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Aide sociale à l'enfance : quel est le parcours des jeunes placés par l'ASE ?

Temps de lecture  3 minutes

Par : La Rédaction

À la croisée des travaux sur la protection de l’enfance et sur l’inégalité des chances, comment analyser le parcours scolaire et professionnel des jeunes éloignés de leur famille par un placement en protection de l'enfance ?

Le nombre de jeunes pris en charge par l'Aide sociale à l’enfance (ASE) s’élève à 344 000 mineurs et jeunes majeurs sur la France entière au 31 décembre 2022. 

Dans une étude intitulée "Retisser les fils du destin : parcours des jeunes placés" publiée le 10 septembre 2024, France Stratégie s'intéresse à la mobilité sociale des jeunes passés par l'ASE, alors que le système éducatif reste "marqué par une forte dépendance de la réussite scolaire à l’origine sociale". L'étude compare le vécu et les trajectoires de jeunes placés (en famille d'accueil, chez un tiers ou en établissement) avec ceux des jeunes non placés du même âge. 

Des parcours scolaires souvent fragmentés ou abrégés

Selon l’étude, les jeunes passés par l’ASE présentent plus que les autres des "parcours heurtés" par des redoublements et des périodes de déscolarisation :

  • 40% des enquêtés ont redoublé à l’école primaire (une proportion 2,5 fois plus élevée que celle de l’ensemble des jeunes du même âge nés en France) ;
  • 21% ont redoublé au collège (un niveau similaire à celui des enfants d’origine très modeste) ;
  • 24% ont été déscolarisés au moins une fois pendant deux mois ou plus.

L’orientation "massive" des jeunes placés dans la voie professionnelle courte s’expliquerait par un cumul de milieu social défavorisé et de situations spécifiques qui ont conduit au placement, les maltraitances subies dans la famille d’origine pouvant créer des troubles psychiques, cognitifs, émotionnels et comportementaux rendant les apprentissages plus difficiles (troubles anxieux, dépression, difficultés relationnelles…).

Par ailleurs, au sein des structures de placement, certains jeunes décrivent des violences psychiques, psychologiques ou sexuelles entre pairs. Ce "continuum des violences familiales aux violences institutionnelles" explique l’interruption parfois précipitée du parcours scolaire. Ainsi, seuls 12% des sondés possèdent un baccalauréat général ou un diplôme de l’enseignement supérieur.

Le poids du milieu social et des contraintes financières

Les trajectoires de jeunes placés résultent d’une "alchimie entre ce qui est hérité de l’avant-placement, ce qui se transmet pendant le placement et comment s’opère la sortie de ce placement". Généralement, les jeunes placés sont issus de familles modestes. L'origine sociale a d’autant plus de poids sur le parcours de l'enfant que le placement intervient tardivement et sur une durée limitée. 

Les familles d’accueil, quant à elles, relèvent le plus souvent des "classes dites populaires supérieures" ou des "classes moyennes inférieures", un milieu social globalement plus favorisé et porteur de certaines valeurs, comme l’importance de la scolarité pour l’avenir. Néanmoins, sans soutien financier de la part de leur famille d'origine, les jeunes placés sont contraints de s'orienter vers des études courtes et professionnalisantes afin d'acquérir une autonomie rapide et nécessaire

En prolongeant l’accompagnement jusqu’à 21 ans, la "loi Taquet" de février 2022 devrait faciliter l’accès des jeunes placés à l’enseignement supérieur et ainsi "renforcer leurs chances d’ascension sociale". Cela suppose néanmoins que la réussite scolaire soit explicitement définie comme objectif prioritaire du placement.