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Biodiversité : des aides publiques aux effets néfastes ?

Temps de lecture  4 minutes

Par : La Rédaction

Changement d'usage des sols et des mers, surexploitation des ressources, pollution... Les activités humaines ont un impact sur la biodiversité. Certaines pratiques et financements publics renforcent les dommages causés.

Dans le cadre de la stratégie nationale de la biodiversité 2030, une mission a été chargée de réaliser "un état des lieux partagé des dépenses publiques les plus dommageables à la biodiversité à réorienter en priorité". Confiée à l’Inspection générale des finances (IGF), au Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) et à l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD), la mission a examiné l'impact des pratiques dans cinq secteurs économiques : l'agriculture, la forêt, les activités maritimes (pêche, aquaculture, transport), l'aménagement du territoire et l'énergie. 

Les travaux ont débouché sur deux rapports distincts, publiés le 22 juillet 2025, le CGAAER s'étant retiré de la mission en raison d'un désaccord sur la méthode d'évaluation. Le rapport de l'IGEDD et de l'IGF a examiné les effets des aides dans cinq secteurs en comparant la situation actuelle avec les objectifs de la SNB. Le document qualifie de dommageable les aides qui incitent à des pratiques préjudiciables et celles qui sont moins performantes pour protéger la biodiversité. Le rapport du CGAAER privilégie de son côté une analyse de l'effet des aides en comparaison avec un scénario sans aide.

Des dépenses publiques nuisibles à la biodiversité

Les différences de méthodologie conduisent à des "écarts substantiels" de chiffrage. Sur 738 aides examinées représentant 92,5 milliards d'euros, le rapport de l'IGF et l'IGEDD identifie 252 dispositifs à réévaluer étant donné leurs effets sur la biodiversité.

Les subventions publiques identifiées par l'IGF et l'IGEDD comme nocives pour la biodiversité sont essentiellement les dispositifs destinés à l'agriculture et à l'aménagement du territoire (artificialisation des sols pour construire des logements, par exemple). Par secteur économique : 

  • 87 aides agricoles sont à revoir sur 248 (essentiellement les aides de la PAC) ;
  • 39 subventions pour l'énergie sur 95 (chèque énergie, bouclier tarifaire, notamment) ;
  • 105 aides pour l'aménagement du territoire sur 302 (prêt à taux zéro, la loi Pinel, par exemple) ;
  • 18 financements dédiés aux filières maritimes (pêche, aquaculture et transport), notamment des aides fiscales (taxe au tonnage, carburant...) ;
  • 3 aides pour la forêt sur 50.

Le CGAAER "a identifié peu de subventions dommageables", évaluées à 1,3 milliard d'euros. Les dépenses préjudiciables à la biodiversité représentent : 

  • 1,1 milliard d'euros pour l'agriculture (irrigation "mal maîtrisée", disparition des haies, pollution des sols et des eaux par excédents d’azote et de phosphore, notamment) ;
  • 149 millions d'euros pour la pêche (chalutage) ;
  • 57 millions d'euros pour la forêt.

Les subventions à revoir pour préserver la biodiversité

"Les politiques menées dans les secteurs étudiés ne sont globalement pas suffisamment alignées sur les objectifs de préservation et de restauration fixés par la SNB 2030, les subventions servent en priorité d'autres fins", constatent ensemble les trois inspections. 

Les deux rapports s'accordent sur les modifications à apporter aux aides agricoles. Ils préconisent de revoir les conditions d'obtention des aides publiques à l'agriculture et de renforcer le soutien à l'agriculture biologique et à l'éco-régime. Les trois inspections recommandent également  :

  • d'élaborer "une stratégie de réduction progressive de la pression liée au chalutage de fond dans les aires marines protégées" pour la pêche ;
  • de s'interroger sur la gestion durable de la forêt publique et sur le maintien des allègements fiscaux en faveur des propriétaires des forêts privées (achat de carburants pour les travaux forestiers, par exemple).