L'Assemblée nationale a publié, le 9 juillet 2025, le rapport de la mission d'information sur l'évaluation de la création des cours criminelles départementales (CCD) qui jugent à plus de 85% des crimes de viols.
Un engorgement aux causes multiples
Selon les termes du rapport, "force est de constater que le modèle actuel des cours criminelles est d’ores et déjà dépassé pour répondre au défi que représente l’engorgement de la justice criminelle."
Dans un contexte de libération de la parole des victimes, les plaintes pour viols ont fortement augmenté (+152% entre 2017 et 2023). La hausse des dénonciations de crimes sexuels constitue un défi pour le système judiciaire : en 2023, les viols et autres crimes de nature sexuelle représentent 62% de la totalité des infractions criminelles sanctionnées (contre 40% en 2020).
Durant leur première année de pleine activité (2023), les cours criminelles départementales (CCD) ont rendu 773 arrêts. En 2024, 1 273 arrêts ont été prononcés par les CCD, soit près de 50% des arrêts de première instance en matière criminelle.
D'après le rapport, les affaires jugées par les CCD en 2023 concernaient :
- pour 82% des crimes sexuels ;
- pour 8% des violences criminelles ;
- pour 3% des vols criminels ;
- pour 7% des délits connexes.
Alors que des affaires de viols, requalifiées en agressions sexuelles, étaient auparavant jugées en quelques heures par un tribunal correctionnel, elles font désormais l’objet d’une audience criminelle dont la durée (plusieurs jours) a tendance à s'accroître.
À cette augmentation des affaires jugées et des délais d'audience s'ajoutent un manque de magistrats et de salles d'audience disponibles qui contribue à l'augmentation du stock d'affaires à juger.
Quelles pistes pour restaurer l’efficacité de la chaîne pénale ?
Les rapporteurs sont favorables à ce qu’une réflexion approfondie portant sur la mise en place d'une procédure de reconnaissance de culpabilité soit menée, en concertation avec l’ensemble des parties de la chaîne pénale.
Une telle procédure permettrait d’accélérer la réponse pénale, d’alléger la charge des juridictions criminelles et d’éviter un procès à la victime, notamment lorsque celle-ci ne le souhaite pas. Il conviendrait de trouver un équilibre entre procédure allégée et respect de la place de la victime.
Ils estiment que le renforcement des effectifs de magistrats et greffiers est nécessaire.
Les rapporteurs préconisent de réduire la composition de la formation de jugement de la CCD à trois magistrats professionnels en activité, soit un président et deux assesseurs.
Ils recommandent d'instituer une CCD d’appel pour réduire la charge des cours d’assises d’appel et rendre le système plus cohérent et davantage intelligible pour le justiciable.
La fin du système hybride (une CCD en première instance et une cour d’assises en appel) pourrait réduire le taux d’appel, la présence d’un jury populaire en appel étant de nature à inciter la personne condamnée en première instance par une CCD à "tenter sa chance devant le jury".
Afin de réduire les contraintes immobilières, les rapporteurs plaident pour que la fixation du siège de la CCD soit possible dans un tribunal judiciaire du même département mais qui ne soit pas celui où se tient la cour d’assises. La décorrélation des sièges des deux juridictions criminelles permettrait la tenue simultanée d’audiences, ce qui contribuerait à réduire les stocks de dossiers criminels.