Déclaration de M. Christian Sautter, secrétaire d'État au budget, sur les orientations budgétaires et fiscales du projet de loi de finances pour 1999, à l'Assemblée nationale le 13 octobre 1998.

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Circonstance : Ouverture du débat sur le projet de loi de finances pour 1999 à l'Assemblée nationale le 13 octobre 1998

Texte intégral

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés,

Ainsi que l'a souligné le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le projet de budget pour 1999 que nous vous présentons est adapté au contexte macro-économique que nous connaissons et traduit nos grandes orientations politiques :
– ce budget contribue à consolider la croissance, notamment la demande intérieure, par une politique favorable à l'emploi et à la consommation des ménages ;
– ce budget traduit nos priorités. Aussi bien en matière de recettes que de dépenses, les mesures proposées ont pour but le développement de l'emploi, le renforcement de la justice sociale, l'amélioration des missions de service public et du cadre de vie de nos concitoyens.

Comme vous le savez, pour atteindre ces objectifs, nous avons réparti nos marges de manœuvre en trois tiers à peu près égaux :

16 MdF pour la baisse des impôts ;
16 MdF pour financer nos priorités ;
21 MdF de baisse du déficit.

La baisse du déficit fait partie intégrante de notre stratégie budgétaire, et le budget de l'État retrouvera l’équilibre primaire l’an prochain, pour la première fois depuis 1991, comme l'a rappelé Dominique Strauss-Kahn. Je ne m'y étendrai donc pas, mais je tiens à souligner au passage par un seul chiffre à quel point cette stratégie est gagnante.
L'augmentation du poids de la dette dans la richesse nationale se ralentit, du fait de notre politique de réduction des déficits, conjuguée à un niveau favorable des taux d'intérêt. La conséquence immédiate est que la charge de la dette ne progressera l'an prochain que de 2,4 MdF par rapport à la loi de finances pour 1998 et que sa part dans le total des dépenses est en baisse. Il y a quelques années à peine, le service de la dette augmentait au rythme de plus de 20 MdF par an On mesure à quel point la politique de réduction des déficits publics dégage des marges de manœuvre qui permettent de réorienter les moyens publics de dépenses passives vers le financement des actions prioritaires de l'État.
Concernant les dépenses, nous avons fixé leur progression à 1 % en volume pour financer nos priorités, que je vous présenterai tout à l'heure. A cette modeste progression, très inférieure à celle observée au cours des cinq dernières années, nous avons associé un réexamen systématique des dépenses afin de dégager le plus de marges de manœuvre possibles, et nous avons ainsi pu redéployer plus de 30 MdF vers nos priorités budgétaires.
Il en va de même pour les recettes fiscales : l'effort de redistribution que nous avons entrepris depuis l’été 1997 ne se limitera pas, en 1999, à la baisse de 16 MdF des prélèvements obligatoires que je vous ai annoncée. Au sein des impôts existants, les mesures prises se traduiront par d'importantes redistributions, en particulier des ménages aisés vers les ménages les plus modestes, et des revenus du capital vers les revenus d'activité.
Enfin, je souhaite, avant d'aller plus avant dans le détail des mesures, insister sur un point qui est de fond mais aussi de méthode. Le budget que nous vous présentons aujourd'hui est un budget plus transparent que dans le passé. En effet, le Gouvernement a procédé à une opération sans précédent de budgétisations, voire dans certains cas, de rebudgétisations, qui s'inscrit clairement en rupture avec certains errements anciens. Plus de 45 MdF de dépenses sont ainsi réintégrés au sein du budget général, traduisant notamment des décisions récentes du Conseil Constitutionnel qui doivent beaucoup à certains spécialistes des finances publiques présents parmi vous.

La pratique encore récente consistait à masquer la réalité de la dépense en débudgétisant certaines d'entre elles ; j'en veux pour exemple le financement du prêt à taux zéro que le précédent gouvernement avait sorti du budget général et que nous réintégrons en son sein. Pour notre part, nous inscrivons clairement dans ce projet de budget des dépenses qui étaient jusqu'alors financées par des fonds de concours et qui n'apparaissaient pas dans la loi de finances initiale. De même, nous supprimons certaines procédures d'affectation de dépenses dans le cadre de comptes spéciaux du trésor afin que celles-ci apparaissent plus lisiblement dans le total des dépenses du budget général. Ces opérations donneront au Parlement une image plus sincère de la réalité de la dépense publique.
Je présenterai maintenant les réformes fiscales, qui ont d'ores et déjà retenu toute votre attention, avant de vous exposer nos grandes priorités en matière de dépenses.

I. – Une réforme progressive et profonde de la fiscalité

Notre fiscalité est critiquée pour son injustice, sa lourdeur, sa complexité. Le Premier ministre a fixé, dans sa déclaration de politique générale, les objectifs que devait atteindre cette indispensable réforme de la fiscalité, dont le budget de 1999 constitue une étape importante. Aucun Gouvernement n'avait osé entreprendre depuis 20 ans, de corriger la taxe professionnelle ou la taxe d’habitation.

Ces objectifs, vous les connaissez :

L'emploi d'abord, notamment par la suppression de la taxe professionnelle assise sur les salaires et par une série de mesures qui favorisent ceux qui produisent, qui bougent, qui créent, qui innovent. C'est une fiscalité en faveur du mouvement et non plus au bénéfice de la rente. La justice fiscale, ensuite, à la fois par une augmentation de près de 30 % du rendement de l'ISF, avec des mesures importantes de lutte contre l'évasion et la délocalisation, par la révision des bases locatives des impôts locaux, qui ne figure pas dans le projet de loi de finances mais qui vous sera soumise très prochainement dans le collectif budgétaire, par des baisses ciblées de la TVA et, pour la première fois depuis vingt ans, par le gel de la TIPP sur l'essence sans plomb. L'environnement, encore, notamment par l'alignement progressif de la fiscalité sur le gazole sur l'écart européen moyen. La simplification enfin, car la complexité avantage les puissants. Cette réforme comprend la suppression pure et simple de plusieurs taxes, notamment sur les timbres de la carte d'identité ou sur les droits d'examen pour le permis de conduire, et un allègement considérable des formalités administratives qui se traduira, dès 1999, par la suppression de 15 millions de formulaires pour les petites entreprises et les ménages.

Elle se traduit, au total, par une vraie réforme de structure de notre fiscalité, autour de cinq objectifs : l'emploi, la justice fiscale, l'écologie, l'innovation et la simplification.

1) Une fiscalité plus favorable à l’emploi

Dès la loi de finances pour 1998, certaines mesures fiscales ont été arrêtées en vue de favoriser l'emploi : crédit d'impôt emploi, crédit d'impôt pour la réalisation de dépenses d'entretien de l'habitation principale. Nous aurons peut-être l'occasion de revenir sur ce dispositif au cours de la discussion budgétaire. Cet effort pour l'emploi est aujourd'hui considérablement amplifié.
D'abord par la suppression de la taxe professionnelle sur les salaires. La taxe professionnelle a été créée en 1975. On ne compte plus les déclarations la critiquant ni les rapports proposant de la réformer. Et c'est effectivement un impôt très critiquable, notamment parce qu'il frappe les salaires et renchérit donc le coût du travail : c'est un frein à l'embauche souvent dénoncé.

En dépit de ces défauts, aucun gouvernement n'a jusqu'à maintenant entrepris une réforme en profondeur de cet impôt. Vous savez que, devant la complexité et l'archaïsme de la taxe professionnelle, le Conseil des impôts avait finalement proposé de « nationaliser » cet impôt en instaurant un taux unique national. Le Gouvernement a écarté une voie aussi radicale, mais il engage, au nom de l'emploi, une réforme essentielle en supprimant sur 5 ans la taxe professionnelle sur les salaires.

Je sais que cette réforme a suscité des controverses sur ses effets pour l'emploi et des inquiétudes chez les élus locaux. Je voudrais, sur ces deux points, apporter des éléments de réponse à la représentation nationale.

D'abord, la suppression de la part salaires aura un fort effet sur l’emploi parce qu'elle bénéficiera principalement aux petites entreprises et aux secteurs à forte intensité de main d’œuvre.

Elle favorise les secteurs de main d’œuvre qui créent des emplois :

La réforme bénéficie avant tout au secteur tertiaire : la TP baissera de près de 50 % dans le BTP, de plus de 40 % dans le commerce, de plus de 50 % dans les services en général, de près de 60 % dans l’artisanat, contre une diminution de l'ordre de 20 % dans l’industrie ; or, ce sont ces secteurs qui créent l'emploi : les 280 000 emplois créés depuis juin 1997 l'ont été quasi exclusivement dans le secteur tertiaire, y compris BTP, l'emploi dans l'industrie manufacturière demeurant stable. Nous savons aussi – beaucoup de rapports et d'études économiques l’ont montré – que la densité en emplois de ces secteurs est inférieure en France à ce qu'elle est dans les autres pays comparables. C'est pourquoi, tout doit être fait, en termes de fiscalité ou de cotisations sociales, pour inciter à la création d’emplois.

Cette réforme favorise les PME, à la fois dans ses effets et dans ses modalités :

– dans ses effets : la baisse de la TP sera en moyenne de 40 % dans les entreprises de moins de 50 MF, et seulement de 25 % dans les entreprises de plus de 500 MF ;
– dans ses modalités : du fait du mécanisme de la franchise, les PME bénéficieront des 1999 pour la plupart d'entre elles, de la suppression totale de la TP sur les salaires : 80 % de la baisse de la TP bénéficiera aux entreprises de moins de 50 MF de chiffre d'affaires en 1999 or ce sont les petites entreprises qui créent des emplois : depuis 1981, les entreprises de moins de 200 salariés ont créé 1,3 million d'emplois, tandis que les entreprises de plus de 200 salariés en détruisaient plus d'1 million.

Sur un autre plan, je voudrais également dissiper les inquiétudes des élus locaux, telles qu'elles se sont exprimées ici ou là.

D'abord, cette réforme n'entrave en rien la libre administration des collectivités locales. Les dotations de l'État représentent, en 1996, globalement 30 % des recettes totales des communes. Elles en représenteront au terme de la réforme de domaine 36 %. On peut difficilement voir la une atteinte à l'autonomie des collectivités locales, alors qu'en Grande-Bretagne 80 % des dépenses nettes des collectivités locales sont financées par l'État et qu'en Allemagne, comme aux Pays-Bas, les recettes des collectivités locales (Länder et communes) dépendent pour l'essentiel des transferts de l'État. Quelle est d'ailleurs l'autonomie réelle de beaucoup de collectivités qui voient l'emploi partir et les entreprises fermer ? N'oublions pas qu'à elles seules, 5 % des collectivités locales perçoivent 95 % du produit de la TP.

Ensuite, le mécanisme de compensation que nous avons mis en place, en collaboration avec Jean-Pierre Chevènement, ministre de l’intérieur, et après plusieurs réunions de concertations et de discussions avec les élus locaux, est clairement établi et le plus souvent favorable aux collectivités locales, notamment aux plus défavorisées d'entre elles.

Nous avons écarte l'option qui avait été retenue en 1982, lorsque la part salaires avait fait l'objet d'un abattement de 10 %, ou celle de 1987, lorsqu'avait été institué un abattement général de 16 % à la base, consistent à utiliser la DCTP, une dotation peu dynamique et qui d'ailleurs, dans le cadre des mécanismes mis en place par le Gouvernement JUPPE, est en régression constante. Au cas présent, parce que la lutte pour l'emploi l'exige, nous avons écarté ce schéma, à l'initiative, je dois le dire, du ministre de l'intérieur J.-P. Chevènement.

La suppression de la part « salaires » sera intégralement compensée aux collectivités locales par une dotation de l'État qui évoluera comme la DGF (inflation + 50 % de la croissance du PIB) à laquelle elle sera d'ailleurs purement et simplement intégrée à l’issue des 5 ans. Les études que nous avons menées montrent que cette compensation est prévisible et dynamique. Son évolution est tout à fait comparable à celle de l’évolution de la masse salariale, voire plus favorable. Ainsi, au cours de la dernière législature, entre 1992 et 1997, la DGF a connu une évolution plus dynamique (12 %) que les bases salaires de la taxe professionnelle (10,5 %). N'oublions pas que la part salaires représentait 50 % des bases en 1980, 40 % en 1990 et 34 % aujourd’hui.

Par ailleurs, ce mécanisme va clairement dans le sens d'une réduction des inégalités entre collectivités, puisque celles qui sont situées dans des zones en difficulté ou confrontées à des restructurations continueront à recevoir des ressources sécurisées. Une commune qui perd des emplois cessera de perdre de la TP. Elle n'aura plus à courir après des compensations, d'ailleurs partielles et provisoires, offertes par le FNPTP.

Parallèlement, les collectivités locales situées dans des zones en croissance continueront à bénéficier, outre de la compensation de la part « salaires », de la taxe professionnelle sur les investissements qui constituent la part la plus dynamique et la plus importante de l'assiette (2/3 de l'assiette totale). Cette part a ainsi évolué de plus de 30 % de 1992 à 1997, contre 10 % seulement pour la part salaires sur la même période. En outre la suppression totale de la réduction pour embauche et investissement (RE1) à compter de 2000 procurera des recettes supplémentaires aux collectivités locales en contrepartie de la suppression d'une compensation (3,2 MdF en 1998) peu dynamique qui avait été progressivement rognée avec le temps.

J'ajoute que la réforme de la taxe professionnelle n'entrave en rien le projet de mise en place d'une taxe professionnelle d'agglomération qui conserve toute sa pertinence pour les collectivités locales (efficacité accrue des services publics avec des ressources garanties) et pour les entreprises (taux unique dans un espace économique cohérent). En effet, les groupements futurs bénéficieront, dans le cadre de la TPU, de la compensation des bases salaires exactement comme les groupements déjà constitués.

Je crois au total qu'il s'agit d'une bonne réforme de la TP, équilibrée dans toutes ses composantes, et efficace pour l’emploi.

L'emploi passe aussi par le développement de l’activité du logement et du bâtiment. C'est l'avis de nombreux parlementaires et c'est aussi celui du Gouvernement. En effet, le soutien de cette activité est particulièrement nécessaire au maintien du dynamisme de notre demande intérieure. Outre la suppression de la taxe professionnelle sur les salaires, qui bénéficiera dans des proportions importantes au secteur du bâtiment, plusieurs mesures du projet de loi de finances ont pour effet de soutenir l’activité de ce secteur.

D'abord, la baisse des droits de mutation à titre onéreux à la fois sur les ventes de locaux d'habitation et sur les cessions de locaux professionnels. Les droits sur les immeubles d'habitation, que l'on dénomme « frais de notaire » dans le langage courant, sont particulièrement élevés en France. Ils passeront désormais en moyenne à 6 % – ce qui représente une baisse d'un cinquième –, par la suppression de la part régionale.

Quant aux droits de mutations à titre onéreux applicables en cas de cession d'immeubles industriels et commerciaux, ils seront réduits de 18,2 % à 4,8 %, cette réforme s'opérant à ressource constante pour les collectivités locales. Ce taux s'appliquera à toutes les transactions.

Ces deux très importantes réformes seront accompagnées, à l'initiative de Louis Besson, secrétaire d'État au logement, de l'institution d'avantages fiscaux en faveur des bailleurs privés de logements intermédiaires, qui combinera l’efficacité économique et la légitimité sociale.

La bonne transmission des entreprises est également un élément essentiel au maintien de l’emploi dans notre pays. Or, toutes les études montrent que ces transmissions sont plus efficaces lorsqu’elles sont anticipées. C’est pourquoi nous vous proposons que les droits de mutation dus en cas de donations soient dorénavant réduits de 50 % lorsque le donateur est âgé de moins de 65 ans et de 30 % lorsque le donateur a entre 65 et 75 ans. Votre commission des finances a adopté un amendement supprimant cette 2e limite pour un an, auquel (je peux d’ores et déjà vous l’indiquer) le Gouvernement apportera son plein appui.

2) Une fiscalité plus favorable à la justice sociale

La recherche de la justice fiscale, déjà entamée par le Gouvernement dans la loi de finances pour 1998; doit se poursuivre en modernisant la taxe d'habitation, en durcissant la fiscalité pour les gros patrimoines, et en allégeant les impôts indirects pesant sur les ménages.

Je n'insisterai pas sur la modernisation de la taxe d'habitation et de la taxe foncière qui résultera de la révision des valeurs locatives. Cette réforme sera soumise au Parlement dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 1998, et nous aurons alors l'occasion d'en discuter de façon très approfondie. C'est une réforme fondamentale qui se traduira l’automne 2000 par des transferts de charges substantiels entre contribuables dans le sens de plus de justice et d'une meilleure correspondance entre les facultés contributives et l'impôt acquitté. Les transitions nécessaires seront ménagées pour que les évolutions soient bien étalées dans le temps.

Il faut également aménager la fiscalité du patrimoine afin d'empêcher une évasion que les imprécisions de la loi permettent aujourd'hui. Il convient aussi d'achever le rééquilibrage entre la fiscalité du travail et celle du capital.

C'est pourquoi le Gouvernement propose d'une part, une série de mesures destinées à la fois à lutter contre l’évasion fiscale et les délocalisations de personnes physiques et, d'autre part, la création d'une nouvelle tranche de 1,8 % pour les 800 patrimoines supérieurs à 100 MF. L'ensemble de ces mesures contribuera à augmenter de 30 % le rendement de l'ISF, qui pourrait être porté de 11 MdF en 1998 a environ 14,5 MdF en 1999, sous réserve évidemment de l’évolution des cours des placements financiers.

Le Gouvernement souhaite également adapter l’exonération des droits de succession dont bénéficient les produits d'assurance-vie, qui profile essentiellement aux plus gros patrimoines. Le dispositif initialement envisagé a été rejeté par votre Commission des finances au nom d'inquiétudes sur la constitutionnalité de cette disposition, ce que le Gouvernement admet. Un nouveau système, qui poursuit des objectifs analogues, vous sera soumis dans le cadre de la discussion budgétaire à l'initiative de votre commission des finances.

Enfin, afin que la fiscalité ne favorise pas les placements financiers des entreprises, il est proposé de réduire en 1999 le taux de l'avoir fiscal dont elles bénéficient de 50 % à 45 %. D'autres mesures pourront peut-être venir compléter, au cours du débat parlementaire, ce durcissement de la fiscalité des placements des entreprises.

La majorité s'était engagée, au cours de la campagne électorale, à baisser la TVA. Une première étape a été accomplie en ce sens lors de la loi de finances pour 1998, qui a prévu une baisse de 20,6 % à 5,5 % de la TVA applicable aux travaux de rénovation dans le logement social.

Cette mesure importante sera amplifiée en 1999. L'ancienne majorité avait relevé le taux de la TVA sur les abonnements à l’électricité et au gaz, par deux fois, en 1994 et 1995. Nous proposons aujourd'hui de revenir au taux de 5,5 %, ce qui bénéficiera tout particulièrement aux ménages modestes. Cette mesure sera accompagnée d'une diminution à 5,5 % de la TVA applicable à certains appareillages pour les personnes handicapées, de la TVA applicable sur la collecte, le traitement et l'élimination des déchets faisant l'objet d'un tri sélectif, de la TVA applicable aux travaux d'amélioration des logements sociaux privés. Peut-être faudra-t-il aller plus loin ? Nous sommes ouverts aux initiatives des parlementaires sur ce sujet, mais dans le respect de deux contraintes particulièrement lourdes en matière de TVA : les contraintes budgétaires et communautaires. Je rappelle que, d'ores et déjà, depuis l'été 1997, le Gouvernement a allégé la TVA de près de 10 MdF.

Ces mesures d’allègement de la TVA seront complétées par d'autres baisses de la fiscalité indirecte. En effet, certaines taxes, comme le droit de timbre sur les cartes nationales d'identité ou encore le droit d'examen pour les permis de conduire, pénalisent avant tout les ménages modestes et les jeunes contribuables. C'est pourquoi le Gouvernement vous propose de supprimer ces deux impôts, ce qui bénéficiera à plus de 4 millions de ménages.

3) Une fiscalité plus favorable à l’écologie

La volonté du Gouvernement de pénaliser les activités polluantes et d'encourager les comportements protecteurs de l'environnement inspire les mesures fiscales de l’an 1 de la fiscalité écologique.

Il est d'abord indispensable de mettre fin à la singularité dc la France en Europe en ce qui concerne l’écart de taxation du gazole et de l'essence sans plomb (1,43 F/1 contre 0,93 F/1 en moyenne dans l'Union européenne). Il vous est donc proposé de supprimer la différence par rapport à l’écart moyen communautaire en 7 ans. En 1999, la première étape de ce rattrapage – qui sera d'un montant de 7 centimes – s'accompagnera pour la première fois depuis 20 ans d'une stabilité de la TIPP sur l'essence sans plomb, carburant moins polluant.

Cette mesure de relèvement des taxes sur le gazole s'accompagnera d'un certain nombre de dispositions favorables aux véhicules propres, notamment aux véhicules bicarburés.

Enfin, il convient de rationaliser les taxes sur la pollution. L'existence de multiples taxes sur la pollution, affectées à des organismes très divers, se traduit par une complète illisibilité de la politique fiscale de lutte contre la pollution et de réelles difficultés de gestion. C'est pourquoi le Gouvernement proposera de substituer dès l’année 1999 aux taxes sur la pollution existantes une taxe unique, appelée taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), affectée au budget de l'État et redistribuée aux acteurs de la lutte contre la pollution.

4) Une fiscalité plus favorable à l'innovation

Le Gouvernement entend favoriser le capital de proximité investi dans les entreprises de croissance. Ainsi, le dispositif actuel de déduction fiscale pour les personnes physiques qui investissent dans des PME nouvelles sera pérennisé et le régime des fonds communs de placements dans l'innovation (FCPI) sera assoupli. Nous allons parallèlement mettre en place un nouvel avantage fiscal au titre des dons faits par les particuliers aux associations de soutien à la création d’entreprise.

Enfin nous allons proposer d'améliorer sensiblement le mécanisme de déduction du revenu global des pertes en capital réalisée par les investisseurs qui n'hésitent pas à prendre des risques.

Le crédit d'impôt recherche, qui a démontré son efficacité pour encourager la réalisation de dépenses de recherche et développement par les entreprises, sera reconduit pour 5 ans et amélioré sur de nombreux points, notamment en direction des petites et moyennes entreprises.

Nous avons aussi décidé d'élargir le régime des bons de souscription de parts de créateurs d'entreprises et le dispositif de report d'imposition des plus-values réinvesties dans les entreprises nouvelles à toutes les entreprises à fort potentiel de croissance de moins de quinze ans.

5) Une fiscalité plus simple

Le Gouvernement a déjà mené, sous l'impulsion de Marylise Lebranchu, secrétaire d'État aux petites et moyennes entreprises, un important effort de simplification des relations entre l'administration et les petites entreprises. Cette démarche de simplification des obligations des petites entreprises est confirmée par plusieurs dispositions importantes de ce projet de loi et étendue à certaines obligations des particuliers.

D'abord, une simplification radicale des obligations au titre de la TVA pour plus de 500 000 très petites entreprises sera mise en œuvre en 1999. Il s'agit d'exonérer de TVA les biens livrés et les prestations facturées par les entreprises dont le chiffre d'affaires n'excède pas selon les professions, 175 000 F ou 500 000 F, alors que le seuil actuel est fixe à 100 000 F. Ces entreprises n'auront plus à souscrire de déclarations de TVA, ce qui conduira à la suppression de plusieurs millions de formulaires fastidieux à remplir pour les dirigeants de ces très petites entreprises, qui y gagnent un allègement des charges et une réduction de l'impôt papier.

Cette mesure sera accompagnée d’un allégement sensible des obligations déclaratives pour plus de 800 000 entreprises réalisant moins de 5 MF de chiffre d'affaires qui sont soumises au régime réel simplifié d'imposition, lequel conduira à la suppression de plus de 7 millions de déclarations chaque année.

La simplification est un enjeu important pour les petites entreprises mais elle concerne également les particuliers. C'est pourquoi, l'exigence d'un certificat de scolarité pour l'obtention de la réduction d'impôt pour frais de scolarisation des enfants sera supprimée. Plus d'une famille sur deux bénéficiera de cette mesure.

Enfin, le mouvement de suppression des petits impôts sera poursuivi. Ainsi, outre le droit de timbre sur les cartes d'identité et le droit d'examen pour l’obtention du permis de conduire, la loi de finances pour 1999 comprendra, dans la ligne de la suppression de la taxe sur les aéronefs ou de droit de timbre sur les contrats de transport, décidées l’année dernière, six suppressions d'impôt, dont par exemple la taxe sur les briquets et les allumettes.

Au total, la loi de finances pour 1999 conduira à l'abrogation de 58 articles législatifs du code général des impôts. Elle permettra par ailleurs la suppression de dix procédures déclaratives concernant plus d'un million de petites entreprises et plus de trois millions de particuliers. Ce sont près de quinze millions de formulaires par an qui vont ainsi être supprimés. Ces chiffres sont les indicateurs les plus notables de la volonté simplificatrice du Gouvernement.

En conclusion de cet exposé sur la fiscalité, je voudrais souligner un seul point : les impôts vont baisser significativement en 1999. J'en viens maintenant à la présentation des dépenses  du PLF.

II. – Les grandes priorités budgétaires du Gouvernement

Les dépenses de l'État progresseront de 1 % en volume en 1999, soit 16 MdF, auxquels s'ajoutent les efforts d'économies et de redéploiements sur l'ensemble des budgets (30 MdF). Ces marges de manœuvre sont concentrées sur les priorités du Gouvernement : l'emploi et la justice sociale d'une part, l'amélioration des missions de service public et de la vie quotidienne d'autre part.

Comme vous pouvez le constater, ces priorités sont les mêmes que l'an dernier. Qu'il s'agisse de l'emploi, la santé et la solidarité, la justice, la sécurité publique, la culture, l'enseignement et la recherche, notre action est une action en profondeur et obstinée, qui s'inscrit dans la durée, selon le plan de route tracé par la déclaration de politique générale du Premier ministre.

1) L'emploi et la justice sociale

L'emploi constitue la priorité numéro un de ce Gouvernement. La politique menée a permis une diminution du chômage de près de 120 000 personnes depuis l'été 1997. La baisse quasi-continue du chômage depuis presque un an constitue une tendance forte qu'il convient de rendre durable et d'amplifier. A cette fin, les crédits du budget de l'emploi progresseront de 6,1 MdF en 1999 (+ 3,9 %).

Le budget de l'emploi poursuit deux ambitions : d'une part rendre la croissance plus riche en emplois, grâce à la réduction du temps de travail et à l'allègement des charges sociales sur les bas salaires ; d'autre part réintégrer les exclus dans le monde du travail au moyen de dispositifs appropriés.

C'est en particulier le cas des emplois jeunes, pour lesquels 100 000 nouveaux postes seront criés l'an prochain, portant le total des bénéficiaires à 250 000 depuis la création de la mesure. C'est aussi le cas des contrats emploi consolidés, dont le volume d'entrées nouvelles sera doublé pour atteindre 60 000 en 1999.

Le développement de l'emploi et de la justice sociale se traduit également par un effort envers la santé et la solidarité, qui verra ses moyens augmenter de 4,5 %, notamment pour créer 2 000 places nouvelles en centres d'aide par le travail, ou encore renforcer les moyens de lutte contre la toxicomanie et le SIDA.

La politique de la ville sera relancée : avec 1 MdF de crédits, la ville enregistre la plus forte progression de ce projet de budget (+ 32 %). Les dépenses d'intervention augmenteront de 50 %, en particulier au profit des contrats de ville, ainsi que des Grands Projets Urbains, pour lesquels une enveloppe spécifique sera créée.

Le logement connaîtra également une progression importante (+ 4 %), essentiellement consacrée à l'accès au logement des plus modestes et à la poursuite de l'effort de rénovation du parc de logements.

Il convient d'ajouter que tous les budgets cités, et d'autres encore, sont dotés de moyens spécifiques au titre de la politique de lutte contre les exclusions. Ces moyens sont en forte augmentation puisqu'ils passeront de 2,4 MdF en 1998 à 7,7 MdF en 1999, soit un triplement en un an.

Concernant l’éducation, les dotations consacrées à l'enseignement scolaire progressent de 4,1 % (+ 12 MdF). Elles permettent de poursuivre les actions de lutte contre l’exclusion sociale en milieu scolaire et notamment d'accueillir 60 000 emplois-jeunes, aux côtés des enseignants, pour encadrer les élèves. Les redéploiements internes au budget de l'enseignement scolaire permettent de créer à la rentrée 1999, dans les établissements scolaires, 3 300 emplois d'enseignants du second degré et 616 emplois de personnels non enseignants.

En particulier, les efforts consentis dans la LFI 1998 en matière de santé scolaire (+ 600 emplois) sont poursuivis : le projet de budget 1999 prévoit de créer 400 emplois de médecins, d'infirmiers et d'assistantes sociales afin de renforcer les moyens médicaux et de suivi social des élèves.

Par ailleurs, afin de développer l'apprentissage des langues vivantes dans le premier degré, 1 000 assistants étrangers supplémentaires sont recrutés à la rentrée 1998, soit un quasi-doublement des effectifs.

Au total, ces efforts, qui doivent être correctement répartis sur le territoire, devraient contribuer à améliorer substantiellement la qualité de l’enseignement.

Les moyens consacrés à l’enseignement supérieur connaissent une évolution encore plus forte, de 5,5 %, compte tenu des besoins démographiques et sociaux : 650 emplois budgétaires de personnels non enseignants (dont 40 affectés au développement des nouvelles technologies dans les IUFM) et 150 emplois budgétaires de personnels de bibliothèque seront créés dans les universités à compter du 1er septembre 1999. Au total, en deux ans, près de 2 000 emplois de personnels ingénieurs, administratifs, techniques, ouvriers et de service auront été créés. De plus, afin de permettre aux universités d'assurer la formation des étudiants dans de meilleures conditions, 1 500 enseignants-chercheurs supplémentaires seront recrutés à la rentrée 1999.

Par ailleurs des moyens importants sont prévus au titre du futur plan social étudiant.

2) L'amélioration des conditions de la vie quotidienne

L'État doit assurer pleinement ses missions régaliennes et garantir un égal accès de tous au service public.

C'est pourquoi la priorité donnée à la justice en 1998 sera renforcée en 1999. Avec une progression de 5,6 % de ses crédits, ce ministère disposera de 26,3 MdF, soit une progression de 1,4 MdF par rapport à 1998. Il fait actuellement progresser de nombreux chantiers de front, afin de mieux répondre aux besoins des usagers et de renforcer les libertés. L'accélération des procédures pénales, le développement des modes alternatifs de règlement des litiges, ou encore le développement des maisons de justice, sont autant d'exemples concrets des efforts que nous menons pour rapprocher la justice de nos concitoyens. Dans ce cadre, 930 emplois sont créés, qui devraient avoir des retombées immédiates et concrètes.

Dans le même temps, les moyens alloués à la sécurité publique sont accrus de 3 %, 53,2 MdF, en particulier les moyens de fonctionnement de la police et les crédits d'investissement du ministère de l’intérieur.

Prolongeant l'effort de 1998, et pour répondre aux attentes exprimées par la population en matière de sécurité de proximité, les effectifs totaux de la police atteindront 133 100 agents, en hausse de 2,6 % par rapport à 1998. En particulier, 7 600 adjoints de sécurité supplémentaires seront recrutés et affectés en priorité dans les zones sensibles.

Le budget de la culture connaîtra également une progression dynamique de ses crédits, lui permettant d'atteindre 0,97 % du montant total des dépenses de l'État en 1999, à 15,7 MdF.

Quant au secteur audiovisuel public, son budget s'élève à 18,5 MdF, en progression de 2,6 % par rapport à 1998. La hausse du tarif de la redevance est limitée à celle des prix. De plus, dans la perspective de la réforme de l'audiovisuel public annoncée récemment par le Premier ministre, qui n'a vocation à entrer en vigueur qu'à partir de l’an 2000, la part des recettes publicitaires dans le budget de France 2 est dès cette année ramenée, à titre symbolique, en dessous de 50 % de ses recettes totales, réduisant ainsi la dépendance des chaînes publiques et de la création publique par rapport à la publicité.

L'environnement constitue enfin une composante essentielle de notre cadre de vie. Compte tenu du nombre croissant de ses missions, les moyens de ce ministère connaissent une progression sans précédent : + 15,1 % à structure constante, soit 2,2 MdF, auxquels s'ajoute le produit de la nouvelle taxe générale sur les activités polluantes (1,9 MdF).

Parmi les priorités de ce ministère, la protection de la nature et la prévention des risques bénéficieront de la création d'un fonds de gestion des milieux naturels. L'information du public et la protection des personnes seront renforcées, notamment dans le domaine de l’eau et des risques industriels. Enfin, la maîtrise de l'énergie et le développement des énergies renouvelables recevront une impulsion dans le cadre de la mise en place de la nouvelle fiscalité écologique.

Mesdames et messieurs les députés, j’ai souhaité, à travers cet aperçu du projet de budget pour 1999, vous montrer la volonté et la cohérence de nos choix. Toutes les mesures que je vous ai présentées, qu'il s'agisse de mesures fiscales, des priorités budgétaires, ou encore de notre politique de réduction du déficit, vont dans le même sens : la volonté de la croissance, d'une croissance plus forte et plus riche en emplois ; la volonté de justice sociale, du partage des fruits de cette croissance au profit de ceux qui en ont le plus besoin. La confiance retrouvée de nos concitoyens, mais aussi de nos entreprises, les bons résultats enregistrés par la France depuis l’été 1997, montrent que nous avons choisi la bonne voie : la réussite économique et la solidarité, loin de se combattre, peuvent aller de pair et se renforcer mutuellement, pour que notre pays rentre dans le XXIe siècle plus fort, plus juste, plus rayonnant.