Texte intégral
Messieurs les Sénateurs,
Madame et Messieurs les Députés,
Monsieur le Président du Conseil régional,
Messieurs les Présidents des Conseils généraux,
Messieurs les Présidents des Associations Départementales des Maires,
Madame et Messieurs les Ambassadeurs,
Messieurs les Préfets,
Messieurs les Directeurs,
Mesdames, Messieurs,
C'est avec un réel plaisir que je me trouve ce matin parmi vous pour présider ces Rencontres destinées à préparer la mise en place prochaine de la Conférence de la coopération régionale dans la zone de l'océan Indien, instituée par la loi relative à Mayotte du 11 juillet 2001, complétant sur ce sujet la loi d'orientation pour l'outre-mer du 13 décembre 2000.
Cette instance, qui s'inscrit dans le cadre des nouvelles responsabilités confiées aux collectivités locales d'Outre-mer en matière de coopération régionale, procède de la volonté de faire de la Réunion et de Mayotte, aux côtés de l'État, des acteurs plus présents encore qu'aujourd'hui au sein de l'océan Indien.
Les pays de cette région, par nature, ont vocation à tisser entre eux des liens durables, fondés notamment sur une coopération régionale accrue.
Ce sont ces liens que nous devons renforcer, aussi grâce à ce moment fondateur et ce coup d'envoi de la coopération régionale des années 2000 qui change de nature de par la volonté du gouvernement et du législateur.
Depuis longtemps, de nombreux efforts ont déjà été réalisés par les différents partenaires : collectivités locales, associations, services de l'État avec l'appui des Préfets de la Réunion et de Mayotte, ambassadeurs également, et de multiples actions concrètes ont pu être menées à bien. Je tiens aujourd'hui à rendre hommage à tous ceux qui y ont participé : élus, parlementaires, responsables associatifs, ministères, chercheurs, hommes et femmes des collectivités locales.
Je pense notamment au programme de relance de la coopération régionale dans l'océan Indien constitué de 21 actions concrètes, décidé ici même lors de la conférence régionale des 25 et 26 février 1997.
Notre objectif, aujourd'hui, est différent. Plus qu'une relance de la coopération régionale, déjà fort active, il s'agit en effet d'échanger pour envisager ensemble comment, désormais, nos actions doivent se conjuguer dans un cadre juridique nouveau. Je souhaite que les débats qui vont s'ouvrir nous permettent de réfléchir aux stratégies à développer et surtout à la cohérence des outils à mettre en place, pour donner un contenu et des objectifs clairs à la politique de coopération régionale dans la région de l'océan Indien au bénéfice de la France, de la Réunion et de Mayotte.
Si, au cours de ces dernières années, un fait a été acquis, c'est bien qu'il était nécessaire et même indispensable que la Réunion et la collectivité départementale de Mayotte s'ouvrent complètement sur leur environnement régional. En effet, nul n'est mieux placé que nos concitoyens qui vivent sur place pour incarner la France aux yeux des habitants, des élus et des dirigeants des autres États de l'océan Indien, pour débattre avec eux de l'avenir de leur région et pour, ensemble, contribuer au développement de chacun. J'entends par là celui de la Réunion et de Mayotte mais aussi celui des pays qui les entourent. Il est indispensable que vous vous préoccupiez de vos voisins immédiats, mais les pays qui vous entourent ne peuvent négliger l'apport original que constituent la Réunion et Mayotte, qui sont des atouts pour toute la zone.
Et tel est bien le message que vous, élus de l'océan Indien, nous avez adressé, à mon collègue Charles Josselin et à moi-même, lors de l'entrevue que nous avons eue à Paris le 20 juin dernier.
Cette réunion nous a permis d'échanger concrètement un certain nombre d'idées sur deux thèmes essentiels : d'une part les contours d'un plan d'action d'urgence à destination des Comores et d'autre part la définition d'une méthode permettant d'imprimer un nouvel élan à la coopération régionale dans l'océan Indien dans le cadre de la loi d'orientation pour l'outre-mer et de la future loi statutaire de Mayotte.
Je profite de cette occasion pour me féliciter et pour vous remercier de la richesse du dialogue que nous avons initié et dont j'ai retenu un certain nombre d'éléments.
Tout d'abord, et c'est là un point capital, je relève qu'il y a un consensus - et je vise là au premier chef les élus - pour estimer que la coopération avec les pays de la région doit s'appuyer sur les bases avancées de la France dans l'océan Indien que sont la Réunion et Mayotte.
Il s'agit là d'une position à laquelle je ne peux que souscrire sans réserve. Ces deux îles disposent d'atouts reconnus et, dans de nombreux domaines, d'un indiscutable savoir-faire dont elles peuvent faire bénéficier nos partenaires étrangers et, ainsi, mieux s'intégrer encore dans leur environnement régional. Tel est le cas, par exemple, dans le secteur agricole, en s'appuyant sur des organismes de recherche performants, tel le CIRAD, mais également dans la lutte contre les catastrophes naturelles, dans le domaine de la santé, du génie civil ou encore de la culture, de la formation supérieure - dans l'une des rares régions du monde où la francophonie progresse.
Il existe, je le sais, et vous me l'avez encore démontré en juin dernier, une forte volonté de votre part de nouer des liens économiques, sociaux et culturels dans la région. La déclaration de Saint-Denis d'avril dernier, relative à la coopération entre les Comores et la Réunion à l'initiative du président Paul Vergès, en est une illustration.
La loi d'orientation pour l'outre-mer du 13 décembre 2000 comme le nouveau statut de Mayotte issu de la loi du 11 juillet 2001, donnent des moyens nouveaux aux exécutifs locaux en matière internationale, vous conférant ainsi un rôle moteur pour animer la coopération régionale.
Sur le fond, les dispositions concernant la coopération régionale de la loi relative à Mayotte sont proches de celles prévues par la loi d'orientation pour l'outre-mer pour les départements d'outre-mer. La différence est essentiellement l'élaboration d'un calendrier prévoyant des étapes dans le cadre du transfert de l'exécutif, du représentant de l'État au président du Conseil général de Mayotte en 2004.
La loi d'orientation pour l'outre-mer, la loi relative à Mayotte, fruits d'une large concertation préalable et d'un débat parlementaire approfondi, visent à donner un nouvel élan à la coopération régionale. Telle est la volonté politique du gouvernement. C'est aussi la vôtre. Tous mes entretiens avec vous, chez vous ou à Paris, me l'ont démontré. Mais aujourd'hui, il faut dépasser le stade des intentions et avancer, aller de l'avant. Nous en avons, tous, la volonté. La loi, dont je rappellerai ici les dispositions essentielles, vous en donne, et nous en donne, les moyens.
Elle vous donne un large pouvoir d'initiative que vous attendiez et dont, je le sais, vous allez vous saisir.
Elle vous permet d'adresser au gouvernement des propositions en vue de conclure des accords de coopération régionale. Dans les domaines de compétence de l'État, vous pouvez être habilités par les autorités de la République à négocier des accords internationaux ; vous agissez alors comme représentants de l'État. Après délivrance de pouvoirs par les autorités de la République, les exécutifs réunionnais peuvent d'ores et déjà signer ces accords, ce que pourra également faire dans un proche avenir le président du conseil général de Mayotte.
Dans les domaines de compétence du département et de la région, l'initiative peut (ou pourra, s'agissant de Mayotte) être vôtre : vous pouvez être autorisés par les autorités de la République à négocier et à signer des accords internationaux, qui sont ensuite soumis pour avis à la délibération des assemblées concernées. La loi vous permet également de demander à négocier, ou à défaut de participer aux négociations des accords internationaux portant à la fois sur des domaines de compétence de l'État et du département, ou de la région. Enfin, sous réserve de l'accord des autorités de la République, la région de la Réunion peut participer aux organisations régionales en qualité de membre associé ou d'observateur, si bien entendu, le statut de ces organisations le permet. La loi du 11 juillet 2001 ouvrira prochainement cette faculté à la collectivité départementale de Mayotte.
Outre ces compétences, la loi d'orientation pour l'outre-mer et la loi relative à Mayotte vous donnent également les moyens d'agir puisque sont créés de nouveaux fonds de coopération régionale. Il s'agit, pour la Réunion comme pour Mayotte, d'une mesure nouvelle puisqu'un tel fonds n'existait pas jusqu'à présent - à la différence des départements français d'Amérique, qui disposaient du Fonds interministériel de coopération (FIC). Pour l'océan Indien, les fonds de coopération régionale sont caractérisés par un net effort de l'État puisque le fonds de la Réunion s'élève pour 2001 à 5 MF (reconduits en 2002) et que le fonds de Mayotte sera doté de 3 MF en 2002.
Bien entendu, outre ces crédits, les acteurs de la coopération disposent également d'autres moyens financiers pour mener leurs actions. Je citerais notamment le Programme de Développement Local aux Comores (PDLC), les sommes débloquées dans le cadre des documents uniques de programmation, les programmes inter-régionaux de l'Union européenne ou encore l'initiative communautaire " Interreg III ", dont deux des trois volets concernent les départements d'outre-mer. Sont également disponibles l'ensemble des crédits gérés par l'Agence française de développement qui lui permettent d'intervenir dans les pays de la zone de solidarité prioritaire. Je rappelle à cet égard que les Comores, Madagascar, Maurice et les Seychelles figurent sur la liste des pays de la zone de solidarité prioritaire définie par le Comité Interministériel de la Coopération Internationale et du Développement.
Au total, ce sont plusieurs dizaines de millions de francs qui sont disponibles.
Par ailleurs sur le plan opérationnel, la loi vous permet de recourir aux sociétés d'économie mixte pour mettre en uvre les actions que vous engagerez dans le cadre des compétences nouvelles dont vous disposez en matière de coopération régionale.
La volonté du gouvernement est que les instruments mis en place par ces deux lois vous permettent d'uvrer avec rapidité et avec la meilleure efficacité possible. Le décret d'application des dispositions " internationales " de la loi d'orientation pour l'outre-mer a été approuvé en Conseil des Ministres le 11 avril et celui de la loi relative à Mayotte est actuellement en cours de préparation. Ces textes précisent les modalités de fonctionnement de ces instruments, qui marient décentralisation et déconcentration.
C'est ainsi que le comité chargé de gérer chaque fonds de coopération régionale est composé à la fois de représentants des collectivités locales, pour la composante décentralisée, et de représentants de l'État au plan local, pour la composante déconcentrée. En effet, les décisions concernant cette ouverture sur la région que j'évoquais tout à l'heure, ne peuvent à l'évidence être prises à Paris.
Si, à l'évidence, la politique étrangère de la France continuera bien à être définie au niveau central, il existe une véritable place pour l'action régionale - action qui devra dans mon esprit être prise en main par les acteurs locaux. C'est pourquoi les comités paritaires, chargés de la gestion des fonds de coopération régionale, comprennent des représentants locaux de l'État (préfets et ambassadeurs) et, bien sûr, des élus locaux.
De la même manière, l'instance de concertation des politiques de coopération régionale (prévue par la loi relative à Mayotte) sera elle-même composée des deux comités de gestion des fonds de coopération régionale et reflétera donc largement les intérêts locaux de la Réunion et de Mayotte. Telle est, je le répète, la volonté du gouvernement.
Nous sommes aujourd'hui confrontés à de nouveaux défis. Avec cette volonté politique que j'ai exposée, grâce aux nouveaux moyens institutionnels dont nous disposons, mais également grâce aux moyens humains présents dans cette salle et que je remercie de leur présence, il nous appartient de travailler concrètement afin de parvenir aux buts que nous nous sommes fixés.
Tous - services de l'État et des collectivités locales - nous devons uvrer ensemble vers ce but commun. Seule cette concertation étroite permettra de déclencher une dynamique collective autour de la coopération régionale. Le dialogue entre tous les partenaires doit être permanent et organisé.
À cet égard, il me vient à l'esprit un exemple illustrant cette dynamique à laquelle nous devons tendre. Je veux parler du récent projet de coopération en matière de sécurité civile, qui s'est vu attribuer une enveloppe de 7 MF sur 3 ans par le Fonds de soutien prioritaire afin d'aider les États de la COI " à réagir avec rapidité et efficacité lorsqu'ils sont confrontés aux risques naturels et technologiques qui entravent leur développement. " Il s'agit bien là d'un projet résultant d'une étroite collaboration entre les différents services concernés et s'appuyant fortement sur les moyens dont la France dispose à la Réunion.
Cette synergie entre nous est fondamentale. Lors de notre rencontre du 20 juin, nous avons pu constater que nos vues se rejoignaient largement. Mes services sont à votre disposition pour vous accompagner dans vos tâches, ceux du ministère des Affaires étrangères le sont également. J'en veux pour preuve la présence aujourd'hui, parmi nous, de l'ensemble des chefs de poste des pays voisins de la Réunion et de Mayotte. Tous sont à votre écoute. Ils ont aussi, j'en suis sûr, des propositions à vous soumettre.
Les chantiers qui nous attendent sont décisifs. Ils concernent tout d'abord les Comores, où une nouvelle donne existe depuis les accords de Fomboni du 17 février 2001, qui ouvrent de nouvelles perspectives en matière de coopération bilatérale. Compte tenu de l'extrême pauvreté de la population, en particulier à Anjouan, un travail de proximité doit être rapidement entrepris. Les bailleurs de fonds, réunis à Paris en juillet dernier à l'initiative de la Banque mondiale, en sont conscients et des actions sont déjà en cours de réflexion ou de réalisation, dans les domaines fondamentaux que sont la santé, l'éducation, la culture, l'assistance technique institutionnelle.
Nous étions convenus de bâtir ensemble, dans les meilleurs délais, un plan de développement à destination des Comores. Un groupe de travail composé de représentants des collectivités locales et de l'État a été formé, sous la responsabilité de l'ambassadeur de France aux Comores et en concertation entre les services des collectivités locales de la Réunion et de Mayotte, afin de dresser une liste de projets susceptibles d'être mis en uvre à court terme.
Je demanderai tout à l'heure à l'ambassadeur de France à Moroni de bien vouloir nous brosser une brève présentation de la coopération bilatérale dans la région. Pour ce faire, l'ambassadeur s'appuiera bien entendu sur des exemples pris dans son pays de résidence, mais il étendra sa réflexion sur la coopération que nous tissons avec l'ensemble des pays de la zone. Je souhaiterais ensuite qu'un débat s'instaure entre nous afin de pouvoir examiner ce que ces pays attendent concrètement de nous en termes de coopération régionale : que pouvons-nous faire dans cette région de l'océan Indien grâce aux moyens, importants, de la Réunion et de Mayotte ?
Dans la seconde moitié de la matinée, nous évoquerons plus généralement la stratégie de coopération régionale à mettre en uvre dans l'océan Indien, à la lumière notamment des nouvelles dispositions législatives. Comment instaurer une politique de coopération régionale globale et équilibrée de la France dans la région ? Quelle place la France, Mayotte, la Réunion occupent-elles dans cette zone géographique ? Quel rôle ont-elles à jouer dans les organisations régionales - la Commission de l'océan Indien, bien entendu, mais également au sein de l'Association des Pays Riverains de l'océan Indien pour la Coopération régionale (IOR/ARC), où la France vient d'être accueillie en tant que partenaire du dialogue, à la Communauté de développement de l'Afrique australe ou encore dans le Marché commun de l'Afrique australe et orientale (COMESA, selon son acronyme anglais) ? Je proposerai à M. Bertile, secrétaire général de la commission de l'océan Indien, puis à M. Cros, directeur d'Afrique et de l'océan Indien, d'intervenir pour que, ensuite, un second temps de débat puisse avoir lieu.
Je souhaiterais donc que dans l'ensemble de cette matinée il y ait au moins deux heures complètes qui vous permettent d'intervenir.
Mesdames et Messieurs, le débat est lancé. Je vous remercie d'être venus aussi nombreux, et pour certains d'entre vous de loin. C'est un moment important ; nous devons l'aborder avec pragmatisme mais sans oublier qu'il constitue le début d'une nouvelle étape pour la coopération régionale dans l'ensemble de l'océan Indien.
Je vous remercie.
(source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 14 novembre 2001)
Madame et Messieurs les Députés,
Monsieur le Président du Conseil régional,
Messieurs les Présidents des Conseils généraux,
Messieurs les Présidents des Associations Départementales des Maires,
Madame et Messieurs les Ambassadeurs,
Messieurs les Préfets,
Messieurs les Directeurs,
Mesdames, Messieurs,
C'est avec un réel plaisir que je me trouve ce matin parmi vous pour présider ces Rencontres destinées à préparer la mise en place prochaine de la Conférence de la coopération régionale dans la zone de l'océan Indien, instituée par la loi relative à Mayotte du 11 juillet 2001, complétant sur ce sujet la loi d'orientation pour l'outre-mer du 13 décembre 2000.
Cette instance, qui s'inscrit dans le cadre des nouvelles responsabilités confiées aux collectivités locales d'Outre-mer en matière de coopération régionale, procède de la volonté de faire de la Réunion et de Mayotte, aux côtés de l'État, des acteurs plus présents encore qu'aujourd'hui au sein de l'océan Indien.
Les pays de cette région, par nature, ont vocation à tisser entre eux des liens durables, fondés notamment sur une coopération régionale accrue.
Ce sont ces liens que nous devons renforcer, aussi grâce à ce moment fondateur et ce coup d'envoi de la coopération régionale des années 2000 qui change de nature de par la volonté du gouvernement et du législateur.
Depuis longtemps, de nombreux efforts ont déjà été réalisés par les différents partenaires : collectivités locales, associations, services de l'État avec l'appui des Préfets de la Réunion et de Mayotte, ambassadeurs également, et de multiples actions concrètes ont pu être menées à bien. Je tiens aujourd'hui à rendre hommage à tous ceux qui y ont participé : élus, parlementaires, responsables associatifs, ministères, chercheurs, hommes et femmes des collectivités locales.
Je pense notamment au programme de relance de la coopération régionale dans l'océan Indien constitué de 21 actions concrètes, décidé ici même lors de la conférence régionale des 25 et 26 février 1997.
Notre objectif, aujourd'hui, est différent. Plus qu'une relance de la coopération régionale, déjà fort active, il s'agit en effet d'échanger pour envisager ensemble comment, désormais, nos actions doivent se conjuguer dans un cadre juridique nouveau. Je souhaite que les débats qui vont s'ouvrir nous permettent de réfléchir aux stratégies à développer et surtout à la cohérence des outils à mettre en place, pour donner un contenu et des objectifs clairs à la politique de coopération régionale dans la région de l'océan Indien au bénéfice de la France, de la Réunion et de Mayotte.
Si, au cours de ces dernières années, un fait a été acquis, c'est bien qu'il était nécessaire et même indispensable que la Réunion et la collectivité départementale de Mayotte s'ouvrent complètement sur leur environnement régional. En effet, nul n'est mieux placé que nos concitoyens qui vivent sur place pour incarner la France aux yeux des habitants, des élus et des dirigeants des autres États de l'océan Indien, pour débattre avec eux de l'avenir de leur région et pour, ensemble, contribuer au développement de chacun. J'entends par là celui de la Réunion et de Mayotte mais aussi celui des pays qui les entourent. Il est indispensable que vous vous préoccupiez de vos voisins immédiats, mais les pays qui vous entourent ne peuvent négliger l'apport original que constituent la Réunion et Mayotte, qui sont des atouts pour toute la zone.
Et tel est bien le message que vous, élus de l'océan Indien, nous avez adressé, à mon collègue Charles Josselin et à moi-même, lors de l'entrevue que nous avons eue à Paris le 20 juin dernier.
Cette réunion nous a permis d'échanger concrètement un certain nombre d'idées sur deux thèmes essentiels : d'une part les contours d'un plan d'action d'urgence à destination des Comores et d'autre part la définition d'une méthode permettant d'imprimer un nouvel élan à la coopération régionale dans l'océan Indien dans le cadre de la loi d'orientation pour l'outre-mer et de la future loi statutaire de Mayotte.
Je profite de cette occasion pour me féliciter et pour vous remercier de la richesse du dialogue que nous avons initié et dont j'ai retenu un certain nombre d'éléments.
Tout d'abord, et c'est là un point capital, je relève qu'il y a un consensus - et je vise là au premier chef les élus - pour estimer que la coopération avec les pays de la région doit s'appuyer sur les bases avancées de la France dans l'océan Indien que sont la Réunion et Mayotte.
Il s'agit là d'une position à laquelle je ne peux que souscrire sans réserve. Ces deux îles disposent d'atouts reconnus et, dans de nombreux domaines, d'un indiscutable savoir-faire dont elles peuvent faire bénéficier nos partenaires étrangers et, ainsi, mieux s'intégrer encore dans leur environnement régional. Tel est le cas, par exemple, dans le secteur agricole, en s'appuyant sur des organismes de recherche performants, tel le CIRAD, mais également dans la lutte contre les catastrophes naturelles, dans le domaine de la santé, du génie civil ou encore de la culture, de la formation supérieure - dans l'une des rares régions du monde où la francophonie progresse.
Il existe, je le sais, et vous me l'avez encore démontré en juin dernier, une forte volonté de votre part de nouer des liens économiques, sociaux et culturels dans la région. La déclaration de Saint-Denis d'avril dernier, relative à la coopération entre les Comores et la Réunion à l'initiative du président Paul Vergès, en est une illustration.
La loi d'orientation pour l'outre-mer du 13 décembre 2000 comme le nouveau statut de Mayotte issu de la loi du 11 juillet 2001, donnent des moyens nouveaux aux exécutifs locaux en matière internationale, vous conférant ainsi un rôle moteur pour animer la coopération régionale.
Sur le fond, les dispositions concernant la coopération régionale de la loi relative à Mayotte sont proches de celles prévues par la loi d'orientation pour l'outre-mer pour les départements d'outre-mer. La différence est essentiellement l'élaboration d'un calendrier prévoyant des étapes dans le cadre du transfert de l'exécutif, du représentant de l'État au président du Conseil général de Mayotte en 2004.
La loi d'orientation pour l'outre-mer, la loi relative à Mayotte, fruits d'une large concertation préalable et d'un débat parlementaire approfondi, visent à donner un nouvel élan à la coopération régionale. Telle est la volonté politique du gouvernement. C'est aussi la vôtre. Tous mes entretiens avec vous, chez vous ou à Paris, me l'ont démontré. Mais aujourd'hui, il faut dépasser le stade des intentions et avancer, aller de l'avant. Nous en avons, tous, la volonté. La loi, dont je rappellerai ici les dispositions essentielles, vous en donne, et nous en donne, les moyens.
Elle vous donne un large pouvoir d'initiative que vous attendiez et dont, je le sais, vous allez vous saisir.
Elle vous permet d'adresser au gouvernement des propositions en vue de conclure des accords de coopération régionale. Dans les domaines de compétence de l'État, vous pouvez être habilités par les autorités de la République à négocier des accords internationaux ; vous agissez alors comme représentants de l'État. Après délivrance de pouvoirs par les autorités de la République, les exécutifs réunionnais peuvent d'ores et déjà signer ces accords, ce que pourra également faire dans un proche avenir le président du conseil général de Mayotte.
Dans les domaines de compétence du département et de la région, l'initiative peut (ou pourra, s'agissant de Mayotte) être vôtre : vous pouvez être autorisés par les autorités de la République à négocier et à signer des accords internationaux, qui sont ensuite soumis pour avis à la délibération des assemblées concernées. La loi vous permet également de demander à négocier, ou à défaut de participer aux négociations des accords internationaux portant à la fois sur des domaines de compétence de l'État et du département, ou de la région. Enfin, sous réserve de l'accord des autorités de la République, la région de la Réunion peut participer aux organisations régionales en qualité de membre associé ou d'observateur, si bien entendu, le statut de ces organisations le permet. La loi du 11 juillet 2001 ouvrira prochainement cette faculté à la collectivité départementale de Mayotte.
Outre ces compétences, la loi d'orientation pour l'outre-mer et la loi relative à Mayotte vous donnent également les moyens d'agir puisque sont créés de nouveaux fonds de coopération régionale. Il s'agit, pour la Réunion comme pour Mayotte, d'une mesure nouvelle puisqu'un tel fonds n'existait pas jusqu'à présent - à la différence des départements français d'Amérique, qui disposaient du Fonds interministériel de coopération (FIC). Pour l'océan Indien, les fonds de coopération régionale sont caractérisés par un net effort de l'État puisque le fonds de la Réunion s'élève pour 2001 à 5 MF (reconduits en 2002) et que le fonds de Mayotte sera doté de 3 MF en 2002.
Bien entendu, outre ces crédits, les acteurs de la coopération disposent également d'autres moyens financiers pour mener leurs actions. Je citerais notamment le Programme de Développement Local aux Comores (PDLC), les sommes débloquées dans le cadre des documents uniques de programmation, les programmes inter-régionaux de l'Union européenne ou encore l'initiative communautaire " Interreg III ", dont deux des trois volets concernent les départements d'outre-mer. Sont également disponibles l'ensemble des crédits gérés par l'Agence française de développement qui lui permettent d'intervenir dans les pays de la zone de solidarité prioritaire. Je rappelle à cet égard que les Comores, Madagascar, Maurice et les Seychelles figurent sur la liste des pays de la zone de solidarité prioritaire définie par le Comité Interministériel de la Coopération Internationale et du Développement.
Au total, ce sont plusieurs dizaines de millions de francs qui sont disponibles.
Par ailleurs sur le plan opérationnel, la loi vous permet de recourir aux sociétés d'économie mixte pour mettre en uvre les actions que vous engagerez dans le cadre des compétences nouvelles dont vous disposez en matière de coopération régionale.
La volonté du gouvernement est que les instruments mis en place par ces deux lois vous permettent d'uvrer avec rapidité et avec la meilleure efficacité possible. Le décret d'application des dispositions " internationales " de la loi d'orientation pour l'outre-mer a été approuvé en Conseil des Ministres le 11 avril et celui de la loi relative à Mayotte est actuellement en cours de préparation. Ces textes précisent les modalités de fonctionnement de ces instruments, qui marient décentralisation et déconcentration.
C'est ainsi que le comité chargé de gérer chaque fonds de coopération régionale est composé à la fois de représentants des collectivités locales, pour la composante décentralisée, et de représentants de l'État au plan local, pour la composante déconcentrée. En effet, les décisions concernant cette ouverture sur la région que j'évoquais tout à l'heure, ne peuvent à l'évidence être prises à Paris.
Si, à l'évidence, la politique étrangère de la France continuera bien à être définie au niveau central, il existe une véritable place pour l'action régionale - action qui devra dans mon esprit être prise en main par les acteurs locaux. C'est pourquoi les comités paritaires, chargés de la gestion des fonds de coopération régionale, comprennent des représentants locaux de l'État (préfets et ambassadeurs) et, bien sûr, des élus locaux.
De la même manière, l'instance de concertation des politiques de coopération régionale (prévue par la loi relative à Mayotte) sera elle-même composée des deux comités de gestion des fonds de coopération régionale et reflétera donc largement les intérêts locaux de la Réunion et de Mayotte. Telle est, je le répète, la volonté du gouvernement.
Nous sommes aujourd'hui confrontés à de nouveaux défis. Avec cette volonté politique que j'ai exposée, grâce aux nouveaux moyens institutionnels dont nous disposons, mais également grâce aux moyens humains présents dans cette salle et que je remercie de leur présence, il nous appartient de travailler concrètement afin de parvenir aux buts que nous nous sommes fixés.
Tous - services de l'État et des collectivités locales - nous devons uvrer ensemble vers ce but commun. Seule cette concertation étroite permettra de déclencher une dynamique collective autour de la coopération régionale. Le dialogue entre tous les partenaires doit être permanent et organisé.
À cet égard, il me vient à l'esprit un exemple illustrant cette dynamique à laquelle nous devons tendre. Je veux parler du récent projet de coopération en matière de sécurité civile, qui s'est vu attribuer une enveloppe de 7 MF sur 3 ans par le Fonds de soutien prioritaire afin d'aider les États de la COI " à réagir avec rapidité et efficacité lorsqu'ils sont confrontés aux risques naturels et technologiques qui entravent leur développement. " Il s'agit bien là d'un projet résultant d'une étroite collaboration entre les différents services concernés et s'appuyant fortement sur les moyens dont la France dispose à la Réunion.
Cette synergie entre nous est fondamentale. Lors de notre rencontre du 20 juin, nous avons pu constater que nos vues se rejoignaient largement. Mes services sont à votre disposition pour vous accompagner dans vos tâches, ceux du ministère des Affaires étrangères le sont également. J'en veux pour preuve la présence aujourd'hui, parmi nous, de l'ensemble des chefs de poste des pays voisins de la Réunion et de Mayotte. Tous sont à votre écoute. Ils ont aussi, j'en suis sûr, des propositions à vous soumettre.
Les chantiers qui nous attendent sont décisifs. Ils concernent tout d'abord les Comores, où une nouvelle donne existe depuis les accords de Fomboni du 17 février 2001, qui ouvrent de nouvelles perspectives en matière de coopération bilatérale. Compte tenu de l'extrême pauvreté de la population, en particulier à Anjouan, un travail de proximité doit être rapidement entrepris. Les bailleurs de fonds, réunis à Paris en juillet dernier à l'initiative de la Banque mondiale, en sont conscients et des actions sont déjà en cours de réflexion ou de réalisation, dans les domaines fondamentaux que sont la santé, l'éducation, la culture, l'assistance technique institutionnelle.
Nous étions convenus de bâtir ensemble, dans les meilleurs délais, un plan de développement à destination des Comores. Un groupe de travail composé de représentants des collectivités locales et de l'État a été formé, sous la responsabilité de l'ambassadeur de France aux Comores et en concertation entre les services des collectivités locales de la Réunion et de Mayotte, afin de dresser une liste de projets susceptibles d'être mis en uvre à court terme.
Je demanderai tout à l'heure à l'ambassadeur de France à Moroni de bien vouloir nous brosser une brève présentation de la coopération bilatérale dans la région. Pour ce faire, l'ambassadeur s'appuiera bien entendu sur des exemples pris dans son pays de résidence, mais il étendra sa réflexion sur la coopération que nous tissons avec l'ensemble des pays de la zone. Je souhaiterais ensuite qu'un débat s'instaure entre nous afin de pouvoir examiner ce que ces pays attendent concrètement de nous en termes de coopération régionale : que pouvons-nous faire dans cette région de l'océan Indien grâce aux moyens, importants, de la Réunion et de Mayotte ?
Dans la seconde moitié de la matinée, nous évoquerons plus généralement la stratégie de coopération régionale à mettre en uvre dans l'océan Indien, à la lumière notamment des nouvelles dispositions législatives. Comment instaurer une politique de coopération régionale globale et équilibrée de la France dans la région ? Quelle place la France, Mayotte, la Réunion occupent-elles dans cette zone géographique ? Quel rôle ont-elles à jouer dans les organisations régionales - la Commission de l'océan Indien, bien entendu, mais également au sein de l'Association des Pays Riverains de l'océan Indien pour la Coopération régionale (IOR/ARC), où la France vient d'être accueillie en tant que partenaire du dialogue, à la Communauté de développement de l'Afrique australe ou encore dans le Marché commun de l'Afrique australe et orientale (COMESA, selon son acronyme anglais) ? Je proposerai à M. Bertile, secrétaire général de la commission de l'océan Indien, puis à M. Cros, directeur d'Afrique et de l'océan Indien, d'intervenir pour que, ensuite, un second temps de débat puisse avoir lieu.
Je souhaiterais donc que dans l'ensemble de cette matinée il y ait au moins deux heures complètes qui vous permettent d'intervenir.
Mesdames et Messieurs, le débat est lancé. Je vous remercie d'être venus aussi nombreux, et pour certains d'entre vous de loin. C'est un moment important ; nous devons l'aborder avec pragmatisme mais sans oublier qu'il constitue le début d'une nouvelle étape pour la coopération régionale dans l'ensemble de l'océan Indien.
Je vous remercie.
(source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 14 novembre 2001)