Déclaration de M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, sur le budget 2003 de la fonction publique et sur les grands axes de la réforme de l'Etat, à l'Assemblée nationale le 7 novembre 2002.

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Circonstance : Présentation du budget 2003 du ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire à l'Assemblée nationale le 7 novembre 2003

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les députés,
En vous présentant aujourd'hui le budget du ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, je ressens toute l'ambiguïté de la charge qui m'est confiée : en effet, si je m'en tenais aux seuls crédits de mon administration, je réduirais mon propos à une présentation technique de moyens somme toute modestes par rapport à l'ensemble du budget de l'Etat ; en retenant au contraire le parti de vous présenter la politique du Gouvernement dans les secteurs où mon ministère intervient, je serais conduit à aborder des aspects plus vastes et plus divers couvrant un champ étendu de l'activité gouvernementale.
Ce que je veux dire par là, c'est que nous exerçons avec le secrétaire d'Etat, Henri PLAGNOL, une action d'influence et de conviction, beaucoup plus que d'intervention directe, à la tête d'un ministère qui est un levier du changement en étant placé au carrefour de sujets très variés dont le fil conducteur est l'efficacité du service public.
Le lien qui est tracé entre la fonction publique et l'aménagement du territoire est celui de la présence des services publics et de leur qualité. Pour la première fois dans l'organisation gouvernementale, c'est le même ministère qui traite les questions relatives à la répartition territoriale des services publics, à leur modernisation, à la conduite du changement dans les méthodes de gestion.
L'aménagement du territoire doit se concevoir en relation avec le développement, ce qui impose des services publics performants et bien répartis. De même, une bonne décentralisation ne peut se concevoir qu'avec une bonne déconcentration. La cohérence de mon ministère, qui est le gardien de ces équilibres, est le reflet de la cohérence d'ensemble que nous voulons maintenir.
Je distinguerai deux parties dans mon propos: tout d'abord, je commencerai par commenter les grandes lignes du budget de mon administration, puis j'exposerai les orientations stratégiques de la politique que nous avons engagée.
I. La présentation des crédits en premier lieu :
Je commencerai par "l'agrégat fonction publique et réforme de l'Etat": il me faut préciser ici que, sur ce point, le budget de notre ministère n'est en réalité qu'un petit aspect d'un ensemble plus vaste. Les crédits que je défends, qui se montent pour 2003 à 211,2millions d'Euros -au lieu de 215,8 millions d'euros l'an passé- ne sont qu'une toute petite partie de la totalité des dépenses de personnel qui s'élèvent, avec ce que l'on appelle les dépenses "induites", à plus 113 milliards d'Euros.
De même, les effectifs de la Direction de la fonction publique et de la Délégation à la réforme de l'Etat ne sont qu'une goutte d'eau par rapport au total: 144 emplois prévus en 2003 pour un nombre total de fonctionnaires de l'Etat de 2,2 millions.
A ces moyens en personnels réduits en nombre - et je voudrais rendre hommage à l'efficacité de ces services qui assurent le pilotage d'ensemble de la fonction publique avec des moyens assez sommaires - s' ajoute le financement d'actions interministérielles en matière de formation, d'action sociale et d'insertion des handicapés ainsi que les crédits affectés aux établissements sous tutelle : l'Ecole nationale d'Administration, les Instituts Régionaux d'Administration et le Centre des études européennes de Strasbourg.
Par rapport à 2002, le budget 2003 est marqué par la recherche de la vérité comptable et par le souci de l'efficacité. Le Gouvernement ne vous demandera pas de crédits nouveaux pour des opérations qui, soit relèvent d'autres ministères, comme la formation interministérielle à la Ville, soit comprennent des reports de crédits inemployés pour des volumes importants: c'est le cas pour la réservation de logements en Ile-de-France et la construction de restaurants interadministratifs.
De même, nous nous appliquons à nous-même la réforme de l'Etat, à commencer par la réforme budgétaire: sur un certain nombre de lignes, le ministère de la fonction publique recevra en 2003 moins de crédits nouveaux qu'en 2002; cependant, nous pourrons utiliser des reports de crédits non consommés qui nous procurent à l'arrivée des moyens de travail suffisants et garantis par un véritable contrat d'exécution avec le ministre du budget. pour prendre l'exemple le plus parlant, le fonds pour la réforme de l'Etat, le FRE, bénéficiera d'un montant garanti de 5,73 millions d'Euros, ce qui permettra de porter les crédits utilisables à 20 millions d'Euros, soit un volume de crédits réellement consommables plus élevé qu'en 2002.
Au moment où la réforme de l'Etat entre dans une phase concrète nécessitant un appui méthodologique et pratique, ce niveau garanti est un atout pour la réussite de notre politique.
Je dois également souligner la sensible augmentation des crédits affectés à la relance des prestations de l'action sociale interministérielle, en hausse de 5,5 millions d'Euros, ainsi que la hausse de presque 50% des crédits affectés à l'insertion des handicapés.
La même logique s'applique pour les crédits de l'Aménagement du territoire, qui regroupent les moyens de la DATAR et les crédits d'intervention.
Les effectifs de la délégation sont de 123 agents, auxquels s'ajoutent 51 agents mis à disposition par d'autres administrations. Je voudrais là aussi rendre hommage à la DATAR dont nous fêterons en 2003 la quarantième anniversaire. La DATAR, voulue par le Général DE GAULLE, est un des atouts dont nous disposons dans la compétition mondiale. Certaines critiques s'étaient déclarées sur son efficacité, sur le sens de son action, voire sur l'opportunité de son maintien au moment où la décentralisation est relancée.
Ces critiques ne me paraissent pas fondées. Le nouveau Délégué, nommé cet été, a reçu du Premier ministre et de moi-même la mission de remettre des propositions pour faire évoluer la DATAR en fonction du nouveau contexte dans lequel elle doit prendre place. Par ailleurs, et ceci vaut pour tous les services qui relèvent de mon autorité, j'ai demandé au Délégué, comme aux autres directeurs du ministère, de veiller en permanence à intégrer un objectif de résultat dans sa gestion.
Ce n'est qu'en étant rigoureux envers nous-mêmes que nous pourrons être les messagers de la réforme.
Les moyens consacrés à l'Aménagement du territoire comprennent ensuite les sommes du Fonds National d'Aménagement Durable du Territoire. Pour ces crédits comme pour ceux de la PAT, la logique de vérité que j'ai invoquée tout à l'heure à propos de la fonction publique trouve à s'appliquer: compte tenu de reports élevés, nous n'avons pas voulu présenter un budget trompeur et faussement brillant en demandant à la Représentation Nationale de voter des crédits nouveaux qui seraient aussitôt gelés.
Ceci s'impose d'autant plus qu'au moment de la mise en uvre de la décentralisation nous avons besoin d'une fonction d'observation des territoires et de clarté dans nos moyens.
Le contrat d'exécution que nous avons conclu avec le ministre du budget permet de maintenir en 2003 un niveau de 90 millions d'euros sur le titre IV du FNADT, dont 60 millions de mesures nouvelles. Pour le titre VI, le montant garanti en 2003 sera de 150 millions de crédits de paiements contre 133 millions en 2003.
La même logique permet de disposer d'un montant protégé de 60 millions de crédits de paiement sur la Prime d'Aménagement du Territoire en 2003, les mesures nouvelles étant de 45 millions. En autorisations de programme, la capacité d'intervention de la PAT est inchangée avec un montant de 67millions d'euros, malgré une contrainte budgétaire forte. Même si je crois qu'une réforme de cet instrument est nécessaire, réforme à laquelle vous serez associés, ceci nous permet de maintenir à un bon niveau d'efficacité notre principal outil pour implanter des entreprises au moment où la conjoncture mondiale rend encore plus impérieuse l'exigence de l'efficacité dans l'emploi de nos crédits.
II. J'en viens maintenant aux grands axes de la politique que le Gouvernement a engagée sur notre champ de compétence:
La réforme de l'Etat est évidemment le fil conducteur de notre action.
Elle se manifeste en premier lieu par une fonction publique attractive, professionnelle et moderne :
Trois principes nous guident dans cette voie : l'efficacité du service public, la satisfaction de l'usager, l'épanouissement du fonctionnaire.
L'efficacité du service public en premier. La mise en uvre de la Loi organique sur les finances publiques introduira dans les administrations une culture du résultat et de la performance. Mon ministère jouera pleinement son rôle dans cette transformation.
Nous nous appuierons pour cela sur plusieurs instruments : en premier lieu, la maîtrise de la gestion des administrations, à commencer par celle de leurs coûts.
La question des effectifs n'est pas un préalable à la réforme de l'Etat. C'est une conséquence de décisions prises au nom des intérêts de la Nation par le Parlement et le Gouvernement, en termes budgétaires et en termes de choix politiques. Je souhaite que s'instaure un débat annuel dans chaque ministère sur la question de ses missions et des moyens qui permettront de les remplir, en particulier les moyens en effectifs. Nous verrons ainsi émerger de véritables " ministères -employeurs " responsables, au sens fort de mot, de leur gestion.
Un préalable nécessaire est d'abord de bien connaître la réalité des effectifs de départ : j'ai réuni il y a quelques jours l'Observatoire de l'Emploi Public, organisme dans lequel siègent notamment des élus et des syndicalistes, pour avancer dans la connaissance plus rigoureuse de la réalité des effectifs. Le rapport établi par l'Observatoire a été adressé au Parlement ; il est évidemment à la disposition de tous les députés.
Pour compléter cette connaissance et préparer les débats futurs, le Premier ministre signera prochainement une circulaire pour demander aux ministres de remplir des tableaux de bord à intervalles réguliers ; il leur sera aussi demandé de présenter des plans de modernisation de leurs administrations intégrant des réformes de structures.
Un Etat plus efficace, c'est aussi un Etat plus proche des citoyens et concentré sur ses missions essentielles. C'est le sens de la relance de la décentralisation contenue dans la réforme constitutionnelle. Elle permettra de faire bouger l'Etat, non seulement en le décongestionnant, mais aussi en lui faisant obligation de repenser l'organisation de ses services au niveau des régions et des départements.
Je crois à ce sujet qu'il serait opportun de faire une expérience dans une région pour tester un système dans lequel le Préfet pourrait réorganiser les services de l'Etat en redéployant les fonctionnaires des services qui seraient trop réduits en dimension.
Pour revenir à la décentralisation, elle ne saurait résumer à elle seule la réforme de l'Etat ; elle ne saurait pas non plus être l'affaiblissement de l'Etat ou la course aux compétences. Un équilibre doit être trouvé, ainsi que l'a déclaré le Premier ministre, entre la proximité et la cohérence. La liberté et l'égalité sont pleinement compatibles.
Pour ma part, je considère que le maintien d'une administration de qualité est une des garanties de cette cohérence, avec la péréquation entre les collectivités, dont je me réjouis qu'elle soit inscrite dans la Constitution.
Je voudrais ici rassurer les fonctionnaires de l'Etat sur la manière dont seront réalisés les transferts de personnels liés à la décentralisation : j'ai reçu du Premier ministre le mandat d'ouvrir avec leurs syndicats des discussions pour les informer et pour concerter avec eux les modalités de ces transferts. Ces discussions auront lieu dès que possible et seront relayées au niveau local par des ateliers que conduiront les Préfets.
Dans la même logique, j'ai ouvert le dossier de l'inter-fonction publique : je me suis rendu devant le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat et devant celui de la fonction publique territoriale. J'aurais l'occasion de venir devant celui de la fonction publique hospitalière dès que possible. Je souhaite pouvoir aborder rapidement les questions transversales qui se posent à l'ensemble des fonctionnaires, et je réunirai au début de 2003 une conférence de ces trois conseils supérieurs.
Cette vision d'ensemble a fait trop longtemps défaut. Par-delà les spécificités, il y a un socle commun, qui est cristallisé dans le Titre premier du statut général. Cet aspect est déterminant pour l'avenir, car nous serons confrontés à des mouvements importants entre les fonctions publiques. Tout ce qui concourt à leur unité, dans le respect de leurs différences naturelles, doit être valorisé.
S'agissant des fonctionnaires de l'Etat, j'ouvrirai d'ici à la fin de ce mois avec les sept syndicats représentatifs un cycle de discussions sur la Gestion des Ressources Humaines, afin de renforcer l'attractivité de la fonction publique, de la préparer aux changements à venir et de renforcer la motivation des agents.
Ces négociations porteront sur les modes de recrutements, qui seront élargis, sur la validation des acquis professionnels, sur la formation, intégrant la formation au management pour les cadres, sur les parcours de carrière, en particulier la question des deuxièmes carrières, sur la mobilité des agents.
Je voudrais m'attarder sur la formation. Loin d'être un coût, elle est un investissement. J'ai l'intention de la renforcer en commençant par la formation initiale dispensée dans les écoles de fonctionnaires. La tradition française, que je n'ai pas l'intention de répudier, repose sur la notion d'école d'application, que ce soit pour les écoles d'ingénieurs ou pour les fonctionnaires non ingénieurs avec au premier rang l'Ecole Nationale d'Administration.
Ce système me paraît préférable à une formation du type universitaire ; nous avons besoin de professionnels formés par des praticiens. De même, pour les fonctionnaires comme pour toutes les professions, il faut que fonctionne un modèle intégrateur où l'enseignant est aussi un modèle pour l'élève qui peut se projeter en lui et se représenter ce qu'il sera plus tard. Nous voulons donc garder ce système, fondé sur le concours républicain, garantie d'égalité des chances.
Pour autant, nous sentons bien qu'il faut faire évoluer le contenu de la formation initiale, brasser les publics, élargir les ouvertures vers l'extérieur, renforcer la connaissance de l'entreprise, des questions sociales, de l'Europe. J'ai demandé à la direction de l'école de retravailler sur ce sujet qui dépasse largement les clivages partisans.
La formation continue doit évoluer en parallèle. Je souhaite la mettre au service du changement et le rendre quasiment obligatoire pour les cadres qui prendront de nouvelles responsabilités, dans les trois fonctions publiques.
S'agissant de la fonction publique territoriale, j'ai formulé devant le Conseil supérieur plusieurs propositions de nature à assouplir la gestion des collectivités, tout en donnant satisfaction aux personnels: l'exigence d'une professionnalisation renforcée impose de revoir un certain nombre de règles: il faut réfléchir à des périodes d'adaptation à l'emploi avant l'occupation de certains postes ou emplois, à la mise en place d'examens nettement plus professionnalisés qu'aujourd'hui, voire à la validation des acquis professionnels, au moins dans certaines spécialités, pour faire rentrer dans la FPT des agents ayant eu d'autres expériences professionnelles.
Nous devons nous doter de moyens attractifs au moment où les difficultés de recrutement se feront sentir pour des raisons démographiques.
Un autre problème me préoccupe: le système actuel de la formation initiale n'est pas satisfaisant. Il pénalise les collectivités en phase de recrutement par une absence bien trop longue durant la première année d'accueil en collectivité. Aussi, je vous propose que nous nous orientions vers un schéma qui pourrait consister à faire du candidat ayant réussi son concours, un stagiaire-élève en formation pour une période de formation aux fondamentaux de son cadre d'emploi pour une période de 8 à 10 semaines dont il conviendra de définir les modalités. L'agent stagiaire ne pourrait quitter sa collectivité d'accueil avant une période par exemple de trois années, que nous allons fixer par décret comme la loi du 12 juillet 1984 relative à la formation nous y autorise.
Il nous faut aussi revoir, et les mécanismes de formation à l'emploi, et les procédures de détachement de cadre d'emploi à cadre d'emploi, ou mettre en place ce que j'appellerais un " véhicule statutaire " permettant de réaliser une véritable mobilité. Toujours en ce qui concerne le déroulement de carrière, j'ai conscience de la nécessité de revisiter le dispositif des seuils et des quotas.
Je souhaite aussi revoir l'organisation de la gestion et réfléchir à un dispositif de regroupement volontaire des centres de gestion. Une mise à plat s'impose et tout comme l'Etat doit se poser la question du bon niveau d'administration, les instances de la fonction publique territoriale doivent se déterminer sur le niveau pertinent d'exercice des compétences.
Pour conclure sur la fonction publique et la réforme de l'Etat, je voudrais évoquer le sujet particulièrement sensible des retraites. Le Gouvernement a décidé d'ouvrir ce dossier au début de l'année prochaine.
Comme l'a déclaré le Premier ministre dans la déclaration de politique générale, il faut avancer pour sauver nos régimes de retraites menacés par les évolutions démographiques, en ayant en tête trois objectifs: l'équité entre les régimes, la solidarité entre les générations, la liberté du choix de la date de départ. C'est en me situant dans ces objectifs que, une fois engagé le débat interprofessionnel que le Premier ministre a demandé au ministre des affaires sociales d'établir, je conduirai en parallèle, dans le cadre approprié, des discussions avec les syndicats de la fonction publique, dans le respect de la spécificité de celle-ci.
Je laisserai le soin à Henri PLAGNOL de présenter tout à l'heure les mesures de simplification administratives qu'il prépare et j'en viens aux grandes lignes de notre politique d'Aménagement du territoire :
Trois principes doivent nous guider: l'attractivité des territoires, l'anticipation des mutations, la solidarité géographique.
Nous souhaitons remettre l'aménagement du territoire sur les rails du réalisme et le sortir de l'ornière idéologique où d'autres l'avaient enlisé. Il faut sortir de l'affrontement stérile entre ville et campagne; il faut introduire la culture du projet véritable; il faut évaluer et réorienter les actions qui n'auraient pas marché.
Pour cela nous nous sommes d'abord attelés à faire fonctionner correctement des choses évidentes mais qui étaient en panne. Je fais évidemment allusion aux fonds structurels européens. La France était menacée de rendre des sommes importantes à la Commission par application de la règle dite du "dégagement d'office" en raison de la sous-consommation des crédits. Cette situation est le produit de la complexité de règles européennes, incluses dans les fameux DOCUP, mais elle a été aggravée par notre propre complexité interne.
Nous avons retroussé nos manches et nous avons simplifié tout ce qui pouvait l'être sur ce sujet. Les SGAR ont été invités à mobiliser les énergies. Une force d'appui en ingénierie de projets sera mise à la disposition des élus et des porteurs de projet à partir du début de 2003.
Nous sentons déjà les effets de cette mobilisation et elle ne fait que commencer.
La même démarche a été appliquée à la téléphonie mobile. Le précédent gouvernement, à l'occasion du CIADT de juillet 2001 et dans les mois qui ont suivi, après avoir affiché un plan de couverture des zones délaissées par les opérateurs, en avait limité la portée géographique sans avoir obtenu les assurances que le dispositif soit juridiquement viable et garanti la présence effective des services des 3 opérateurs sur ces zones. Le bilan pratique est quasiment nul, les priorités d'aménagement du territoire se sont effilochées dans des travaux qui ne pouvait qu'aboutir à un saupoudrage de crédits sans effet structurant sur les territoires. La perception des élus est celle d'un échec.
C'est pourquoi je me suis attaché, avec ma collègue Nicole FONTAINE et grâce au soutien efficace de l'Autorité de Régulation des Télécommunications, à réorienter ce projet, en concertation avec les 3 opérateurs. L'engagement volontaire pris par les opérateurs le 24 septembre dernier constitue à cet égard une étape importante dans la mise en uvre d'un plan de déploiement des futurs pylônes destinés aux zones blanches. Il est cependant incomplet et requiert une phase de concertation qui doit démarrer très prochainement à l'échelon régional associant les opérateurs et les collectivités territoriales pour hiérarchiser les besoins et optimiser les effets de levier sur le développement et l'attractivité des territoires. Afin d'alléger la charge financière que les collectivités locales consacreront à cet objectif, et en sus des 44 Millions d'euros que le gouvernement a décidé de consacrer au plan de couverture, nous nous sommes rapprochés de la Commission européenne afin de conclure un accord permettant de mobiliser le FEDER. Ce plan sera détaillé lors du prochain CIADT et entrera dans sa phase opérationnelle début 2003.
Ce premier volet de la politique d'aménagement numérique des territoires introduit le chantier du déploiement de réseaux de télécommunications à hauts débits que les collectivités territoriales ont, pour certaines, engagé tant l'enjeu en termes de cohésion territoriale et d'attractivité apparaît essentiel. Nous les accompagnerons en leur donnant les moyens juridiques de l'initiative, en veillant à la cohérence de ces interventions, au développement de la concurrence et à l'accès aux financements européens ( FEDER) en sus des fonds mobilisés par la Caisse des dépôts.
Ces deux exemples illustrent notre méthode: pragmatisme, efficacité, sens du terrain.
J'y rajouterai le souci du long terme en mariant le réalisme et le respect de la parole donnée. Dans le cas des contrats de plan Etat - région, nous nous orientons vers la révision à mi-parcours au 31 décembre 2003 à budgets constant, comme cela était prévu. Cela dit, je ne peux que m'étonner de la technique qui consiste à inscrire dans certains contrats des sommes en carton-pâte, pour des actions qui n'ont objectivement aucune chance de démarrer avant la fin du contrat. Ce point me paraît devoir être revu pour le prochain exercice.
Dans le même esprit, la DATAR a été chargée par le Premier ministre de conduire une étude sur les infrastructures de transport dans le futur, qui donnera lieu l'an prochain à un débat devant le Parlement. Là encore, il faut d'abord évaluer, puis avancer de façon déterminée mais raisonnée.
Nous devons réfléchir dans les mois qui viennent aux évolutions de notre outil d'aménagement du territoire. Nous allons regarder ce qu'il convient de faire avec les relais locaux de la Délégation, la décentralisation faisant certainement basculer un certain nombre de compétences économiques vers la région. A cet égard, je rappellerai l'effort déjà réalisé concernant la rénovation du dispositif national d'attraction des investisseurs étrangers basé sur une agence nationale - l'AFII - et un réseau de correspondants territoriaux régionaux.
Dans un contexte économique difficile, cet effort doit être maintenu et poursuivi. L'AFII, au passage exemple de réforme des services de l'Etat, doit faire preuve de son efficacité. De même, il importera que les Commissariats au développement économique à ce jour présents dans 18 régions dont 15 entièrement couvertes adaptent leur présence et leur action aux évolutions de compétences en matière économique.
De même, il faudra ouvrir sous peu le dossier de l'avenir des fonds structurels et des outils d'intervention après 2006. Dans l'immédiat, j'ai l'intention de faire évoluer les instruments dont dispose l'Etat pour appuyer la mutation des territoires et pour traiter les crises dans les bassins d'emplois fragiles. Nous y travaillons avec mes collègues Francis MER et François FILLON.
Si l'actualité économique et sociale nous donne rendez-vous sur le créneau de l'accompagnement - du " curatif " -, je souhaite que ce sujet soit aussi appréhendé dans sa dimension " préventive ". Cet aspect est encore trop peu développé. Il nécessite un investissement interministériel important (notamment en matière d'intelligence économique) et un partenariat fort avec les collectivités pour traduire l'analyse et les diagnostics en projet de territoire.
Notre action des prochains mois sera aussi consacrée à avancer sur les politiques portant sur des parties particulières du territoire: dans le cas de la Montagne en premier lieu, une étape importante sera franchie le 13 novembre avec l'installation du Conseil National de la Montagne que le précédent Gouvernement n'avait pas réuni depuis un an.
J'en attends un échange riche et constructif autour de l'évaluation des dispositifs existants et des propositions pour l'avenir. Je pense que là encore, la culture du projet doit l'emporter sur celle de la subvention.
J'ai de même procédé récemment au renouvellement de la commission Littoral du CNADT, qui doit me remettre un Livre Blanc faisant le point des mesures décidées en 2001 et faisant des propositions en faveur de cet atout qu'est le littoral pour notre pays dans une Europe élargie.
Dans le cas de l'aménagement rural, mon ministère est associé à l'action que conduit mon collègue Hervé GAYMARD. J'ai indiqué tout à l'heure que je voulais dépasser l'opposition factice entre la ville et la campagne et passer à une logique de complémentarité et de développement partagé. Nous serons très attentifs à tout ce qui touche à l'attractivité des territoires ruraux et à la présence des services publics. Ces aspects, ainsi que d'autres, seront repris bientôt dans le texte de loi que nous préparons sur le développement rural avec Hervé GAYMARD.
Plus généralement, nous sommes investis dans la politique du développement durable que conduit le Gouvernement conformément aux orientations tracées par le Président de la République. J'ai ainsi demandé à la DATAR d'inclure dans son étude sur les transports une réflexion sur les aspects environnementaux, pour comparer les émissions de CO2 des différents modes de transport.
Le même esprit doit animer les différents exercices contractuels et les schémas en cours d'élaboration.
Enfin, il va de soi que notre ministère est engagé dans le grand mouvement de la décentralisation. Par le rôle naturel qu'il joue aux côtés des collectivités locales en matière de développement économique, par la fonction de solidarité entre les territoires qui lui incombe, il est naturellement placé au centre de ce mouvement.
Nous participons ainsi aux réflexions sur les transferts de compétences. J'ai dit tout à l'heure un mot des transferts de personnels.
La DATAR sera un des pilotes des expérimentations. Nous le ferons avec pragmatisme et dans le respect du dialogue avec les élus et les organisations syndicales.
En parallèle, nous sommes partie prenante au grand chantier de la remise en cohérence des lois sur l'intercommunalité, sur l'aménagement et le développement durable du territoire, et de la loi SRU.
Au sujet des Pays en particulier, je voudrais revenir un instant sur la philosophie qui m'anime: le pays, ce n'est pas une collectivité locale de plus; le pays, ce n'est pas un point de passage obligé pour distribuer les subventions ; le pays, ce n'est pas une usine à gaz avec des conseils de développement pléthoriques et des procédures à n'en plus finir.
Je voudrais revenir au projet, dont le pays n'est que la traduction. A la base il doit y avoir le volontariat. Je préfère qu'il y ait moins de pays, mais des pays plus réalistes et correspondant à des projets volontaires et concrets. Pas de personnel, pas de structure lourde. Voilà les principes qui me paraissent devoir être appliqués en la matière.
La même démarche prévaudra pour le maintien des services publics : je souhaite promouvoir le développement d'offres de services publics " territorialisées ", qui soient adaptées aux besoins du terrain et garantissent l'efficacité de l'action publique sur les territoires. Ces offres pourraient être définies sur un territoire donné, régional, départemental ou pays dans le cadre de concertations entre les élus et les gestionnaires de services publics qu'il conviendrait d'organiser, et pourraient donner lieu à une contractualisation locale. Il s'agit, sur la méthode, de renverser la logique mise en oeuvre par l'ancien gouvernement qui avait conçu un dispositif de concertation défensif s'exerçant à l'occasion des fermetures de services publics, et de développer un dispositif de concertation constructif visant à définir, au niveau le plus approprié, une offre de services efficace et cohérente, qui mette l'usager au centre de la démarche.
Pour conclure, je dirais que le mot de cohérence st celui qui résume le mieux le département ministériel qui m'est confié. Cohérence dans la gestion des hommes et des femmes qui font vivre le service public, cohérence dans l'équilibre entre le secteur privé et le service public, cohérence entre les territoires enfin.
A ce titre, je ne peux conclure sans rappeler que l'attractivité des territoires ne peut être promue sans solidarité. Ceci nous conduira à relancer les politiques de péréquation, en insistant sur le fait que celle-ci n'est pas exclusivement financière. La réflexion engagée par la DATAR permettra de faire au Parlement des propositions concrètes de réforme des systèmes actuels. Voilà encore un signe de cette cohérence que nous entendons promouvoir autour de services publics de qualité répondant aux attentes de nos concitoyens.
(Source http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 12 novembre 2002)