Déclaration à la presse de Mme Marylise Lebranchu, ministre de la justice, sur le budget 2002 de la justice, Paris, le 18 septembre 2001.

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Circonstance : Présentation du budget 2002 de la justice, Paris, le 18 septembre 2001

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
Je vous souhaite la bienvenue à la Chancellerie pour la traditionnelle présentation à la presse du budget de la Justice.
Je vais maintenant vous présenter brièvement les principales mesures du projet de loi de finances pour 2002, avant de répondre à vos questions. Vous trouverez les chiffres et les détails dans la brochure qui vous a été distribuée.
Je crois que l'on peut dire, sans exagération aucune, qu'il s'agit d'un très bon budget pour mon ministère : le signe que, cette année plus encore que les précédentes, la justice est une vraie priorité du gouvernement.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes :
- une progression de 5,7 %, bien plus rapide que la progression moyenne des dépenses de l'Etat.
- un total de 30,7 milliards de francs - ou plus exactement : 4,7 milliards d'euros car, vous le savez, le budget sera voté en euros dès cette année. C'est en tout cas la première fois que le seuil " symbolique " de 30 milliards de francs est dépassé - et je sais que le seuil de 5 milliards d'euros ser le nouveau symbole à atteindre.
- près de 2800 emplois nouveaux seront créés, 2792 exactement, contre 1550 en 2001 - ce qui était déjà un chiffre très élevé.
- 2,4 milliards de francs de crédits d'équipement (360 millions d'euros) seront ouverts pour poursuivre le grand programme de rénovation et de construction de palais de justice et de prisons.
Au delà des chiffres, c'est surtout un budget cohérent avec les priorités du ministère de la Justice, et qui donne les moyens de leur financement.
S'agissant des créations d'emplois, j'ai déjà évoqué leur nombre total -2792-. Leur répartition est évidemment essentielle :
1. L'administration pénitentiaire vient au premier rang avec 1525 emplois créés, soit un niveau trois fois plus élevé qu'en 2001 [530]. Il s'agit en majorité de surveillants (un peu plus de 1200) mais un effort particulier sera également fait pour accroître les effectifs des personnels qui travaillent à la réinsertion des détenus, et des personnels administratifs. Ce niveau de recrutement est cohérent avec la politique pénitentiaire du gouvernement, qui vise à améliorer la prise en charge des détenus, mais aussi à renforcer la sécurité dans les établissements -deux orientations réclament bien entendu des moyens.
J'ajoute que les créations d'emplois permettront d'aborder dans de bonnes conditions la réduction du temps de travail au 1er janvier 2002.
2. 845 emplois seront créés dans les juridictions judiciaires, dont 320 magistrats et 525 fonctionnaires, greffiers, greffiers en chef et contractuels.
Grâce à ces recrutements, nous pourrons non seulement achever la mise en uvre des réformes récentes (et notamment de la loi du 15 juin 2000 sur la présomption d'innocence), mais également poursuivre notre effort permanent d'amélioration de la " qualité de la Justice ". D'ores et déjà, les moyens nouveaux que le gouvernement a donné à la Justice ont permis des progrès tangibles :
- en matière de délais de jugement, les indicateurs commencent enfin à s'améliorer [durée moyenne des affaires terminées dans les TGI au civil : 8,9 mois en 2000 contre 9,3 mois en 1998] ;
- ce que l'on appelle le taux de réponse pénale, c'est-à-dire le pourcentage d'affaires susceptibles d'être poursuivies et qui le sont effectivement [ou donnent lieu à une mesure alternative aux poursuites], est en nette hausse : il est passé de 64 % en 1997 à 67,9 % en 2000 ;
3. Un autre domaine essentiel, la protection judiciaire de la jeunesse bénéficiera de 300 créations d'emplois, dans le cadre du plan de lutte contre la délinquance des mineurs. Il s'agit bien entendu d'éducateurs, mais aussi de psychologues, d'enseignants, et de personnel administratif pour renforcer les structures de la PJJ.
4. Enfin, le PLF 2002 prévoit aussi 32 créations d'emplois à l'administration centrale, 86 dans les juridictions administratives, et 4 à la CNIL.
La situation des personnels de la Justice ne sera pas oubliée : près de 450 MF lui seront consacrés dans le nouveau budget. Il s'agit là d'un effort nécessaire et entièrement légitime, qui permettra de mieux prendre en compte les compétences, le niveau de responsabilité des personnels de la justice, et surtout la difficulté de certains métiers - je pense en particulier aux surveillants de l'administration pénitentiaire et aux éducateurs de la PJJ, qui sont en contact quotidien avec les détenus et les mineurs délinquants.
Je ne perd pas non plus de vue les crédits de fonctionnement courant, qui doivent nécessairement accompagner la croissance des effectifs : ils augmenteront de 3,4 %. Bien entendu, la modernisation des méthodes de travail restera une priorité et, dans ce cadre, les crédits informatiques progresseront de 5,6%. Dans ce domaine également, je voudrais insister sur le fait que les progrès sont bien réels : nous sommes désormais parvenu à un taux d'équipement micro-informatique correct même s'il doit encore être amélioré dans certains secteurs (globalement 1,27 agents par ordinateur). Fin 2001, nous devrions avoir 21 000 agents connectés à l'Intranet Justice - fin 1998, il n'y en avait quasiment aucun.
Du côté des crédits d'intervention, deux évolutions méritent d'être soulignées :
- d'une part, les crédits d'aide juridictionnelle sont en très forte hausse (18 %) et atteindront 1,8 MdF, ce qui résulte notamment de la hausse de la rétribution des avocats décidée à la fin de l'année dernière. La loi de finances permettra également l'extension de l'AJ aux procédures disciplinaires concernant les détenus, ce qui est une mesure très significative bien que d'un impact budgétaire limité.
- d'autre part, notre effort en faveur de l'aide aux victimes se poursuit : les associations partenaires de la Chancellerie bénéficieront d'une mesure nouvelle de 7,5 MF, dont une partie sera utilisée pour financer le numéro national d'aide aux victimes géré par l'INAVEM, qui sera enfin inauguré.
S'agissant maintenant de l'équipement, nous continuons notre programme de construction et de rénovation à un rythme accéléré :
- 550 MF d'autorisations de programme seront ouvertes dans le domaine judiciaire, ce qui permettra de poursuivre les opérations en cours et d'en engager de nouvelles (pour ne citer que les plus importantes : Palais de justice de Chartes, Rouen, Fort-de-France, Laon, Ecole nationale des greffes à Dijon). Nous procéderons aussi à d'importants travaux de sécurité au palais de Justice de Paris.
- notre effort sera encore plus marqué dans le domaine pénitentiaire, avec 1,7 milliard de francs d'autorisations de programme, qui s'inscrivent pour l'essentiel dans le cadre du programme de construction de 10 MdF en 6 ans annoncé par le Premier ministre en novembre 2000. Ces crédits nous permettront bien sûr d'achever les 6 nouvelles prisons actuellement en travaux, qui vont entrer en service en 2002-2003. Mais nous pourrons surtout poursuivre la rénovation des établissements existants et notamment des 5 plus grands d'entre eux (Fleury-Mérogis, La Santé, Fresnes, Les Baumettes, Loos-les-Lille), ainsi que les constructions neuves : plusieurs programmes ont déjà été annoncés à ce titre (La Réunion, Lyon, Nice, Basse-Terre, Nancy et Le Mans).
Dès octobre prochain, je préciserai l'emploi qui sera fait des 10 MdF annoncés par le Premier ministre, dans le cadre d'un programme global d'équipement pénitentiaire, et en lien étroit avec la refonte de la carte pénitentiaire.
- un établissement public spécialisé, l'Agence de maîtrise d'ouvrage des travaux du ministère de la justice, sera créé au 1er janvier 2002. Il sera chargé du pilotage des grandes opérations immobilières, souvent très complexes et permettra d'accélérer celles-ci.
Pour conclure, je voudrais insister sur le fait que la situation budgétaire favorable de mon ministère n'a rien d'accidentel ou de conjoncturel. Il ne s'agit pas de réaliser tel ou tel effet d'affichage ponctuel. Le gouvernement mène une véritable action dans la durée pour renforcer les moyens de la Justice, qui en avait bien besoin - la comparaison internationale montre à quel point la Justice était " pauvre " en France.
Il y a cinq ans, le budget de la justice était réellement à un niveau inacceptable. L'augmentation du contentieux, la difficulté croissante des métiers pénitentiaires et le changement de nature de la délinquance n'avaient été accompagnés d'aucun effort sérieux, d'aucune priorité donnée à l'institution judiciaire. Plus grave encore, la loi de programme votée en 1995 avait été stoppée : c'est finalement Elisabeth Guigou qui l'a mise en oeuvre !
Le gouvernement a voulu rompre avec cette situation et donner une priorité affirmée à la Justice. Les évolutions quantitatives par rapport à 1997 sont, à cet égard, très significatives :
- le budget de la Justice a augmenté de 29 %, presque un tiers, en 5 ans. C'est considérable.
- 7300 emplois ont été créés dont 1212 magistrats judiciaires et administratifs. Mieux encore : les promotions entrant à l'Ecole nationale de la magistrature ont quasiment doublé (280 en 2002 contre 148 en 1997), signe de la priorité accordée à la formation.
- les crédits de l'aide juridictionnelle, qui permet aux Français les moins favorisés d'accéder à la Justice, auront augmenté de moitié entre 1997 et 2002.
Certes, j'ai bien conscience que nous sommes encore loin de disposer des moyens nécessaires à une justice efficace et adaptée aux missions qui lui sont confiées. Les personnels, dont le métier est rude, et dont je salue l'engagement et le sens du service public, ne bénéficieront que progressivement des moyens budgétaires nouveaux. De même, les usagers ne percevront que progressivement les améliorations du service rendu.
Notre effort doit donc se poursuivre : pour l'avenir, le gouvernement a pris des engagements pluriannuels et les tiendra. C'est le cas du plan de créations de 1200 emplois de magistrats sur 4 ans, qui a été présenté en mars dernier : en 2002, comme prévu, nous en réalisons la première tranche, et même un peu plus, avec 320 créations. Il va de même s'agissant du plan de construction de 10 milliards de francs sur 6 ans, en matière pénitentiaire [1 MdF ouvert en 2001, 1,45 en 2002].
Il est clair que beaucoup reste à faire : les usagers, les personnels seront les premiers à nous le rappeler. Pourtant, je suis convaincue que le budget 2002 marquera une étape importante de l'action du gouvernement dans le domaine de la Justice.
Je vous remercie de votre attention
(Source http://www.justice.gouv.fr, le 21 septembre 2001)