Communiqué commun des chefs d'Etat et de gouvernement des pays de la CEE réunis en Conseil européen, Hanovre le 28 juin 1988.

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Circonstance : Conseil européen de Hanovre les 27 et 28 juin 1988

Média : Bulletin d'information du ministère des affaires étrangères - Bulletin d'information du ministère des affaires étrangères

Texte intégral

Questions communautaires
- Mise en oeuvre de l'acte unique européen
- Le Conseil européen se félicite de l'évolution constructive des relations entre les institutions communautaires constatée ces derniers mois et souligne l'importance politique que revet l'accord interinstitutionnel conclu entre le Conseil, la Commission et le Parlement européen.
- Une association plus étroite du Parlement européen aux décisions du Conseil dans cette phase de pleine réalisation du marché intérieur et de progrès vers l'Union européenne apparaît nécessaire dans le but d'assurer non seulement un meilleur équilibre institutionnel, mais aussi une meilleure compréhension des décisions communautaires de la part des citoyens de la Communauté.
- Achèvement du marché intérieur
- Le Conseil européen estime que cet objectif majeur fixé par l'Acte unique a désormais atteint un seuil d'irréversibilité, notamment auprès des acteurs de la vie économique et sociale.
- Les résultats des études effectuées pour évaluer les avantages du marché unique confirment que sa réalisation offre à la Communauté un considérable potentiel de croissance et d'augmentation de l'emploi.
- Le Conseil européen relève que plus d'un tiers des mesures programmées dans le Livre blanc de la Commission sont déjà approuvées. Le Conseil considère comme particulièrement encourageant que des décisions aient été prises ou soient en voie de l'être dans des domaines stratégiques tels que : la libération totale des mouvements de capitaux, la reconnaissance mutuelle des diplômes, l'ouverture des marchés publics, les assurances ainsi que les transports routiers et aériens. Le Conseil européen a noté que ces progrès ont été rendus possibles par la pleine utilisation des procédures de vote prévues dans l'Acte unique européen.
- Le Conseil européen souligne qu'il convient de progresser de manière équilibrée sur la voie de la réalisation du marché unique, il aura un débat approfondi lors de sa réunion de Rhodes sur le rapport prévu par l'Acte unique sur l'état d'avancement des travaux en vue de respecter l'échéance du 31 décembre 1992. Il note qu'à la fin de 1988, la Commission aura présenté l'essentiel des propositions prévues dans son Livre blanc.
- Lors de sa réunion de Bruxelles, en juin 1987, le Conseil européen s'est mis d'accord sur un certain nombre de décisions particulièrement importantes à prendre dans les douze mois suivants. Ces décisions sont à présent adoptées. Le Conseil européen est maintenant convenu, conformément au calendrier prévu par le Livre blanc, que les décisions en vue de l'achèvement du marché intérieur devraient être prises dès que possible, notamment dans les domaines suivants : achèvement du marché intérieur dans les domaines des marchés publics, de la banque et des autres services financiers, rapprochement des normes et propriété intellectuelle.
- Le Conseil européen a été d'accord pour estimer qu'il est nécessaire de faciliter la coopération entre les entreprises dans toute la Communauté, et il invite le Conseil à examiner le mémorandum de la Commission concernant le statut de la société européenne et les propositions qui lui seront par la suite soumises à cet effet.
En ce qui concerne la mesure dans laquelle une harmonisation est nécessaire dans le domaine fiscal pour assurer l'établissement et le fonctionnement du marché intérieur conformément à l'article 99 du traité, le Conseil européen note avec satisfaction que le Conseil des ministres de l'économie et des finances procède actuellement à un examen approfondi des propositions de la Commission. Il a été également noté que la Commission ferait rapport au Conseil des ministres de l'économie et des finances sur le problème qui se pose au Danemark à propos de certains dégrèvements fiscaux.
- Dans le contexte de la directive sur les mouvements de capitaux, le Conseil européen a souligné l'importance des décisions prises le 13 juin 1988 dans le cadre du Conseil des ministres de l'économie et des finances, aux termes desquelles la Commission transmettrait avant le 31 décembre 1990 à ce Conseil des propositions visant à supprimer ou à atténuer les risques de distorsion, d'évasion et de fraude fiscales liés à la diversité des régimes nationaux concernant la fiscalité de l'épargne et à contrôler l'application de ces régimes, le Conseil européen a également pris acte de ce que le Conseil des ministres de l'économie et des finances statuerait sur ces propositions d'ici le 30 juin 1989, eu égard au fait que toute décision communautaire en matière fiscale doit être adoptée à l'unanimité.
-Le Conseil européen a examiné la situation dans le domaine des moyens de communication audiovisuels. Il a été d'accord pour estimer qu'il est de la plus haute urgence pour la Communauté que la production européenne de programmes audiovisuels reflétant la richesse et la diversité de la culture européenne atteigne un niveau plus conforme à la capacité de radiodiffusion et de télédiffusion de l'Europe. Il invite le Conseil des affaires culturelles à attacher une importance particulière à cette question. Il estime qu'il convient d'examiner d'urgence la possibilité de créer un projet EUREKA dans le domaine audiovisuel. Il convient de veiller à une bonne coordination avec les travaux du Conseil de l'Europe.
- Le marché intérieur ne devrait pas se refermer sur lui-même. Conformément aux dispositions du GATT, la Communauté devrait être ouverte aux pays tiers et doit le cas échéant négocier avec ces pays afin d'assurer l'accès des exportations communautaires à leur marché. Il veillera à préserver l'équilibre des avantages accordés tout en respectant l'unité et l'identité du marché intérieur de la Communauté.
- Le Conseil européen souligne l'importance que revêtent, dans le contexte de la progression vers le marché unique, une croissance économique soutenue, la poursuite de la coopération technologique et le succès de la mise en oeuvre des dispositions de l'Acte unique relatives à la cohésion.
Europe des citoyens
-Le Conseil européen a souligné l'importance que revêt l'élimination des obstacles à la libre circulation des personnes. Il souligne également la nécessité d'intensifier et d'élargir la coopération entre les administrations nationales en étroite collaboration avec la Commission de manière à garantir l'adoption de mesures efficaces pour combattre le terrorisme, la toxicomanie et le crime organisé.
- Volet Social
- Le Conseil européen souligne l'importance que revêtent les aspects sociaux de la progression vers les objectifs de 1992.
- Il note que l'achèvement du grand marché unique offre la meilleure perspective, grâce à la suppression des entraves à la croissance, de promouvoir l'emploi et d'accroître la prospérité générale de la Communauté au bénéfice de tous ses citoyens.
- Le Conseil européen considère que le marché intérieur doit être conçu de manière à profiter à tous les citoyens de la Communauté. A cette fin, il est nécessaire non seulement d'améliorer les conditions de travail et le niveau de vie des salariés mais aussi d'assurer une meilleure protection de la santé et de la sécurité des travailleurs sur leur lieu de travail. Il souligne que les mesures à prendre ne réduiront pas le niveau de protection déjà atteint dans le Etats membres. Il se félicite des initiatives qui ont déjà été prises sur la base des dispositions du traité, et notamment de l'article 118 A, et il invite la Commission et le Conseil à poursuivre dans ces directions.
- Le Conseil européen considère que la réalisation du grand marché doit aller de pair avec une amélioration de l'accès à la formation professionnelle, y compris la formation en alternance, dans tous les Etats membres. Dans ce contexte, il a exprimé le souhait que les conditions d'une reconnaissance mutuelle des diplômes soient réunies. Il souligne l'importance de l'information et de la consultation des partenaires sociaux tout au long de la réalisation du marché unique. Dans cet esprit, le Conseil européen invite la Commission à intensifier son dialogue avec les partenaires sociaux. Dans ce contexte, il convient de tenir particulièrement compte de l'article 188 B. La Commission élaborera une étude comparative des réglementations appliquées dans les différents Etats membres en matière de conditions de travail.
Protection de l'environnement
- le Conseil européen a exprimé ses préoccupations au sujet des dangers qui menacent l'environnement en général et en particulier ceux causés par la pollution de l'air et des eaux. Il a pris acte des résultats positifs auxquels a récemment abouti le Conseil "Environnement" et a invité la Commission et le Conseil à intensifier leurs efforts en vue d'améliorer les moyens de combattre et de prévenir la pollution de l'air et des eaux. Il s'est félicité des conclusions adoptées lors du sommet économique mondial de Toronto, le 21 juin 1988. Le principe selon lequel les considérations d'ordre écologique doivent être intégrées dans tous les domaines qui font l'objet de décisions de politique économique est conforme à l'objectif de l'Acte unique européen en matière d'environnement.
- Le Conseil européen a invité la Commission à préparer des propositions en vue de mesures concrètes pour la mise en oeuvre de la contribution de la Communauté à la coopération internationale évoquée à Toronto.
Union monétaire
- Le Conseil européen rappelle qu'en adoptant l'Acte unique les pays membres ont confirmé l'objectif de réalisation progressive de l'union économique et monétaire.
- Ils ont donc décidé d'examiner, lors du Conseil européen de Madrid, en juin 1989, les moyens de parvenir à cette union.
- A cette fin, ils ont décidé de confier à un comité la mission d'étudier et de proposer les étapes concrètes devant mener à cette union.
- Ce comité sera présidé par Jacques Delors, Président de la Commission européenne.
- Les chefs d'Etat et de gouvernement sont convenus d'inviter le Président ou le gouverneur de leur Banque centrale à participer aux travaux du comité à titre individuel. Celui-ci comprendra également un autre membre de la Commission européenne et trois personnalités désignées d'un commun accord par les chefs d'Etat et de gouvernement. Ils sont convenus d'inviter :
- M. Niels Thygesen, professeur d'économie à Copenhague,
- M. Lamfalussy, directeur général de la Banque des Règlements Internationaux à Bale, professeur d'économie à l'Université catholique de Louvain-la-Neuve,
- M. Miguel Boyer, président de la "Banco Exterior de Espana".
- Le Comité devra avoir terminé ses travaux en temps utile pour permettre aux ministres de l'économie et des finances d'en examiner les résultats avant les délibérations du Conseil européen de Madrid.
- Présidence de la Commission
- Le Conseil européen, après consultation du président et du bureau élargi du Parlement européen, est convenu de renouveler le mandat de Monsieur Jacques Delors en tant que Président de la Commission.
Coopération politique
- Relations Est-Ouest
- Le Conseil européen a noté que les relations Est-Ouest sont entrées dans une phase plus dynamique. Dans ce processus, les Douze sont résolus à continuer de jouer un rôle actif. Ils voient avec satisfaction dans le Sommet de Moscou la preuve qu'un climat de confiance et de coopération accrues a maintenant été établi dans les relations entre les Etats-Unis et l'Union soviétique.
- Les Douze sont encouragés par les récents progrès accomplis dans le domaine de la maîtrise des armements et du désarmement. Ils soulignent leur volonté d'oeuvrer pour assurer la progression des négociations actuelles et futures en vue de parvenir à la stabilité à un niveau plus bas d'armements. Le principe de réductions asymétriques défini dans le traité FNI et les dispositions en matière de vérification constituent des précédents précieux.
- Les Douze s'attendent également à des progrès continus vers la solution pacifique de conflits régionaux, le respect universel des droits de l'homme fondamentaux et le libre échange de personnes et des idées.
- Le Conseil européen accueille favorablement l'attitude actuelle plus ouverte des pays d'Europe de l'Est dans leurs contacts économiques avec l'Ouest dont témoignent l'instauration et le développement de relations avec la Communauté. Ceci devrait être encouragé en tant que contribution à l'ouverture plus grande de leurs économies et leurs sociétés. La conférence économique Est-Ouest proposée par les Douze lors de la réunion de Vienne sur les suites de la CSCE servira également cet objectif.
- Le Conseil européen lance un appel aux autres Etats participant à la CSCE pour qu'ils unissent leurs efforts afin de conclure la réunion de Vienne par un document substantiel et équilibré permettant de réaliser des progrès significatifs dans tous les domaines, en particulier en ce qui concerne la dimension humaine. Le projet de document de clôture proposé le 13 mai par les Etats neutres et non alignés offre une base appropriée pour élaborer un tel document. Une conclusion satisfaisante de la réunion de Vienne rendra possible l'ouverture rapide de négociations sur la stabilité conventionnelle en Europe, qui est la question clé de la sécurité européenne, visant l'établissement d'un équilibre stable et sur de forces conventionnelles en Europe à un niveau plus bas, et sur un ensemble additionnel de mesures de confiance et de sécurité, ainsi que d'autres propositions de suivi soutenues par les Douze.
Afghanistan
- Le Conseil européen lance un appel à toutes les parties concernées pour qu'elles mettent pleinement en oeuvre le processus de paix engagé par les accords de Genève sur l'Afghanistan. Il s'attend à ce que l'Union soviétique achève le retrait de ses troupes conformément à ces accords. Il soutient tout effort visant à l'établissement d'un gouvernement représentatif, constitué dans un processus d'autodétermination, où la Résistance doit jouer pleinement son rôle.
- Le Conseil européen déclare que la Communauté et ses Etats membres sont prêts à fournir une aide humanitaire dans le cadre du programme dont la mise en oeuvre doit être assurée par le Coordinateur des Nations unies, des ONG et le CICR, en vue du rapatriement volontaire et de la réinstallation des réfugiés et des personnes déplacées.
- La Communauté et ses Etats-membres sont également disposés à fournir une aide à la reconstruction de l'Afghanistan après l'instauration de la paix intérieure.
- Moyen Orient
- Le Conseil européen a exprimé sa préoccupation devant le regain de tension au Moyen-Orient. Le statu-quo dans les territoires occupés n'est pas tenable. Sur la base de leurs positions bien établies, les Douze continueront à oeuvrer vers la convocation rapide, sous l'égide des Nations Unies, d'une conférence internationale de paix, qui constitue le cadre approprié pour les indispensables négociations entre les parties directement concernées, et qui est essentielle pour parvenir à une paix globale, juste et durable dans la région. Les Douze soutiendront toutes les initiatives tendant vers ce but. La guerre qui se poursuit entre l'Irak et l'Iran met en danger la sécurité et la stabilité de toute la région. Les Douze déplorent que, presqu'un an après son adoption à l'unanimité par le Conseil de Sécurité des Nations unies, la Résolution 598 n'ait pas encore été mise en oeuvre. Ils continueront à soutenir les efforts déployés par le Secrétaire général des Nations unies en vue d'obtenir sa mise en oeuvre rapide et entière. Les Douze condamnent l'utilisation d'armes chimiques et renouvellent leur engagement de soutenir le principe de la liberté de navigation dans le Golfe.
- Les Douze demeurent profondément préoccupés par la situation au Liban. Ils confirment l'importance qu'ils attachent à ce que les élections présidentielles aient lieu dans l'ordre et la légalité. Ils rappellent également leur soutien à la FINUL et réitèrent leur appel pressant pour la libération immédiate de tous les otages actuellement détenus au Liban.
- Le Conseil européen se félicite de la signature récente de l'accord de coopération avec le Conseil de Coopération du Golfe et l'intensification des relations avec ses membres. Il accueille favorablement aussi la récente réunion de la troïka dans le cadre du Dialogue euro-arabe, et exprime l'espoir que ceci mènera à une coopération de plus en plus productive.
Afrique du Sud
- Le Conseil européen a noté avec une grande préoccupation que les relations entre les Douze et l'Afrique du Sud risquent de se détériorer encore davantage.
- Dans ce contexte il lance un appel pressant pour que toutes les voies légales disponibles en Afrique du Sud, y compris si nécessaire l'application d'une mesure de grâce par le Président Botha, soient utilisées afin d'empêcher l'application de la peine de mort aux Six de Sharpeville.
- Le 18 juillet, Nelson Mandela aura 70 ans. Le Conseil européen demande instamment aux autorités sud-africaines de le libérer ainsi que tous les autres prisonniers politiques.
- Le Conseil européen confirme que, s'il devait être promulgué, le projet de loi visant à priver les organisations anti-apartheid qui luttent pour des changements pacifiques du soutien financier de l'étranger pèserait encore plus sur les relations entre les Douze et l'Afrique du Sud.
- Afrique australe
- Les Douze rappellent leur position constante concernant la Namibie et soutiennent les efforts en cours, qui visent à instaurer la paix en Angola et à obtenir l'indépendance pour la Namibie sur la base de la Résolution 435 du Conseil de Sécurité des Nations unies.
- Amérique latine
- Le Conseil européen a débattu de la situation en Amérique latine et a souligné l'importance primordiale du régime démocratique et du fonctionnement normal des institutions démocratiques, facteurs clés de la stabilité dans le sub-continent. Il est indispensable que l'on poursuive le processus de paix en Amérique centrale afin d'assurer la paix, la justice et le respect des droits de l'homme dans l'ensemble de la région. Les Douze demeurent résolus à continuer d'apporter leur soutien à ce processus.