Texte intégral
Je veux vous rendre compte de la réunion que je viens de présider en compagnie du gouverneur de la Banque de France, de Monsieur RICOL qui vient d'être nommé médiateur pour l'accès au crédit des PME, et du préfet de l'Eure, avec les acteurs de l'économie de ce département. Cette réunion est sans doute une des premières qui se tient en France depuis la décision que j'ai prise d'installer ces commissions dans chaque département.
Il s'agit pour nous de suivre au plus près du terrain la mise en oeuvre des mesures de refinancement de l'économie qui ont été décidées par l'Etat. Nous faisons face à une crise financière très grave, cette crise financière a créé des tensions sur le marché du financement des entreprises, des particuliers et des collectivités locales. L'Etat est intervenu parce que c'était son devoir, pour remettre en marche le système financier, pour réinjecter les moyens nécessaires pour permettre aux banques de faire leur métier, c'est-à-dire de prêter de l'argent à l'économie. Il convient maintenant que nous nous assurions de la façon la plus précise qui soit que ces mesures sont efficaces, qu'elles sont suivies d'effet et que sur le terrain, les entreprises, les particuliers et les collectivités locales, trouvent bien les moyens nécessaires de leur développement.
Cette réunion a montré plusieurs choses ; d'abord que les entreprises n'étaient pas paniquées par la situation, les chefs d'entreprise se sont tous exprimés pour dire qu'ils faisaient face avec une certaine sérénité aux difficultés. On a vu d'ailleurs que les niveaux de prêts aux entreprises dans ce département n'étaient pas en baisse, mais au contraire, en augmentation, même si, en même temps, les uns et les autres ont distingué des fragilités liées à la situation économique internationale, liées au difficulté de refinancement des banques qui pouvaient annoncer des tensions à venir.
Notre souci, c'est que l'ensemble des acteurs mette bien en oeuvre les mesures qui ont été prises sans rajouter à chaque niveau des sécurités inutiles qui viendraient paralyser le système.
Je veux rappeler que le dispositif qui a été mis en place par l'Etat est un dispositif massif. Nous avons d'abord décidé de réorienter vers les PME 22 milliards de nouveaux prêts qui venaient de la collecte des livrets réglementés, et qui seront pour une part d'ailleurs mis en oeuvre grâce à l'intervention d'OSEO.
Nous avons ensuite décidé de mettre à la disposition du secteur bancaire 320 milliards sous forme de prêts garantis par l'Etat, pour permettre aux banques de ne pas dépendre des seules ressources à court terme qui sont à leur disposition.
Ce dispositif est mis en oeuvre à travers une société de financement de l'économie française qui a été créée en début de semaine. L'arrêté de garantie a été signé par la ministre de l'Economie hier. La société de financement de l'économie a levé ses premiers fonds à hauteur de 5 milliards d'euros aujourd'hui, et je vous annonce qu'elle fera ses premiers prêts aux établissements bancaires qui en font la demande à partir d'aujourd'hui même.
Et enfin, nous avons déjà mobilisé 10,5 milliards en injection de fonds propres, sous forme de titres subordonnés, souscrits par l'Etat dans les grandes banques françaises.
Je voudrais dire que ces montants qui peuvent paraître faramineux à nos concitoyens, et qui créent un débat sur la question de savoir si l'Etat a les moyens d'assurer le financement de l'économie, pourquoi est-il par ailleurs extrêmement rigoureux sur la dépense publique. Je pense que c'est tout à fait simple à expliquer, et je suis parfois étonné de voir des observateurs avertis, même parfois de grands économistes, qui ne comprennent pas la différence qu'il y a entre un prêt et une subvention. Je pense que tous ceux qui, ici, perçoivent des subventions publiques, ne sont pas prêts à les transformer en emprunts à 8 %. Mais naturellement, si c'était le cas, l'Etat serait extrêmement satisfait de transformer les subventions qu'il accorde, je pense à des organismes de recherche en matière économique par exemple, des organismes de presse, en emprunts à 8 %.
Je pense que c'est le devoir de citoyen qui est le nôtre que de montrer à nos concitoyens la différence qu'il y a entre le fait de prêter à l'économie à un taux qui est un taux du marché, avec une rémunération, et l'injection de fonds publics sans espoir de retour, qui évidemment, n'a rien à voir.
Nous avons demandé aux établissements bancaires, en échange de cette injection massive de liquidités, des contreparties.
Ces contreparties sont d'abord des engagements éthiques. Nous leur avons demandé d'accélérer de manière anticipée la charte de déontologie sur les rémunérations des dirigeants. Je voudrais prendre quelques exemples : pendant toute la durée de remboursement des prêts, les indemnités de départ seront plafonnées dans les établissements bancaires, et leur versement sera interdit en cas de situation d'échec du dirigeant ou de l'entreprise. De la même façon, la distribution aux dirigeants d'actions gratuites, sans condition de performance ou de stock-options avec décote, est interdite. Et enfin, nous avons demandé que dans les six mois, les banques proposent à la commission bancaire une politique adaptée de rémunération des opérateurs de marché, qui lui permette d'apprécier son impact sur les risques que prend la banque, en effet, quand un opérateur de marché agit, il fait prendre des risques à sa banque. Il ne faut pas que sa rémunération soit déconnectée de cette prise de risque.
Enfin, les banques se sont engagées, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, à augmenter de 3 à 4 % le volume des encours de crédit. Cela représente 75 milliards de prêts supplémentaires à l'économie. Nous sommes donc bien dans une contrepartie qui est une contrepartie extrêmement forte, surtout dans une période de ralentissement économique.
Fort des enseignements de la table ronde que je viens de tenir, nous allons demander aux banques des engagements supplémentaires. Des engagements d'abord de comportement, des engagements de transparence. Nous voulons que soient publiés de manière mensuelle les flux de crédits aux PME ; des engagements de dialogue et de considération ; nous demandons aux banques qu'il n'y ait pas d'annonces brutales de coupures de lignes de crédit, qu'on respecte les usages de préavis, qu'on apporte des réponses aux demandes de crédits dans des délais courts. Nous voulons des engagements en matière d'accompagnement pour donner une seconde chance à des entreprises qui seraient en situation difficile. Chaque dossier repoussé en première analyse devra être transféré à OSEO, et être réexaminé si OSEO est prêt à s'engager au côté de la banque.
Il appartiendra aux préfets de vérifier le respect de ces engagements à l'occasion des réunions mensuelles des comités de suivi, et de faire parvenir toutes les anomalies au médiateur national de crédits aux PME. Médiateur national qui va d'ailleurs mettre en place un dispositif permettant dans chaque département d'avoir un correspondant siégeant au sein de la Commission départementale.
Voilà, Mesdames et Messieurs, comme vous le voyez, non seulement le Gouvernement met en oeuvre un plan massif de refinancement du système financier pour permettre le redémarrage de l'économie, mais il entend s'assurer au quotidien, au plus près du terrain, du bon fonctionnement de ce plan.
Je suis maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions.
Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 27 octobre 2008