Déclaration de Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville, sur le projet de loi pour la mobilisation en faveur du logement, notamment le renforcement du PLH (programme local de l'habitat), et le transfert de l'élaboration du PLU (plan local d'urbanisme) aux intercommunalités, Paris le 24 juin 2008.

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Circonstance : Congrès du Syndicat national des professionnels de l'aménagement et du lotissement, à Paris le 24 juin 2008

Texte intégral

Monsieur le Président, Cher Dominique de Lavenère,
Mesdames et messieurs,
Avant de passer à une cérémonie bien plus conviviale et personnelle, vous m'avez invitée, Monsieur le président, à clôturer votre congrès annuel. Je vous remercie de cette attention. Mon collègue Jean-Louis Borloo, en charge de l'urbanisme, aurait sans doute plus de légitimité que je n'en ai moi-même à être aujourd'hui devant les aménageurs que vous êtes.
Cependant il ne vous aura échappé, et à vous-même, moins qu'un autre, Monsieur le président, que pour construire du logement il faut un terrain. Et pour le rendre constructible, il faut des règles d'urbanisme. Aussi, en ma qualité de ministre du logement et de la ville, je ne saurais me désintéresser de cette compétence et j'entends jouer un rôle important pour faire évoluer les pratiques et les lois en la matière.
Le président de la République m'a fixé comme objectif de construire 500 000 logements par an et de faire des Français un peuple de propriétaires. C'est là un rude défi auquel je m'attèle depuis un an.
Vous êtes en première ligne pour m'accompagner dans cette mission. Sans aménageurs, aucune politique sérieuse de construction n'est possible, ni réaliste. Votre soutien m'est donc essentiel et je puis vous dire en retour que vous pouvez compter sur le mien, au moment notamment où je finalise un projet de loi que je défendrai à l'automne devant le Parlement.
Je vais naturellement vous en présenter les grandes lignes mais avant que de le faire, je souhaite faire une remarque préalable.
La spécificité de la crise du logement actuelle, c'est qu'elle est loin d'être uniforme. Elle se caractérise par de fortes inégalités de l'offre de logements entre des zones tendues - essentiellement regroupées en Ile de France et autour des grandes agglomérations françaises - et les autres territoires, où je n'irai pas jusqu'à dire qu'il n'y a pas de difficultés mais, à tout le moins, qu'elles apparaissent surmontables.
Par tradition jacobine et égalitaire, la France est toujours rétive à l'idée de moduler ses lois et règlements en fonctions des réalités territoriales. Et pourtant, les choses étant ce qu'elles sont, cette modulation est à mes yeux la condition sine qua non, pour conduire une politique équitable.
Dans mon projet de loi, j'ai bien l'intention d'introduire un soupçon de nuances territoriales afin de ménager une transition vers une politique plus moderne et mieux adaptée aux nécessités du moment. En matière d'urbanisme et d'offre foncière, cela se traduira, par exemple, par une disposition applicable à la région Ile de France afin de permettre la réalisation des 60 000 logements par an prévus par le schéma directeur de la région.
Au-delà, dans le domaine de l'urbanisme, mon texte proposera un renforcement du PLH afin de le rendre d'une part plus contraignant en matière de production de logements, à l'égard des communes du territoire couvert par le PLH et d'autre part, plus opérationnel via l'inscription d'une programmation dans le temps. Dans l'immédiat, je ne crois pas qu'il soit possible d'imposer la conformité du PLH au PLU, au regard du trop grand risque de contentieux ; lequel aurait pour conséquence, l'effet inverse de celui qui est recherché : à savoir le développement de l'offre foncière.
Le transfert de l'élaboration du PLU aux intercommunalités s'impose. J'ai eu l'occasion d'évoquer cette question avec les associations d'élus concernés et je sens qu'il y a désormais sinon un consensus général sur cette idée, de moins une position beaucoup plus ouverte. Cela dit, je crois qu'il reviendra à la future réforme du code de l'urbanisme, réclamée par le Président de la République, de proposer éventuellement une telle évolution. Le jour venu, je ne manquerai naturellement de soutenir activement cette mesure.
J'ai pris bonne note des revendications réclamant une disposition analogue à ce qui existait avant la loi SRU sous la forme de ZAC privées. J'ai prévu dans mon texte un article instituant le projet urbain partenarial que vous appelez de vos voeux. Il me semble que c'est le meilleur compromis que nous puissions trouver pour tenir compte des demandes du ministère de l'écologie. Une large concertation a été organisée, réunissant tous les professionnels, et le SNAL au premier chef. Je crois qu'il est indispensable que vous puissiez exercer votre métier au service de la production de logements dans des conditions simplifiées. C'est en tout cas le souhait du Président la République et le mien.
En ce qui concerne le chapitre relatif à l'urbanisme, j'ai introduit des dispositions sur la densification dans les PLU. Vous vous souviendrez sans doute de l'idée que j'avais lancée à Lyon, en septembre dernier, de pouvoir permettre la réalisation d'un étage supplémentaire. Au-delà de l'aspect volontairement provocateur, il y a une vérité : nous devons densifier la ville, y compris dans sa dimension « habitat individuel ». Au demeurant, je crois qu'il n'est ni sain, ni raisonnable de cultiver l'aversion pour ce type d'habitat. C'est la forme de logement la plus plébiscitée par les Français. Et puis, n'oublions pas que dans les pays du nord de l'Europe, dont certains affichent les plus fortes densités au monde, il a été démontré que la maison individuelle est parfaitement compatible avec la ville dense.
Enfin et pour clore l'évocation du chapitre consacré à l'urbanisme, il y a une disposition que je veux évoquer de nature fiscale qui permet de lutter contre la rétention foncière en renforçant la mesure mise en place à ce titre dans la loi ENL de 2006.
J'ai lancé, il y a quatre mois, le projet de la maison pour 15 euros par jour. Certains ont fait la moue, pensant que je cherchais à copier la maison pour 100 000 euros de mon prédécesseur.
En réalité le système est sans commune mesure. C'est un produit « clefs en main » de primo accession populaire totalement innovant qui se base sur le Pass-Foncier, institué en accord avec les partenaires sociaux du 1 % logement l'an dernier. Vous en connaissez le principe. Il s'agit de dissocier le coût du terrain de celui de la maison proprement dite. J'ajoute que la TVA est ramenée à 5,5% pour la construction de la maison. Le Pass-foncier suppose une subvention des communes de 3000 à 5000 Euros afin d'impliquer l'ensemble des acteurs de la construction. Je suis convaincue que ce concept a beaucoup d'avenir même, si dans une première phase, j'ai pris le parti de limiter l'expérience à 5000 réalisations.
Vous avez été de ceux qui ont immédiatement saisi la portée de ce projet puisque, Monsieur le président, nous avons signé ensemble la charte instituant la Maison pour 15 euros par jour. Depuis, 150 partenaires vous ont imité, et à peu près l'équivalent est en train de frapper à notre porte.
Ce matin, vos travaux se sont focalisés sur le dossier majeur du développement durable.
C'est un aspect stratégique, car comme je viens de l'évoquer, il serait extrêmement regrettable qu'en France la maison individuelle devienne la grande « réprouvée » au motif qu'elle serait de manière rédhibitoire, anti-écologique et synonyme d'étalement urbain.
Il vous revient, à nos côtés, de réhabiliter cette forme urbaine d'habitat, de prouver qu'elle peut répondre au canon du développement durable tout en restant financièrement à la portée des Français.
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.snal.fr, le 5 août 2008