Image principale 1
Image principale 1
© Frédéric Bisson - flickr

Justice administrative : les 150 ans de l'arrêt "Blanco" 

Temps de lecture  3 minutes

Par : La Rédaction

Le 8 février 1873, le Tribunal des conflits juge que l'État peut être tenu responsable des dommages causés par les services publics. À l'occasion des 150 ans de cet acte fondateur du droit administratif moderne en France, le Conseil d'État revient sur l'arrêt "Blanco".

Agnès Blanco était une fillette de 5 ans, amputée d'une jambe après s'être fait renverser par le wagonnet d'une manufacture de tabac exploitée par l'État (transformée par la suite en une société commerciale, la Seita). Son père avait saisi les tribunaux judiciaires afin de faire déclarer l'État civilement responsable du dommage, sur le fondement des articles 1382 à 1384 du code civil.

Par l'arrêt "Blanco" du 8 février 1873, le Tribunal des conflits consacre :

  • la responsabilité de l'État à raison des dommages causés par les services publics ;
  • la compétence de la juridiction administrative.

Selon l'analyse du Conseil d'État, cette décision met fin à une longue tradition d'irresponsabilité, qui ne trouvait d'exceptions qu'en cas de responsabilité contractuelle ou d'intervention législative (loi du 28 pluviôse an VIII pour les dommages de travaux publics).

À l'occasion du 150e anniversaire de cette décision, le Conseil d'État revient sur les apports de l'arrêt "Blanco" au droit administratif français.

 

Responsabilité de l'État et services publics

L'arrêt "Blanco" soumet la responsabilité de l'État à un régime spécifique, justifié par les besoins du service public. Cette responsabilité "ne peut être régie par les principes établis dans le code civil, pour les rapports de particulier à particulier". 

Le corollaire de l'existence de ces règles spéciales réside dans la compétence de la juridiction administrative pour connaître de cette responsabilité, en application de la loi des 16 et 24 août 1790 : "Les fonctions judiciaires sont distinctes et demeureront toujours séparées des fonctions administratives. Les juges ne pourront, à peine de forfaiture, troubler, de quelque manière que ce soit, les opérations des corps administratifs, ni citer devant eux les administrateurs pour raison de leurs fonctions (article 13)."

Avec l'arrêt "Blanco", l'État est responsable des dommages qu'il provoque et le juge administratif est chargé de juger la responsabilité de l'État pour l'action des services publics, nationaux comme locaux.

Évolution du droit administratif depuis l'arrêt "Blanco"

Le Conseil d'État donne quelques exemples de décisions de la justice administrative :

  • affaire du sang contaminé : l'État est condamné en avril 1993 par le Conseil d'État à indemniser des victimes contaminées par le virus de l'immunodéficience humaine en raison de perfusions de produits sanguins anti-hémophiliques ;
  • décision "Papon" : le Conseil d'État ouvre en avril 2002 la possibilité d'engager la responsabilité de l'État français pour les actes antisémites commis par l'administration française sous le régime de Vichy.

Le Conseil d'État souligne que l'accident d'Agnès Blanco ne serait plus jugé de la même manière aujourd'hui :