Texte intégral
S. Paoli Vers la fin de la guerre des couples au moment du divorce ? Supprimera-t-on le divorce pour faute ? On envisage même un divorce administratif sans jugement : une idée qui sera soumise à un débat citoyen. Cette réforme du droit de la famille précède-t-elle la réforme toujours attendue de la justice ? S'ouvrent aujourd'hui les entretiens de Vendôme qui vont dresser l'état des lieux de la justice. La famille a changé donc le divorce change ?
- "La famille a changé. Cela fait des années qu'elle évolue et comme le droit de la famille est un droit structurant, c'est un des piliers de notre code civil, il est important de le faire évoluer. Je crois qu'on a beaucoup parlé du divorce - et j'y reviendrai - mais il ne faut pas oublier un point important qui a initié tout ce travail, c'est l'autorité parentale et la filiation. Il y a de plus en plus de couples séparés et il faut que les enfants dans notre pays sachent par leur filiation qu'ils ont bien deux parents et que les deux parents soient à égalité de droits. On a vraiment renforcé ce volet de l'autorité parentale en espérant que cela fonctionne mieux."
C'est une nouvelle définition au fond de ce qu'est la famille. L'autorité parentale, c'est notamment aussi le rôle des pères. Est-ce la question de la garde alternée qui est inscrite là-dedans ?
- "C'est tout cela. L'enfant, même si le couple est divorcé, reste l'enfant des deux parents. Hormis quelques cas, lorsque le père n'a pas reconnu son enfant ou a mis beaucoup de temps à le reconnaître, le père ou la mère qui n'est pas avec l'enfant aura autant de droit que l'autre. Par exemple, lorsqu'il y aura de actes à faire, les deux seront concernés ; en cas de délinquance, malheureusement les deux seront aussi appelés à venir devant le juge ou le médiateur. Les deux seront toujours présents à l'école ; les deux seront présents sur les grandes décisions. Je pense que les enfants ont tellement besoin d'une filiation que notre premier objectif, avec S. Royal, était de réaffirmer cela. Le second objectif, bien sûr, c'est le divorce ; cela va ensemble. Si le divorce se passe mieux, si on évite de voir ces familles qui démarrent avec une sorte de dossier de consentement quasi mutuel même s'il n'est pas tout à fait déclaré..."
Quelle différence y a-t-il justement entre le divorce par consentement mutuel et ce que vous appelez maintenant le divorce pour cause objective ?
- "Il y en a deux. Il y a des parents ou des couples qui sont d'accord pour divorcer et puis il y a une cause objective : il y en a un qui déjà parti. Avant il fallait attendre six ans ; maintenant, au bout de trois ans ,le divorce sera prononcé. Il y en a qui viennent dire : "voilà on ne vit plus ensemble ; on ne se parle pas", peu importe la raison, si on constate une cause objective et le divorce est prononcé. Mais surtout, on le pacifie. On évite avec ces histoires de "j'ai gagné mon divorce" ou "j'ai perdu mon divorce", "je cherche des torts pour l'un" que les voisins, les parents, tout le monde soit appelé à témoigner pour l'un et pour l'autre."
L'escalade.
- "L'escalade qui fait que l'enfant ou les enfants assistent en spectateurs à un couple qui ne s'entendait plus vers un couple qui se bat. Pour l'autorité parentale et l'équilibre des enfants, c'est terrible."
Mais est-ce que cela dessine déjà ce à quoi vous réfléchissez apparemment, c'est-à-dire un divorce administratif qui serait un divorce sans jugement ?
- "Dans le document d'orientation, on n'a pas été jusqu'à ce dossier, même si on est tous intimement convaincu que cela doit être possible. La seule chose qui nous manque pour aller jusque là, c'est de savoir comment et qui va dire que les deux - l'homme et la femme - ont été vraiment libres au moment où ils ont décidé de divorcer. Est-ce qu'il n'y en a pas un qui va subir une influence d'une belle-famille, d'un groupe ? N'oublions pas que notre société est multiculturelle : est-ce qu'il n'y aura pas des répudiations cachées derrière ces divorces automatiques ? Qui va dire aussi au bout de quelques années que l'enfant n'a pas vu l'un de ses parents ? Qui va gérer le contentieux ? Qui va dire que tout est bien et que l'on peut signer ce divorce?"
Mais à l'inverse se pose aussi la question du mariage. Si on peut se séparer sans jugement, pourquoi se marier avec un acte civil ?
- "Entre le mariage et la séparation, il peut y avoir du patrimoine - c'est peut-être ce qu'il y a de moins grave - mais il y a surtout des enfants. Si on se sépare administrativement sans dire qui va garder l'enfant, est-ce qu'il y a une garde alternée, quel est le droit de visite etc, et qu'au bout de quelques mois il y a un contentieux, qui va le régler ? C'est une question qui est en suspens et qui demande débat. Si cette société, en particulier quand les couples n'ont pas d'enfants, veut se divorce-là moi, je crois qu'il faut que nous l'étudions. En revanche - en dehors de celui-là - faisons une seule audience quand tout le monde est d'accord. Pourquoi faire deux audiences comme aujourd'hui ? Pourquoi attendre six mois entre les deux ? Quand tout le monde est d'accord, faisons une audience et puis c'est fini. On pousse les gens à faire leur convention eux-mêmes, on les pousse à harmoniser leurs demandes, à échanger, à parler de leur avenir parce qu'après le divorce, il y a un avenir qui est en particulier l'avenir des enfants. C'est important pour nous de pacifier ce système qui concerne 115 000 couples par an."
Il y aura un débat citoyen. On lit dans la presse que vous allez organiser un débat citoyen dans quatre villes sur la question du divorce administratif un débat citoyen.
- "Nous allons organiser un débat sur toutes les questions, sur la famille dans sa globalité, dans tout ce qu'on propose. Je pense que compte tenu des commentaires que j'ai entendus depuis hier de la part des journalistes, apparemment ce qui intéresse le plus c'est quel type de divorce et pour qui. Tout le monde est d'accord sur l'autorité parentale."
Vous savez où et quand auront lieu ces débats ?
- "Oui. Je n'ai pas les dates ici mais ce débat aura lieu à Lille, Marseille, Toulouse et à Nantes. Ce sont des villes qu'on a choisies en espérant - et les parlementaires sont d'accord - que quelque uns organiseront leur propre débat dans leur circonscription."
Ce serait un peu comme un référendum pour vous. Imaginez que tout le monde dise : "ça nous plaît, on veut ça."
- "C'est très important pour nous d'entendre le retour des personnes. On ne fait pas la loi pour nous, on fait la loi pour une société. Comme il s'agit du code civil - le coeur d'équilibre de notre société - c'est important que les gens s'expriment via leurs associations, via leurs élus, eux-mêmes."
Est clairement posée la volonté de comprendre en quoi la famille a changé et donc en quoi change le comportement dans la famille, malheureusement jusqu'au divorce. Pourquoi ne pas élargir plus et ne pas se poser la question de savoir en quoi la justice a mécaniquement changé, la société n'est plus la même. Est-ce que Vendôme, qui commence aujourd'hui, c'est la volonté de répondre à cette question-là ?
- "C'est la volonté de répondre au fait que cette société est de plus en plus contractuelle. On vient de parler des couples, mais c'est pareil en économie et pour de nombreux sujets de la vie quotidienne. C'est la justice qui va répondre aux contrats non respectés, quels qu'ils soient. Il faut que la justice soit accessible aux citoyens d'une façon un peu différente de ce qu'elle était avant. On a donné des moyens. Je crois que tout le monde maintenant en est convaincu."
Les magistrats disent que ce n'est pas assez. La justice n'est pas qu'une question financière.
- "Une fois qu'on parle de moyens, on doit parler de qualité de la justice, d'accessibilité. Cela va du vocabulaire utilisé par les magistrats jusqu'au points d'accueil. Cela va aussi passer par toutes les relations entre les justiciables et leurs magistrats, la place des citoyens. Est-ce qu'il ne faut pas se poser la question de la place des citoyens dans la justice aujourd'hui ? Est-ce que les citoyens ne peuvent pas faire plus qu'être jurés d'assises ? Il y a de tas de questions de fond de ce type qu'on va poser ensemble. Mais je ne veux pas clore les entretiens avant de les avoir ouvert."
Cela veut-il dire que vous voulez vous attaquer au serpent de mer, la fameuse grande réforme de la justice ?
- "Je crois que si je disais que je veux un texte fondateur dans x mois, je me tromperais. Pendant quatre mois, on va débattre au fond de tout ce qui dysfonctionne à partir du vécu des magistrats, à partir du vécu des auxiliaires, des fonctionnaires, des greffiers, des justiciables, de tout ceux qui veulent bien s'exprimer sur la justice. On va chercher ce dysfonctionnement et on va chercher à le réparer. Par exemple, dans chaque juridiction, plus personne n'a le temps de se parler, de parler d'organisation, de parler d'accueil, de parler du rôle de chacun. On a besoin en fait de toute mettre sur la table, non pas reconstruire la justice mais de l'améliorer, parce que la justice a des bases extraordinairement bien établies dans ce pays. Heureusement, c'est un pays démocratique. Mais je sens bien que tous ceux qui sont concernés de près ou de loin ont besoin de parler de son organisation et de son accessibilité."
Tout le monde est inquiet : les magistrats manifestent, les avocats à propos du fameux divorce que nous évoquions commencent à se demander à quoi ils vont servir parce que c'est quand même 170 000 divorces par an, c'est de la clientèle pour eux qui va disparaître si on arrive au divorce sans jugement.
- "Les avocats sont inquiets bien sûr. Mais qui va écrire les conventions ? Qui va écrire tous les documents qui fonderont ces relations entre des hommes et des femmes ? Ce sont les avocats."
Et la grande question du lien entre la justice et la politique qui décidément ne cesse de se poser. J. Chirac a été à nouveau mis en cause hier.
- "Je me suis déjà exprimée. Il y a un article de la Constitution (article 68), il y a une interprétation de janvier 1999 du Conseil constitutionnel et je vous rappelle que dans la Constitution également, il est rappelé, à moi comme à d'autres, que toute décision du Conseil constitutionnel s'impose à tous les pouvoirs publics. Je suis absolument liée par ce texte. C'est pourquoi vous permettrez que je ne m'exprime plus sur cette affaire parce que je crois que j'ai dit tout ce que je pouvais dire."
Chacun peut se poser la question du modèle: un Président qui ne se présente pas à une convocation, est-ce que, du point de vue de l'image que le citoyen se fait de la justice, ce n'est pas au minimum une question ?
- "Il y a deux choses. Il y a le Président de la République et son privilège de juridiction. Je crois que cela a été réaffirmé. Et puis il y a le Président de la République et tout ce qui est commenté aujourd'hui. Mais c'est de sa responsabilité, ce n'est sûrement pas de la mienne. Je ne m'immisce dans aucune affaire. Si je m'immisçais dans celle-là, ce serait la fin de ce que L. Jospin a voulu affirmer et que je respecte largement : une indépendance totale. Aucune immixtion dans une affaire quelle qu'elle soit, même si on en parle beaucoup."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 5 avril 2001)
- "La famille a changé. Cela fait des années qu'elle évolue et comme le droit de la famille est un droit structurant, c'est un des piliers de notre code civil, il est important de le faire évoluer. Je crois qu'on a beaucoup parlé du divorce - et j'y reviendrai - mais il ne faut pas oublier un point important qui a initié tout ce travail, c'est l'autorité parentale et la filiation. Il y a de plus en plus de couples séparés et il faut que les enfants dans notre pays sachent par leur filiation qu'ils ont bien deux parents et que les deux parents soient à égalité de droits. On a vraiment renforcé ce volet de l'autorité parentale en espérant que cela fonctionne mieux."
C'est une nouvelle définition au fond de ce qu'est la famille. L'autorité parentale, c'est notamment aussi le rôle des pères. Est-ce la question de la garde alternée qui est inscrite là-dedans ?
- "C'est tout cela. L'enfant, même si le couple est divorcé, reste l'enfant des deux parents. Hormis quelques cas, lorsque le père n'a pas reconnu son enfant ou a mis beaucoup de temps à le reconnaître, le père ou la mère qui n'est pas avec l'enfant aura autant de droit que l'autre. Par exemple, lorsqu'il y aura de actes à faire, les deux seront concernés ; en cas de délinquance, malheureusement les deux seront aussi appelés à venir devant le juge ou le médiateur. Les deux seront toujours présents à l'école ; les deux seront présents sur les grandes décisions. Je pense que les enfants ont tellement besoin d'une filiation que notre premier objectif, avec S. Royal, était de réaffirmer cela. Le second objectif, bien sûr, c'est le divorce ; cela va ensemble. Si le divorce se passe mieux, si on évite de voir ces familles qui démarrent avec une sorte de dossier de consentement quasi mutuel même s'il n'est pas tout à fait déclaré..."
Quelle différence y a-t-il justement entre le divorce par consentement mutuel et ce que vous appelez maintenant le divorce pour cause objective ?
- "Il y en a deux. Il y a des parents ou des couples qui sont d'accord pour divorcer et puis il y a une cause objective : il y en a un qui déjà parti. Avant il fallait attendre six ans ; maintenant, au bout de trois ans ,le divorce sera prononcé. Il y en a qui viennent dire : "voilà on ne vit plus ensemble ; on ne se parle pas", peu importe la raison, si on constate une cause objective et le divorce est prononcé. Mais surtout, on le pacifie. On évite avec ces histoires de "j'ai gagné mon divorce" ou "j'ai perdu mon divorce", "je cherche des torts pour l'un" que les voisins, les parents, tout le monde soit appelé à témoigner pour l'un et pour l'autre."
L'escalade.
- "L'escalade qui fait que l'enfant ou les enfants assistent en spectateurs à un couple qui ne s'entendait plus vers un couple qui se bat. Pour l'autorité parentale et l'équilibre des enfants, c'est terrible."
Mais est-ce que cela dessine déjà ce à quoi vous réfléchissez apparemment, c'est-à-dire un divorce administratif qui serait un divorce sans jugement ?
- "Dans le document d'orientation, on n'a pas été jusqu'à ce dossier, même si on est tous intimement convaincu que cela doit être possible. La seule chose qui nous manque pour aller jusque là, c'est de savoir comment et qui va dire que les deux - l'homme et la femme - ont été vraiment libres au moment où ils ont décidé de divorcer. Est-ce qu'il n'y en a pas un qui va subir une influence d'une belle-famille, d'un groupe ? N'oublions pas que notre société est multiculturelle : est-ce qu'il n'y aura pas des répudiations cachées derrière ces divorces automatiques ? Qui va dire aussi au bout de quelques années que l'enfant n'a pas vu l'un de ses parents ? Qui va gérer le contentieux ? Qui va dire que tout est bien et que l'on peut signer ce divorce?"
Mais à l'inverse se pose aussi la question du mariage. Si on peut se séparer sans jugement, pourquoi se marier avec un acte civil ?
- "Entre le mariage et la séparation, il peut y avoir du patrimoine - c'est peut-être ce qu'il y a de moins grave - mais il y a surtout des enfants. Si on se sépare administrativement sans dire qui va garder l'enfant, est-ce qu'il y a une garde alternée, quel est le droit de visite etc, et qu'au bout de quelques mois il y a un contentieux, qui va le régler ? C'est une question qui est en suspens et qui demande débat. Si cette société, en particulier quand les couples n'ont pas d'enfants, veut se divorce-là moi, je crois qu'il faut que nous l'étudions. En revanche - en dehors de celui-là - faisons une seule audience quand tout le monde est d'accord. Pourquoi faire deux audiences comme aujourd'hui ? Pourquoi attendre six mois entre les deux ? Quand tout le monde est d'accord, faisons une audience et puis c'est fini. On pousse les gens à faire leur convention eux-mêmes, on les pousse à harmoniser leurs demandes, à échanger, à parler de leur avenir parce qu'après le divorce, il y a un avenir qui est en particulier l'avenir des enfants. C'est important pour nous de pacifier ce système qui concerne 115 000 couples par an."
Il y aura un débat citoyen. On lit dans la presse que vous allez organiser un débat citoyen dans quatre villes sur la question du divorce administratif un débat citoyen.
- "Nous allons organiser un débat sur toutes les questions, sur la famille dans sa globalité, dans tout ce qu'on propose. Je pense que compte tenu des commentaires que j'ai entendus depuis hier de la part des journalistes, apparemment ce qui intéresse le plus c'est quel type de divorce et pour qui. Tout le monde est d'accord sur l'autorité parentale."
Vous savez où et quand auront lieu ces débats ?
- "Oui. Je n'ai pas les dates ici mais ce débat aura lieu à Lille, Marseille, Toulouse et à Nantes. Ce sont des villes qu'on a choisies en espérant - et les parlementaires sont d'accord - que quelque uns organiseront leur propre débat dans leur circonscription."
Ce serait un peu comme un référendum pour vous. Imaginez que tout le monde dise : "ça nous plaît, on veut ça."
- "C'est très important pour nous d'entendre le retour des personnes. On ne fait pas la loi pour nous, on fait la loi pour une société. Comme il s'agit du code civil - le coeur d'équilibre de notre société - c'est important que les gens s'expriment via leurs associations, via leurs élus, eux-mêmes."
Est clairement posée la volonté de comprendre en quoi la famille a changé et donc en quoi change le comportement dans la famille, malheureusement jusqu'au divorce. Pourquoi ne pas élargir plus et ne pas se poser la question de savoir en quoi la justice a mécaniquement changé, la société n'est plus la même. Est-ce que Vendôme, qui commence aujourd'hui, c'est la volonté de répondre à cette question-là ?
- "C'est la volonté de répondre au fait que cette société est de plus en plus contractuelle. On vient de parler des couples, mais c'est pareil en économie et pour de nombreux sujets de la vie quotidienne. C'est la justice qui va répondre aux contrats non respectés, quels qu'ils soient. Il faut que la justice soit accessible aux citoyens d'une façon un peu différente de ce qu'elle était avant. On a donné des moyens. Je crois que tout le monde maintenant en est convaincu."
Les magistrats disent que ce n'est pas assez. La justice n'est pas qu'une question financière.
- "Une fois qu'on parle de moyens, on doit parler de qualité de la justice, d'accessibilité. Cela va du vocabulaire utilisé par les magistrats jusqu'au points d'accueil. Cela va aussi passer par toutes les relations entre les justiciables et leurs magistrats, la place des citoyens. Est-ce qu'il ne faut pas se poser la question de la place des citoyens dans la justice aujourd'hui ? Est-ce que les citoyens ne peuvent pas faire plus qu'être jurés d'assises ? Il y a de tas de questions de fond de ce type qu'on va poser ensemble. Mais je ne veux pas clore les entretiens avant de les avoir ouvert."
Cela veut-il dire que vous voulez vous attaquer au serpent de mer, la fameuse grande réforme de la justice ?
- "Je crois que si je disais que je veux un texte fondateur dans x mois, je me tromperais. Pendant quatre mois, on va débattre au fond de tout ce qui dysfonctionne à partir du vécu des magistrats, à partir du vécu des auxiliaires, des fonctionnaires, des greffiers, des justiciables, de tout ceux qui veulent bien s'exprimer sur la justice. On va chercher ce dysfonctionnement et on va chercher à le réparer. Par exemple, dans chaque juridiction, plus personne n'a le temps de se parler, de parler d'organisation, de parler d'accueil, de parler du rôle de chacun. On a besoin en fait de toute mettre sur la table, non pas reconstruire la justice mais de l'améliorer, parce que la justice a des bases extraordinairement bien établies dans ce pays. Heureusement, c'est un pays démocratique. Mais je sens bien que tous ceux qui sont concernés de près ou de loin ont besoin de parler de son organisation et de son accessibilité."
Tout le monde est inquiet : les magistrats manifestent, les avocats à propos du fameux divorce que nous évoquions commencent à se demander à quoi ils vont servir parce que c'est quand même 170 000 divorces par an, c'est de la clientèle pour eux qui va disparaître si on arrive au divorce sans jugement.
- "Les avocats sont inquiets bien sûr. Mais qui va écrire les conventions ? Qui va écrire tous les documents qui fonderont ces relations entre des hommes et des femmes ? Ce sont les avocats."
Et la grande question du lien entre la justice et la politique qui décidément ne cesse de se poser. J. Chirac a été à nouveau mis en cause hier.
- "Je me suis déjà exprimée. Il y a un article de la Constitution (article 68), il y a une interprétation de janvier 1999 du Conseil constitutionnel et je vous rappelle que dans la Constitution également, il est rappelé, à moi comme à d'autres, que toute décision du Conseil constitutionnel s'impose à tous les pouvoirs publics. Je suis absolument liée par ce texte. C'est pourquoi vous permettrez que je ne m'exprime plus sur cette affaire parce que je crois que j'ai dit tout ce que je pouvais dire."
Chacun peut se poser la question du modèle: un Président qui ne se présente pas à une convocation, est-ce que, du point de vue de l'image que le citoyen se fait de la justice, ce n'est pas au minimum une question ?
- "Il y a deux choses. Il y a le Président de la République et son privilège de juridiction. Je crois que cela a été réaffirmé. Et puis il y a le Président de la République et tout ce qui est commenté aujourd'hui. Mais c'est de sa responsabilité, ce n'est sûrement pas de la mienne. Je ne m'immisce dans aucune affaire. Si je m'immisçais dans celle-là, ce serait la fin de ce que L. Jospin a voulu affirmer et que je respecte largement : une indépendance totale. Aucune immixtion dans une affaire quelle qu'elle soit, même si on en parle beaucoup."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 5 avril 2001)