessionnelle de cette filière ;
- deuxième objectif, valoriser les fonctions environnementales paysagères et sociales des forêts de montagne en favorisant la prise en considération de ces services collectifs par l'ensemble de partenaires participant au développement des territoires de montagne.
Sans attendre la promulgation de la loi d'orientation sur la forêt, il est proposé de mettre en uvre, à titre pilote, 5 chartes de territoires forestiers en zone de montagne. Ces chartes, associant l'ensemble des partenaires élus, professionnels et usagers de ces territoires permettront notamment de poursuivre les actions innovantes engagées ces dernières années dans le cadre du programme "compétitivité +".
Deuxième chantier : le pastoralisme.
Il est nécessaire aujourd'hui d'analyser les évolutions qui s'attachent à cette activité et d'examiner les moyens qui permettront de la conforter. Je souhaite à cette fin qu'un travail s'engage dans les prochains mois, afin d'aboutir à un plan d'actions dans les quatre directions suivantes :
- premièrement, rechercher les moyens d'améliorer les actions de développement en direction des zones pastorales, ainsi que de protection de l'activité pastorale, notamment dans les zones où se posent des problèmes de cohabitation avec des animaux de grande faune ;
- deuxièmement, adapter le statut des entités collectives, définies principalement par la loi montagne de 1972, dans l'objectif de simplifier et de moderniser les procédures au bénéfice des pastoralistes ;
- troisièmement, rechercher une plus grande cohérence entre les droits d'usage et les exigences des règlements communautaires en ce qui concerne notamment la justification de l'utilisation des superficies gérées par les commissions syndicales ou d'autres structures collectives ;
- quatrièmement, adapter la formation initiale et continue des bergers, et leur statut. Ce dernier point passe notamment par des interventions sur le statut des saisonniers et le développement de la pluriactivité.
Ce groupe de travail, dont la composition associera toutes les parties prenantes, devra rendre ses conclusions à la fin de l'année 2001.
Enfin, le ministère de l'agriculture souhaite encourager la multiplication d'exploitations agritouristiques, notamment grâce à des CTE à caractère touristique reposant sur une démarche collective, afin de professionnaliser les acteurs et de mettre en uvre de véritables démarches de qualité.
Telles sont les grandes orientations politiques et chantiers prioritaires sur lesquels je souhaite me mobiliser avec vous pour que nous poursuivions, sur la durée, nos efforts en faveur de l'agriculture de montagne, des agriculteurs de montagne, dans une logique non pas de maintien mais de développement. Je vous remercie.
(Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 9 février 2001)