Conférence de presse de M. Christian Paul, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, sur le projet de loi de finances 2001 concernant l'outre-mer, Paris le 20 septembre 2000.

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Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
C'est avec grand plaisir que je vous présente, quelques semaines après mon arrivée, les éléments qui figurent dans le projet de loi de finances 2001, adopté ce matin en conseil des ministres, et qui concernent l'outre-mer.
Il y a, bien sûr, le projet de budget du secrétariat d'Etat pour l'an prochain. Sa présentation constituera la première partie de mon propos et comme je vous le préciserai dans un instant, cet exercice est particulièrement agréable à conduire cette année, car il s'agit incontestablement d'un bon budget. Il augmente en effet de près de 7 % (6,94 % très exactement, soit au 3ème rang des ministères, après la ville et l'environnement). Cela va donc très au-delà de l'augmentation moyenne du budget de l'Etat, dont la croissance est limitée à 1,5 % afin, vous le savez, de dégager les ressources nécessaires à la réduction du déficit et à la baisse des impôts.
Qu'est ce qu'un bon budget ? Ce n'est pas seulement un budget en augmentation, même si je viens de l'indiquer, celui-ci connaît une progression qui ne passera pas inaperçue, en particulier outre-mer.
Un budget est bon s'il vient en appui d'une politique et s'il confirme par des actes ses orientations.
Dans les domaines essentiels de la politique menée en direction de l'outre-mer - l'emploi, le logement... - , 2001 enregistrera un nouvel effort substantiel.
Un budget est bon pour l'outre-mer, quand au delà de sa stricte lecture, l'on trouve au sein des budgets d'autres ministères, des choix et des décisions qui viennent consolider l'effort propre de ce ministère.
Je veux donc signaler tout particulièrement, l'évolution du montant des exonérations de charges sociales (de cotisations patronales) portée à 3,5 millions de francs dans le budget du ministère de l'Emploi (contre 1million de francs précédemment).
A côté de cette partie budgétaire de la loi de finances, le volet fiscal contient cette année un article qui intéresse directement l'outre-mer. Il s'agit de la mise en place d'un nouveau dispositif d'aide fiscale à l'investissement, qui se substitue à la "loi Pons", laquelle faisait toujours l'objet de critiques, malgré les aménagements qu'elle a connus au cours de ces dernières années.
En mettant en place, à compter de 2001, une nouvelle "loi de soutien fiscal à l'investissement", le gouvernement respecte l'engagement qu'il avait pris et je vous tracerai les grandes lignes de ce nouveau mécanisme, ce qui constituera la 2ème partie de mon intervention devant vous.
Je précise immédiatement que sur l'un et l'autre de ces sujets, budget et aide fiscale à l'investissement, vous trouverez des fiches explicatives dans le dossier de presse qui est mis à votre disposition, contenant notamment davantage de détails et de commentaires que je ne puis en donner par oral.
Quelques mots donc, en premier lieu, sur notre budget de l'année prochaine. Je vous disais à l'instant qu'il s'agissait d'un très " bon budget". Il s'établit en effet à 6,81 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement, soit une progression de 6,94% par rapport à la loi de finances initiale pour 2000. Sur quatre exercices (1998-2001), et donc durant l'actuelle législature, ce budget aura augmenté de 40 % ; c'est là, incontestablement, le témoignage de l'intérêt porté par ce gouvernement à l'outre-mer et je tenais à le signaler.
Pour les mesures prévues par la loi d'orientation, une première dotation spécifique de 325 MF est inscrite au budget du Secrétariat d'Etat à l'outre-mer.
Pour l'essentiel ( 290 MF ), ces crédits figurent sur le FEDOM (le chapitre du fonds pour l'emploi dans les DOM et à Saint-Pierre et Miquelon). Ils serviront au financement des nouvelles mesures en faveur de l'emploi et de l'insertion, prévues par la loi d'orientation ("projets initiative jeunes", "allocations de retour à l'activité", primes à la création d'emplois, et départs en préretraite en contrepartie de l'embauche de jeunes) ; je reviendrai sur ces mesures dans un instant, lorsque j'évoquerai le chapitre "emploi" du budget.
Hors FEDOM, des crédits sont inscrits pour d'autres mesures prévues par la loi d'orientation, que je vous rappelle pour mémoire :
- la mise en place, pour un montant de 3 MF, d'un "office de l'eau", dans chaque département, établissement public local chargé de faciliter les actions dans le domaine de la gestion de l'eau ; le ministère chargé de l'environnement apportera le même montant.
- une dotation de 12 MF, pour créer un fonds de promotion des échanges, dont l'objectif sera de promouvoir les déplacements éducatifs, culturels et sportifs des habitants des DOM, vers la métropole et les pays situés dans leur environnement régional.
- enfin, 20 MF pour la création de quatre fonds de coopération régionale, au bénéfice de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Guyane et de la Réunion.
J'en viens maintenant au soutien à l'emploi et au développement économique, dont je vous rappelle qu'il constitue la première priorité du Secrétariat à l'Outre-mer. Le FEDOM, le chapitre budgétaire qui y est spécifiquement consacré, s'élèvera à 2,64 milliards de francs, en hausse de 25 % par rapport à l'an dernier ; ce chapitre constitue la part la plus significative du budget (près de 40 % de l'ensemble).
Ceci témoigne de l'engagement du gouvernement pour l'emploi dans les DOM.
Deux orientations majeures caractériseront le FEDOM l'an prochain : la prise en compte des nouvelles mesures prévues par la loi d'orientation d'une part, le maintien de l'effort pour les mesures d'insertion existantes, d'autre part.
Une enveloppe nouvelle de 290 MF, je vous l'indiquais à l'instant, est prévue pour les mesures emploi de la loi d'orientation pour l'Outre-mer.
Elle est destinée à financer la première année de mise en oeuvre de ces mesures que je vous rappelle :
- 10 000 projets initiative jeunes (PIJ). Aide au projet professionnel, le PIJ est destiné à permettre aux jeunes de moins de 30 ans, soit de créer leur entreprise dans le département d'outre-mer, soit de suivre une formation professionnelle hors de ce département.
- 3 000 départs en préretraite à 55 ans, avec en contrepartie l'embauche de 3 000 jeunes. Il y aura pour cela des conventions entre l'Etat, les partenaires sociaux, et le conseil général ou le conseil régional.
- 10 000 allocations de retour à l'activité (ARA), qui permettront de lutter contre l'exclusion en favorisant le retour à l'emploi des bénéficiaires du RMI, de l'allocation de parent isolé (API), de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), ainsi que des chômeurs de longue durée indemnisés par l'allocation de solidarité spécifique (ASS).
- Enfin, 1 200 primes à la création d'emplois seront financées, en faveur des entreprises qui diversifieront leurs débouchés commerciaux hors du département.
- En outre, l'enveloppe du FEDOM est également augmentée de 50 MF, afin de compenser, pour le financement des agences d'insertion, la baisse de la créance de proratisation consécutive à l'alignement progressif du RMI sur trois ans ( 2001-2003 ), prévu par la loi d'orientation.
Voilà pour ce qui est nouveau et lié à la loi d'orientation. Ces mesures nouvelles ne se substituent pas aux mesures existantes. Bien au contraire, elles s'ajoutent aux 63 800 mesures d'insertion de l'année 2000, dont le volume est maintenu en 2001. Il s'agit des contrats emploi-solidarité et emplois consolidés, des contrats d'insertion par l'activité, des contrats d'accès à l'emploi, des nouveaux emplois-jeunes et des primes à la création d'emplois (Vous trouverez les chiffres détaillés du nombre de chacune de ces mesures, sur les fiches qui figurent dans le dossier de presse).
Au total, avec les 24.200 solutions d'insertion supplémentaires, ce sont donc 88 000 actions individuellement concrètes pour l'emploi et l'insertion qui seront financées par le FEDOM. L'ambition du gouvernement et de faire baisser clairement le niveau du chômage, et en particulier celui des jeunes. Les premiers résultats sont là en 2000 et les moyens dégagés amplifieront ce mouvement en 2001. Il en sera de même pour le RMI.
Au-delà de ces mesures, et bien que les crédits ne soient pas inscrits sur le budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer, je tiens néanmoins à souligner l'effort exceptionnel qui est réalisé par le gouvernement en faveur du développement des activités économiques, toujours dans la perspective de la création d'emplois outre-mer :
En effet, je vous rappelle que la loi d'orientation prévoit des exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale, d'un montant maximum de 32 500 F par an et par salarié (soit 100 % d'exonération dans la limite de 1,3 SMIC), ce qui permettra un abaissement massif du coût du travail. Ces exonérations concernent la totalité des entreprises de moins de onze salariés, ainsi que toutes celles des secteurs exposés à la concurrence : l'industrie, l'agriculture, le tourisme et l'hôtellerie, la pêche, les nouvelles technologies de l'information et de la communication, la presse et l'audiovisuel, ainsi que, à hauteur de 50 %, celles du secteur du BTP.
S'y ajoute l'allégement de 50 % des charges sociales des travailleurs indépendants (commerçants, artisans ...), dans la limite du plafond de la sécurité sociale.
Il s'agit d'une dépense de 3,5 milliards de francs par an en année pleine, inscrite sur le budget du ministère de l'emploi et de la solidarité, mais qu'il fallait évoquer ici, compte tenu de son importance. 112 000 salariés, soit la moitié des effectifs du secteur privé d'outre-mer, sont concernés, ainsi que tous les travailleurs indépendants. Le dispositif précédent, qui venait à échéance, représentait un effort limité à moins d'1 milliard de francs.
Enfin, au titre de l'effort pour le dynamisme de l'économie, je dois mentionner l'aide fiscale apportée par le nouveau dispositif de soutien à l'investissement, que nous évoquerons tout à l'heure.
Pour favoriser l'insertion des jeunes, le budget du secrétariat d'Etat consacre également, vous le savez, d'importants moyens au service militaire adapté, le SMA.
En 2001, le service militaire adapté poursuivra sa professionnalisation et sa féminisation, commencées en 1999. Avec la suppression du service national, ce sont des volontaires qui remplacent les appelés, mais le coût de cette professionnalisation est bien sûr, plus important pour l'Etat.
Compte-tenu du rôle incontesté du SMA dans l'insertion des jeunes (il y a 5 candidatures pour un poste), le gouvernement a fait le choix d'accueillir, malgré la dépense accrue, un nombre de volontaires équivalent à celui des emplois d'appelés qui sont supprimés.
C'est ainsi qu'après 1 100 emplois de volontaires créés au cours des deux dernières années, 900 emplois supplémentaires le seront en 2001, en contrepartie de la suppression de 900 postes d'appelés et de 30 postes d'encadrement.
Notre objectif est de former et d'insérer outre-mer, d'ici 2002, autant de jeunes volontaires que l'on formait d'appelés en 1998, soit environ 3 000 jeunes.
Compte tenu des besoins et de l'évolution démographique, la politique d'aide au logement reste une autre priorité du secrétariat d'Etat à l'outre-mer.
Le logement constitue le deuxième poste de dépenses du budget, avec en 2001 des crédits de paiement d'un montant de 950 MF, en hausse de 3,5% par rapport à l'an dernier et des autorisations de programme réévaluées à hauteur de 1 350 MF, en augmentation de 22,7 %.
Les engagements de l'Etat en matière de logement seront donc maintenus. La baisse du montant de la créance de proratisation en cours d'année, du fait du relèvement partiel du RMI dès 2001, sera en effet compensée par un montant équivalent en autorisations de programme.
La ligne budgétaire relative à l'aide au logement dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre et Miquelon et à Mayotte, permettra de financer la réhabilitation et la construction d'environ 16 500 logements (contre 15 760 en 2000).
Enfin, relative à la résorption de l'habitat insalubre permettra d'améliorer le logement de 2 300 familles.
Autre volet traditionnel de ce budget du secrétariat d'Etat, les crédits en faveur de l'action sociale et culturelle progresseront fortement, de 23,5 %. Ils s'inscrivent à près de 230 MF, en augmentation de 44 MF par rapport à l'an dernier.
Ce renforcement de notre action résulte de l'inscription, sur ce chapitre, de certaines des mesures nouvelles figurant dans la loi d'orientation :
- les 12 MF du fonds de promotion des échanges éducatifs, sportifs et culturels ;
- et les 20 MF pour l'installation de quatre fonds de coopération régionale, au bénéfice de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Guyane et de la Réunion, en lieu et place de l'ancien Fonds interministériel caraïbe.
Par ailleurs, des crédits supplémentaires, à hauteur de 12 MF sont destinés, d'une part à la poursuite des actions de formation et d'insertion dans les territoires d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie, d'autre part à la mise en place d'un programme de formation des cadres mahorais.
Enfin, les dépenses en capital progresseront également dans le budget 2001, notamment du fait de la prise en compte de la part incombant à l'Etat dans le financement des contrats de plan 2000 - 2006.
C'est ainsi que le montant de la subvention attribuée au FIDOM, le Fonds d'investissement dans les DOM, est porté à 250 MF pour ce qui est des crédits de paiement, en augmentation de 15 %, et à 340 MF en autorisations de programme, soit 55 % de hausse.
Le FIDES, Fonds d'investissement pour le développement économique et social, qui concerne les TOM, est abondé à hauteur de 146 MF en crédits de paiement ( + 1,4 %) et de 174 MF en autorisations de programme ( + 20 % ). Il intègre la part de financement des contrats avec la Polynésie française et Wallis et Futuna.
Enfin, les crédits destinés aux actions en Nouvelle-Calédonie (contractuelles et hors contrat) s'élèvent à 260 MF en crédits de paiement et 336 MF en autorisations de programme ; les dotations globales en faveur de la Nouvelle-Calédonie (qui ne concernent pas les contrats de plan, mais sont destinées à compenser les transferts de compétences prévus par la loi organique du 19 mars 1999), s'élèvent à 471 MF, en augmentation de 16 % par rapport à l'année 2000.
Voilà, Mesdames et Messieurs, les points sur lesquels je souhaitais attirer votre attention, sur le budget 2001 de ce ministère.
Il me reste à vous présenter les grandes lignes du nouveau dispositif d'aide fiscale à l'investissement, qui à compter de l'an prochain, se substituera à la "loi Pons".
(source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 22 septembre 2000)

Un rappel tout d'abord, sur le contexte. Vous vous souvenez que ce mécanisme de soutien à l'investissement outre-mer était menacé, en raison des abus qui avaient été constatés, mais aussi parce que, même mieux encadré, en particulier par l'agrément préalable des dossiers, il portait atteinte à la progressivité de l'impôt sur le revenu, l'un des principes fondamentaux de notre système fiscal. De nombreux parlementaires l'avaient, à ce titre, fortement critiqué.
Ce dispositif en outre n'avait pas fait que des heureux, mais aussi des déçus et je vous rappelle que bien des contribuables, notamment au cours des premières années, attirés par l'espoir de gains fiscaux faciles, ont été gravement pénalisés par les scandales et les faillites de ce mécanisme mal maîtrisé.
Une suppression pure et simple du dispositif aurait cependant nuit au développement de certains secteurs économiques outre-mer, pour lesquels le bien fondé de cette aide fiscale est reconnu.
C'est la raison pour laquelle, parallèlement à la préparation de la loi d'orientation pour l'outre-mer, qui s'attache à fortement diminuer le coût du travail, le Premier ministre s'était engagé à ce qu'un nouveau dispositif soit proposé, avant la fin de l'année, à coût constant pour l'Etat et ce sera le cas : il n'y a aucun désengagement financier dans l'aide fiscale à l'outre-mer, mais une mise à plat du dispositif pour le rendre plus équitable et plus efficace, et donc plus équilibré.
Certains se sont étonnés de ne pas trouver, dans le projet de loi d'orientation, ce volet "d'aide à l'investissement". Il y à cela deux raisons : une raison "technique", qui est que s'agissant de dispositions fiscales importantes, à intégrer dans le code général des impôts, il est d'usage que la loi de finances en soit le support ; la seconde, c'est que le Gouvernement a souhaité, comme il l'avait fait pour la loi d'orientation, consulter préalablement les responsables économiques de l'outre-mer, avant de présenter sa réforme.
Cette consultation a pris la forme d'un groupe de travail, associant aux fonctionnaires et aux conseillers des ministres de l'outre-mer et du budget, six représentants des milieux professionnels ultramarins, MM. Bruno BLANDIN (Guadeloupe), Guy DUPONT (La Réunion), Marcel OSENAT (Martinique), Germain SIMONEAU (Guyane), Michel QUINTARD (Nelle Calédonie) et Christian VERNAUDON (Polynésie).
Il s'agissait de recueillir les propositions qu'ils pouvaient formuler, au nom des entrepreneurs de l'outre-mer, et forte de leur expérience personnelle sur leurs attentes dans le domaine du soutien à l'investissement.
Je tiens ici à les remercier pour la très grande qualité de leur contribution et la richesse des débats qui ont caractérisé les travaux de ce groupe de travail.
Certes, ils ne retrouveront pas, bien sûr, dans le projet du gouvernement, la totalité de ce qu'ils avaient proposé ; mais même si des choix ont dû être effectués, et cela est bien compréhensible, je crois pouvoir dire que les acteurs économiques d'outre-mer trouveront dans ce projet, une réponse à la plupart de leurs attentes.
Je vous rappelle que cette aide de l'Etat peut actuellement se présenter sous trois formes :
- pour les contribuables qui sont soumis à l'impôt sur le revenu : une déduction, de leur revenu imposable, de l'intégralité du montant qu'ils investissent outre-mer, dans certains secteurs économiques ;
- pour les entreprises qui acquittent l'impôt sur les sociétés et qui, elles aussi, investissent outre-mer : une déduction de leur résultat imposable ;
- pour les personnes physiques enfin, une réduction de leur impôt, lorsqu'elles investissent dans le secteur de la construction outre-mer ;
L'avantage fiscal accordé pour les investissements effectués par des entreprises, ainsi que la réduction d'impôt pour l'aide au logement ne sont pas remis en cause, mais profondément améliorés, selon des modalités sur lesquelles je reviendrai.
En revanche, la déduction du revenu imposable des particuliers est supprimée, et remplacée par un système plus conforme aux principes de notre droit fiscal.
Le nouveau mécanisme d'aide fiscale à l'investissement ainsi mis en oeuvre, est créé pour 6 ans ; il s'appliquera donc aux dossiers déposés à compter du 1er janvier prochain, et jusqu'à fin 2006, ce qui donne une bonne visibilité aux professionnels, et c'était très attendu.
Il est fondé sur cinq idées directrices.
Cette nouvelle aide fiscale sera plus transparente et plus juste.
Les entreprises d'outre-mer seront les principales bénéficiaires.
Les investissements créateurs d'emplois seront particulièrement soutenus.
Un effort particulier est réalisé pour la Guyane, Saint-Pierre et Miquelon, Mayotte et Wallis et Futuna.
Enfin, l'aide au logement est réorientée en faveur des populations d'outre-mer.
Je vais revenir sur chacun de ces points, étant entendu qu'en raison du caractère un peu technique de ces dispositifs fiscaux, je m'en tiendrai bien sûr aux grandes lignes. ( le dossier dans de presse comporte davantage de détails).
Cette réforme, sera plus transparente et plus juste : elle respectera en effet les grands principes de notre système fiscal, et notamment la progressivité de l'impôt.
La déduction du revenu, telle qu'elle est prévue actuellement, favorise les personnes qui ont les revenus les plus élevés.
Jusqu'à présent, un contribuable métropolitain qui investissait 100.000 F outre-mer, pouvait :
diminuer son impôt de 54.000 F s'il était imposé dans la tranche à 54 % ;
le diminuer de 43.000 F s'il était imposé dans la tranche à 43 %.
Le mécanisme était ainsi d'autant plus avantageux, que l'investisseur était plus fortement imposé.
Désormais, l'avantage fiscal sera constitué d'une réduction d'impôt, de 50 % du montant de l'investissement.
Tous les intervenants seront donc traités de façon équivalente, quelle que soit leur tranche d'imposition, alors que la "loi Pons" était, dans la pratique, bénéficiaient essentiellement aux contribuables situés dans la tranche la plus élevée du barème.
En outre, cette réduction d'impôt sera plafonnée, à la moitié de leur l'impôt de l'année, l'excédent éventuel pouvant s'imputer sur leur impôt de l'année suivante, toujours dans la limite de la moitié du montant de cet impôt.
Ceux des contribuables métropolitains, les plus fortunés, qui investissaient outre-mer pour échapper au paiement de l'essentiel de leur impôt de l'année, ne pourront plus organiser cette " évasion fiscale ".
Pour reprendre mon exemple précédent, un contribuable qui investira 100.000 F pourra :
bénéficier d'une réduction d'impôt de 50 % de son investissement, soit 50.000 F, quelle que soit sa tranche d'imposition ;
mais cette réduction ne pourra plus diminuer que la moitié de son impôt de l'année ; ainsi, s'il devait acquitter 60.000 F d'impôt, il ne pourra le diminuer que de 30.000 F, et imputer le solde de 20.000 F sur l'année suivante.
L'opération doit certes demeurer attractive pour le contribuable car son apport de fonds est nécessaire au développement de l'outre-mer, mais au même titre qu'un autre placement. La défiscalisation, "niche fiscale" réservée aux seuls gros contribuables, telle que se présentait la loi Pons, est supprimée.
En ce qui concerne les investissements réalisés par les entreprises imposées à l'impôt sur les sociétés, la déduction du résultat imposable, du montant de leurs investissements est prorogée, car elle ne posait pas de problème.
Le deuxième point fort de cette réforme, c'est qu'elle profitera avant tout aux entreprises d'outre-mer.
Lorsqu'elles feront appel à des investisseurs extérieurs, il sera désormais inscrit dans la loi que l'essentiel de l'avantage fiscal accordé à ces contribuables, devra être rétrocédé aux entreprises d'outre-mer.
Ce financement externe se réalise, le plus souvent, sous forme d'acquisition d'un bien par des contribuables métropolitains, qui le louent 5 ans à l'entreprise d'outre-mer, avant de lui céder pour un montant symbolique. En compensation, ces investisseurs peuvent diminuer leur impôt, à due proportion de leur participation à l'achat.
Or, il est fréquemment reproché au mécanisme actuel, de ne pas suffisamment profiter aux opérateurs d'outre-mer : la complexité de certains montages, les stratégies d'optimisation fiscale des contribuables métropolitains et les commissions élevées perçues par les intermédiaires, aboutissent en effet à réduire les sommes qui sont, au final, rétrocédées aux entreprises d'outre-mer.
Ainsi, certains dossiers ont pu être présentés, antérieurement, qui aboutissaient à ce que les entrepreneurs de l'outre-mer ne bénéficient même pas du quart de l'avantage induit par l'investissement.
Désormais, et ce sera inscrit dans la loi, au moins 60 % de l'avantage fiscal obtenu par les contribuables imposés à l'impôt sur le revenu devra être rétrocédé à l'exploitant d'outre-mer. Ceci, en pratique, se fera à l'occasion de la fixation du loyer et du prix de cession du bien après les 5 ans de location.
Lorsque ce seront des sociétés qui investiront dans des entreprises d'outre-mer, étant donné que les frais d'intermédiation sont plus faibles dans ce cas, ce sont 75 %, soit les trois quarts de l'avantage fiscal dont elles bénéficient, qui devront être rétrocédés et ce sera, là encore, inscrit dans le nouveau texte législatif.
Ainsi, pour reprendre mon exemple de tout à l'heure, lorsqu'un contribuable extérieur à l'entreprise investira 100.000 F, sur les 50.000 F de réduction d'impôt dont il bénéficiera :
60 % de cette réduction, soit 30.000 F, devront être rétrocédés à l'entreprise d'outre-mer, si l'investisseur est une personne imposée à l'impôt sur le revenu ;
Il ne conservera donc, en définitive, qu'un avantage de 20.000 F, sur les 50.000 F de sa baisse d'impôt.
et si l'investisseur est une entreprise imposée à l'impôt sur les sociétés, ce sont 75 % de cette réduction d'impôt, soit 37.500 F, seront rétrocédés.
Vous le voyez, il s'agit de redonner à cette aide à l'investissement sa vraie finalité : elle ne doit plus constituer au premier chef un moyen pour le contribuable métropolitain de diminuer une part importante de ses impôts, mais redevenir une modalité, transparente et maîtrisée, d'orientation des capitaux vers les entreprises de l'outre-mer, par le biais de l'incitation fiscale.
Un nouveau mécanisme est également instauré pour les petits entrepreneurs des DOM, qui investiront dans leur propre entreprise :
Ils n'ont pas accès aujourd'hui à la défiscalisation, car beaucoup d'entre eux n'ont pas un revenu suffisant pour investir. En effet, pour bénéficier de ce soutien fiscal à l'investissement, il leur faut disposer d'un revenu au moins égal au montant investi, pour pouvoir le déduire en une seule année.
Ces petits entrepreneurs ne peuvent pas non plus faire appel à des financements externes, car les montages sont surtout adaptés aux gros investissements.
Le gouvernement comble cette lacune et instaure une aide fiscale particulièrement souple, adaptée à leur situation : pour eux, le crédit d'impôt, de 50 % du montant de leur investissement, sera reportable et remboursable ; ainsi,
ils pourront l'imputer sur la totalité de leur impôt de l'année de l'investissement, sans plafonnement ;
la partie qu'ils n'auront pas pu déduire, le cas échéant, la 1ère année, sera reportable sur leur impôt pendant les 4 années suivantes ;
et le solde éventuel leur sera remboursé la 5ème année, si l'investissement n'a pas dépassé 10 MF.
Le fait de ne pas avoir un revenu imposable important ne sera donc plus, pour ces petits entrepreneurs des DOM qui souhaitent investir, un obstacle à l'obtention d'un soutien fiscal.
Un autre objectif du gouvernement, c'est que cette réforme de l'aide fiscale à l'investissement, soit plus efficace, au service de l'emploi.
La liste des secteurs éligibles à l'aide fiscale est donc modifiée, afin de tenir compte des évolutions économiques, et de l'impact des investissements dans le domaine de l'emploi.
Vous en trouverez la liste exhaustive dans le dossier de presse, mais je voudrais simplement attirer votre attention sur deux changements, qui illustrent bien la démarche du gouvernement : la suppression d'un secteur, celui de la navigation de croisière et l'ajout de la rénovation hôtelière.
Les paquebots de croisière ne bénéficieront plus de l'aide fiscale, car leur défiscalisation s'est révélée coûteuse (500 MF par an en moyenne sur les 5 dernières années) et n'a pas suffisamment profité au développement de l'activité et de l'emploi dans les départements et territoires d'outre-mer. Les équipages n'étaient pas constitués de personnes originaires de l'outre-mer et ces "hôtels flottants" avaient un impact bien moindre sur l'activité locale, que les hôtels installés outre-mer, le long du littoral.
En revanche, il sera désormais possible de bénéficier de l'aide fiscale pour les travaux de rénovation des hôtels, alors que jusqu'à présent, seules les constructions d'hôtels neufs étaient défiscalisées.
Cette mesure permettra, dans ce secteur très créateur d'emplois, de faciliter la mise aux normes et la réhabilitation.
Dans certains départements en effet, surtout aux Antilles, un important effort de rénovation est indispensable, pour que le parc hôtelier actuel demeure attractif et que les touristes restent accueillis dans de bonnes conditions.
En outre, cette réduction d'impôt pour la rénovation des hôtels sera porté à 60 % du montant de l'investissement (au lieu de 50 %), afin d'encourager, pendant les six prochaines années, la remise en état de tout ce secteur.
Une autre nouveauté importante de cette réforme, c'est qu'un effort particulier est réalisé pour la Guyane, Saint-Pierre et Miquelon, Mayotte et Wallis et Futuna. La réduction d'impôt sera en effet portée à 60 % pour les investissements qui y seront réalisés.
L'attribution d'une réduction d'impôt supérieure permettra, lorsqu'elle sera accordée à un investisseur métropolitain, de lui imposer, lors de l'agrément de son dossier, une rétrocession plus importante de l'avantage fiscal à l'entreprise locale ; et dans le cas où l'investissement sera réalisé en Guyane par le chef d'entreprise lui-même, d'augmenter la part de son autofinancement, et de faciliter ainsi l'obtention des crédits bancaires complémentaires, dont il aura besoin .
L'objectif est de permettre une meilleure intégration de ces territoires qui, en raison de leur situation géographique ou économique spécifique, ont jusqu'à présent peu bénéficié de l'aide fiscale à l'investissement (moins de 7 % à eux quatre, des dossiers présentés à l'agrément en 1999).
Enfin, le mécanisme de réduction d'impôt pour les personnes qui investissent dans le logement locatif, l'acquisition ou la construction de leur résidence principale, sera réorienté en faveur de l'outre-mer.
Le taux de réduction d'impôt accordé pour l'investissement dans les logements sera stabilisé à 25 % de l'investissement, réduction étalée comme aujourd'hui sur 5 ans, et un effort particulier est en outre réalisé pour le logement intermédiaire :
Pour ces investissements locatifs réalisés dans le secteur intermédiaire, le taux de la réduction est porté de 25 % à 40 %, ce qui permettra de soutenir la construction de ce type de logements outre-mer.
Pour l'acquisition ou la construction des logements affectés à la résidence principale des contribuables d'outre-mer, le gouvernement maintiendra la réduction d'impôt de 25 %, dont bénéficient aujourd'hui leurs propriétaires. Mais cette réduction sera désormais plafonnée à 10.000 F/m², afin de limiter l'avantage fiscal pour les acquéreurs les plus aisés.
Voilà, Mesdames et Messieurs, les grandes lignes de cette nouvelle loi, qui met en place un soutien important à l'investissement outre-mer, plus juste, plus transparent et plus efficace, sans aucun désengagement financier de l'Etat, je le rappelle.
Cet effort est complémentaire à celui que le gouvernement a prévu dans la loi d'orientation pour alléger le coût du travail. Avec ces deux volets, aide à l'exploitation d'une part, aide à l'investissement d'autre part, un soutien considérable à l'activité économique et à l'emploi dans les collectivités d'outre-mer est engagé. Il complétera celui réalisé par l'Etat et par les collectivités dans le cadre des contrats de plan sur la période 2000-2006, et nous ne pouvons que nous en féliciter.
Je vous remercie.

(source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 22 septembre 2000)