Texte intégral
C'est parce que je suis en état de manque que je suis venu vous voir aujourd'hui avec trois des ministres particulièrement concernés et engagés pour la cause associative, non seulement dans leur mission gouvernementale, mais aussi dans leur engagement personnel. J'aimerais vous dire que, madame la Présidente, je suis très heureux de voir, ici représentée cette diversité de la vie associative, que je connais bien mais que je n'ai jamais vu rassemblée ainsi avec ses différentes variétés, diversités, qui font la richesse du tissu associatif. Et je voudrais vraiment vous dire combien, pour moi, cette installation du CNVA est importante pour que, ensemble, non seulement nous définissions quelques convictions communes, en laissant la place aux uns et autres de trouver cette liberté dans ce partenariat, mais aussi que nous puissions engager des actions, des partenariats et un cadre de travail structuré entre l'État et la vie associative. Sur le plan de la conviction, nous sommes ici tous convaincus que la vie associative est un élément très important de notre cohésion sociale.
Nous nous sommes engagés pour mettre dans la Constitution que notre République devait avoir une organisation décentralisée. Mais nous décentraliser, cela ne veut pas dire confier seulement des responsabilités à tel ou tel niveau de collectivités locales. Cela veut dire pour toutes les organisations sociales des territoires prendre la place, la place qui est la leur dans notre organisation républicaine. Je pense que c'est très important. Nous avons tous en commun - vous faisiez allusion aux extrémismes, à ce message du 21 avril - cette République qui rassemble tant, qui est capable de mettre tous les Français d'accord, qui obtient même, à l'Assemblée nationale et au Sénat, un vote pour la laïcité dans la République quasiment unanime, à quelques jours d'élections territoriales. [Cela] montre bien qu'il y a un vrai pacte autour des valeurs Liberté, Egalité, Fraternité. Tout notre problème est de faire en sorte que ces valeurs-là ne soient pas seulement inscrites sur le fronton de nos édifices publics, mais soient, dans la société, partagées. Et là, nous avons besoin de l'État déconcentré, des collectivités territoriales décentralisées et de la vie associative, du lien social qui participe à l'expression de ces valeurs. Donc je crois vraiment que nous avons, là, une conviction très forte qui montre combien la République a besoin de la vie associative, mais aussi combien la vie associative, dans la période récente, a servi la République.
Un grand quotidien du soir, qui est comme vous tous ma lecture dès 14 heures - avant c'était 13 heures, mais je me suis pris une heure de réflexion -, nous disait récemment qu'il s'agissait du baby-boom associatif. Je crois qu'il y a là un dynamisme qu'il faut souligner. 70 000 associations supplémentaires ont été créées au cours de l'année passée. Vous êtes filles et fils de 1901 mais vous êtes filles et fils aussi du centenaire de 1901. A cette occasion, nous avons beaucoup débattu au niveau national, au niveau territorial, nous avons eu beaucoup de réflexions sur ce que signifiait cette loi. Je pense que cette dynamique a été renforcée par cette réflexion et notamment cette réflexion à laquelle les associations ont beaucoup participé, et les territoires également ont beaucoup participé et je crois que c'est très important. Je vois que la création d'associations a augmenté de 15% en 15 ans et que donc très nombreux sont les Français et les Françaises qui s'engagent dans cette action associative.
Alors, la légitimité est fondamentalement aujourd'hui, cette légitimité de la société civile ; je pense qu'il ne faut pas avoir peur de dire que nous sommes dans une démocratie qui est représentative et participative. N'opposons pas les deux, nous avons besoin des deux. La démocratie représentative est essentielle, c'est le moins mauvais de tous les systèmes et donc nous y adhérons évidemment. Mais ce n'est pas parce qu'un maire est élu pour six ans que six ans durant, il ne doit pas s'intéresser à la vie, à la respiration de sa commune. Même chose pour les représentants de la Nation. Donc représentation évidemment, mais aussi participation. Et donc, cet équilibre finalement, ces deux pieds sur lesquels doit marcher la démocratie, démocratie représentative, démocratie participative, doivent avancer ensemble et nous devons travailler, puisque nous avons, déjà beaucoup de dispositifs pour la démocratie représentative, sur les dispositifs de la démocratie participative. C'est vrai quelques progrès ont été faits - vous les signaliez tout à l'heure - au Conseil économique et social national ; il faut faire des progrès au conseil économique et social régional. Nous avons, François Fillon et moi-même, présidé des conseils régionaux et nous avons vu combien la vie associative était un apport pour les conseils économiques et sociaux régionaux et combien c'était un laboratoire, que c'était le moyen de jardiner une idée, jardiner une procédure, d'éclairer la route du politique, en menant un certain nombre de réflexions, en organisant un certain nombre de débats, voire même de confrontations. Et c'était nécessaire, souvent, pour que l'on puisse mesurer et les difficultés et, je crois, la complexité d'un certain nombre de sujets. Le tissu associatif donc a ce rôle important d'aiguillon de l'action politique, d'aiguillon de la représentation par cette logique participative. Je crois qu'on peut aller plus loin même dans cette logique participative ; il ne s'agit pas simplement de conseiller, il s'agit aussi de partager l'intérêt général.
Quelquefois on dit le participatif et le consultatif, ne confondons pas. Le consultatif c'est un des éléments du participatif, mais le participatif peut être aussi du délégataire, peut être aussi donc une part du dispositif d'intérêt général. Je crois que ça, c'est une réflexion qui doit nous animer, l'État n'a pas le monopole de l'intérêt général. Il faut le dire et il faut le vivre, c'est une position claire : l'État représente évidemment, dans sa dimension politique mais aussi dans sa dimension administrative, l'intérêt général. Représenter l'intérêt général ne signifie pas en avoir le monopole. Et donc il faut partager, dans une société qui se veut ouverte, l'intérêt général. Les collectivités partagent l'intérêt général, elles le partagent pour leurs actions publiques, on va même quelquefois le partager par délégations fortes. Le maire est officier d'état civil. Donc il y a des délégations qui sont puissantes, quelquefois données à tel ou tel représentant. Il y a aussi évidemment, par des formes contractuelles, par des formes de partenariat, voire par des formes de responsabilité juridiquement définies, des partenariats qui sont de vraies délégations de service public. Et il y en un certain nombre ; il faut clarifier quelquefois parce que c'est vrai que, dans le "jaune" on mélange, quelquefois. Mais même dans la délégation, il faut distinguer. Distinguer ce qui peut être, aujourd'hui, l'organisation d'une maison de retraite, c'est-à-dire une organisation associative d'un outil social et public, de ce que peut être une ligue de protection, par exemple des oiseaux, qui gère un programme européen. Et donc là, on est dans une autre forme de délégation, c'est-à-dire c'est une association qui gère ou participe à la gestion d'un dispositif national, régional ou européen. Mais je pense que notre démocratie et, au fond, notre vie républicaine, sortira renforcée de ces principes de délégation où l'État et la République, dans les instances nationales, fabriquent de la norme, fabriquent de l'égalité, de la liberté et de la fraternité, mais en même temps, laissent à la fois un certain nombre de partenaires déconcentrés de l'État ou des associations et des collectivités locales, participer à la gestion même de l'ensemble de ces dispositifs. Et donc je suis tout à fait conscient combien il est nécessaire que nous clarifiions, au-delà du "jaune" actuel, le processus associatif pour bien montrer les différents types d'associations et voir la mission d'intérêt général de la vie associative et montrer aussi, aux uns et aux autres, que l'association, comme un certain nombre de cellules biologiques, je dirais, peut avoir sa spécificité vitale. Il y a celles qui sont faites pour vivre sur le cours terme parce qu'elles expriment une colère, une revendication, une aspiration, un espoir ; il y a celles qui peuvent vivre sur le long terme, il y a celles qui construisent les missions de service public. Tout ceci est dans une diversité qu'il nous faut mesurer et c'est vrai, aujourd'hui, on a un peu la tendance, dans le "jaune", à pouvoir mélanger l'ensemble des dispositifs. Et ceci ne sert pas la transparence et ne lève pas donc un certain nombre d'obstacles auxquels vous avez fait référence et qui sont très importants, et pour lesquels je ne veux pas qu'il y ait d'ambiguïté.
L'État est favorable au développement de la vie associative. Nous sommes favorables au partenariat financier et nous avons confiance dans la capacité de gestion des associations. Et nous ne mélangeons pas dans les problèmes qui ont pu être médiatisés sur un certain nombre de financements détournés, d'un certain nombre de difficultés qu'il y a pu y avoir. Il y a des difficultés dans tous les secteurs et la vie associative est tout à fait capable de bien gérer l'ensemble de ces dispositifs financiers, qu'ils soient publics ou qu'ils soient privés. C'est un point très important, je le réaffirme avec vous, non pas simplement parce qu'il s'agit, là, d'un propos de circonstance, mais un propos de conviction pour avoir suffisamment vu la rigueur avec laquelle les associations mettaient un point d'honneur à être capables de bien gérer leur propre argent, c'est-à-dire souvent l'argent des adhérents, mais aussi l'argent que les collectivités territoriales ou que l'État pouvaient leur fournir au titre d'une action publique. Et le nouveau "jaune", le "jaune" clair, nous permettra de bien vérifier l'ensemble de ces dispositifs, de manière à ce qu'on ait cette transparence. Et il ne faut pas hésiter à dire que 50 000 associations perçoivent 90 % des financements publics, alors que plus de 730 000 ne s'appuient que sur du travail des bénévoles. Donc il y a un certain nombre de choses qu'il faut dire, et ce n'est pas mettre en cause celles qui reçoivent de l'argent public que de le dire. Mais à partir du moment où on parle du diagnostic, faisons-le avec transparence et je crois que tout le monde y gagnera. Cela ne remet pas en cause la légitimité de ceux qui reçoivent de l'argent, mais cela évite un certain nombre de confusions et montre, au contraire, la richesse de la vie associative. Parce que la vie associative ne doit pas être soumise à un système de modèle unique parce que, justement, sa force c'est la diversité, cette capacité de coller à la société humaine avec ses propres diversités. Donc il ne faut surtout pas enfermer la vie associative dans un seul modèle. Ce serait l'affaiblir parce, qu'au contraire, justement, sa force est d'être capable en toute circonstance d'avoir une capacité d'action, je dirais, tout terrain, suivant les circonstances qui sont celles évidemment de sa propre mission et de ses objectifs.
La loi du 1er août 2003, en faveur du mécénat permettra d'accroître les ressources financières des associations d'intérêt général. C'est un point important : parmi les différentes associations, je crois qu'il faut qu'on trouve des formes d'incitation, des formes de partenariat. De plus en plus nous aurons, là, des possibilités d'intervention. Quand je regarde un peu ce qui se passe en Europe, je vois un certain nombre d'acteurs publics qui font appel à la vie associative, y compris pour des grandes causes, en faisant en sorte que les financements publics soient fonction des financements privés, qu'il puisse y avoir des dynamiques de partenariat qui ainsi, s'installent. Je crois que c'est important de bien préparer ces relations entre l'État d'une part et les associations, mais aussi entre tout ce qui peut être, aujourd'hui, l'action publique qui n'est donc pas seulement l'État.
Je voudrais également vous dire combien la démarche partenariale équilibrée a inspiré, ces dernières années, l'action des pouvoirs publics et combien il faut renforcer ces idées de partenariats. Alors sur ces idées de partenariat, je crois que nous avons beaucoup à travailler ensemble - vous l'avez souhaité. Mon expérience d'une charte régionale de la vie associative, élaborée dans ma région m'a montré combien nous avons des exigences de travail sur ces sujets. Par exemple, notamment, la notion du pluriannuel qui est une notion très très importante et qui n'est pas dans la culture publique puisque nous sommes évidemment dans l'annualité budgétaire. Mais les associations, compte tenu aussi de leur démarche, souvent bénévole et participative, consultative, font qu'il faut discuter, il faut débattre. Tout ceci peut prendre du temps et quelquefois, l'année fait qu'on bouscule l'action alors que des actions un peu significatives et un peu fortes dans bien des domaines, nécessitent des contrats pluriannuels et qu'on puisse bâtir une démarche plus structurée, ce qui rassure l'ensemble des acteurs. Et je crois que personne n'a à gagner dans une forme de précarité des financements, où on attend le mois de novembre pour savoir si on va avoir la subvention de l'année. Je pense que c'est, finalement, des types d'attitudes qui sont de nature à fragiliser l'action des associations.
Alors, nous voulons avoir une démarche très responsable et majeure avec les responsables associatifs d'une part et les représentants de l'État, et trouver sur tous les grands sujets, ces formes de partenariats stabilisés, de manière à avoir une certaine forme de sécurité du travail qui puisse rendre la tâche plus sereine pour les uns et pour les autres, y compris sur les questions d'emplois. Je pense que le ministre du Travail ici présent, notamment, avec le CIVIS qui est un des éléments importants de la mobilisation et de l'engagement des jeunes, pourra, avec vous, participer à la construction de partenariats qui sont des partenariats également pluriannuels pour permettre, justement, à des jeunes, de s'engager. C'est pour cela qu'il y a, dans la vie associative, pour moi, une dimension très importante qui est cette dimension de fraternité. On peut disserter longuement sur solidarité, fraternité, il me semble - mais là je parle en présence de mon philosophe préféré donc qui pourra me corriger, - mais je crois qu'entre solidarité et fraternité, dans la fraternité il y a une notion d'engagement. Le bénévole qui participe à une association travaille à une mission de solidarité mais dans laquelle il s'engage par fraternité parce qu'il donne de lui-même, il ne remplit pas qu'un papier, il n'a pas qu'une attitude administrative, bureaucratique. Il donne de lui-même, de sa propre substance, de son cur, de son intelligence, de son temps, de son argent, quelque chose qu'il a pris en lui et qu'il donne, via l'association, aux autres. C'est un engagement et cet engagement, il est très important. Il faut vraiment en faire une richesse collective, sociale ; on a besoin de cette forme d'engagement. C'est pour cela que je souhaite vraiment que le CIVIS puisse être très ouvert pour permettre aux jeunes qui veulent s'engager. Naturellement ils rêvent d'humanitaire, mais il y a 1 000 façons de donner. L'environnement, les autres grandes causes qui mobilisent les jeunes, ce sont des causes pour lesquelles il y a une formidable jeunesse, aujourd'hui, en France, qui a une générosité très importante à donner. Il faut que le mouvement associatif soit l'un des mouvements d'accueil de cette générosité qui est dans le coeur de la jeunesse, aujourd'hui. Alors cela veut dire qu'il faut que nous puissions, en effet, avancer, monsieur le ministre de l'Éducation, sur la validation des acquis de l'expérience. Je vais faire une confidence au ministre de l'Éducation, il se trouve que j'ai fait une école de commerce dans ma jeunesse - mais il n'y a aucun énarque ici ! On vous en a trouvé quatre sans énarque, vous êtes quand même gâtés ! Mais il y en a sans doute dans la salle.... Mais moi, j'ai été dans une école de commerce où on appelait ça des activités. C'était des associations et on avait des points pour le diplôme qui étaient liés aux associations qu'on faisait. Et donc celui qui animait tel club sportif, le capitaine de l'équipe de rugby, il avait en fin d'année 2 ou 3 points. Et moi, je faisais des débats, déjà, et donc j'avais mis Pierre Mendès France face à Michel Rocard. J'organisais un certain nombre de débats de cette nature et j'avais eu, à la fin, pour mon diplôme, quelques points.
Je crois que la vie associative est évidemment formatrice, si un certain nombre d'écoles l'ont reconnue comme telle. Il est évident que, dans les dispositifs de gestion, dans les dispositifs de ressources humaines, de mobilisation, de dynamique de groupe, beaucoup de sujets montrent qu'il y a une forme d'ingénierie sociale qui est une vraie compétence ; il faut qu'on trouve le moyen de valoriser ces acquis de l'expérience. Cela aidera, évidemment, les personnes qui sont dans les associations, actuellement, à valoriser leurs propres acquis au bout d'un parcours. Mais cela permettra aussi, à un certain nombre de gens, de venir dans la vie associative et cela montrera que dans la vie associative on donne, mais on reçoit aussi. Et on reçoit une expérience, on reçoit une qualification, on reçoit quelque chose qui donne un peu plus de forces à la personnalité, qui donne un peu plus de consistance à la nature humaine, qui donne une capacité qui doit être reconnue par la société parce qu'elle est utile dans d'autres activités. C'est un point, je crois, essentiel de cette validation d'expérience, chère madame la présidente, que vous avez évoqué tout à l'heure. Je crois, d'une manière générale, qu'il faut favoriser cette dynamique de l'emploi à l'intérieur des associations, évidemment, dans cette perspective-là, avec une validation des acquis. C'est-à-dire qu'on puisse reconnaître que l'emploi n'est pas simplement une prestation bénévole. Il y a une partie de bénévolat, mais il y a aussi une partie de travail, et cette partie de travail mérite reconnaissance, c'est-à-dire le statut et l'acquis. Pour nous, il y a une étape très importante qui est la création du chèque emploi service, chèque emploi service spécial association, chèque donc emploi associatif, qui répond à une demande ancienne d'ailleurs des plus petites associations, afin de leur faciliter la gestion. Ce chèque associatif permettra, dans un seul document, d'avoir un document qui est la déclaration d'embauche, qui est la fiche de paie, qui est collectivement une série de procédures ainsi rassemblées. Donc je pense qu'il y a un certain nombre de dispositions qui devraient vous aider.
Je voudrais dire aussi que nous allons faire en sorte qu'on puisse inciter les particuliers, et les entreprises, à effectuer des dons aux associations. Vous avez vu que la loi 2004 permet un taux de réduction porté à 60 % pour l'ensemble des associations d'intérêt général et à 66 %, pour un certain nombre d'associations. Nous l'avons fait pour les associations qui entrent dans le champ de l'amendement Coluche qui avaient un statut, , nous n'avons pas voulu pénaliser les associations qui avaient déjà un dispositif qui leur permettait de pouvoir récolter des dons.
Je voudrais avoir un regard particulier pour un secteur important de votre action militante, qui est l'encadrement des enfants et des jeunes dans les centres de vacances et de loisirs, les CVL, qui est aujourd'hui fragilisé. Il doit être mieux reconnu, mieux soutenu : nous y travaillons. C'est un élément très important et nous voulons inscrire, dans la loi, un véritable statut de l'engagement éducatif pour que les animateurs et les directeurs de ces centres, lorsqu'ils interviennent sur des périodes courtes qui sont souvent des périodes fractionnées, puissent valoriser leur action et sortir d'une certaine ambiguïté de leurs contrats actuels qui sont parfois contestés. Je veillerai à ce que ce dossier, qui est suivi par Luc Ferry, aboutisse dans les plus brefs délais. C'est un élément, important là aussi, de la stabilité juridique de notre dispositif. Il ne faut pas que le fait associatif soit un fait d'instabilité.
Je voudrais vous dire, enfin, combien je souhaite madame la Présidente, mesdames et messieurs, qu'on puisse travailler ensemble avec ce partenariat que le CNVA demande et que les ministres concernés souhaitent également, pour pouvoir bâtir un certain nombre de projets dont vous avez parlé et ce, dans la plus grande indépendance. Ce qui est intéressant dans le CNVA, c'est cette capacité que vous avez, vous CNVA, nous État, d'être libres les uns et les autres et de travailler ensemble et de faire des parcours communs, sans porter atteinte à la liberté des uns et des autres. Les associations, par définition, ont besoin de cet oxygène. Je le connais bien, il doit exprimer la liberté, les prises de position, mais de temps en temps, il est très important d'avoir cette collégialité qui donne de la force, notamment quand on veut pratiquer la subsidiarité. Et donc c'est un élément qui est, pour nous, élément structurant de ce partenariat.
Nous avons, je crois, trois chantiers avec le CNVA pour les médias. Il nous faut, tout d'abord, soutenir la volonté d'engagement de nos concitoyens en créant un statut juridique du volontaire. C'est un point clé. Je veux d'abord, évidemment, rappeler que le bénévolat reste la vertu cardinale et l'essentiel de l'engagement associatif ; donc, il faut garder cette force qui fait partie, aussi, de la légitimité.
Mais certaines des actions engagées par les associations demandent un investissement particulièrement important, souvent régulier, et des compétences et des fortes motivations. Et donc nous devons nous efforcer de définir, pour ces volontaires, un statut légal - c'est le premier point - qui permette aux associations, évidemment, de les accueillir. Le statut défini vous le disiez tout à l'heure, par la loi du 14 mars 2000, n'est pas satisfaisant et je souhaite que ce statut soit ouvert à tous ceux qui souhaitent y participer, sans limite d'âge supérieure - c'est un point clé - et, en outre, le temps de l'engagement doit pouvoir être modulable. C'est un élément très important. Nous sommes dans une société vieillissante ou plus exactement, on va être plus âgé, mais plus jeune. Une petite fille sur deux aujourd'hui qui naît, ici en ce moment, va vivre jusqu'à 100 ans. Donc, il faut nous préparer à cela. Il faut en faire un bonheur ; ce n'est pas un malheur. On combat les maladies, on combat les difficultés, on est en train de faire en sorte qu'on repousse le temps de vie et donc cette espérance de vie, il faut pouvoir la fertiliser. Alors on ne va pas mettre des plafonds à l'engagement de statut de volontaire à un moment où, justement, on voit des gens qui, à un certain âge, ont toutes leurs capacités, tous leurs moyens et au contraire, on a souvent, là, l'occasion d'aller chercher cette richesse sociale, cette richesse d'expérience. Il faut valoriser l'expérience et donc il ne faut pas mettre des limites d'âge supérieures dans ce statut. C'est un enjeu majeur et nous voulons que l'engagement associatif ne soit pas l'apanage ni d'un type de population, ni d'un type d'âge. L'association n'est pas typée, elle doit être ouverte et donc, on n'a pas une association qui doit, finalement, être trop classifiée. Je souhaite que la représentation nationale se saisisse de ce projet, qu'elle vous consulte évidemment et nous aurons ensemble, je crois, le travail de bâtir un texte qui pourra être proposé en effet, donc, au Parlement.
Deuxième grand sujet, il nous faut objectiver, je dirais, le partenariat État-associations et devenir, ensemble, des partenaires transparents et donc définir la stratégie associative des ministères. C'est un point, je crois, qui va concerner l'ensemble des ministères, mais il faut que l'État puisse dire clairement, ministère par ministère, département par département ministériel, quelle est la part des associations dans son action publique. Et donc là, il y a un partenariat qui ne doit pas être forcément toujours enfermé sur les mêmes associations, ces associations partenaires privilégiées, quelquefois adversaires privilégiées, quelquefois amies privilégiées, mais de toute façon privilégiées parce que finalement, on s'installe dans une dialectique qui finit par être commode. Je souhaite que les ministères aient une ouverture la plus forte possible sur la vie associative, à la fois dans les méthodes de travail mais aussi, évidemment, dans les stratégies de financement. Et je souhaite qu'on puisse conforter la place du secteur associatif et l'impliquer, non seulement dans le projet de court terme - quand il y a une crise on voit souvent la vie associative arriver -, mais ce qu'il faut aussi, c'est mettre du temps pour avoir des bons partenariats. Et je crois que nous y gagnerons tous, y compris dans les cas des dossiers très difficiles.Je vous suggère de mettre en place, en liaison constante avec le CNVA et dans quelques ministères qui seraient candidats, une forme d'expérimentation, de manière à ce qu'on puisse avancer sur ces sujets. Le ministère des Sports, le ministère de la Ville On peut voir ceux qui sont directement concernés et qui le souhaitent, pour pouvoir avancer ensemble dans un partenariat, pour faire de la vie associative un des piliers de l'action publique pour un département ministériel et de définir les formes de travail, en respectant un peu et en construisant cette éthique de partenariat qui n'est pas si facile à construire que ça. J'ai travaillé sur des chartes de cette nature, au niveau territorial : ce n'est pas si simple, parce qu'il faut qu'on puisse travailler ensemble et que chacun garde sa liberté et que vous-même, vous arriviez à avoir à l'intérieur d'une association, la capacité à pouvoir dégager une position commune, tout en respectant les structures individuelles. Donc, ce n'est pas si simple que ça. J'ai gratté un peu la question, mais c'est très important, parce que ce qui est essentiel, c'est la subsidiarité et c'est qu'un jour on puisse dire, les associations de tel type de secteur apportent tel type de contribution.
Enfin, les démarches que nous souhaitons marquent la volonté de transparence de l'État et je souhaite accompagner notre travail en commun par des formes d'évaluation, qu'il nous faut bâtir ensemble. Car, dans une démocratie moderne, il faut qu'on trouve les formes de l'évaluation. Et je crois qu'on pourrait ensemble travailler sur des sujets qui peuvent nous permettre de déboucher sur des procédures qui ne soient ni lourdes, ni accusatrices, mais au contraire, qui soient les marques de confiance. L'évaluation, c'est le signe de la confiance ; on confie des objectifs, on confie des moyens et on demande en retour une évaluation. C'est assez dans la culture associative, pour les associations qui vivent vraiment leur assemblée générale toute l'année, pour les associations qui respectent vraiment leur éthique de délibération, la transparence est naturelle. Et on voit bien que les associations qui ne la respectent pas, à un moment où à un autre, ont des difficultés. Donc nous, nous avons simplement à bâtir, avec vous, des formes de bonne gestion. Voilà quelques réflexions.
Vous avez conclu, madame la Présidente, sur la dimension européenne. Je pense que c'est également très important. L'Europe qui est en train de se construire sera, en fait, une Europe de réseaux. Nous voyons que le traité de Maastricht a choisi l'Europe des États par rapport à l'Europe des régions. Mais aujourd'hui l'Europe des États à 25 va être une Europe des États pour laquelle, un certain nombre d'États travailleront ensemble sur un certain nombre de sujets. Nous avons déjà la zone euro, peut-être qu'il y aura des groupes pionniers. Nous verrons quelle forme prendront les partenariats, mais on ne travaillera pas systématiquement, et sur tous les sujets, à 25. Je crois que cette organisation des États devra être intégrée, également, aux associations, pour travailler au niveau européen par un certain nombre de réseaux. L'Europe parce est une mission d'intérêt général : il fait que le citoyen ait conscience de l'espace dans lequel il évolue et dans lequel, naturellement, ses instances représentatives évoluent. Et donc la vie associative, de ce point de vue-là, doit considérer que la nouvelle Europe, dans sa nouvelle géographie et dans son nouveau fonctionnement avec, je l'espère, sa nouvelle constitution, fait partie de la mission d'intérêt général qui est dans votre mission de citoyenneté, pour vivre avec toutes les formes de légitimité qui sont les vôtres.
Parallèlement, vous savez donc que nous avons modifié notre Constitution, pour dire que nous voulions une République qui ait une organisation décentralisée. Quand vous entendez décentralisation, pensez association. Et nous, à chaque fois, nous ferons en sorte qu'on puisse penser association. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas que vous ayez des associations qui aient une organisation nationale, mais même les grandes associations nationales, elles n'ont rien à perdre à faire confiance à leur délégation territoriale. Elles n'ont rien à perdre à écouter le terrain. Faire confiance au territoire, c'est faire confiance à l'ouverture et notre République aujourd'hui, elle a besoin au fond, de centres de décisions qui soient multiples sur l'ensemble du territoire. Qu'est-ce que craint le citoyen ? Le citoyen, il craint d'être dans un monde sans pilotage humain, il craint la financiarisation de l'économie, il craint le gigantisme, il craint, finalement, une forme de décision qui serait une forme de décision anonyme. Il faut faire en sorte que notre société soit une société à pilotage humain. C'est-à-dire que partout dans la société, il y ait des lieux de décisions, de débats, où on voit des hommes et des femmes parler avec d'autres et prendre des responsabilités. Et si je suis avec vous, à vos côtés, c'est parce que je crois à votre rôle fondateur pour la dynamique républicaine. Je vous remercie.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 16 mars 2004)
Nous nous sommes engagés pour mettre dans la Constitution que notre République devait avoir une organisation décentralisée. Mais nous décentraliser, cela ne veut pas dire confier seulement des responsabilités à tel ou tel niveau de collectivités locales. Cela veut dire pour toutes les organisations sociales des territoires prendre la place, la place qui est la leur dans notre organisation républicaine. Je pense que c'est très important. Nous avons tous en commun - vous faisiez allusion aux extrémismes, à ce message du 21 avril - cette République qui rassemble tant, qui est capable de mettre tous les Français d'accord, qui obtient même, à l'Assemblée nationale et au Sénat, un vote pour la laïcité dans la République quasiment unanime, à quelques jours d'élections territoriales. [Cela] montre bien qu'il y a un vrai pacte autour des valeurs Liberté, Egalité, Fraternité. Tout notre problème est de faire en sorte que ces valeurs-là ne soient pas seulement inscrites sur le fronton de nos édifices publics, mais soient, dans la société, partagées. Et là, nous avons besoin de l'État déconcentré, des collectivités territoriales décentralisées et de la vie associative, du lien social qui participe à l'expression de ces valeurs. Donc je crois vraiment que nous avons, là, une conviction très forte qui montre combien la République a besoin de la vie associative, mais aussi combien la vie associative, dans la période récente, a servi la République.
Un grand quotidien du soir, qui est comme vous tous ma lecture dès 14 heures - avant c'était 13 heures, mais je me suis pris une heure de réflexion -, nous disait récemment qu'il s'agissait du baby-boom associatif. Je crois qu'il y a là un dynamisme qu'il faut souligner. 70 000 associations supplémentaires ont été créées au cours de l'année passée. Vous êtes filles et fils de 1901 mais vous êtes filles et fils aussi du centenaire de 1901. A cette occasion, nous avons beaucoup débattu au niveau national, au niveau territorial, nous avons eu beaucoup de réflexions sur ce que signifiait cette loi. Je pense que cette dynamique a été renforcée par cette réflexion et notamment cette réflexion à laquelle les associations ont beaucoup participé, et les territoires également ont beaucoup participé et je crois que c'est très important. Je vois que la création d'associations a augmenté de 15% en 15 ans et que donc très nombreux sont les Français et les Françaises qui s'engagent dans cette action associative.
Alors, la légitimité est fondamentalement aujourd'hui, cette légitimité de la société civile ; je pense qu'il ne faut pas avoir peur de dire que nous sommes dans une démocratie qui est représentative et participative. N'opposons pas les deux, nous avons besoin des deux. La démocratie représentative est essentielle, c'est le moins mauvais de tous les systèmes et donc nous y adhérons évidemment. Mais ce n'est pas parce qu'un maire est élu pour six ans que six ans durant, il ne doit pas s'intéresser à la vie, à la respiration de sa commune. Même chose pour les représentants de la Nation. Donc représentation évidemment, mais aussi participation. Et donc, cet équilibre finalement, ces deux pieds sur lesquels doit marcher la démocratie, démocratie représentative, démocratie participative, doivent avancer ensemble et nous devons travailler, puisque nous avons, déjà beaucoup de dispositifs pour la démocratie représentative, sur les dispositifs de la démocratie participative. C'est vrai quelques progrès ont été faits - vous les signaliez tout à l'heure - au Conseil économique et social national ; il faut faire des progrès au conseil économique et social régional. Nous avons, François Fillon et moi-même, présidé des conseils régionaux et nous avons vu combien la vie associative était un apport pour les conseils économiques et sociaux régionaux et combien c'était un laboratoire, que c'était le moyen de jardiner une idée, jardiner une procédure, d'éclairer la route du politique, en menant un certain nombre de réflexions, en organisant un certain nombre de débats, voire même de confrontations. Et c'était nécessaire, souvent, pour que l'on puisse mesurer et les difficultés et, je crois, la complexité d'un certain nombre de sujets. Le tissu associatif donc a ce rôle important d'aiguillon de l'action politique, d'aiguillon de la représentation par cette logique participative. Je crois qu'on peut aller plus loin même dans cette logique participative ; il ne s'agit pas simplement de conseiller, il s'agit aussi de partager l'intérêt général.
Quelquefois on dit le participatif et le consultatif, ne confondons pas. Le consultatif c'est un des éléments du participatif, mais le participatif peut être aussi du délégataire, peut être aussi donc une part du dispositif d'intérêt général. Je crois que ça, c'est une réflexion qui doit nous animer, l'État n'a pas le monopole de l'intérêt général. Il faut le dire et il faut le vivre, c'est une position claire : l'État représente évidemment, dans sa dimension politique mais aussi dans sa dimension administrative, l'intérêt général. Représenter l'intérêt général ne signifie pas en avoir le monopole. Et donc il faut partager, dans une société qui se veut ouverte, l'intérêt général. Les collectivités partagent l'intérêt général, elles le partagent pour leurs actions publiques, on va même quelquefois le partager par délégations fortes. Le maire est officier d'état civil. Donc il y a des délégations qui sont puissantes, quelquefois données à tel ou tel représentant. Il y a aussi évidemment, par des formes contractuelles, par des formes de partenariat, voire par des formes de responsabilité juridiquement définies, des partenariats qui sont de vraies délégations de service public. Et il y en un certain nombre ; il faut clarifier quelquefois parce que c'est vrai que, dans le "jaune" on mélange, quelquefois. Mais même dans la délégation, il faut distinguer. Distinguer ce qui peut être, aujourd'hui, l'organisation d'une maison de retraite, c'est-à-dire une organisation associative d'un outil social et public, de ce que peut être une ligue de protection, par exemple des oiseaux, qui gère un programme européen. Et donc là, on est dans une autre forme de délégation, c'est-à-dire c'est une association qui gère ou participe à la gestion d'un dispositif national, régional ou européen. Mais je pense que notre démocratie et, au fond, notre vie républicaine, sortira renforcée de ces principes de délégation où l'État et la République, dans les instances nationales, fabriquent de la norme, fabriquent de l'égalité, de la liberté et de la fraternité, mais en même temps, laissent à la fois un certain nombre de partenaires déconcentrés de l'État ou des associations et des collectivités locales, participer à la gestion même de l'ensemble de ces dispositifs. Et donc je suis tout à fait conscient combien il est nécessaire que nous clarifiions, au-delà du "jaune" actuel, le processus associatif pour bien montrer les différents types d'associations et voir la mission d'intérêt général de la vie associative et montrer aussi, aux uns et aux autres, que l'association, comme un certain nombre de cellules biologiques, je dirais, peut avoir sa spécificité vitale. Il y a celles qui sont faites pour vivre sur le cours terme parce qu'elles expriment une colère, une revendication, une aspiration, un espoir ; il y a celles qui peuvent vivre sur le long terme, il y a celles qui construisent les missions de service public. Tout ceci est dans une diversité qu'il nous faut mesurer et c'est vrai, aujourd'hui, on a un peu la tendance, dans le "jaune", à pouvoir mélanger l'ensemble des dispositifs. Et ceci ne sert pas la transparence et ne lève pas donc un certain nombre d'obstacles auxquels vous avez fait référence et qui sont très importants, et pour lesquels je ne veux pas qu'il y ait d'ambiguïté.
L'État est favorable au développement de la vie associative. Nous sommes favorables au partenariat financier et nous avons confiance dans la capacité de gestion des associations. Et nous ne mélangeons pas dans les problèmes qui ont pu être médiatisés sur un certain nombre de financements détournés, d'un certain nombre de difficultés qu'il y a pu y avoir. Il y a des difficultés dans tous les secteurs et la vie associative est tout à fait capable de bien gérer l'ensemble de ces dispositifs financiers, qu'ils soient publics ou qu'ils soient privés. C'est un point très important, je le réaffirme avec vous, non pas simplement parce qu'il s'agit, là, d'un propos de circonstance, mais un propos de conviction pour avoir suffisamment vu la rigueur avec laquelle les associations mettaient un point d'honneur à être capables de bien gérer leur propre argent, c'est-à-dire souvent l'argent des adhérents, mais aussi l'argent que les collectivités territoriales ou que l'État pouvaient leur fournir au titre d'une action publique. Et le nouveau "jaune", le "jaune" clair, nous permettra de bien vérifier l'ensemble de ces dispositifs, de manière à ce qu'on ait cette transparence. Et il ne faut pas hésiter à dire que 50 000 associations perçoivent 90 % des financements publics, alors que plus de 730 000 ne s'appuient que sur du travail des bénévoles. Donc il y a un certain nombre de choses qu'il faut dire, et ce n'est pas mettre en cause celles qui reçoivent de l'argent public que de le dire. Mais à partir du moment où on parle du diagnostic, faisons-le avec transparence et je crois que tout le monde y gagnera. Cela ne remet pas en cause la légitimité de ceux qui reçoivent de l'argent, mais cela évite un certain nombre de confusions et montre, au contraire, la richesse de la vie associative. Parce que la vie associative ne doit pas être soumise à un système de modèle unique parce que, justement, sa force c'est la diversité, cette capacité de coller à la société humaine avec ses propres diversités. Donc il ne faut surtout pas enfermer la vie associative dans un seul modèle. Ce serait l'affaiblir parce, qu'au contraire, justement, sa force est d'être capable en toute circonstance d'avoir une capacité d'action, je dirais, tout terrain, suivant les circonstances qui sont celles évidemment de sa propre mission et de ses objectifs.
La loi du 1er août 2003, en faveur du mécénat permettra d'accroître les ressources financières des associations d'intérêt général. C'est un point important : parmi les différentes associations, je crois qu'il faut qu'on trouve des formes d'incitation, des formes de partenariat. De plus en plus nous aurons, là, des possibilités d'intervention. Quand je regarde un peu ce qui se passe en Europe, je vois un certain nombre d'acteurs publics qui font appel à la vie associative, y compris pour des grandes causes, en faisant en sorte que les financements publics soient fonction des financements privés, qu'il puisse y avoir des dynamiques de partenariat qui ainsi, s'installent. Je crois que c'est important de bien préparer ces relations entre l'État d'une part et les associations, mais aussi entre tout ce qui peut être, aujourd'hui, l'action publique qui n'est donc pas seulement l'État.
Je voudrais également vous dire combien la démarche partenariale équilibrée a inspiré, ces dernières années, l'action des pouvoirs publics et combien il faut renforcer ces idées de partenariats. Alors sur ces idées de partenariat, je crois que nous avons beaucoup à travailler ensemble - vous l'avez souhaité. Mon expérience d'une charte régionale de la vie associative, élaborée dans ma région m'a montré combien nous avons des exigences de travail sur ces sujets. Par exemple, notamment, la notion du pluriannuel qui est une notion très très importante et qui n'est pas dans la culture publique puisque nous sommes évidemment dans l'annualité budgétaire. Mais les associations, compte tenu aussi de leur démarche, souvent bénévole et participative, consultative, font qu'il faut discuter, il faut débattre. Tout ceci peut prendre du temps et quelquefois, l'année fait qu'on bouscule l'action alors que des actions un peu significatives et un peu fortes dans bien des domaines, nécessitent des contrats pluriannuels et qu'on puisse bâtir une démarche plus structurée, ce qui rassure l'ensemble des acteurs. Et je crois que personne n'a à gagner dans une forme de précarité des financements, où on attend le mois de novembre pour savoir si on va avoir la subvention de l'année. Je pense que c'est, finalement, des types d'attitudes qui sont de nature à fragiliser l'action des associations.
Alors, nous voulons avoir une démarche très responsable et majeure avec les responsables associatifs d'une part et les représentants de l'État, et trouver sur tous les grands sujets, ces formes de partenariats stabilisés, de manière à avoir une certaine forme de sécurité du travail qui puisse rendre la tâche plus sereine pour les uns et pour les autres, y compris sur les questions d'emplois. Je pense que le ministre du Travail ici présent, notamment, avec le CIVIS qui est un des éléments importants de la mobilisation et de l'engagement des jeunes, pourra, avec vous, participer à la construction de partenariats qui sont des partenariats également pluriannuels pour permettre, justement, à des jeunes, de s'engager. C'est pour cela qu'il y a, dans la vie associative, pour moi, une dimension très importante qui est cette dimension de fraternité. On peut disserter longuement sur solidarité, fraternité, il me semble - mais là je parle en présence de mon philosophe préféré donc qui pourra me corriger, - mais je crois qu'entre solidarité et fraternité, dans la fraternité il y a une notion d'engagement. Le bénévole qui participe à une association travaille à une mission de solidarité mais dans laquelle il s'engage par fraternité parce qu'il donne de lui-même, il ne remplit pas qu'un papier, il n'a pas qu'une attitude administrative, bureaucratique. Il donne de lui-même, de sa propre substance, de son cur, de son intelligence, de son temps, de son argent, quelque chose qu'il a pris en lui et qu'il donne, via l'association, aux autres. C'est un engagement et cet engagement, il est très important. Il faut vraiment en faire une richesse collective, sociale ; on a besoin de cette forme d'engagement. C'est pour cela que je souhaite vraiment que le CIVIS puisse être très ouvert pour permettre aux jeunes qui veulent s'engager. Naturellement ils rêvent d'humanitaire, mais il y a 1 000 façons de donner. L'environnement, les autres grandes causes qui mobilisent les jeunes, ce sont des causes pour lesquelles il y a une formidable jeunesse, aujourd'hui, en France, qui a une générosité très importante à donner. Il faut que le mouvement associatif soit l'un des mouvements d'accueil de cette générosité qui est dans le coeur de la jeunesse, aujourd'hui. Alors cela veut dire qu'il faut que nous puissions, en effet, avancer, monsieur le ministre de l'Éducation, sur la validation des acquis de l'expérience. Je vais faire une confidence au ministre de l'Éducation, il se trouve que j'ai fait une école de commerce dans ma jeunesse - mais il n'y a aucun énarque ici ! On vous en a trouvé quatre sans énarque, vous êtes quand même gâtés ! Mais il y en a sans doute dans la salle.... Mais moi, j'ai été dans une école de commerce où on appelait ça des activités. C'était des associations et on avait des points pour le diplôme qui étaient liés aux associations qu'on faisait. Et donc celui qui animait tel club sportif, le capitaine de l'équipe de rugby, il avait en fin d'année 2 ou 3 points. Et moi, je faisais des débats, déjà, et donc j'avais mis Pierre Mendès France face à Michel Rocard. J'organisais un certain nombre de débats de cette nature et j'avais eu, à la fin, pour mon diplôme, quelques points.
Je crois que la vie associative est évidemment formatrice, si un certain nombre d'écoles l'ont reconnue comme telle. Il est évident que, dans les dispositifs de gestion, dans les dispositifs de ressources humaines, de mobilisation, de dynamique de groupe, beaucoup de sujets montrent qu'il y a une forme d'ingénierie sociale qui est une vraie compétence ; il faut qu'on trouve le moyen de valoriser ces acquis de l'expérience. Cela aidera, évidemment, les personnes qui sont dans les associations, actuellement, à valoriser leurs propres acquis au bout d'un parcours. Mais cela permettra aussi, à un certain nombre de gens, de venir dans la vie associative et cela montrera que dans la vie associative on donne, mais on reçoit aussi. Et on reçoit une expérience, on reçoit une qualification, on reçoit quelque chose qui donne un peu plus de forces à la personnalité, qui donne un peu plus de consistance à la nature humaine, qui donne une capacité qui doit être reconnue par la société parce qu'elle est utile dans d'autres activités. C'est un point, je crois, essentiel de cette validation d'expérience, chère madame la présidente, que vous avez évoqué tout à l'heure. Je crois, d'une manière générale, qu'il faut favoriser cette dynamique de l'emploi à l'intérieur des associations, évidemment, dans cette perspective-là, avec une validation des acquis. C'est-à-dire qu'on puisse reconnaître que l'emploi n'est pas simplement une prestation bénévole. Il y a une partie de bénévolat, mais il y a aussi une partie de travail, et cette partie de travail mérite reconnaissance, c'est-à-dire le statut et l'acquis. Pour nous, il y a une étape très importante qui est la création du chèque emploi service, chèque emploi service spécial association, chèque donc emploi associatif, qui répond à une demande ancienne d'ailleurs des plus petites associations, afin de leur faciliter la gestion. Ce chèque associatif permettra, dans un seul document, d'avoir un document qui est la déclaration d'embauche, qui est la fiche de paie, qui est collectivement une série de procédures ainsi rassemblées. Donc je pense qu'il y a un certain nombre de dispositions qui devraient vous aider.
Je voudrais dire aussi que nous allons faire en sorte qu'on puisse inciter les particuliers, et les entreprises, à effectuer des dons aux associations. Vous avez vu que la loi 2004 permet un taux de réduction porté à 60 % pour l'ensemble des associations d'intérêt général et à 66 %, pour un certain nombre d'associations. Nous l'avons fait pour les associations qui entrent dans le champ de l'amendement Coluche qui avaient un statut, , nous n'avons pas voulu pénaliser les associations qui avaient déjà un dispositif qui leur permettait de pouvoir récolter des dons.
Je voudrais avoir un regard particulier pour un secteur important de votre action militante, qui est l'encadrement des enfants et des jeunes dans les centres de vacances et de loisirs, les CVL, qui est aujourd'hui fragilisé. Il doit être mieux reconnu, mieux soutenu : nous y travaillons. C'est un élément très important et nous voulons inscrire, dans la loi, un véritable statut de l'engagement éducatif pour que les animateurs et les directeurs de ces centres, lorsqu'ils interviennent sur des périodes courtes qui sont souvent des périodes fractionnées, puissent valoriser leur action et sortir d'une certaine ambiguïté de leurs contrats actuels qui sont parfois contestés. Je veillerai à ce que ce dossier, qui est suivi par Luc Ferry, aboutisse dans les plus brefs délais. C'est un élément, important là aussi, de la stabilité juridique de notre dispositif. Il ne faut pas que le fait associatif soit un fait d'instabilité.
Je voudrais vous dire, enfin, combien je souhaite madame la Présidente, mesdames et messieurs, qu'on puisse travailler ensemble avec ce partenariat que le CNVA demande et que les ministres concernés souhaitent également, pour pouvoir bâtir un certain nombre de projets dont vous avez parlé et ce, dans la plus grande indépendance. Ce qui est intéressant dans le CNVA, c'est cette capacité que vous avez, vous CNVA, nous État, d'être libres les uns et les autres et de travailler ensemble et de faire des parcours communs, sans porter atteinte à la liberté des uns et des autres. Les associations, par définition, ont besoin de cet oxygène. Je le connais bien, il doit exprimer la liberté, les prises de position, mais de temps en temps, il est très important d'avoir cette collégialité qui donne de la force, notamment quand on veut pratiquer la subsidiarité. Et donc c'est un élément qui est, pour nous, élément structurant de ce partenariat.
Nous avons, je crois, trois chantiers avec le CNVA pour les médias. Il nous faut, tout d'abord, soutenir la volonté d'engagement de nos concitoyens en créant un statut juridique du volontaire. C'est un point clé. Je veux d'abord, évidemment, rappeler que le bénévolat reste la vertu cardinale et l'essentiel de l'engagement associatif ; donc, il faut garder cette force qui fait partie, aussi, de la légitimité.
Mais certaines des actions engagées par les associations demandent un investissement particulièrement important, souvent régulier, et des compétences et des fortes motivations. Et donc nous devons nous efforcer de définir, pour ces volontaires, un statut légal - c'est le premier point - qui permette aux associations, évidemment, de les accueillir. Le statut défini vous le disiez tout à l'heure, par la loi du 14 mars 2000, n'est pas satisfaisant et je souhaite que ce statut soit ouvert à tous ceux qui souhaitent y participer, sans limite d'âge supérieure - c'est un point clé - et, en outre, le temps de l'engagement doit pouvoir être modulable. C'est un élément très important. Nous sommes dans une société vieillissante ou plus exactement, on va être plus âgé, mais plus jeune. Une petite fille sur deux aujourd'hui qui naît, ici en ce moment, va vivre jusqu'à 100 ans. Donc, il faut nous préparer à cela. Il faut en faire un bonheur ; ce n'est pas un malheur. On combat les maladies, on combat les difficultés, on est en train de faire en sorte qu'on repousse le temps de vie et donc cette espérance de vie, il faut pouvoir la fertiliser. Alors on ne va pas mettre des plafonds à l'engagement de statut de volontaire à un moment où, justement, on voit des gens qui, à un certain âge, ont toutes leurs capacités, tous leurs moyens et au contraire, on a souvent, là, l'occasion d'aller chercher cette richesse sociale, cette richesse d'expérience. Il faut valoriser l'expérience et donc il ne faut pas mettre des limites d'âge supérieures dans ce statut. C'est un enjeu majeur et nous voulons que l'engagement associatif ne soit pas l'apanage ni d'un type de population, ni d'un type d'âge. L'association n'est pas typée, elle doit être ouverte et donc, on n'a pas une association qui doit, finalement, être trop classifiée. Je souhaite que la représentation nationale se saisisse de ce projet, qu'elle vous consulte évidemment et nous aurons ensemble, je crois, le travail de bâtir un texte qui pourra être proposé en effet, donc, au Parlement.
Deuxième grand sujet, il nous faut objectiver, je dirais, le partenariat État-associations et devenir, ensemble, des partenaires transparents et donc définir la stratégie associative des ministères. C'est un point, je crois, qui va concerner l'ensemble des ministères, mais il faut que l'État puisse dire clairement, ministère par ministère, département par département ministériel, quelle est la part des associations dans son action publique. Et donc là, il y a un partenariat qui ne doit pas être forcément toujours enfermé sur les mêmes associations, ces associations partenaires privilégiées, quelquefois adversaires privilégiées, quelquefois amies privilégiées, mais de toute façon privilégiées parce que finalement, on s'installe dans une dialectique qui finit par être commode. Je souhaite que les ministères aient une ouverture la plus forte possible sur la vie associative, à la fois dans les méthodes de travail mais aussi, évidemment, dans les stratégies de financement. Et je souhaite qu'on puisse conforter la place du secteur associatif et l'impliquer, non seulement dans le projet de court terme - quand il y a une crise on voit souvent la vie associative arriver -, mais ce qu'il faut aussi, c'est mettre du temps pour avoir des bons partenariats. Et je crois que nous y gagnerons tous, y compris dans les cas des dossiers très difficiles.Je vous suggère de mettre en place, en liaison constante avec le CNVA et dans quelques ministères qui seraient candidats, une forme d'expérimentation, de manière à ce qu'on puisse avancer sur ces sujets. Le ministère des Sports, le ministère de la Ville On peut voir ceux qui sont directement concernés et qui le souhaitent, pour pouvoir avancer ensemble dans un partenariat, pour faire de la vie associative un des piliers de l'action publique pour un département ministériel et de définir les formes de travail, en respectant un peu et en construisant cette éthique de partenariat qui n'est pas si facile à construire que ça. J'ai travaillé sur des chartes de cette nature, au niveau territorial : ce n'est pas si simple, parce qu'il faut qu'on puisse travailler ensemble et que chacun garde sa liberté et que vous-même, vous arriviez à avoir à l'intérieur d'une association, la capacité à pouvoir dégager une position commune, tout en respectant les structures individuelles. Donc, ce n'est pas si simple que ça. J'ai gratté un peu la question, mais c'est très important, parce que ce qui est essentiel, c'est la subsidiarité et c'est qu'un jour on puisse dire, les associations de tel type de secteur apportent tel type de contribution.
Enfin, les démarches que nous souhaitons marquent la volonté de transparence de l'État et je souhaite accompagner notre travail en commun par des formes d'évaluation, qu'il nous faut bâtir ensemble. Car, dans une démocratie moderne, il faut qu'on trouve les formes de l'évaluation. Et je crois qu'on pourrait ensemble travailler sur des sujets qui peuvent nous permettre de déboucher sur des procédures qui ne soient ni lourdes, ni accusatrices, mais au contraire, qui soient les marques de confiance. L'évaluation, c'est le signe de la confiance ; on confie des objectifs, on confie des moyens et on demande en retour une évaluation. C'est assez dans la culture associative, pour les associations qui vivent vraiment leur assemblée générale toute l'année, pour les associations qui respectent vraiment leur éthique de délibération, la transparence est naturelle. Et on voit bien que les associations qui ne la respectent pas, à un moment où à un autre, ont des difficultés. Donc nous, nous avons simplement à bâtir, avec vous, des formes de bonne gestion. Voilà quelques réflexions.
Vous avez conclu, madame la Présidente, sur la dimension européenne. Je pense que c'est également très important. L'Europe qui est en train de se construire sera, en fait, une Europe de réseaux. Nous voyons que le traité de Maastricht a choisi l'Europe des États par rapport à l'Europe des régions. Mais aujourd'hui l'Europe des États à 25 va être une Europe des États pour laquelle, un certain nombre d'États travailleront ensemble sur un certain nombre de sujets. Nous avons déjà la zone euro, peut-être qu'il y aura des groupes pionniers. Nous verrons quelle forme prendront les partenariats, mais on ne travaillera pas systématiquement, et sur tous les sujets, à 25. Je crois que cette organisation des États devra être intégrée, également, aux associations, pour travailler au niveau européen par un certain nombre de réseaux. L'Europe parce est une mission d'intérêt général : il fait que le citoyen ait conscience de l'espace dans lequel il évolue et dans lequel, naturellement, ses instances représentatives évoluent. Et donc la vie associative, de ce point de vue-là, doit considérer que la nouvelle Europe, dans sa nouvelle géographie et dans son nouveau fonctionnement avec, je l'espère, sa nouvelle constitution, fait partie de la mission d'intérêt général qui est dans votre mission de citoyenneté, pour vivre avec toutes les formes de légitimité qui sont les vôtres.
Parallèlement, vous savez donc que nous avons modifié notre Constitution, pour dire que nous voulions une République qui ait une organisation décentralisée. Quand vous entendez décentralisation, pensez association. Et nous, à chaque fois, nous ferons en sorte qu'on puisse penser association. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas que vous ayez des associations qui aient une organisation nationale, mais même les grandes associations nationales, elles n'ont rien à perdre à faire confiance à leur délégation territoriale. Elles n'ont rien à perdre à écouter le terrain. Faire confiance au territoire, c'est faire confiance à l'ouverture et notre République aujourd'hui, elle a besoin au fond, de centres de décisions qui soient multiples sur l'ensemble du territoire. Qu'est-ce que craint le citoyen ? Le citoyen, il craint d'être dans un monde sans pilotage humain, il craint la financiarisation de l'économie, il craint le gigantisme, il craint, finalement, une forme de décision qui serait une forme de décision anonyme. Il faut faire en sorte que notre société soit une société à pilotage humain. C'est-à-dire que partout dans la société, il y ait des lieux de décisions, de débats, où on voit des hommes et des femmes parler avec d'autres et prendre des responsabilités. Et si je suis avec vous, à vos côtés, c'est parce que je crois à votre rôle fondateur pour la dynamique républicaine. Je vous remercie.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 16 mars 2004)