Texte intégral
PATRICK COHEN
Le gouvernement va donc à nouveau venir en aide à PSA PEUGEOT CITROËN en grave difficulté financière. Pourquoi cette garantie de lEtat, quelles contreparties avez-vous obtenues du constructeur automobile ?
JEAN-MARC AYRAULT
Dabord, et pour comprendre de quoi il sagit, la Banque de PSA, cest la banque qui permet de vendre des voitures, qui fait le crédit des voitures, cette banque dispose de fonds propres importants, mais elle naccède plus aux liquidités, pour la raison suivante, cest que la dégradation de la note du groupe industriel PSA fait que cette banque, qui est un outil, je dirais, de commercialisation de lentreprise, eh bien, ne peut plus utiliser largent, ne peut plus aller sur les marchés chercher de largent. Donc ça veut dire que si on ne fait rien, ce nest pas seulement PSA Aulnay qui est en danger, et qui risque de fermer, cest aussi Rennes, mais cest aussi Sochaux, cest tous les sites industriels.
PATRICK COHEN
Lensemble du groupe qui est menacé.
JEAN-MARC AYRAULT
Donc il y a 130.000 salariés, et dans une filière industrielle qui je le rappelle dans lautomobile est très importante, cest 200.000 emplois. Donc il y a une responsabilité très importante du gouvernement de ne pas laisser tomber ce secteur industriel, et particulièrement le groupe PSA, pas à nimporte quel prix, il y a des contreparties, cest évident. Ce que nous demandons au groupe PSA, cest dentrer dans la gouvernance, un changement de gouvernance. Et il y a, je crois, un accord de principe pour que, il y ait un administrateur
PATRICK COHEN
Il y aura un représentant de lEtat ?
JEAN-MARC AYRAULT
Oui, qui sera un administrateur indépendant, désigné par lEtat. Les salariés seront représentés au conseil dadministration, ça, cest très important, ça ne sest jamais fait. Et puis par ailleurs, nous demandons au groupe PSA de ne pas distribuer, pendant que le groupe ne sest pas redressé, de dividendes, de stock-options, dachats dactions, ce qui serait un scandale, et donc de tout concentrer sur le redressement de lentreprise.
PATRICK COHEN
Ça permettra au gouvernement de peser sur la stratégie, sur les décisions du groupe PSA ?
JEAN-MARC AYRAULT
Alors, il y a deux volets dans votre question, il y a tout ce qui concerne lavenir des salariés, et eux-mêmes, parce que, aujourdhui, il y a un plan social qui a été engagé par le groupe PSA, qui concerne à la fois Aulnay et puis Rennes, eh bien, nous demandons que le groupe PSA, monsieur le président, monsieur VARIN, que jai rencontré il y a quelques jours, ne fasse des propositions aux salariés ou à leurs représentants pour améliorer ses propositions. Lobjectif pour nous, cest clair : pas de licenciements secs, pas de personnes sans solutions. Alors, il y a la ré-industrialisation, quil faut accélérer sur Aulnay, donc là, cest facile si on veut sen donner les moyens daller très, très vite, et puis, sur Rennes, il y a le projet dune nouvelle voiture, dune nouvelle gamme, et ça, cest très important. Alors, quest-ce quon va faire en attendant
PATRICK COHEN
Mais cest du donnant/donnant, pardon, Jean-Marc AYRAULT
JEAN-MARC AYRAULT
Et ça lest toujours
PATRICK COHEN
Vous avez dit à PSA : on vous apporte la garantie de lEtat contre
JEAN-MARC AYRAULT
Cest toujours une discussion
PATRICK COHEN
La préservation de plusieurs centaines demplois supplémentaires ?
JEAN-MARC AYRAULT
Le gouvernement, en tout cas, mon gouvernement na pas du tout lintention de donner, de faire des cadeaux comme cela sans engagement, sans contrepartie. Je crois que ce temps-là est terminé. Et parce que pendant longtemps, on a fait beaucoup de cadeaux aux entreprises, et certains sen sont plaint. Les aides aux entreprises sont nécessaires, à condition quelles se traduisent en investissement, quelles se traduisent en emplois. Et le deuxième volet de votre question, cest justement le développement de PSA, linvestissement stratégique, donc il y a une alliance qui est envisagée avec GENERAL MOTORS OPEL
PATRICK COHEN
Oui, ça vous plaît ça ?
JEAN-MARC AYRAULT
A ce stade, elle porte sur la mise en commun des moyens de commandes des pièces détachées, notamment pour faire des économies, parce que les grands groupes industriels qui ont réussi dans lindustrie automobile ont fait ça. Et là, il y a eu du retard de pris. Et puis, le deuxième élément de ce plan, cest la fabrication avec des plateformes de voitures, même si elles sont vendues par OPEL ou elles sont vendues par PSA, parce que ça fait des économies. Cest comme ça quun groupe comme VOLKSWAGEN sen est sorti ; là, il y a eu beaucoup trop de retard de pris. Nous, nous avons des critiques à faire sur la manière dont ce groupe a été géré, maintenant, il sagit de le sauver, préparer lavenir, et ça, cest essentiel pour les salariés, cest essentiel aussi pour la France, parce que lindustrie automobile, cest le fleuron de notre industrie. Et comme lenjeu, cest bien le redressement économique de la France, le redressement de léconomie
PATRICK COHEN
On va en parler
JEAN-MARC AYRAULT
La compétitivité, dont on parle beaucoup, cest-à-dire la performance des entreprises, eh bien, cest on est au coeur des questions.
PATRICK COHEN
Donc on vous a entendu, Jean-Marc AYRAULT, vous demandez à PSA de ne plus distribuer de dividendes tant que lentreprise ne sera pas redressée. Sur les suppressions de postes, qui sont envisagées, il y a un chiffre, vous avez négocié
JEAN-MARC AYRAULT
Jai demandé à monsieur VARIN de faire de nouvelles propositions aux salariés, parce que je pense quil faut respecter aussi le dialogue
PATRICK COHEN
Vous ne vous êtes pas mis daccord sur un chiffre encore ?
JEAN-MARC AYRAULT
Mais ce nest pas à moi de le faire, nous sommes dans un Etat de droit où il y a un comité dentreprise, des représentants des salariés, et un patron, et cest dans ce cadre-là que doit se faire la négociation. Mais en même temps, le gouvernement dit : vous, vous avez des gens qui sont dans la difficulté, il ne faut pas les laisser tomber, donc, on vous aide, mais quest-ce que vous apportez en contrepartie, comment vous revoyez votre plan social, quallez-vous dire aux représentants des personnels ; cest ce que jattends de monsieur VARIN, et il sest engagé à bouger. Et jespère que les résultats iront dans la bonne direction.
PATRICK COHEN
En attendant, la liste des plans sociaux continue de sallonger, le chômage continue de grimper, les chiffres de septembre seront connus ce soir. Jimagine quils ne seront pas bons, Jean-Marc AYRAULT ?
JEAN-MARC AYRAULT
Mais ils ne peuvent pas être bons, Monsieur COHEN, ils ne peuvent pas être bons, ça fait seize mois consécutifs, ça va faire dix-sept mois maintenant, que les chiffres du chômage augmentent, et en particulier, chez les jeunes de moins de 25 ans et chez les seniors. Ce nest dailleurs pas un hasard si le gouvernement a agi tout de suite concernant ces deux catégories, dabord, les contrats davenir, on va en signer les premiers dans quelques jours, je réunis à Matignon dailleurs tous ceux qui veulent sengager pour les emplois davenir en direction des jeunes, ça, cest des mesures durgence, ça compte. Et puis, deuxième élément, concernant les contrats de génération, cest-à-dire, on maintient un senior dans lemploi, on embauche un jeune en CDI, pour transmettre aussi de lexpérience. La négociation entre les partenaires sociaux, beaucoup critiquent cette méthode, elle marche, elle marche non seulement pour les dépassements dhonoraires, mais elle marche aussi pour lutter contre le chômage. Maintenant, ça ne suffit pas, cest tout le chantier que nous avons lancé de redressement, il y a une grande cohérence dans la politique du gouvernement, hier soir, le Parlement, la majorité parlementaire, a adopté la Loi de Finances sur la partie recettes, maîtrise de nos déficits, maîtrise de notre dette, réduction de la dépense, un effort qui est demandé aux ménages les plus aisés, un effort qui est demandé aux grandes entreprises, pour préserver les PME, eh bien, cette politique-là, qui a pour but de réduire la dette, elle a aussi pour objectif de retrouver des marges de manoeuvre, parce que quand le premier budget de lEtat, cest le remboursement des intérêts de la dette, vous ne mettez pas dargent dans linvestissement, vous ne mettez pas dargent dans la recherche, vous ne mettez pas dargent dans la formation, et lenjeu, cest le redressement économique du pays, cest-à-dire la lutte contre le chômage, la lutte aussi pour les créations demplois. Donc
PATRICK COHEN
Mais elle marche pour qui, Jean-Marc AYRAULT, pour les entreprises ou pour les ménages, cest deux caps différents et deux doctrines différentes et cest là-dessus quil y a débat, le gouvernement se déchire à nouveau sur ce cap économique à suivre, sur la compétitivité des entreprises et le coût du travail
JEAN-MARC AYRAULT
Oui, mais est-ce que je peux vous corriger quand même sur un point
PATRICK COHEN
Question simple : quallez-vous oui sur ?
JEAN-MARC AYRAULT
Parce que vous dites « le gouvernement se déchire ».
PATRICK COHEN
Ah ben oui !
JEAN-MARC AYRAULT
Non, le gouvernement ne se déchire pas
PATRICK COHEN
Ah ben
JEAN-MARC AYRAULT
Le gouvernement travaille
PATRICK COHEN
Les divergences sétalent dans toute la presse depuis plusieurs jours, Pierre MOSCOVICI voudrait diminuer les charges sur les bas salaires, Michel SAPIN pense quil faut plutôt cibler les salaires intermédiaires, comme Arnaud MONTEBOURG, qui voudrait conditionner lallègement de charges à de linvestissement, Marisol TOURAINE ne veut pas de transfert du tout, je peux continuer si vous voulez
JEAN-MARC AYRAULT
Bien, vous pouvez continuer le réquisitoire bien orienté
PATRICK COHEN
Non, ce nest pas un réquisitoire, cest simplement ce que jai lu dans la presse et dans les médias ces derniers jours
JEAN-MARC AYRAULT
Je le récuse, je le récuse. Je le récuse parce que le gouvernement travaille sérieusement, parce que si vous avez la solution sur comment améliorer la compétitivité de notre industrie, et de façon non simpliste, vous me la donnez, mais vous serez bien incapable de le faire. Donc le gouvernement se réunit, et je réunis les ministres régulièrement depuis plusieurs semaines, pour apporter les réponses au redressement de notre industrie. La compétitivité, la performance, cest-à-dire, comment on va retrouver des marges, parce que vous savez ce qui sest passé depuis dix ans, la droite a été au pouvoir pendant dix ans, 750.000 emplois dans lindustrie perdus ! Pendant cinq ans, parce que nous, on nous dit : vous ne faites pas assez vite, pendant cinq ans, le gouvernement précédent, concernant la compétitivité des entreprises, la capacité à être performant au niveau de notre industrie, il na rien fait du tout. Et on dit : oui, mais faites pourquoi vous ne faites pas comme SCHRÖDER en Allemagne. SCHRÖDER, pendant quatre ans, il na rien fait, eh bien, moi, je vous le dis, le 5, je recevrai le rapport de Louis GALLOIS, et ça ne sera pas un rapport enterré, il va être utile, ça sera une contribution supplémentaire au travail que les membres du gouvernement font, ils discutent pour trouver la bonne réponse. Et le 6, jannoncerai les grandes orientations pour lancer la compétitivité et la performance économique de notre pays.
PATRICK COHEN
Y aura-t-il oui ou non des transferts de cotisations ?
JEAN-MARC AYRAULT
Ah mais, tout est sur la table
PATRICK COHEN
Ah oui
JEAN-MARC AYRAULT
Sur la question vous voyez, tout de suite, vous revenez à une seule question, cest toujours la même question
PATRICK COHEN
Ben oui !
JEAN-MARC AYRAULT
Vous dites : la compétitivité, la performance des entreprises, pour vous, cest le coût du travail
PATRICK COHEN
Oui ! Jai entendu François HOLLANDE
JEAN-MARC AYRAULT
Oui, pour vous
PATRICK COHEN
Le 9 septembre, cétait à TF1, sur le plateau de TF1
JEAN-MARC AYRAULT
Mais pour moi
PATRICK COHEN
Lemploi sera favorisé dès lors quembaucher coûtera moins cher pour les entreprises.
JEAN-MARC AYRAULT
Daccord, mais ce nest pas la seule solution ce nest pas la seule question
PATRICK COHEN
Non, mais cest une des questions
JEAN-MARC AYRAULT
Je vous demande dadmettre que cest une question qui doit être qui devrait embrasser la totalité des problèmes, jétais hier à Toulouse, quest-ce que jai vu à Toulouse, pour le lancement de lA350, là, il est à peine commencé quil y a déjà 550 commandes, quest-ce qui se passe dans ce secteur industriel, qui, pour moi, est une référence, cest un grand groupe qui sappuie sur des PME, qui investit, qui innove, et qui prépare la montée en gamme, comme on dit, cest-à-dire en qualité de ses produits. Et cet avion, lA350, va être un avion qui va moins consommer dénergie, parce que, dabord, il y a un moteur qui est adapté, et puis, ensuite, il utilise des matériaux composites qui notamment sont fabriqués et conçus sur un autre site, qui est celui de Nantes, où on associe entreprises, PME, recherche publique et privée, et on trouve de nouvelles réponses technologiques, de nouveaux produits de qualité. Si ça navait pas été fait, eh bien, AIRBUS ne vendrait pas davions, ne vendrait plus davions, et sans doute aurait disparu. Et donc cet exemple-là, que je trouve vertueux, il a été lancé dailleurs par Louis GALLOIS, ce nest pas un hasard si je lai choisi aussi comme commissaire général à lInvestissement auprès de moi, à Matignon, eh bien, cest la bonne méthode, simplement, il faut lélargir à toutes les filières économiques. La France a des capacités, simplement, si on ne décide pas, et ça sera fait le 6, à la fois sur la compétitivité au sens, je dirais, des transferts de technologies, daide à linvestissement, à linnovation, enfin, tout ce qui va faciliter lefficacité et la qualité
PATRICK COHEN
Recherche, innovation
JEAN-MARC AYRAULT
Et en même temps, sur la question du coût du travail, tout sera mis sur la table, et les orientations seront données. Je vous rassure
PATRICK COHEN
Réforme des professions réglementées ?
JEAN-MARC AYRAULT
Mais vous parlez de quoi exactement ?
PATRICK COHEN
Les taxis, les pharmaciens, les notaires
JEAN-MARC AYRAULT
Ecoutez, ce nest pas lavenir de le grand enjeu pour la France
PATRICK COHEN
Non, mais ça fait partie des propositions qui sont sur la table aussi
JEAN-MARC AYRAULT
Non, mais oui, bien sûr, cest, jappelle ça le marronnier, comme vous le savez, en journalisme, vous savez ce que cest quun marronnier, si vous pensez que lavenir de lindustrie de la France dépend du statut des chauffeurs de taxi et des pharmaciens
PATRICK COHEN
Non, non
JEAN-MARC AYRAULT
Excusez-moi, il faudrait mieux que jarrête ce que je fais aujourdhui, moi, je prends les choses au sérieux
PATRICK COHEN
Alors, on va reparler du coût du travail, si vous préférez
JEAN-MARC AYRAULT
Eh bien, on peut en parler, mais on peut parler de tout, et parler de tout, cest pour ça que jai cité lexemple dAIRBUS, vous voyez bien que si on ne prenait pas un exemple concret, on ne saurait pas de quoi on parle, j???ai parlé de lautomobile tout à lheure, eh bien, je vais prendre un exemple pour me faire comprendre, lautomobile, moi, jai fixé à la conférence environnementale un objectif, jai dit : il faut que les industriels de lautomobile construisent des voitures qui vont consommer 2 litres aux 100. Alors tout le monde a dit : 2 litres aux 100, cest impossible, etc. Que répondent les industriels, ils me répondent : oui, vous avez raison, cest un objectif quil faut absolument quon atteigne, cest lexemple de lAIRBUS de tout à lheure, cest la même chose, avec ces matériaux composites. Cest possible. Cest possible parce que, dabord, on utilisera moins dénergie carbonée, on utilisera moins de pétrole, ça coûtera moins cher pour lutilisateur, et donc ça veut dire des voitures plus légères et des moteurs adaptés. Il faut investir ! Ils mont dit : on est daccord, on veut investir, aidez-nous à investir, aidez-nous à innover. Alors, cest le plan que je vais proposer, appliquer concrètement à un exemple, lobjectif de la voiture à 2 litres, les industriels me disent : oui, on est daccord, on est partants ! Mais ça, ça na pas été fait depuis des années. Donc le redressement de notre économie, ce nest pas la fatalité, ce nest pas : il ny a plus dindustries en France, ce nest pas grave, moi, je dis que si, cest grave, et je pense que la France, si elle le veut, elle peut sen donner les moyens. Jai vu que la France était attendue à Singapour et dans les Philippines, il y a quelques jours, et je pense quil faut aussi avoir une certaine fierté de ce quon est capable de faire, et parfois, cest cette fierté manque, et elle est attendue dans le monde entier.
PATRICK COHEN
Juste une précision, Jean-Marc AYRAULT, avant la pause, le rapport GALLOIS
JEAN-MARC AYRAULT
Je vous en ai parlé à linstant
PATRICK COHEN
Vous sera remis le 5 novembre. Vous lavez lu déjà, vous lavez eu ?
JEAN-MARC AYRAULT
Attendez, il me sera remis le 5 novembre, comment je laurais lu avant ?
PATRICK COHEN
Ah ben, parce que Louis GALLOIS a fait la tournée des ministères, et que, on a compris quil avait déposé auprès de vous plusieurs de ses conclusions
JEAN-MARC AYRAULT
Mais Louis GALLOIS Monsieur COHEN, Monsieur COHEN, jai écouté votre radio depuis ce matin, et même Thomas LEGRAND, qui est à mes côtés à vos côtés, qui a dit : oh, là, là, ils vont enterrer le rapport GALLOIS
THOMAS LEGRAND
Jai posé la question
JEAN-MARC AYRAULT
Moi, je ne veux pas enterrer le rapport GALLOIS, et le rapport GALLOIS, cest monsieur Louis GALLOIS, cétait le grand patron dEADS qui a pris sa retraite, et lorsque jai pris mes fonctions de chef de gouvernement, je lai appelé pour lui demander de venir auprès de moi je lai dit tout à lheure comme commissaire général à linvestissement. Et ça, cest une fonction très importante. Tous les investissements davenir, donc ça concerne lindustrie évidemment. Et puis en plus, je lui ai demandé ce rapport. Je lui ai dit : est-ce que vous pouvez me faire un rapport sur quest-ce qui pourrait améliorer la compétitivité et la performance de notre industrie. Je lui ai donné carte blanche, je lui ai donné exprimez-vous, dites ce que vous pensez réellement à partir de votre expérience, je ne lui ai pas dit : censurez-vous parce que ça pourrait gêner le gouvernement, donc il y aura des choses qui seront reprises, beaucoup de choses qui seront reprises, et puis dautres qui ne le seront peut-être pas. Mais en tout cas, je peux vous dire que ça sera une contribution pour moi essentielle, pour moi, cest un des grands patrons français, mais qui en plus a une éthique, cest-à-dire, il a aussi le sens de lintérêt général du pays ; parfois, ça manque.
[08h40]
PATRICK COHEN
Le Premier ministre Jean-Marc AYRAULT est notre invité ce matin. Deux questions sur des réformes de société, comme on dit, avant daller au standard de France Inter. Les étrangers non communautaires pourront-ils élire leur maire en 2014, Jean-Marc AYRAULT ?
JEAN-MARC AYRAULT
Pour cela, il faudrait obtenir une majorité de trois cinquièmes des parlementaires pour réformer la constitution. Vous le savez. On ne peut pas tromper les Français, on ne peut pas dire : Il suffit dune loi puisque la gauche a la majorité ; ce nest pas vrai. Cest une réforme constitutionnelle qui est nécessaire. Cest ce que jai dit il y a déjà quelques semaines. Il faut rechercher dans le Parlement au-delà de la gauche, parce que la gauche na pas la majorité des trois cinquièmes, des alliés pour convaincre que cette réforme est possible. Cest tout ce travail quil reste à faire. Il ne suffit pas que le gouvernement adopte un projet de loi ; il faut trouver cette majorité.
PATRICK COHEN
Là-dessus, une question de Thomas LEGRAND.
THOMAS LEGRAND
Pour avoir les trois cinquièmes, il manque cinquante députés de lopposition.
JEAN-MARC AYRAULT
Cest beaucoup.
THOMAS LEGRAND
Oui, cest beaucoup.
PATRICK COHEN
Députés ou sénateurs.
THOMAS LEGRAND
Oui, ou sénateurs. Beaucoup de députés ou sénateurs UMP prennent comme argument la réciprocité. Est-ce que le gouvernement pourrait, par exemple, proposer un projet qui intègre cette idée de réciprocité ?
JEAN-MARC AYRAULT
Vous savez, moi jai invité les parlementaires, parce que ça cest un travail que les parlementaires doivent faire, des groupes de la majorité qui souhaitent ce texte, de faire ce travail avec leurs collègues de droite et du centre. Daccepter y compris, je lai déjà dit, je le redis ici, des amendements qui pourraient venir des autres groupes.
THOMAS LEGRAND
Donc lidée de réciprocité ne vous rebute pas ?
JEAN-MARC AYRAULT
Mais ça existe dans certains pays déjà, ce nest donc pas un sujet tabou. Simplement, je pense que sur une réforme de cette importance qui fait controverse, et pas seulement la droite, la gauche : il y a beaucoup de Français qui sinterrogent sur lopportunité, il faut les écouter. Si vous voulez en faire un sujet de clivage absolu, je pense que vous ne faites pas oeuvre utile sur une question de cette sensibilité. Donc parlons, mais jinvite les parlementaires qui sont pressés à le faire. Cest sans tarder et puis je pense que ça vaut aussi pour dautres sujets de société.
PATRICK COHEN
Autre question de société justement : le gouvernement est-il oui ou non favorable à la procréation médicale assistée pour les couples de lesbiennes ? Cette disposition pourrait-elle être votée lors du débat qui aura lieu bientôt, en janvier, sur le mariage pour tous ?
JEAN-MARC AYRAULT
Vous avez une drôle de façon de poser votre question.
PATRICK COHEN
Non. C'est une question qui est posée par de nombreux parlementaires, y compris socialistes.
JEAN-MARC AYRAULT
Oui, mais ce nest pas le premier sujet, monsieur COHEN. Le sujet cest est-ce que le gouvernement va présenter un projet de loi qui permettra le mariage pour tous, quel que soit leur sexe, et ladoption. C'est lengagement de François HOLLANDE pendant la campagne présidentielle.
PATRICK COHEN
Oui. Ce sera fait le 7 novembre au conseil des ministres.
JEAN-MARC AYRAULT
Il faut rappeler les choses, parce que si les auditeurs nont pas ce rappel, ils ne vont pas comprendre quel est le sens de votre question.
PATRICK COHEN
Ils nous écoutent chaque matin.
JEAN-MARC AYRAULT
Oui, oui, oui. Ils vous écoutent mais moi, je suis là pour rappeler les choses, parce que plus on les répète, plus elles finissent par être comprises. Le projet de loi sera effectivement adopté par le conseil des ministres le 7 novembre, qui comprendra à la fois le mariage pour les couples de même sexe, donc pour tous, et le droit à adopter. Dans le débat parlementaire, il est possible quil y ait des amendements qui soient présentés pour laide à la PMA, comme on dit ; vous venez de lévoquer à cet instant. Le gouvernement sera attentif évidemment, comme il lest toujours, aux propositions qui viennent des parlementaires. Mais le débat aura lieu au Parlement, il aura lieu au sein même de la majorité, au sein même du groupe socialiste où des avis divergents existent aussi.
PATRICK COHEN
Et quelle sera la position du gouvernement ?
JEAN-MARC AYRAULT
La position du gouvernement, c'est le projet de loi du gouvernement. Après il écoutera les parlementaires. Simplement si vous me demandez mon avis pour bien expliquer le sens de ce que veut le gouvernement, cest que toutes ces questions concernent la parentalité, la famille. Il y a beaucoup de questions, il ny a pas que la PMA. Il y a aussi les questions daccouchement sous X ; il y a les questions du droit des tiers ; il y a les questions des droits des beaux-parents. La famille française évolue dans notre société de façon très, très importante. La position du gouvernement, cest que ces questions devraient être renvoyées à une loi famille qui ne sera pas renvoyée aux calendes grecques mais qui serait abordée avec la totalité des questions, et pas au détour dun texte, mais le débat aura lieu. Je pense que ce qui est très important, cest que le débat ait lieu dans la sérénité.
PATRICK COHEN
Le débat aura donc lieu et le gouvernement pourrait inciter les parlementaires à renvoyer cette discussion.
JEAN-MARC AYRAULT
Cest plutôt mon point de vue. Je vous le dis là, ce matin.
PATRICK COHEN
Ah ! une autre loi !
JEAN-MARC AYRAULT
Ce que je souhaite, cest quon ait un débat qui soit respectueux et serein sur cette question. Parce que cest quand même un vrai changement de société daccepter le mariage pour tous. Pour certains, ça a lair dêtre simple mais vous voyez bien quil y a une controverse, quil y a des points de vue philosophiques et des points de vue religieux qui sont différents. Ils sont respectables alors acceptons le débat. Dans les groupes parlementaires, y compris de la majorité, il y a des sensibilités différentes. Donc le gouvernement prend ses responsabilités mais il les prend sur la base des engagements du président de la République devant les Français.
PATRICK COHEN
On va revenir à des questions économiques avec les auditeurs dInter qui nous appellent. Maurice nous appelle de Seine-et-Marne. Bonjour Maurice.
MAURICE, AUDITEUR DE SEINE-ET-MARNE
Bonjour France Inter, bonjour Monsieur le Premier ministre.
JEAN-MARC AYRAULT
Bonjour monsieur.
MAURICE
Premier ministre et cher camarade. Voilà, cest sur le budget des niches fiscales. Il y a un total de niches fiscales de soixante dix milliards deuros. Cest énorme ! Il y en aurait quatre cent quarante-neuf. On en garderait quatre cent trente-trois, on nenlèverait que seize niches fiscales. Je trouve que c'est trop peu. Est-ce quon ne peut pas faire mieux ? Merci de me répondre et bon boulot à la tête du gouvernement.
JEAN-MARC AYRAULT
Merci beaucoup. Merci beaucoup. Il y a encore des progrès à faire, jen suis parfaitement conscient. Là, nous avons franchi une première étape : cest de limiter à dix mille euros le bénéfice dune niche fiscale. C'est beaucoup. Beaucoup de gens sont bien incapables de pouvoir utiliser cette possibilité. Il y a encore un travail à faire sur dautres niches fiscales. Il y a des niches fiscales qui ont été critiquées ; je pense à la niche fiscale Outre-mer. Je lai dit à plusieurs reprises : cest une disposition plus favorable encore et qui est transitoire. Il faut trouver pour lOutre-mer jen ai encore discuté avec le ministre des Outre-mer Victorin LUREL ces derniers jours il faut trouver dautres réponses pour lOutre-mer. Donner des perspectives de développement et d'auto-développement sur le plan économique. Là, brutalement supprimer cet avantage fiscal qui permet de financer du logement social, nous avons mis la barre assez haut y compris financer aussi des constructions dentreprises, le faire brutalement aurait causé de vrais problèmes. De toutes les sensibilités politiques, les parlementaires nous ont demandé de ne pas y toucher cette année, mais le chantier est ouvert.
PATRICK COHEN
Sur le travail législatif, on est en plein débat budgétaire, vous entendez lopposition, Jean-Marc AYRAULT. Vous lisez aussi les commentaires sur votre façon de gouverner : improvisation, changement de pied, amateurisme. Encore aujourd'hui, la loi Duflot sur le logement social devrait être censurée par le conseil constitutionnel pour non-respect de la procédure parlementaire parce que vous avez voulu aller trop vite. Ça fait désordre, non ?
JEAN-MARC AYRAULT
Je vais vous dire : amateurisme et changement de pied, ce nest pas vrai. Ça, cest lopposition qui le dit.
PATRICK COHEN
Il y a eu des changements de pied.
JEAN-MARC AYRAULT
Ah bon ?
PATRICK COHEN
Oui. La redevance audiovisuelle sur les résidences secondaires par exemple. Il y a eu un arbitrage annoncé par Jérôme CAHUZAC, un contre-arbitrage annoncé par vous-même.
JEAN-MARC AYRAULT
Non mais monsieur COHEN ! monsieur COHEN, il ne faut pas vous précipiter comme cela ! Il ny a pas eu de contre-arbitrage ni dautre chose. Quand quelqu'un prend le risque avant larbitrage dannoncer quelque chose, il prend un risque. Mais larbitrage du Premier ministre, je lai annoncé la semaine dernière. Cétait : pas de redevance audiovisuelle supplémentaire.
PATRICK COHEN
Et dans lintervalle, FRANCE TÉLÉVISIONS a vu valser une centaine de millions deuros qui lui sont nécessaires, et même un peu plus, pour boucler son budget. Quest-ce qui vous a guidé dans cette histoire ?
JEAN-MARC AYRAULT
Monsieur COHEN, monsieur COHEN, tout le monde doit faire un effort pour redresser les comptes publics du pays. Y compris les agences publiques. Il y a eu un rapport il ny a pas très longtemps dont vous vous êtes fait lécho en disant : Oh la la ! cest scandaleux ! LÉtat sert ses budgets mais par contre toutes les agences qui dépendent de lÉtat, eux, augmentent de cinq-six pour cents chaque année Il y a toute une série de gens qui sont intervenus auprès du gouvernement, auprès des parlementaires pour ne rien changer. Tout le monde dit : Il faut maîtriser les comptes publics, réduire les dépenses, le faire dans la justice , mais aussitôt quon commence à toucher à certaines situations : Ah non ! mais il ne faut surtout rien changer ! Moi, je ne suis pas là pour ne rien changer. Je le dis : le redressement des comptes publics, je vous lai dit tout à l'heure, cest une nécessité. Il nécessite des efforts partout, à condition quils soient justes, mais cest le cas. Quatre-vingt-dix pour cents de leffort fiscal est fait par dix pour cents des ménages. Je le dis ici, cest la vérité. Les efforts qui sont demandés aux entreprises, cest essentiellement les grandes entreprises. Les PME sont épargnées parce quon a besoin delles pour recréer de lemploi. Cest ça la politique du gouvernement. Mais baisser la dette, retrouver des marges de manoeuvre, cest se mettre au service de la croissance et se mettre au service de lemploi. Cest se mettre aussi en capacité de financer notamment nos services publics de léducation, et de la santé, et de la recherche. Cest le choix du gouvernement. Quil y ait des résistances, quil y ait des volontés de ne rien changer, je le constate mais ça ne fera pas changer de ligne le gouvernement.
PATRICK COHEN
FRANCE TÉLÉVISIONS doit prendre sa part des efforts. Oui, dans le logement social ?
JEAN-MARC AYRAULT
Mais tout le monde prend sa part des efforts, et les Français les premiers. Ils le comprennent à partir du moment où cest juste et je suis donc là pour lexpliquer.
PATRICK COHEN
Le logement ?
JEAN-MARC AYRAULT
Oui, le logement. Vous savez ce qui sest passé : ce nest ni madame DUFLOT, ni aucun ministre qui ait la responsabilité de lannulation par le conseil constitutionnel. Il y a eu un cafouillage parlementaire, je le regrette. Mais en ce qui concerne la cause de cette annulation, vous savez que le conseil constitutionnel a été saisi sur un problème de forme, de procédure par lUMP. LUMP a obtenu lannulation. Très bien pour lUMP mais ce nest pas bien pour les Français. Vous croyez quils nont pas autre chose à faire ? LUMP pendant toute la bataille parlementaire sur le logement na eu de cesse de combattre ce que nous faisions pour la mise à disposition gratuitement des collectivités locales de terrains de lÉtat pour construire du logement social, na eu de cesse de combattre également les dispositions plus contraignantes pour construire du logement social y compris dans des communes comme Neuilly parce quils nen veulent pas. Ils lont carrément dit. La loi nouvelle va être proposée, dans un mois et demi elle sera votée et sera appliquée, à Neuilly comme ailleurs.
PATRICK COHEN
André nous appelle du Morbihan au standard dInter. Bonjour André.
ANDRE, AUDITEUR DU MORBIHAN
Oui, bonjour Monsieur le Premier ministre, bonjour monsieur COHEN. Lobjectif de tous les gouvernements européens, cest bien évidemment la réduction des déficits. Et pour faire des économies, ne serait-il pas important de différer un certain nombre de projets dinfrastructures qui représentent des centaines de millions, voire des milliards ? Je pense aux lignes à grande vitesse qui ne sont pas urgentes à réaliser, ou bien au projet que je considère inutile chacun son avis comme Notre-Dame-des-Landes étant donné que Nantes a le premier aéroport régional européen et que cela va mettre au chômage des centaines dagriculteurs. Dailleurs, la même chose pour les lignes à grande vitesse.
PATRICK COHEN
Merci André et jajoute : forte mobilisation au standard dInter, et pas seulement au standard, des opposants à laéroport Notre-Dame-des-Landes.
JEAN-MARC AYRAULT
Écoutez, il y a des investissements qui sont indispensables. Cest ce quon appelle les infrastructures. Je pense que la France sest développée ces dernières années parce quelle a su aussi investir dans des lignes à grande vitesse. Alors est-ce quil faut en faire partout ? Sans doute que non. Jai dailleurs demandé une évaluation, dont jaurai les résultats dans quelques jours, sur tous les grands investissements qui ont été envisagés ces dernières années pour vérifier leur utilité. Leur impact sur le développement des territoires. Leur impact sur le développement économique et leur rapport aussi entre la dépense et lefficacité. Jaurai ce rapport. Simplement, sagissant de laéroport de Notre-Dame-des-Landes qui mobilise très peu dargent public puisque cest une concession, ce nest pas un nouvel aéroport : cest le transfert de laéroport de Nantes, qui est au bord des portes de la ville et qui va arriver bientôt à saturation, à quelques kilomètres comme ça se fait dans dautres pays. Il ne sagit pas de mettre tout sur le même plan et de tout mélanger. Je pense que la France a besoin de rénover, si je prends par exemple le réseau de transport ferroviaire, pas seulement de faire de nouvelles lignes de TGV mais aussi de rénover tout son système de lignes secondaires. Là, il faudra investir et le gouvernement fera des propositions prochainement puisque cest le grand chantier de la réforme ferroviaire qui est en train dêtre préparé.
PATRICK COHEN
Question de Philippe LEFÉBURE.
PHILIPPE LEFÉBURE
Une grève commence ce soir à la SNCF, vingt-quatre heures. Les quatre syndicats représentatifs de lentreprise appellent à faire grève. Est-ce que vous dites merci à vos prédécesseurs davoir instauré le service minimum qui va permettre aux usagers dutiliser les trains ? et quelle réforme ferroviaire préparez-vous puisquon attend des annonces dici la fin du mois ?
JEAN-MARC AYRAULT
Oui. Je pense, vous lavez dit, que cette loi sur le service minimum na pas été remise en cause et lenjeu, cest la réforme ferroviaire comme vous venez de le dire. Là, on a un système très lourd, très complexe. Dun côté la SNCF et puis les exploitants ; et de lautre côté RÉSEAU FERRÉ DE FRANCE qui gère le réseau, et cætera, et la dette, et qui porte la dette. Tout ça, ça paralyse. Souvent il y a un renvoi de balle entre les deux structures. Ce que nous voulons, cest une grande politique ferroviaire, je lai évoqué tout à l'heure, qui nest pas seulement de faire des lignes TGV. Cest davoir un réseau performant sur lensemble du territoire. Il y aura des choix à faire. Lorganisation de notre système ferroviaire, sans oublier dailleurs la partie du fret, nécessite une très grande réforme. Cette réforme, elle est en cours de préparation avec notamment le ministre des Transports Frédéric CUVILLIER, avec lequel je mentretiens régulièrement. Nous allons faire très vite des propositions qui feront aussi lobjet de présentations aux partenaires sociaux. Les partenaires sociaux ont des choses à proposer. Là, ils lexpriment par un mouvement mais nous sommes tout à fait prêts à écouter les uns et les autres pour créer les conditions dune grande politique et dune grande ambition ferroviaire en France qui nous manque.
PHILIPPE LEFÉBURE
Vous comprenez linquiétude des cheminots.
JEAN-MARC AYRAULT
Mais les cheminots, comme vous le savez, cest une réorganisation qui est envisagée. Cest normal que les cheminots posent des questions. Ils sont attachés à leur métier. Ils ont une éthique et une fierté de leur service. Cest des gens formidables et quand il y a une crise, vous voyez bien comment ça se passe. On fait appel à eux, ils font face. On peut toujours critiquer la SNCF mais enfin, globalement, la France peut en être fière. Mais il y a des améliorations à apporter donc on ne fera pas contre les cheminots : on fera avec eux. Cest le pacte que lon proposera.
PATRICK COHEN
Question courte, sil-vous-plaît de Bernard GUETTA.
BERNARD GUETTA
Le président de la République ne veut pas ouvrir de chantier institutionnel en Europe avant que la crise de leuro nait été complètement résolue. Mais question : pourquoi la France le président, le Premier ministre, éventuellement ses partis nexposent pas leurs ambitions à long terme sur lUnion européenne ? et donc le cadre dans lequel vous, vous agissez à la tête du gouvernement, et le président à la tête de lÉtat ?
JEAN-MARC AYRAULT
Ce nest pas tout à fait juste. Récemment le président de la République a donné une interview à plusieurs grands journaux européens dont Le Monde. Il a bien distingué les deux temps : le temps du court terme, où là il faut sauver leuro et cest bien parti.
BERNARD GUETTA
Cest clair, mais il na rien dit sur le deuxième temps.
JEAN-MARC AYRAULT
Sur le deuxième temps, il dit quil faut une intégration supplémentaire. Il le dit et il le dit notamment, Bernard GUETTA je vous le rappelle, il dit notamment que la zone euro doit avancer plus vite que le reste de lEurope parce que la zone euro a déjà une monnaie unique. Il faut donc quelle coordonne mieux ses politiques économiques, ce quon a appelé longtemps en France le gouvernement économique. Quon aille vers une harmonie fiscale ; quon aille vers des politiques beaucoup plus intégrées, des projets en commun notamment en matière de politique industrielle.
BERNARD GUETTA
Mais ça signifie une union de type fédéral au sein de lUnion ?
JEAN-MARC AYRAULT
Mais il nest pas besoin de faire une Europe fédérale. LEurope fédérale, ça veut dire que les nations disparaissent et ce nest pas du tout lenjeu de ce débat. Vous savez, lAllemagne a fait des propositions qui apparaissent audacieuses pour un très long terme. Très souvent, on confond les propositions allemandes pour un très long terme. Je serai en Allemagne le 15, je rencontrerai madame MERKEL et jaurai loccasion de discuter de cela avec elle : le très long terme et le court terme. Le court terme, cest de permettre la relance de la croissance en Europe. Ça passe par la stabilisation de la situation de leuro. Ça passe par la mise en place de lunion bancaire de la supervision des banques. Ça passe par la mise en place de lintervention de la BCE pour que les pays qui font des efforts considérables je pense à lItalie, à lEspagne ne soient payés en retour et ne continuent plus à emprunter à cinq ou six pour cents sur les marchés. Ça, cest létape de lurgence. Si on fait ça, on crée de la confiance. On fait redémarrer la croissance et on peut avancer sur létape suivante dans un consensus politique que je souhaite, qui à mes yeux, comme ceux du président de la République, doit avancer plus vite dans la zone euro.
PATRICK COHEN
OBAMA-ROMNEY : les Américains vont choisir dans deux semaines. Et vous, vous préféreriez la réélection dOBAMA, Jean-Marc AYRAULT ?
JEAN-MARC AYRAULT
Si jétais citoyen américain, je voterai sans hésiter OBAMA, même si on attend des États-Unis peut-être sur un certain nombre de sujets de laudace. Je vais vous en citer un. Si OBAMA est réélu, jespère quen attendant de toute façon la France et lEurope prendront leurs responsabilités, cest la question très importante du conflit israélo-palestinien. Il faut résoudre cette question, ça devient insupportable pour ceux qui sont là-bas. Il y a trop dinsécurité pour Israël, on la vu avec lIran, mais il y a aussi trop, je dirais, de souffrances pour le peuple palestinien, donc il faut avancer avec résolution. Cest une question de haute responsabilité des dirigeants du monde.
Source : Service d'Information du Gouvernement, le 24 octobre 2012
Le gouvernement va donc à nouveau venir en aide à PSA PEUGEOT CITROËN en grave difficulté financière. Pourquoi cette garantie de lEtat, quelles contreparties avez-vous obtenues du constructeur automobile ?
JEAN-MARC AYRAULT
Dabord, et pour comprendre de quoi il sagit, la Banque de PSA, cest la banque qui permet de vendre des voitures, qui fait le crédit des voitures, cette banque dispose de fonds propres importants, mais elle naccède plus aux liquidités, pour la raison suivante, cest que la dégradation de la note du groupe industriel PSA fait que cette banque, qui est un outil, je dirais, de commercialisation de lentreprise, eh bien, ne peut plus utiliser largent, ne peut plus aller sur les marchés chercher de largent. Donc ça veut dire que si on ne fait rien, ce nest pas seulement PSA Aulnay qui est en danger, et qui risque de fermer, cest aussi Rennes, mais cest aussi Sochaux, cest tous les sites industriels.
PATRICK COHEN
Lensemble du groupe qui est menacé.
JEAN-MARC AYRAULT
Donc il y a 130.000 salariés, et dans une filière industrielle qui je le rappelle dans lautomobile est très importante, cest 200.000 emplois. Donc il y a une responsabilité très importante du gouvernement de ne pas laisser tomber ce secteur industriel, et particulièrement le groupe PSA, pas à nimporte quel prix, il y a des contreparties, cest évident. Ce que nous demandons au groupe PSA, cest dentrer dans la gouvernance, un changement de gouvernance. Et il y a, je crois, un accord de principe pour que, il y ait un administrateur
PATRICK COHEN
Il y aura un représentant de lEtat ?
JEAN-MARC AYRAULT
Oui, qui sera un administrateur indépendant, désigné par lEtat. Les salariés seront représentés au conseil dadministration, ça, cest très important, ça ne sest jamais fait. Et puis par ailleurs, nous demandons au groupe PSA de ne pas distribuer, pendant que le groupe ne sest pas redressé, de dividendes, de stock-options, dachats dactions, ce qui serait un scandale, et donc de tout concentrer sur le redressement de lentreprise.
PATRICK COHEN
Ça permettra au gouvernement de peser sur la stratégie, sur les décisions du groupe PSA ?
JEAN-MARC AYRAULT
Alors, il y a deux volets dans votre question, il y a tout ce qui concerne lavenir des salariés, et eux-mêmes, parce que, aujourdhui, il y a un plan social qui a été engagé par le groupe PSA, qui concerne à la fois Aulnay et puis Rennes, eh bien, nous demandons que le groupe PSA, monsieur le président, monsieur VARIN, que jai rencontré il y a quelques jours, ne fasse des propositions aux salariés ou à leurs représentants pour améliorer ses propositions. Lobjectif pour nous, cest clair : pas de licenciements secs, pas de personnes sans solutions. Alors, il y a la ré-industrialisation, quil faut accélérer sur Aulnay, donc là, cest facile si on veut sen donner les moyens daller très, très vite, et puis, sur Rennes, il y a le projet dune nouvelle voiture, dune nouvelle gamme, et ça, cest très important. Alors, quest-ce quon va faire en attendant
PATRICK COHEN
Mais cest du donnant/donnant, pardon, Jean-Marc AYRAULT
JEAN-MARC AYRAULT
Et ça lest toujours
PATRICK COHEN
Vous avez dit à PSA : on vous apporte la garantie de lEtat contre
JEAN-MARC AYRAULT
Cest toujours une discussion
PATRICK COHEN
La préservation de plusieurs centaines demplois supplémentaires ?
JEAN-MARC AYRAULT
Le gouvernement, en tout cas, mon gouvernement na pas du tout lintention de donner, de faire des cadeaux comme cela sans engagement, sans contrepartie. Je crois que ce temps-là est terminé. Et parce que pendant longtemps, on a fait beaucoup de cadeaux aux entreprises, et certains sen sont plaint. Les aides aux entreprises sont nécessaires, à condition quelles se traduisent en investissement, quelles se traduisent en emplois. Et le deuxième volet de votre question, cest justement le développement de PSA, linvestissement stratégique, donc il y a une alliance qui est envisagée avec GENERAL MOTORS OPEL
PATRICK COHEN
Oui, ça vous plaît ça ?
JEAN-MARC AYRAULT
A ce stade, elle porte sur la mise en commun des moyens de commandes des pièces détachées, notamment pour faire des économies, parce que les grands groupes industriels qui ont réussi dans lindustrie automobile ont fait ça. Et là, il y a eu du retard de pris. Et puis, le deuxième élément de ce plan, cest la fabrication avec des plateformes de voitures, même si elles sont vendues par OPEL ou elles sont vendues par PSA, parce que ça fait des économies. Cest comme ça quun groupe comme VOLKSWAGEN sen est sorti ; là, il y a eu beaucoup trop de retard de pris. Nous, nous avons des critiques à faire sur la manière dont ce groupe a été géré, maintenant, il sagit de le sauver, préparer lavenir, et ça, cest essentiel pour les salariés, cest essentiel aussi pour la France, parce que lindustrie automobile, cest le fleuron de notre industrie. Et comme lenjeu, cest bien le redressement économique de la France, le redressement de léconomie
PATRICK COHEN
On va en parler
JEAN-MARC AYRAULT
La compétitivité, dont on parle beaucoup, cest-à-dire la performance des entreprises, eh bien, cest on est au coeur des questions.
PATRICK COHEN
Donc on vous a entendu, Jean-Marc AYRAULT, vous demandez à PSA de ne plus distribuer de dividendes tant que lentreprise ne sera pas redressée. Sur les suppressions de postes, qui sont envisagées, il y a un chiffre, vous avez négocié
JEAN-MARC AYRAULT
Jai demandé à monsieur VARIN de faire de nouvelles propositions aux salariés, parce que je pense quil faut respecter aussi le dialogue
PATRICK COHEN
Vous ne vous êtes pas mis daccord sur un chiffre encore ?
JEAN-MARC AYRAULT
Mais ce nest pas à moi de le faire, nous sommes dans un Etat de droit où il y a un comité dentreprise, des représentants des salariés, et un patron, et cest dans ce cadre-là que doit se faire la négociation. Mais en même temps, le gouvernement dit : vous, vous avez des gens qui sont dans la difficulté, il ne faut pas les laisser tomber, donc, on vous aide, mais quest-ce que vous apportez en contrepartie, comment vous revoyez votre plan social, quallez-vous dire aux représentants des personnels ; cest ce que jattends de monsieur VARIN, et il sest engagé à bouger. Et jespère que les résultats iront dans la bonne direction.
PATRICK COHEN
En attendant, la liste des plans sociaux continue de sallonger, le chômage continue de grimper, les chiffres de septembre seront connus ce soir. Jimagine quils ne seront pas bons, Jean-Marc AYRAULT ?
JEAN-MARC AYRAULT
Mais ils ne peuvent pas être bons, Monsieur COHEN, ils ne peuvent pas être bons, ça fait seize mois consécutifs, ça va faire dix-sept mois maintenant, que les chiffres du chômage augmentent, et en particulier, chez les jeunes de moins de 25 ans et chez les seniors. Ce nest dailleurs pas un hasard si le gouvernement a agi tout de suite concernant ces deux catégories, dabord, les contrats davenir, on va en signer les premiers dans quelques jours, je réunis à Matignon dailleurs tous ceux qui veulent sengager pour les emplois davenir en direction des jeunes, ça, cest des mesures durgence, ça compte. Et puis, deuxième élément, concernant les contrats de génération, cest-à-dire, on maintient un senior dans lemploi, on embauche un jeune en CDI, pour transmettre aussi de lexpérience. La négociation entre les partenaires sociaux, beaucoup critiquent cette méthode, elle marche, elle marche non seulement pour les dépassements dhonoraires, mais elle marche aussi pour lutter contre le chômage. Maintenant, ça ne suffit pas, cest tout le chantier que nous avons lancé de redressement, il y a une grande cohérence dans la politique du gouvernement, hier soir, le Parlement, la majorité parlementaire, a adopté la Loi de Finances sur la partie recettes, maîtrise de nos déficits, maîtrise de notre dette, réduction de la dépense, un effort qui est demandé aux ménages les plus aisés, un effort qui est demandé aux grandes entreprises, pour préserver les PME, eh bien, cette politique-là, qui a pour but de réduire la dette, elle a aussi pour objectif de retrouver des marges de manoeuvre, parce que quand le premier budget de lEtat, cest le remboursement des intérêts de la dette, vous ne mettez pas dargent dans linvestissement, vous ne mettez pas dargent dans la recherche, vous ne mettez pas dargent dans la formation, et lenjeu, cest le redressement économique du pays, cest-à-dire la lutte contre le chômage, la lutte aussi pour les créations demplois. Donc
PATRICK COHEN
Mais elle marche pour qui, Jean-Marc AYRAULT, pour les entreprises ou pour les ménages, cest deux caps différents et deux doctrines différentes et cest là-dessus quil y a débat, le gouvernement se déchire à nouveau sur ce cap économique à suivre, sur la compétitivité des entreprises et le coût du travail
JEAN-MARC AYRAULT
Oui, mais est-ce que je peux vous corriger quand même sur un point
PATRICK COHEN
Question simple : quallez-vous oui sur ?
JEAN-MARC AYRAULT
Parce que vous dites « le gouvernement se déchire ».
PATRICK COHEN
Ah ben oui !
JEAN-MARC AYRAULT
Non, le gouvernement ne se déchire pas
PATRICK COHEN
Ah ben
JEAN-MARC AYRAULT
Le gouvernement travaille
PATRICK COHEN
Les divergences sétalent dans toute la presse depuis plusieurs jours, Pierre MOSCOVICI voudrait diminuer les charges sur les bas salaires, Michel SAPIN pense quil faut plutôt cibler les salaires intermédiaires, comme Arnaud MONTEBOURG, qui voudrait conditionner lallègement de charges à de linvestissement, Marisol TOURAINE ne veut pas de transfert du tout, je peux continuer si vous voulez
JEAN-MARC AYRAULT
Bien, vous pouvez continuer le réquisitoire bien orienté
PATRICK COHEN
Non, ce nest pas un réquisitoire, cest simplement ce que jai lu dans la presse et dans les médias ces derniers jours
JEAN-MARC AYRAULT
Je le récuse, je le récuse. Je le récuse parce que le gouvernement travaille sérieusement, parce que si vous avez la solution sur comment améliorer la compétitivité de notre industrie, et de façon non simpliste, vous me la donnez, mais vous serez bien incapable de le faire. Donc le gouvernement se réunit, et je réunis les ministres régulièrement depuis plusieurs semaines, pour apporter les réponses au redressement de notre industrie. La compétitivité, la performance, cest-à-dire, comment on va retrouver des marges, parce que vous savez ce qui sest passé depuis dix ans, la droite a été au pouvoir pendant dix ans, 750.000 emplois dans lindustrie perdus ! Pendant cinq ans, parce que nous, on nous dit : vous ne faites pas assez vite, pendant cinq ans, le gouvernement précédent, concernant la compétitivité des entreprises, la capacité à être performant au niveau de notre industrie, il na rien fait du tout. Et on dit : oui, mais faites pourquoi vous ne faites pas comme SCHRÖDER en Allemagne. SCHRÖDER, pendant quatre ans, il na rien fait, eh bien, moi, je vous le dis, le 5, je recevrai le rapport de Louis GALLOIS, et ça ne sera pas un rapport enterré, il va être utile, ça sera une contribution supplémentaire au travail que les membres du gouvernement font, ils discutent pour trouver la bonne réponse. Et le 6, jannoncerai les grandes orientations pour lancer la compétitivité et la performance économique de notre pays.
PATRICK COHEN
Y aura-t-il oui ou non des transferts de cotisations ?
JEAN-MARC AYRAULT
Ah mais, tout est sur la table
PATRICK COHEN
Ah oui
JEAN-MARC AYRAULT
Sur la question vous voyez, tout de suite, vous revenez à une seule question, cest toujours la même question
PATRICK COHEN
Ben oui !
JEAN-MARC AYRAULT
Vous dites : la compétitivité, la performance des entreprises, pour vous, cest le coût du travail
PATRICK COHEN
Oui ! Jai entendu François HOLLANDE
JEAN-MARC AYRAULT
Oui, pour vous
PATRICK COHEN
Le 9 septembre, cétait à TF1, sur le plateau de TF1
JEAN-MARC AYRAULT
Mais pour moi
PATRICK COHEN
Lemploi sera favorisé dès lors quembaucher coûtera moins cher pour les entreprises.
JEAN-MARC AYRAULT
Daccord, mais ce nest pas la seule solution ce nest pas la seule question
PATRICK COHEN
Non, mais cest une des questions
JEAN-MARC AYRAULT
Je vous demande dadmettre que cest une question qui doit être qui devrait embrasser la totalité des problèmes, jétais hier à Toulouse, quest-ce que jai vu à Toulouse, pour le lancement de lA350, là, il est à peine commencé quil y a déjà 550 commandes, quest-ce qui se passe dans ce secteur industriel, qui, pour moi, est une référence, cest un grand groupe qui sappuie sur des PME, qui investit, qui innove, et qui prépare la montée en gamme, comme on dit, cest-à-dire en qualité de ses produits. Et cet avion, lA350, va être un avion qui va moins consommer dénergie, parce que, dabord, il y a un moteur qui est adapté, et puis, ensuite, il utilise des matériaux composites qui notamment sont fabriqués et conçus sur un autre site, qui est celui de Nantes, où on associe entreprises, PME, recherche publique et privée, et on trouve de nouvelles réponses technologiques, de nouveaux produits de qualité. Si ça navait pas été fait, eh bien, AIRBUS ne vendrait pas davions, ne vendrait plus davions, et sans doute aurait disparu. Et donc cet exemple-là, que je trouve vertueux, il a été lancé dailleurs par Louis GALLOIS, ce nest pas un hasard si je lai choisi aussi comme commissaire général à lInvestissement auprès de moi, à Matignon, eh bien, cest la bonne méthode, simplement, il faut lélargir à toutes les filières économiques. La France a des capacités, simplement, si on ne décide pas, et ça sera fait le 6, à la fois sur la compétitivité au sens, je dirais, des transferts de technologies, daide à linvestissement, à linnovation, enfin, tout ce qui va faciliter lefficacité et la qualité
PATRICK COHEN
Recherche, innovation
JEAN-MARC AYRAULT
Et en même temps, sur la question du coût du travail, tout sera mis sur la table, et les orientations seront données. Je vous rassure
PATRICK COHEN
Réforme des professions réglementées ?
JEAN-MARC AYRAULT
Mais vous parlez de quoi exactement ?
PATRICK COHEN
Les taxis, les pharmaciens, les notaires
JEAN-MARC AYRAULT
Ecoutez, ce nest pas lavenir de le grand enjeu pour la France
PATRICK COHEN
Non, mais ça fait partie des propositions qui sont sur la table aussi
JEAN-MARC AYRAULT
Non, mais oui, bien sûr, cest, jappelle ça le marronnier, comme vous le savez, en journalisme, vous savez ce que cest quun marronnier, si vous pensez que lavenir de lindustrie de la France dépend du statut des chauffeurs de taxi et des pharmaciens
PATRICK COHEN
Non, non
JEAN-MARC AYRAULT
Excusez-moi, il faudrait mieux que jarrête ce que je fais aujourdhui, moi, je prends les choses au sérieux
PATRICK COHEN
Alors, on va reparler du coût du travail, si vous préférez
JEAN-MARC AYRAULT
Eh bien, on peut en parler, mais on peut parler de tout, et parler de tout, cest pour ça que jai cité lexemple dAIRBUS, vous voyez bien que si on ne prenait pas un exemple concret, on ne saurait pas de quoi on parle, j???ai parlé de lautomobile tout à lheure, eh bien, je vais prendre un exemple pour me faire comprendre, lautomobile, moi, jai fixé à la conférence environnementale un objectif, jai dit : il faut que les industriels de lautomobile construisent des voitures qui vont consommer 2 litres aux 100. Alors tout le monde a dit : 2 litres aux 100, cest impossible, etc. Que répondent les industriels, ils me répondent : oui, vous avez raison, cest un objectif quil faut absolument quon atteigne, cest lexemple de lAIRBUS de tout à lheure, cest la même chose, avec ces matériaux composites. Cest possible. Cest possible parce que, dabord, on utilisera moins dénergie carbonée, on utilisera moins de pétrole, ça coûtera moins cher pour lutilisateur, et donc ça veut dire des voitures plus légères et des moteurs adaptés. Il faut investir ! Ils mont dit : on est daccord, on veut investir, aidez-nous à investir, aidez-nous à innover. Alors, cest le plan que je vais proposer, appliquer concrètement à un exemple, lobjectif de la voiture à 2 litres, les industriels me disent : oui, on est daccord, on est partants ! Mais ça, ça na pas été fait depuis des années. Donc le redressement de notre économie, ce nest pas la fatalité, ce nest pas : il ny a plus dindustries en France, ce nest pas grave, moi, je dis que si, cest grave, et je pense que la France, si elle le veut, elle peut sen donner les moyens. Jai vu que la France était attendue à Singapour et dans les Philippines, il y a quelques jours, et je pense quil faut aussi avoir une certaine fierté de ce quon est capable de faire, et parfois, cest cette fierté manque, et elle est attendue dans le monde entier.
PATRICK COHEN
Juste une précision, Jean-Marc AYRAULT, avant la pause, le rapport GALLOIS
JEAN-MARC AYRAULT
Je vous en ai parlé à linstant
PATRICK COHEN
Vous sera remis le 5 novembre. Vous lavez lu déjà, vous lavez eu ?
JEAN-MARC AYRAULT
Attendez, il me sera remis le 5 novembre, comment je laurais lu avant ?
PATRICK COHEN
Ah ben, parce que Louis GALLOIS a fait la tournée des ministères, et que, on a compris quil avait déposé auprès de vous plusieurs de ses conclusions
JEAN-MARC AYRAULT
Mais Louis GALLOIS Monsieur COHEN, Monsieur COHEN, jai écouté votre radio depuis ce matin, et même Thomas LEGRAND, qui est à mes côtés à vos côtés, qui a dit : oh, là, là, ils vont enterrer le rapport GALLOIS
THOMAS LEGRAND
Jai posé la question
JEAN-MARC AYRAULT
Moi, je ne veux pas enterrer le rapport GALLOIS, et le rapport GALLOIS, cest monsieur Louis GALLOIS, cétait le grand patron dEADS qui a pris sa retraite, et lorsque jai pris mes fonctions de chef de gouvernement, je lai appelé pour lui demander de venir auprès de moi je lai dit tout à lheure comme commissaire général à linvestissement. Et ça, cest une fonction très importante. Tous les investissements davenir, donc ça concerne lindustrie évidemment. Et puis en plus, je lui ai demandé ce rapport. Je lui ai dit : est-ce que vous pouvez me faire un rapport sur quest-ce qui pourrait améliorer la compétitivité et la performance de notre industrie. Je lui ai donné carte blanche, je lui ai donné exprimez-vous, dites ce que vous pensez réellement à partir de votre expérience, je ne lui ai pas dit : censurez-vous parce que ça pourrait gêner le gouvernement, donc il y aura des choses qui seront reprises, beaucoup de choses qui seront reprises, et puis dautres qui ne le seront peut-être pas. Mais en tout cas, je peux vous dire que ça sera une contribution pour moi essentielle, pour moi, cest un des grands patrons français, mais qui en plus a une éthique, cest-à-dire, il a aussi le sens de lintérêt général du pays ; parfois, ça manque.
[08h40]
PATRICK COHEN
Le Premier ministre Jean-Marc AYRAULT est notre invité ce matin. Deux questions sur des réformes de société, comme on dit, avant daller au standard de France Inter. Les étrangers non communautaires pourront-ils élire leur maire en 2014, Jean-Marc AYRAULT ?
JEAN-MARC AYRAULT
Pour cela, il faudrait obtenir une majorité de trois cinquièmes des parlementaires pour réformer la constitution. Vous le savez. On ne peut pas tromper les Français, on ne peut pas dire : Il suffit dune loi puisque la gauche a la majorité ; ce nest pas vrai. Cest une réforme constitutionnelle qui est nécessaire. Cest ce que jai dit il y a déjà quelques semaines. Il faut rechercher dans le Parlement au-delà de la gauche, parce que la gauche na pas la majorité des trois cinquièmes, des alliés pour convaincre que cette réforme est possible. Cest tout ce travail quil reste à faire. Il ne suffit pas que le gouvernement adopte un projet de loi ; il faut trouver cette majorité.
PATRICK COHEN
Là-dessus, une question de Thomas LEGRAND.
THOMAS LEGRAND
Pour avoir les trois cinquièmes, il manque cinquante députés de lopposition.
JEAN-MARC AYRAULT
Cest beaucoup.
THOMAS LEGRAND
Oui, cest beaucoup.
PATRICK COHEN
Députés ou sénateurs.
THOMAS LEGRAND
Oui, ou sénateurs. Beaucoup de députés ou sénateurs UMP prennent comme argument la réciprocité. Est-ce que le gouvernement pourrait, par exemple, proposer un projet qui intègre cette idée de réciprocité ?
JEAN-MARC AYRAULT
Vous savez, moi jai invité les parlementaires, parce que ça cest un travail que les parlementaires doivent faire, des groupes de la majorité qui souhaitent ce texte, de faire ce travail avec leurs collègues de droite et du centre. Daccepter y compris, je lai déjà dit, je le redis ici, des amendements qui pourraient venir des autres groupes.
THOMAS LEGRAND
Donc lidée de réciprocité ne vous rebute pas ?
JEAN-MARC AYRAULT
Mais ça existe dans certains pays déjà, ce nest donc pas un sujet tabou. Simplement, je pense que sur une réforme de cette importance qui fait controverse, et pas seulement la droite, la gauche : il y a beaucoup de Français qui sinterrogent sur lopportunité, il faut les écouter. Si vous voulez en faire un sujet de clivage absolu, je pense que vous ne faites pas oeuvre utile sur une question de cette sensibilité. Donc parlons, mais jinvite les parlementaires qui sont pressés à le faire. Cest sans tarder et puis je pense que ça vaut aussi pour dautres sujets de société.
PATRICK COHEN
Autre question de société justement : le gouvernement est-il oui ou non favorable à la procréation médicale assistée pour les couples de lesbiennes ? Cette disposition pourrait-elle être votée lors du débat qui aura lieu bientôt, en janvier, sur le mariage pour tous ?
JEAN-MARC AYRAULT
Vous avez une drôle de façon de poser votre question.
PATRICK COHEN
Non. C'est une question qui est posée par de nombreux parlementaires, y compris socialistes.
JEAN-MARC AYRAULT
Oui, mais ce nest pas le premier sujet, monsieur COHEN. Le sujet cest est-ce que le gouvernement va présenter un projet de loi qui permettra le mariage pour tous, quel que soit leur sexe, et ladoption. C'est lengagement de François HOLLANDE pendant la campagne présidentielle.
PATRICK COHEN
Oui. Ce sera fait le 7 novembre au conseil des ministres.
JEAN-MARC AYRAULT
Il faut rappeler les choses, parce que si les auditeurs nont pas ce rappel, ils ne vont pas comprendre quel est le sens de votre question.
PATRICK COHEN
Ils nous écoutent chaque matin.
JEAN-MARC AYRAULT
Oui, oui, oui. Ils vous écoutent mais moi, je suis là pour rappeler les choses, parce que plus on les répète, plus elles finissent par être comprises. Le projet de loi sera effectivement adopté par le conseil des ministres le 7 novembre, qui comprendra à la fois le mariage pour les couples de même sexe, donc pour tous, et le droit à adopter. Dans le débat parlementaire, il est possible quil y ait des amendements qui soient présentés pour laide à la PMA, comme on dit ; vous venez de lévoquer à cet instant. Le gouvernement sera attentif évidemment, comme il lest toujours, aux propositions qui viennent des parlementaires. Mais le débat aura lieu au Parlement, il aura lieu au sein même de la majorité, au sein même du groupe socialiste où des avis divergents existent aussi.
PATRICK COHEN
Et quelle sera la position du gouvernement ?
JEAN-MARC AYRAULT
La position du gouvernement, c'est le projet de loi du gouvernement. Après il écoutera les parlementaires. Simplement si vous me demandez mon avis pour bien expliquer le sens de ce que veut le gouvernement, cest que toutes ces questions concernent la parentalité, la famille. Il y a beaucoup de questions, il ny a pas que la PMA. Il y a aussi les questions daccouchement sous X ; il y a les questions du droit des tiers ; il y a les questions des droits des beaux-parents. La famille française évolue dans notre société de façon très, très importante. La position du gouvernement, cest que ces questions devraient être renvoyées à une loi famille qui ne sera pas renvoyée aux calendes grecques mais qui serait abordée avec la totalité des questions, et pas au détour dun texte, mais le débat aura lieu. Je pense que ce qui est très important, cest que le débat ait lieu dans la sérénité.
PATRICK COHEN
Le débat aura donc lieu et le gouvernement pourrait inciter les parlementaires à renvoyer cette discussion.
JEAN-MARC AYRAULT
Cest plutôt mon point de vue. Je vous le dis là, ce matin.
PATRICK COHEN
Ah ! une autre loi !
JEAN-MARC AYRAULT
Ce que je souhaite, cest quon ait un débat qui soit respectueux et serein sur cette question. Parce que cest quand même un vrai changement de société daccepter le mariage pour tous. Pour certains, ça a lair dêtre simple mais vous voyez bien quil y a une controverse, quil y a des points de vue philosophiques et des points de vue religieux qui sont différents. Ils sont respectables alors acceptons le débat. Dans les groupes parlementaires, y compris de la majorité, il y a des sensibilités différentes. Donc le gouvernement prend ses responsabilités mais il les prend sur la base des engagements du président de la République devant les Français.
PATRICK COHEN
On va revenir à des questions économiques avec les auditeurs dInter qui nous appellent. Maurice nous appelle de Seine-et-Marne. Bonjour Maurice.
MAURICE, AUDITEUR DE SEINE-ET-MARNE
Bonjour France Inter, bonjour Monsieur le Premier ministre.
JEAN-MARC AYRAULT
Bonjour monsieur.
MAURICE
Premier ministre et cher camarade. Voilà, cest sur le budget des niches fiscales. Il y a un total de niches fiscales de soixante dix milliards deuros. Cest énorme ! Il y en aurait quatre cent quarante-neuf. On en garderait quatre cent trente-trois, on nenlèverait que seize niches fiscales. Je trouve que c'est trop peu. Est-ce quon ne peut pas faire mieux ? Merci de me répondre et bon boulot à la tête du gouvernement.
JEAN-MARC AYRAULT
Merci beaucoup. Merci beaucoup. Il y a encore des progrès à faire, jen suis parfaitement conscient. Là, nous avons franchi une première étape : cest de limiter à dix mille euros le bénéfice dune niche fiscale. C'est beaucoup. Beaucoup de gens sont bien incapables de pouvoir utiliser cette possibilité. Il y a encore un travail à faire sur dautres niches fiscales. Il y a des niches fiscales qui ont été critiquées ; je pense à la niche fiscale Outre-mer. Je lai dit à plusieurs reprises : cest une disposition plus favorable encore et qui est transitoire. Il faut trouver pour lOutre-mer jen ai encore discuté avec le ministre des Outre-mer Victorin LUREL ces derniers jours il faut trouver dautres réponses pour lOutre-mer. Donner des perspectives de développement et d'auto-développement sur le plan économique. Là, brutalement supprimer cet avantage fiscal qui permet de financer du logement social, nous avons mis la barre assez haut y compris financer aussi des constructions dentreprises, le faire brutalement aurait causé de vrais problèmes. De toutes les sensibilités politiques, les parlementaires nous ont demandé de ne pas y toucher cette année, mais le chantier est ouvert.
PATRICK COHEN
Sur le travail législatif, on est en plein débat budgétaire, vous entendez lopposition, Jean-Marc AYRAULT. Vous lisez aussi les commentaires sur votre façon de gouverner : improvisation, changement de pied, amateurisme. Encore aujourd'hui, la loi Duflot sur le logement social devrait être censurée par le conseil constitutionnel pour non-respect de la procédure parlementaire parce que vous avez voulu aller trop vite. Ça fait désordre, non ?
JEAN-MARC AYRAULT
Je vais vous dire : amateurisme et changement de pied, ce nest pas vrai. Ça, cest lopposition qui le dit.
PATRICK COHEN
Il y a eu des changements de pied.
JEAN-MARC AYRAULT
Ah bon ?
PATRICK COHEN
Oui. La redevance audiovisuelle sur les résidences secondaires par exemple. Il y a eu un arbitrage annoncé par Jérôme CAHUZAC, un contre-arbitrage annoncé par vous-même.
JEAN-MARC AYRAULT
Non mais monsieur COHEN ! monsieur COHEN, il ne faut pas vous précipiter comme cela ! Il ny a pas eu de contre-arbitrage ni dautre chose. Quand quelqu'un prend le risque avant larbitrage dannoncer quelque chose, il prend un risque. Mais larbitrage du Premier ministre, je lai annoncé la semaine dernière. Cétait : pas de redevance audiovisuelle supplémentaire.
PATRICK COHEN
Et dans lintervalle, FRANCE TÉLÉVISIONS a vu valser une centaine de millions deuros qui lui sont nécessaires, et même un peu plus, pour boucler son budget. Quest-ce qui vous a guidé dans cette histoire ?
JEAN-MARC AYRAULT
Monsieur COHEN, monsieur COHEN, tout le monde doit faire un effort pour redresser les comptes publics du pays. Y compris les agences publiques. Il y a eu un rapport il ny a pas très longtemps dont vous vous êtes fait lécho en disant : Oh la la ! cest scandaleux ! LÉtat sert ses budgets mais par contre toutes les agences qui dépendent de lÉtat, eux, augmentent de cinq-six pour cents chaque année Il y a toute une série de gens qui sont intervenus auprès du gouvernement, auprès des parlementaires pour ne rien changer. Tout le monde dit : Il faut maîtriser les comptes publics, réduire les dépenses, le faire dans la justice , mais aussitôt quon commence à toucher à certaines situations : Ah non ! mais il ne faut surtout rien changer ! Moi, je ne suis pas là pour ne rien changer. Je le dis : le redressement des comptes publics, je vous lai dit tout à l'heure, cest une nécessité. Il nécessite des efforts partout, à condition quils soient justes, mais cest le cas. Quatre-vingt-dix pour cents de leffort fiscal est fait par dix pour cents des ménages. Je le dis ici, cest la vérité. Les efforts qui sont demandés aux entreprises, cest essentiellement les grandes entreprises. Les PME sont épargnées parce quon a besoin delles pour recréer de lemploi. Cest ça la politique du gouvernement. Mais baisser la dette, retrouver des marges de manoeuvre, cest se mettre au service de la croissance et se mettre au service de lemploi. Cest se mettre aussi en capacité de financer notamment nos services publics de léducation, et de la santé, et de la recherche. Cest le choix du gouvernement. Quil y ait des résistances, quil y ait des volontés de ne rien changer, je le constate mais ça ne fera pas changer de ligne le gouvernement.
PATRICK COHEN
FRANCE TÉLÉVISIONS doit prendre sa part des efforts. Oui, dans le logement social ?
JEAN-MARC AYRAULT
Mais tout le monde prend sa part des efforts, et les Français les premiers. Ils le comprennent à partir du moment où cest juste et je suis donc là pour lexpliquer.
PATRICK COHEN
Le logement ?
JEAN-MARC AYRAULT
Oui, le logement. Vous savez ce qui sest passé : ce nest ni madame DUFLOT, ni aucun ministre qui ait la responsabilité de lannulation par le conseil constitutionnel. Il y a eu un cafouillage parlementaire, je le regrette. Mais en ce qui concerne la cause de cette annulation, vous savez que le conseil constitutionnel a été saisi sur un problème de forme, de procédure par lUMP. LUMP a obtenu lannulation. Très bien pour lUMP mais ce nest pas bien pour les Français. Vous croyez quils nont pas autre chose à faire ? LUMP pendant toute la bataille parlementaire sur le logement na eu de cesse de combattre ce que nous faisions pour la mise à disposition gratuitement des collectivités locales de terrains de lÉtat pour construire du logement social, na eu de cesse de combattre également les dispositions plus contraignantes pour construire du logement social y compris dans des communes comme Neuilly parce quils nen veulent pas. Ils lont carrément dit. La loi nouvelle va être proposée, dans un mois et demi elle sera votée et sera appliquée, à Neuilly comme ailleurs.
PATRICK COHEN
André nous appelle du Morbihan au standard dInter. Bonjour André.
ANDRE, AUDITEUR DU MORBIHAN
Oui, bonjour Monsieur le Premier ministre, bonjour monsieur COHEN. Lobjectif de tous les gouvernements européens, cest bien évidemment la réduction des déficits. Et pour faire des économies, ne serait-il pas important de différer un certain nombre de projets dinfrastructures qui représentent des centaines de millions, voire des milliards ? Je pense aux lignes à grande vitesse qui ne sont pas urgentes à réaliser, ou bien au projet que je considère inutile chacun son avis comme Notre-Dame-des-Landes étant donné que Nantes a le premier aéroport régional européen et que cela va mettre au chômage des centaines dagriculteurs. Dailleurs, la même chose pour les lignes à grande vitesse.
PATRICK COHEN
Merci André et jajoute : forte mobilisation au standard dInter, et pas seulement au standard, des opposants à laéroport Notre-Dame-des-Landes.
JEAN-MARC AYRAULT
Écoutez, il y a des investissements qui sont indispensables. Cest ce quon appelle les infrastructures. Je pense que la France sest développée ces dernières années parce quelle a su aussi investir dans des lignes à grande vitesse. Alors est-ce quil faut en faire partout ? Sans doute que non. Jai dailleurs demandé une évaluation, dont jaurai les résultats dans quelques jours, sur tous les grands investissements qui ont été envisagés ces dernières années pour vérifier leur utilité. Leur impact sur le développement des territoires. Leur impact sur le développement économique et leur rapport aussi entre la dépense et lefficacité. Jaurai ce rapport. Simplement, sagissant de laéroport de Notre-Dame-des-Landes qui mobilise très peu dargent public puisque cest une concession, ce nest pas un nouvel aéroport : cest le transfert de laéroport de Nantes, qui est au bord des portes de la ville et qui va arriver bientôt à saturation, à quelques kilomètres comme ça se fait dans dautres pays. Il ne sagit pas de mettre tout sur le même plan et de tout mélanger. Je pense que la France a besoin de rénover, si je prends par exemple le réseau de transport ferroviaire, pas seulement de faire de nouvelles lignes de TGV mais aussi de rénover tout son système de lignes secondaires. Là, il faudra investir et le gouvernement fera des propositions prochainement puisque cest le grand chantier de la réforme ferroviaire qui est en train dêtre préparé.
PATRICK COHEN
Question de Philippe LEFÉBURE.
PHILIPPE LEFÉBURE
Une grève commence ce soir à la SNCF, vingt-quatre heures. Les quatre syndicats représentatifs de lentreprise appellent à faire grève. Est-ce que vous dites merci à vos prédécesseurs davoir instauré le service minimum qui va permettre aux usagers dutiliser les trains ? et quelle réforme ferroviaire préparez-vous puisquon attend des annonces dici la fin du mois ?
JEAN-MARC AYRAULT
Oui. Je pense, vous lavez dit, que cette loi sur le service minimum na pas été remise en cause et lenjeu, cest la réforme ferroviaire comme vous venez de le dire. Là, on a un système très lourd, très complexe. Dun côté la SNCF et puis les exploitants ; et de lautre côté RÉSEAU FERRÉ DE FRANCE qui gère le réseau, et cætera, et la dette, et qui porte la dette. Tout ça, ça paralyse. Souvent il y a un renvoi de balle entre les deux structures. Ce que nous voulons, cest une grande politique ferroviaire, je lai évoqué tout à l'heure, qui nest pas seulement de faire des lignes TGV. Cest davoir un réseau performant sur lensemble du territoire. Il y aura des choix à faire. Lorganisation de notre système ferroviaire, sans oublier dailleurs la partie du fret, nécessite une très grande réforme. Cette réforme, elle est en cours de préparation avec notamment le ministre des Transports Frédéric CUVILLIER, avec lequel je mentretiens régulièrement. Nous allons faire très vite des propositions qui feront aussi lobjet de présentations aux partenaires sociaux. Les partenaires sociaux ont des choses à proposer. Là, ils lexpriment par un mouvement mais nous sommes tout à fait prêts à écouter les uns et les autres pour créer les conditions dune grande politique et dune grande ambition ferroviaire en France qui nous manque.
PHILIPPE LEFÉBURE
Vous comprenez linquiétude des cheminots.
JEAN-MARC AYRAULT
Mais les cheminots, comme vous le savez, cest une réorganisation qui est envisagée. Cest normal que les cheminots posent des questions. Ils sont attachés à leur métier. Ils ont une éthique et une fierté de leur service. Cest des gens formidables et quand il y a une crise, vous voyez bien comment ça se passe. On fait appel à eux, ils font face. On peut toujours critiquer la SNCF mais enfin, globalement, la France peut en être fière. Mais il y a des améliorations à apporter donc on ne fera pas contre les cheminots : on fera avec eux. Cest le pacte que lon proposera.
PATRICK COHEN
Question courte, sil-vous-plaît de Bernard GUETTA.
BERNARD GUETTA
Le président de la République ne veut pas ouvrir de chantier institutionnel en Europe avant que la crise de leuro nait été complètement résolue. Mais question : pourquoi la France le président, le Premier ministre, éventuellement ses partis nexposent pas leurs ambitions à long terme sur lUnion européenne ? et donc le cadre dans lequel vous, vous agissez à la tête du gouvernement, et le président à la tête de lÉtat ?
JEAN-MARC AYRAULT
Ce nest pas tout à fait juste. Récemment le président de la République a donné une interview à plusieurs grands journaux européens dont Le Monde. Il a bien distingué les deux temps : le temps du court terme, où là il faut sauver leuro et cest bien parti.
BERNARD GUETTA
Cest clair, mais il na rien dit sur le deuxième temps.
JEAN-MARC AYRAULT
Sur le deuxième temps, il dit quil faut une intégration supplémentaire. Il le dit et il le dit notamment, Bernard GUETTA je vous le rappelle, il dit notamment que la zone euro doit avancer plus vite que le reste de lEurope parce que la zone euro a déjà une monnaie unique. Il faut donc quelle coordonne mieux ses politiques économiques, ce quon a appelé longtemps en France le gouvernement économique. Quon aille vers une harmonie fiscale ; quon aille vers des politiques beaucoup plus intégrées, des projets en commun notamment en matière de politique industrielle.
BERNARD GUETTA
Mais ça signifie une union de type fédéral au sein de lUnion ?
JEAN-MARC AYRAULT
Mais il nest pas besoin de faire une Europe fédérale. LEurope fédérale, ça veut dire que les nations disparaissent et ce nest pas du tout lenjeu de ce débat. Vous savez, lAllemagne a fait des propositions qui apparaissent audacieuses pour un très long terme. Très souvent, on confond les propositions allemandes pour un très long terme. Je serai en Allemagne le 15, je rencontrerai madame MERKEL et jaurai loccasion de discuter de cela avec elle : le très long terme et le court terme. Le court terme, cest de permettre la relance de la croissance en Europe. Ça passe par la stabilisation de la situation de leuro. Ça passe par la mise en place de lunion bancaire de la supervision des banques. Ça passe par la mise en place de lintervention de la BCE pour que les pays qui font des efforts considérables je pense à lItalie, à lEspagne ne soient payés en retour et ne continuent plus à emprunter à cinq ou six pour cents sur les marchés. Ça, cest létape de lurgence. Si on fait ça, on crée de la confiance. On fait redémarrer la croissance et on peut avancer sur létape suivante dans un consensus politique que je souhaite, qui à mes yeux, comme ceux du président de la République, doit avancer plus vite dans la zone euro.
PATRICK COHEN
OBAMA-ROMNEY : les Américains vont choisir dans deux semaines. Et vous, vous préféreriez la réélection dOBAMA, Jean-Marc AYRAULT ?
JEAN-MARC AYRAULT
Si jétais citoyen américain, je voterai sans hésiter OBAMA, même si on attend des États-Unis peut-être sur un certain nombre de sujets de laudace. Je vais vous en citer un. Si OBAMA est réélu, jespère quen attendant de toute façon la France et lEurope prendront leurs responsabilités, cest la question très importante du conflit israélo-palestinien. Il faut résoudre cette question, ça devient insupportable pour ceux qui sont là-bas. Il y a trop dinsécurité pour Israël, on la vu avec lIran, mais il y a aussi trop, je dirais, de souffrances pour le peuple palestinien, donc il faut avancer avec résolution. Cest une question de haute responsabilité des dirigeants du monde.
Source : Service d'Information du Gouvernement, le 24 octobre 2012