Communiqué commun des chefs d'Etat et de gouvernement des pays de la CEE diffusé à l'issue du Conseil européen de Dublin le 26 juin 1990, sur l'union politique (Annexe I).

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Circonstance : Conseil européen de Dublin les 25 et 26 juin 1990

Média : Bulletin d'information du ministère des affaires étrangères - Bulletin d'information du ministère des affaires étrangères

Texte intégral

1. Introduction.
- Lors de sa réunion du 28 avril 1990, le Conseil européen a déclaré que l'on est parvenu à un stade où la poursuite de l'évolution dynamique de la Communauté est devenue un impératif, non seulement parce qu'elle correspond aux intérêts directs des douze Etats membres, mais encore parce qu'elle est devenue un élément d'une importance cruciale dans la réalisation des progrès en cours visant à établir un cadre fiable pour la paix et la sécurité en Europe. Dans ce contexte, le Conseil européen a confirmé son engagement à l'égard de l'Union politique et il a décidé que les ministres des affaires étrangères devaient soumettre à un examen approfondi la question de savoir s'il est nécessaire d'apporter d'éventuelles modifications au traité et élaborer des propositions à l'intention du Conseil européen.
- Des contributions écrites ont été présentées par les Etats membres et un certain nombre d'idées et de suggestions ont été rassemblées. Lors de leurs réunions de mai et juin, les ministres des affaires étrangères ont procédé à un examen et à une analyse de ces questions en vue du débat du Conseil européen au sujet de la convocation d'une conférence intergouvernementale sur l'Union politique visant à définir le cadre dans lequel l'ensemble des relations entre les Etats membres pourront se transformer en une Union européenne dotée des moyens d'action nécessaires.
- Le résultat de ces travaux est exposé ci-dessous.

2. L'objectif général de l'Union politique.
- L'Union politique devra renforcer d'une manière globale et équilibrée la capacité de la Communauté et de ses Etats membres d'agir dans les domaines où ils ont des intérêts communs. L'unité et la cohérence des politiques et des actions devraient être garanties par des institutions fortes et démocratiques.
- L'Union restera ouverte à l'adhésion d'autres Etats européens qui en acceptent les objectifs finals, en même temps que des relations plus étroites seront instaurées avec d'autres pays dans l'esprit de la déclaration de Rhodes.
- La transformation de la Communauté, qui doit faire d'une entité essentiellement fondée sur l'intégration économique et la coopération politique une union de nature politique, avec une politique commune en matière de relations extérieures et de sécurité, soulève un certain nombre de questions d'ordre général :

  • a) Etendue du champ de compétences.

- Dans quelle mesure l'Union exige-t-elle un nouveau transfert de compétences à la Communauté accompagné des moyens nécessaires pour lui permettre d'atteindre ses objectifs ?
- Comment l'Union intégrera-t-elle et étendra-t-elle la citoyenneté communautaire avec les droits spécifiques qui s'y attachent (droits de l'homme, droits politiques et sociaux, liberté totale de circulation et de séjour) en faveur des citoyens des Etats membres au titre de l'appartenance de ces derniers à l'Union ?
- Dans quelle mesure d'autres domaines, qui relèvent actuellement de la coopération intergouvernementale, comme certains aspects de la libre circulation des personnes, la lutte contre la drogue, la police et la coopération judiciaire, seront-ils intégrés ?

  • b) Aspects institutionnels.

- Dans quelle mesure faudra-t-il modifier les mécanismes institutionnels ou en créer de nouveaux pour assurer l'unité et la cohérence de tous les éléments constitutifs de l'Union européenne ?
- Comment le rôle du Conseil européen, tel qu'il est défini dans la Déclaration solennelle sur l'Union européenne et dans l'Acte unique européen, devrait-t-il être développé dans le cadre de la réalisation de l'Union ?
- c) Principes généraux.
- Certains principes généraux ont été mis en avant au sujet desquels se posent les questions suivantes :
- S'agissant du respect de l'identité nationale et des institutions fondam:entales : quelle est la meilleure façon de faire ressortir ce qui ne relève pas de l'Union ?
- S'agissant de l'application du principe de la subsidiarité : comment doit-on le définir pour garantir qu'il s'appliquera effectivement.

3. La légitimité démocratique.
- Il est nécessaire d'assurer que le principe de la responsabilité devant des instances démocratiques, auquel tous les Etats membres souscrivent, soit pleinement respecté au niveau de la Communauté. Le transfert continu de tâches à la Communauté et l'accroissement correspondant des compétences et des responsabilités de ses institutions rendent nécessaire un renforcement du contrôle démocratique. Cet objectif devrait être poursuivi par un ensemble de mesures, parmi lesquelles on peut mentionner les suivantes :
- participation accrue du parlement européen :

  • au processus législatif y compris éventuellement par des formes de codécision,
  • dans le domaine des relations extérieures,
  • l'accroissement de la responsabilité, grâce à un contrôle renforcé du Parlement européen sur la mise en oeuvre des politiques convenues au niveau de la Communauté,
  • le renforcement du caractère démocratique d'autres Institutions (par exemple, rôle spécifique du Parlement européen dans la désignation du Président et des membres de la Commission, transparence et ouverture accrues en ce qui concerne le fonctionnement de la Communauté...),
  • une plus grande implication des parlements nationaux dans le processus démocratique au sein de l'Union, en particulier dans les domaines où des compétences nouvelles seront transférées à l'Union.


4. Réponse effective et efficace de la Communauté et de ses institutions.
- L'adéquation de la réponse de la Communauté, et de celle de ses institutions, aux besoins issus de la nouvelle situation ainsi que de la mise en oeuvre du marché intérieur, la réalisation de l'UEM, la réalisation des objectifs de l'Acte unique, le développement de nouvelles politiques et le renforcement du rôle international de la Communauté (y compris sa capacité de répondre aux aspirations des pays qui souhaitent voir renforcer leurs relations avec la Communauté) devraient être examinés sous deux aspects : en premier lieu, comment relever d'une manière globale et équilibrée les défis auxquels la Communauté est confrontée, en deuxième lieu, du point de vue du fonctionnement des institutions.
- La question du fonctionnement des institutions devrait être examinée à plusieurs niveaux opérationnels, tout en respectant l'équilibre général entre les institutions :

  • le Parlement européen : (cf. point 3 ci-dessus),
  • le Conseil : améliorer le processus de décision, notamment en élargissant le domaine du vote à la majorité qualifiée, prévoir une coordination centrale par le Conseil "Affaires générales", concentrer et rationaliser le travail du Conseil en général,
  • la Commission : réduire le nombre de ses membres et renforcer son rôle exécutif dans la mise en oeuvre des politiques communautaires,
  • la Cour de justice : entre autres rendre ses arrêts automatiquement exécutoires, là où c'est approprié,
  • la Cour des comptes : renforcer son rôle consistant à assurer une saine gestion financière,
  • Etats membres : assurer la mise en oeuvre et le respect du droit communautaire et des arrêts de la Cour européenne.

- Il conviendrait en outre d'envisager un examen des différents types d'instruments juridiques de la Communauté et de leurs procédures d'élaboration.

5. Unité et cohérence de l'action de la Communauté sur la scène internationale.
- Conformément aux conclusions du Conseil européen de Dublin, du 28 avril 1990, la Communauté se comportera comme une entité politique sur la scène internationale.
- Le projet d'une politique commune en matière de relations extérieures et de sécurité, qui tienne compte de l'intérêt commun des Etats membres agissant avec cohérence et solidarité et qui, du point de vue institutionnel, aille au-delà de la Coopération politique telle qu'elle fonctionne actuellement, soulève un certain nombre de questions, notamment en ce qui concerne :

  • a) son champ d'application.

- l'intégration des aspects économique, politique et de la sécurité de la politique extérieure,
- la définition de la dimension de sécurité,
- le renforcement de l'action diplomatique et politique de la Communauté à l'égard des pays tiers, dans les organisations internationales et autres instances multilatérales,
- l'évolution du transfert de compétences à l'Union, et en particulier la définition de domaines prioritaires pour lesquels le transfert se ferait à un stade initial.

  • b) la prise de décision.

- utilisation de la méthode communautaire (telle quelle ou sous une forme adaptée) et/ou d'une méthode sui generis en tenant compte des possibilités offertes par l'évolution dans le temps du degré de transfert de compétences à l'Union, telle qu'évoquée plus haut,
- le rôle de la Commission, y compris la faculté de lancer des initiatives et de faire des propositions,
- mise en place d'une structure unique de prise de décision, rôle central du Conseil "Affaires générales" et du Conseil européen dans ce contexte, organes préparatoires, l'organisation et le renforcement du secrétariat,
- modalités visant à assurer la souplesse et l'efficacité nécessaires pour répondre aux besoins de formulation de la politique extérieure dans divers domaines, étude de procédures de décision comprenant la règle du consensus, des pratiques de vote à l'unanimité avec abstentions, et le vote à la majorité qualifiée dans des domaines spécifiques.

  • c) mise en oeuvre.

- Il est reconnu que la mise en oeuvre de la politique extérieure commune exige la définition de règles et de modalités claires, il faudra à cet égard examiner les aspects suivants :

  • le rôle de la Présidence (et de la Troïka) et du secrétariat,
  • le rôle de la Commission,
  • le rôle des services diplomatiques nationaux dans le cadre d'une collaboration renforcée.