Texte intégral
Déclaration à l'Assemblée nationale le 13 novembre :
Monsieur le Président,
Mesdames et messieurs les députés,
Avant de vous présenter les grandes lignes du projet de budget 2001 de la justice, je voudrais remercier les deux rapporteurs pour avis de la commission des lois, MM. FLOCH et GERIN pour leurs travaux, ainsi que tous les membres de la commission des lois, et en premier lieu son président M. ROMAN, pour la qualité des débats qui se sont tenus en commission jeudi dernier.
Nous avons pu aborder tous les grands problèmes de mon ministère, avec des échanges qui ont permis d'aller au fond des choses et qui à plusieurs occasions ont montré une identité de vue entre la majorité et l'opposition sur des sujets d'intérêt national.
Je remercie également le rapporteur spécial de la commission des finances, M. DEVEDJIAN pour son rapport.
N'ayant pas moi-même préparé ce budget, je suis d'autant plus à l'aise pour vous dire que c'est le meilleur budget de la justice depuis 4 ans.
Trois chiffres pour marquer la priorité accordée à la justice en 2001 :
1550 créations de postes, soit la plus forte hausse des effectifs depuis 4 ans (762 en 1998, 930 en 1999 et 1239 en 2000).
1 milliard de F de crédits supplémentaires pour des mesures nouvelles, soit le plus fort montant depuis 4 ans (587 MF en 1998, 764 MF en 1999, 865 MF en 2000)
1,75 milliard d'autorisations de programmes pour de nouveaux investissements, soit le montant le plus important en LFI depuis 10 ans.
Sur les 4 premiers budgets de la législature, le ministère de la justice aura ainsi créé 4.481 emplois et aura vu ses crédits progresser de +4,2 milliards de F, soit + 17,8%.
1. LES SERVICES JUDICIAIRES
525 créations de postes budgétaires pour les services judiciaires, dont 307 magistrats et 218 greffiers, auxquels on doit ajouter 8 emplois pour l'école nationale de la magistrature, soit un total de 533 emplois.
Avec 307 créations de postes de magistrats judiciaires, on atteindra en 2001 un niveau jamais atteint sous la Vème République.
En 4 ans, nous aurons ainsi créé 729 postes de magistrats, soit autant que tous les ministres entre 1981 et 1997 (727).
Je sais que vous portez une grande attention au financement des réformes que vous avez votées et je voudrais vous donner des assurances sur ce point, notamment sur la loi du 15 juin 2000 sur la " présomption d'innocence et les droits des victimes ", qui fait l'objet de débat animés et qui suscite de l'inquiétude dans les juridictions, trop souvent hélas à partir de chiffres erronés.
Au budget 2001, nous aurons 237 emplois de magistrats et 135 greffiers pour l'appel et le respect des délais aux assises, et pour la nouvelle procédure d'application des peines.
Je rappelle que 108 postes de magistrats pour le juge des libertés et de la détention et 108 greffiers avaient été inscrits en 1999 et 2000, avant même que la loi ne soit votée!
Au total, sur trois budgets (99-2001), nous avons 345 magistrats et 243 greffiers, soit 588 emplois, pour l'application de cette réforme.
Voilà pour les emplois, mais nous avons aussi 350 MF de crédits supplémentaires pour l'application de cette loi :
72,7 MF de crédits d'aide juridique pour l'assistance des prévenus devant les cours d'assises et le JAP.
92 MF pour l'intervention des avocats lors de la première heure de garde à vue.
157 MF de frais de justice (indemnités journalières des jurés d'assises, indemnisation des personnes abusivement détenues et enquêtes en faveur des victimes.
et 40 MF pour le fonctionnement des juridictions.
588 emplois et 350 MF de crédits, je ne crois pas qu'il y ait eu par le passé beaucoup de réformes qui aient mobilisé autant de moyens. Les surenchères sur ce sujet sont donc bien mal venues.
On a parlé, à tort, d'un délai de trois ans pour pouvoir ces postes. C'est complètement faux, et je voudrais faire un sort à ce raisonnement que j'entends encore trop souvent. Chaque année l'ENM produit une nouvelle promotion de magistrats. L'effectif des promotions sortantes dépend des postes ouverts au concours pas des emplois budgétaires.
Or, l'accélération des recrutements a été engagée dès 1998, puisqu'on est passé de 140 à 185 auditeurs par promotion. Dans le même temps deux concours exceptionnels ont été organisés, ainsi 100 magistrats supplémentaires en 1999 et 100 en 2000 sont arrivés sur le terrain.
Au total, l'augmentation nette des effectifs de magistrats a été très importante depuis 3 ans du fait de la faiblesse des départs en retraite. Les effectifs réels auront ainsi augmenté de plus de 500 magistrats entre le 1er janvier 1998 et le 31 décembre 2000, pour 422 postes créés. On a donc non seulement pourvu les créations d'emplois budgétaires mais en plus pourvu des postes laissés vacants par nos prédécesseurs.
En 2001, ce sont 200 magistrats de plus qui arriveront pour seulement 50 départs à la retraite. Même chose en 2002 et en 2003. Avec en plus une trentaine de postes par an par la voie de l'intégration, hors ENM.
Tout cela montre que les moyens seront là dès l'année 2001, sans attendre 3 ans, même si certaines innovations apportées par amendement à la loi du 15 juin 2000 ne pouvaient pas être anticipées.
A partir du 1er janvier 2001, il y aura une période d'adaptation et de réorganisation pour beaucoup de juridictions. Le premier semestre 2001 sera donc plus difficile. Mais il faut ramener cela à de justes proportions, même si je sais que dans certaines juridictions qui ont des centres de détentions importants, il y pourra y avoir aura un démarrage difficile pour l'application des peines.
Enfin, j'insiste sur l'effort budgétaire en faveur de l'ENM dont les crédits auront augmenté de +40% en 4 ans, avec en 2001 une nouvelle augmentation des promotions à 190 auditeurs, alors qu'on était parti à 140 en 1997.
Il s'agit de préparer l'avenir et d'anticiper sur les besoins de recrutement qui sont importants aujourd'hui du fait des créations de postes et qui continueront de l'être dans quelques années du fait des départs à la retraite. La gestion prévisionnelle des ressources humaines est évidemment essentielle pour la justice.
La réforme des carrières des magistrats reçoit une nouvelle provision de 40 MF, le total de la réforme mobilisera 170 MF en année pleine..
Cette revalorisation était nécessaire pour aligner les carrières des magistrats judiciaires sur celles des magistrats administratifs et financiers, et pour accélérer des avancements qui étaient bloqués pour toute une génération de juges.
Mais cette revalorisation s'inscrit aussi dans cette perspective de gestion prévisionnelle car il est nécessaire de donner une plus forte attractivité au corps judiciaire.
Dans les prochaines années, il y aura une compétition de plus en plus vive entre le privé et le public et, eu sein du public, entre les ministères, pour le recrutement des meilleurs cadres de haut niveau. Cette compétition sera exacerbée par la nécessité de remplacer les départs à la retraite massifs à partir de 2007-2008. Il faut dès à présent essayer d'attirer les meilleurs bacheliers vers la magistrature.
2. L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE
Les créations d'emplois à l'administration pénitentiaire sont très importantes, puisque c'est la direction qui reçoit le plus avec 530 emplois. C'est nettement plus que les années précédentes (300 emplois en 1998, 370 en 1999, 382 en 2000).
Parmi ces emplois, il y aura 330 surveillants, ce qui est également plus que les années précédentes.
J'insiste sur le fait que sur les 530 emplois, tous participent à l'amélioration des conditions de travail dans les prisons et à l'allègement des tâches des surveillants.
D'abord les 141 postes de personnels de surveillance supplémentaires créés pour renforcer les organigrammes.
mais aussi, les 215 emplois créés pour préparer l'ouverture des deux premiers établissements du programme de 4000 : Toulouse-Seysses et Avignon-Le Pontet.
Enfin, le suivi des détenus sous surveillance électronique et des alternatives à l'incarcération mobiliseront 112 emplois de personnels d'insertion et de probation. Ce renforcement du suivi en milieu ouvert permet aussi d'alléger les charges de travail en détention.
S'agissant des personnels, je présenterai un amendement du gouvernement destiné à augmenter de 57,6 MF les crédits indemnitaires, cette somme correspondant au financement du protocole d'accord signé avec les organisations syndicales le 18 octobre dernier.
La formation
L'ENAP bénéficie, en 2001, de la création de 15 emplois et d'une augmentation de son budget de 30,8 MF. En deux ans, les effectifs de l'ENAP auront ainsi été augmentés de +20% et les crédits de +63%.
Le Premier ministre a inauguré mercredi dernier, à Agen, les nouveaux locaux de l'ENAP, qui sera transformée en établissement public administratif à partir du 1er janvier 2001. Ceux d'entre vous qui étaient présents ont pu voir que ce nouvel outil avec des moyens renforcés permettra à l'ENAP de mieux assurer ses missions de formations et de faire face aux recrutements massifs engagés depuis deux ans (1800 personnes seront formées par l'ENAP cette année et plus de 2000 l'an prochain). Ces recrutements se maintiendront à un niveau élevé dans les prochaines années pour faire face aux départs à la retraite.
Un grand programme de rénovation pénitentiaire
Le Premier ministre a également annoncé le lancement un plan de rénovation pénitentiaire pour répondre, d'une part, aux critiques des rapports parlementaires sur l'état du parc immobilier et, d'autre part, aux exigences de la loi du 15 juin 2000 sur l'encellulement individuel.
Il s'agit d'une décision majeure puisqu'on va sortir d'une logique de file d'attente dans laquelle on décidait chaque année de lancer telle ou telle rénovation en fonction des crédits disponibles, pour adopter une démarche d'ensemble, tous les établissements anciens ayant vocation a être soit rénovés, soit remplacés.
Je sais, et plusieurs députés ont insisté sur ce point en commission des lois, que l'immobilier n'est qu'une partie du problème pénitentiaire, mais c'est une condition indispensable de la réussite d'une réforme de la vie en détention.
Des douches, des sanitaires, des espaces de travail, des parloirs dignes, tout cela ne résoudra pas tous les problèmes, mais rien ne fera sans cela. On ne pourra sérieusement parler de réinsertion et de resocialisation des détenus tant que leurs conditions matérielles de vie continueront d'aggraver cette désocialisation.
Nous avons maintenant une feuille de route qui nous permettra, dans le cadre d'une baisse attendue, et souhaitable, de la population pénale, de remettre à la plat la carte pénitentiaire et d'adapter le parc aux besoins de notre pays.
Ce plan d'ensemble ne doit pas faire oublier que le projet de loi de finances qui vous est soumis était déjà très favorable en matière d'investissements :
avec 844 MF d'autorisations de programme (soit + 37,5% par rapport à 2000), dont l'essentiel, soit 500 MF, va à la rénovation des grandes maisons d'arrêts (Fleury Mérogis, Fresnes, La Santé, Les Baumettes, Loos-les-Lille).
3. LA PROTECTION JUDICIAIRE DELA JEUNESSE
Le traitement de la délinquance des mineurs est une des priorités du Gouvernement. Le budget 2001 confirme le changement d'échelle dans les moyens mis au service de cette action. Changement d'échelle d'abord pour les créations d'emplois puisque l'on ouvre 380 postes, comme en 2000 contre 150 en 1999 et 100 en 1998. Dans le même temps, les crédits de fonctionnement du secteur public augmenteront de +8,5% et ceux du secteur associatif habilité de +10,3%.
Le rythme des ouvertures de centres c'est accéléré : 30 Centres de placement immédiat (CPI) seront ouverts avant la fin de l'année (22 sont déjà en activité), l'objectif de 50 fin 2001 est maintenu.
47 Centre éducatifs renforcés (CER) seront en activité avant la fin de l'année, 13 autres sont en cours d'instruction. L'objectif de 100 CER à la fin 2001 est également maintenu.
Un des résultats les plus tangibles de cette politique est la meilleure prise en charge des mesures de réparations ordonnées par les juges. En 1998, il y en avait 7500, en 1999 nous avons passé le cap des 10.000. Nous serons autour de 12.000 cette année. Depuis 1997 les mesures de réparation auront augmenté de 72%.
4. LES FRAIS DE JUSTICE
Le ministère de la justice fait depuis 3 ans des efforts de gestion importants, pour la bonne utilisation des moyens que vous lui accordez. Les résultats sont là puisque les mesures nouvelles en frais de justice sont entièrement auto-financées par 200 MF d'économies en 2001.
Le total du chapitre est même en légère baisse, ce qui est une grande satisfaction puisque les frais de justice, qui représentent 1,8 MdF, avaient tendance à déraper depuis des années et pesaient de plus en plus sur le budget de mon ministère.
Ces économies annoncées ne sont pas des promesses en l'air, elles s'appuient sur les résultats constatés en 1999. Les juridictions, grâces aux contrats de gestion mis en place en 1998, ont réalisé 150 MF d'économies par rapport aux crédits inscrits au budget 1999. Nous en attendons autant en 2000.
5. AIDE JURIDIQUE
Comme vous le savez, j'ai engagé des discussions avec les barreaux pour examiner la remise à plat de notre système d'aide juridique. J'ai déjà rencontré leurs représentants institutionnels et je me suis rendu au congrès du Syndicat des avocats de France, vendredi dernier pour avoir un contact direct avec les avocats qui expriment les inquiétudes les plus fortes.
Comme je l'ai déjà annoncé devant votre assemblée, je suis favorable à une remise du système d'aide juridique et je vais demander à un groupe de réflexion de haut de me faire des propositions avant l'été 2001.
Je recevrai également l'ensemble des organisations professionnelles à la Chancellerie pour examiner des propositions pour des mesures d'urgence.
S'agissant du budget 2001, la priorité a été donnée à la revalorisation des seuils afin de combattre l'érosion des admissions constatée depuis 2 ans.
Grâce à une hausse de 4,2% (la 1ère depuis la loi réformant l'aide juridictionnelle de 1991) des plafonds de ressources : au 1er janvier 2001, les seuils seront portés à 5175 F mois pour l'aide juridictionnelle totale et 7.764 F par mois pour l'aide juridictionnelle partielle, le supplément pour charge de famille passera de 656 F à 588 F par enfant.
Environ 500.00 foyers sont potentiellement concernés par cette mesure et on attend une augmentation d'environ 15.000 des dossiers admis à l'AJ en 2001 (coût 30 MF).
Voilà les principales mesures du budget 2001, que je vous demande de bien vouloir voter comme vous l'avez fait pour les trois premiers exercices de cette législature.
Je vous remercie.
(Source http://www.justice.gouv.fr, le 21 novembre 2000)
Déclaration au Sénat le 11 décembre :
Monsieur le Président,
Mesdames et messieurs les sénateurs,
Je tiens à remercier Messieurs les rapporteurs pour avis de la commission des Lois et Monsieur le rapporteur spécial.
L'actualité ayant placé le budget de la justice au centre de plusieurs débats, un peu désordonnés, je tiens à répondre sur ces sujets que l'on doit aborder avec beaucoup de sang-froid et de raison.
· On entend essentiellement trois reproches :
1) le budget de la justice serait insuffisant pour faire face aux besoins de la réforme ;
2) les postes ne seront pas pourvus avant plusieurs années, car nous n'aurions pas anticipé les besoins ;
3) la situation se dégrade dans les juridictions parce qu'il y a trop de textes nouveaux à appliquer.
Je répondrai à ces critiques dans l'ordre pour en montrer la fragilité et les contradictions.
· Sur le budget lui-même, je rappelle que nous avons très largement financé, tant en crédits qu'en postes budgétaires, la loi du 15 juin 2000.
Au budget 2001, nous aurons 237 emplois de magistrats et 135 greffiers pour la réforme des assises et pour la nouvelle procédure d'application des peines.
Je rappelle que 108 postes de magistrats pour le juge des libertés et de la détention et 108 greffiers avaient été inscrits en 1999 et 2000, avant même que la loi ne soit votée !
Au total, sur trois budgets de 1999 à 2001, nous avons 345 magistrats et 243 greffiers, soit 588 emplois, pour l'application de cette réforme.
Nous avons aussi 350 MF de crédits supplémentaires pour l'application de cette loi :
73 MF pour l'aide juridique et l'assistance des prévenus devant les cours d'assises et le JAP
92 MF pour l'intervention des avocats lors de la première heure de garde à vue
157 MF pour les frais de justice comportant les indemnités journalières des jurys, l'indemnisation des personnes abusivement détenues et les enquêtes en faveur des victimes
enfin 49 MF pour le fonctionnement des juridictions.
Avec 588 créations de postes et des crédits pour 350 MF, les moyens mis en uvre pour ces réformes n'ont guère de précédent.
Je sais bien qu'une organisation professionnelle de magistrats estime que le double est nécessaire, mais cette estimation a été démentie par l'inspection générale des services judiciaires.
Voyant que les crédits sont corrects, on passe à d'autres critiques : les postes resteraient vacants faute de recrutements.
Il est contradictoire de nous reprocher à la fois l'insuffisance des créations des postes et l'incapacité à pourvoir l'existant. Nos contradicteurs ne disent pas comment ils feraient avec 1000 postes supplémentaires par an.
Plus sérieusement, il faut examiner les recrutements et les arrivées sur le terrain.
Je rappelle que l'ENM produit une promotion chaque année dont l'effectif des postes mis aux concours. Ceux-ci étant organisés en flux continu, le délai de trois qui existerait entre la création d'un emploi et la nomination correspondante n'existe pas.
Dès 1998, les recrutements ont été accélérés, puisqu'on est passé de 140 à 185 auditeurs par promotion. En outre, deux concours exceptionnels ont permis à 100 magistrats supplémentaires d'arriver sur le terrain en 1999 et autant l'année suivante.
Au total, l'augmentation nette des effectifs de magistrats a été très importante depuis 3 ans grâce à la faiblesse des départs en retraite. Les effectifs réels auront ainsi augmenté de plus de 606 magistrats entre le 1er janvier 1998 et le 31 décembre 2000, pour 422 nouveaux postes. Nous avons donc pourvu les créations d'emplois budgétaires ainsi que les 200 postes laissés vacants par nos prédécesseurs !
En 2001, 230 magistrats supplémentaires seront nommés pour seulement 50 départs à la retraite. Il en ira de même en 2002 et en 2003.
Comment peut-on dire que les recrutements de magistrats n'ont pas été anticipés ?
A ceux qui viennent parler d'héritage, je rappelle qu'avec 307 créations de postes de magistrats judiciaires, on atteindra en 2001 un niveau jamais atteint sous la Vème République ! En 4 ans, ce gouvernement, avec Elisabeth Guigou, aura créé 729 postes de magistrats, alors que tous les ministres entre 1981 et 1997 en avaient créé 727. Tous ces postes seront pourvus, puisque près de 800 arriveront sur le terrain avec 1000 recrutements pour 200 départs en retraite.
Malheureusement, il en va différemment pour les greffiers. Il nous manquera quelques mois pour accueillir les nouvelles promotions de greffiers.
Mais il faut ici encore rappeler quelques chiffres.
C'est ce Gouvernement qui a accéléré les recrutements de greffiers dès 1998 : 134 sorties en 1999, 269 sorties cette année, 405 sorties en 2001 et nous portons à 500 les promotions suivantes.
Je rappelle qu'en 1997 aucun concours de greffiers n'avait été organisé par nos prédécesseurs. L'année 1998 a donc été blanche pour les arrivées de greffiers sur le terrain ! Ces 200 greffiers manquants auraient bien facilité les tâches des juridictions depuis 3 ans. Ils nous manqueront cruellement en début d'année prochaine.
Il était évidemment impossible d'anticiper en 1999 les besoins créés par des amendements votés en juin 2000, même s'il est vrai que ces amendements utiles marquent un progrès du droit.
Je réfute donc tous les discours outranciers qui saluent les progrès depuis 3 ans mais présentent la réalité actuelle en noir.
Là encore, il faut éviter la polémique et les jugements à l'emporte pièce, pour traiter le calendrier avec sérénité.
Reste la dernière critique, la plus étrange à mes yeux : la multiplication des réformes aurait gêné le fonctionnement des juridictions !
Mais elles ne sont encore entrées en vigueur ! Comment auraient-elles pu surcharger les juridictions ?La vérité est que l'encombrement des juridictions diminue.
Au cours des trois dernières années, les affaires civiles nouvelles dans les TGI comme en appel, on diminué de 10%. Cette baisse n'a pas été compensée par l'activité pénale qui n'a augmenté que de 2%.
L'objectivité conduit à constater que la pression a diminué, avec les arrivées massives de magistrats sur le terrain et la baisse du contentieux.
Certes, les juridictions avaient besoin de souffler après la terrible période 1992-1996, pendant laquelle le contentieux civil des cours d'appel avait augmenté de 20% et celui des TGI de 30%, sans créations de postes ni recrutements massifs.
Mais, me dira-t-on, si tout va bien, pourquoi cette agitation ?
Je ne crois pas que tout aille bien. Le retard accumulé n'est pas encore comblé. Il faudra encore bien d'autres budgets pour poursuivre le redressement engagé depuis 3 ans. Ce travail de longue haleine n'est pas achevé, mais il ne faut pas renier les premières étapes.
Les conflits actuels témoignent à mes yeux de frustrations accumulées qui devaient s'exprimer.
Le discours tenu depuis 3 ans sur la priorité accordée à la justice est crédible. Il y a une vraie prise de conscience nationale de cette priorité, que ce soit pour les juridictions, les prisons ou la délinquance des mineurs. Vous le savez comme moi : les revendications apparaissent lorsque les perspectives d'amélioration sont réelles.
J'observe enfin que ces revendications sont contradictoires : certains manifestent pour la totalité de la loi du 15 juin 2000 soit appliquée immédiatement, d'autres pour que certains de ses éléments soient décalés.
Ceux-là ne sont pas d'accord entre eux sur ce qu'il faudrait différer. Certains, plus cohérents avec le discours sur les moyens, montrent le problème des JAP, d'autres s'attaquent au juge de la liberté et de la détention, alors même que cette partie de la loi est celle qui a été le mieux anticipée ! Je crains que cette opposition ne s'empare d'arguments budgétaires que par tactique.
Si tous ces contradicteurs avaient le pouvoir de décision, ils seraient bien en peine de s'entendre !
S'agissant de l'aide juridictionnelle, un mouvement de protestation des avocats a été engagé. Il porte principalement sur la revalorisation de ses tarifs, mais il traduit aussi le malaise de cette profession.
- Depuis la réforme de 1991, voulue par M. Nallet, le nombre des avocats est passé de 24.000 à 36.000. Je rappelle que les barreaux ont la responsabilité de la formation et de l'accès à la profession. Il n'existe pas de numerus clausus.
-
Ces nouveaux arrivants n'ont pas tous trouvé leur place. Une appellation unique regroupe en fait trois activités : les avocats généralistes bien implantés, pour qui l'aide juridictionnelle joue un rôle et les avocats du secteur aide, souvent jeunes, dont l'aide juridictionnelle représente une part importante de l'activité.
Ainsi, les principes de solidarité et d'indemnisation des barreaux qui fondaient le système de 1991 ne correspond plus à la réalité sociologique de la profession.
Tous les professionnels concernés estiment que l'aide juridictionnelle doit être repensée pour tenir compte des évolutions récentes et de la crise de la profession d'avocat.
C'est pourquoi, j'ai annoncé une refonte du système, dès mon arrivée à la Chancellerie, afin de présenter un projet de loi au Parlement avant la fin 2001.
J'ai immédiatement mis en place un groupe de travail, présidé par M. BOUCHET, président de l'association Aide à toute détresse-Quart monde, et doit proposer une réforme globale en avril 2001. Une large concertation sera ensuite organisée.
S'agissant des mesures immédiates, une négociation a été engagée et après un rapprochement qui laisse présager un accord, elle a dû être suspendue pour des motifs qui m'échappent. Je crois qu'un accord est possible à condition qu'on ne cherche pas à régler trop de problèmes de la profession par des mesures transitoires qui n'ont pas vocation à se substituer à une réforme d'ensemble.
Je rappelle que le budget 2001 présente des mesures nouvelles pour 102 MF, dont 72 pour la loi renforçant la présomption d'innocence et 30 MF pour le relèvement des plafonds de ressources, dont la réévaluation de 4,2% est la première d'une telle ampleur depuis 10 ans.
2) L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE
J'en viens à l'administration pénitentiaire. Les 530 créations emplois y sont remarquables, puisque c'est la direction qui en reçoit le plus. Ils participent tous à l'amélioration des conditions de travail dans les prisons, soit par renforcement des organigrammes, soit par le renforcement des personnels d'insertion et de probation.
S'agissant des recrutements et de la formation, vous savez que le Premier ministre a inauguré le 8 novembre dernier, à Agen, les nouveaux locaux de l'ENAP. La nouvelle construction permettra de faire face aux recrutements massifs engagés depuis deux ans : 1800 personnes seront formées par l'ENAP cette année, plus de 2000 l'an prochain.
Un grand programme de rénovation pénitentiaire.
Le Premier ministre a également annoncé le lancement d'un plan de rénovation pénitentiaire pour répondre aux critiques des rapports parlementaires sur le parc immobilier et satisfaire à la loi du 15 juin 2000 sur l'encellulement individuel.
On a parfois reproché à la Chancellerie de ne pas consommer tous ses crédits. Mais il en va d'un ministère comme d'une collectivité locale : la phase d'étude préalable n'exige pas de forte consommation de moyens, dont le rythme d'utilisation devient très élevé en fin de programme. Avec l'accord du ministère du Budget, les crédits non utilisés sont reportés. Nous avons créé un établissement public administratif - doté d'un conseil d'administration et d'un conseil d'orientation comportant des parlementaires - pour que le programme de 10 MF bénéficie d'un outil adapté.
Il y aura des parloirs dignes, des douches et des installations sanitaires, car on ne peut pas réinserer des personnes quand les conditions de vie aggravent la désocialisation.
3 La protection judiciaire de la jeunesse
Le traitement de la délinquance des mineurs est une des priorités du gouvernement. Le budget 2001 confirme le changement d'échelle dans les moyens mis au service de cette action. Changement d'échelle d'abord pour les créations d'emplois puisque l'on ouvre 380 postes, comme en 2000 contre 150 en 1999 et 100 en 1998. Dans le même temps, les crédits de fonctionnement du secteur public augmenteront de 8,5% et ceux du secteur associatif habilité de 10,3%.
Le rythme des ouvertures de centres s'est accéléré : 30 Centres de placement immédiat (CPI) seront ouverts avant la fin de l'année (22 sont déjà en activité), l'objectif de 50 fin 2001 étant maintenu.
47 Centre éducatifs renforcés (CER) seront en activité avant la fin de l'année, 13 autres sont en cours d'instruction, l'objectif de 100 CER à la fin 2001 est également maintenu.
Un des résultats les plus tangibles de cette politique est la meilleure prise en charge des mesures de réparations ordonnées par les juges. En 1998, il y en avait 7500, en 1999 nous avons passé le cap des 10.000. Nous serons autour de 12.000 cette année. Depuis 1997 les mesures de réparation auront augmenté de 72%.
Je vous remercie.
(Source http://www.justice.gouv.fr, le 18 décembre 2000)
Monsieur le Président,
Mesdames et messieurs les députés,
Avant de vous présenter les grandes lignes du projet de budget 2001 de la justice, je voudrais remercier les deux rapporteurs pour avis de la commission des lois, MM. FLOCH et GERIN pour leurs travaux, ainsi que tous les membres de la commission des lois, et en premier lieu son président M. ROMAN, pour la qualité des débats qui se sont tenus en commission jeudi dernier.
Nous avons pu aborder tous les grands problèmes de mon ministère, avec des échanges qui ont permis d'aller au fond des choses et qui à plusieurs occasions ont montré une identité de vue entre la majorité et l'opposition sur des sujets d'intérêt national.
Je remercie également le rapporteur spécial de la commission des finances, M. DEVEDJIAN pour son rapport.
N'ayant pas moi-même préparé ce budget, je suis d'autant plus à l'aise pour vous dire que c'est le meilleur budget de la justice depuis 4 ans.
Trois chiffres pour marquer la priorité accordée à la justice en 2001 :
1550 créations de postes, soit la plus forte hausse des effectifs depuis 4 ans (762 en 1998, 930 en 1999 et 1239 en 2000).
1 milliard de F de crédits supplémentaires pour des mesures nouvelles, soit le plus fort montant depuis 4 ans (587 MF en 1998, 764 MF en 1999, 865 MF en 2000)
1,75 milliard d'autorisations de programmes pour de nouveaux investissements, soit le montant le plus important en LFI depuis 10 ans.
Sur les 4 premiers budgets de la législature, le ministère de la justice aura ainsi créé 4.481 emplois et aura vu ses crédits progresser de +4,2 milliards de F, soit + 17,8%.
1. LES SERVICES JUDICIAIRES
525 créations de postes budgétaires pour les services judiciaires, dont 307 magistrats et 218 greffiers, auxquels on doit ajouter 8 emplois pour l'école nationale de la magistrature, soit un total de 533 emplois.
Avec 307 créations de postes de magistrats judiciaires, on atteindra en 2001 un niveau jamais atteint sous la Vème République.
En 4 ans, nous aurons ainsi créé 729 postes de magistrats, soit autant que tous les ministres entre 1981 et 1997 (727).
Je sais que vous portez une grande attention au financement des réformes que vous avez votées et je voudrais vous donner des assurances sur ce point, notamment sur la loi du 15 juin 2000 sur la " présomption d'innocence et les droits des victimes ", qui fait l'objet de débat animés et qui suscite de l'inquiétude dans les juridictions, trop souvent hélas à partir de chiffres erronés.
Au budget 2001, nous aurons 237 emplois de magistrats et 135 greffiers pour l'appel et le respect des délais aux assises, et pour la nouvelle procédure d'application des peines.
Je rappelle que 108 postes de magistrats pour le juge des libertés et de la détention et 108 greffiers avaient été inscrits en 1999 et 2000, avant même que la loi ne soit votée!
Au total, sur trois budgets (99-2001), nous avons 345 magistrats et 243 greffiers, soit 588 emplois, pour l'application de cette réforme.
Voilà pour les emplois, mais nous avons aussi 350 MF de crédits supplémentaires pour l'application de cette loi :
72,7 MF de crédits d'aide juridique pour l'assistance des prévenus devant les cours d'assises et le JAP.
92 MF pour l'intervention des avocats lors de la première heure de garde à vue.
157 MF de frais de justice (indemnités journalières des jurés d'assises, indemnisation des personnes abusivement détenues et enquêtes en faveur des victimes.
et 40 MF pour le fonctionnement des juridictions.
588 emplois et 350 MF de crédits, je ne crois pas qu'il y ait eu par le passé beaucoup de réformes qui aient mobilisé autant de moyens. Les surenchères sur ce sujet sont donc bien mal venues.
On a parlé, à tort, d'un délai de trois ans pour pouvoir ces postes. C'est complètement faux, et je voudrais faire un sort à ce raisonnement que j'entends encore trop souvent. Chaque année l'ENM produit une nouvelle promotion de magistrats. L'effectif des promotions sortantes dépend des postes ouverts au concours pas des emplois budgétaires.
Or, l'accélération des recrutements a été engagée dès 1998, puisqu'on est passé de 140 à 185 auditeurs par promotion. Dans le même temps deux concours exceptionnels ont été organisés, ainsi 100 magistrats supplémentaires en 1999 et 100 en 2000 sont arrivés sur le terrain.
Au total, l'augmentation nette des effectifs de magistrats a été très importante depuis 3 ans du fait de la faiblesse des départs en retraite. Les effectifs réels auront ainsi augmenté de plus de 500 magistrats entre le 1er janvier 1998 et le 31 décembre 2000, pour 422 postes créés. On a donc non seulement pourvu les créations d'emplois budgétaires mais en plus pourvu des postes laissés vacants par nos prédécesseurs.
En 2001, ce sont 200 magistrats de plus qui arriveront pour seulement 50 départs à la retraite. Même chose en 2002 et en 2003. Avec en plus une trentaine de postes par an par la voie de l'intégration, hors ENM.
Tout cela montre que les moyens seront là dès l'année 2001, sans attendre 3 ans, même si certaines innovations apportées par amendement à la loi du 15 juin 2000 ne pouvaient pas être anticipées.
A partir du 1er janvier 2001, il y aura une période d'adaptation et de réorganisation pour beaucoup de juridictions. Le premier semestre 2001 sera donc plus difficile. Mais il faut ramener cela à de justes proportions, même si je sais que dans certaines juridictions qui ont des centres de détentions importants, il y pourra y avoir aura un démarrage difficile pour l'application des peines.
Enfin, j'insiste sur l'effort budgétaire en faveur de l'ENM dont les crédits auront augmenté de +40% en 4 ans, avec en 2001 une nouvelle augmentation des promotions à 190 auditeurs, alors qu'on était parti à 140 en 1997.
Il s'agit de préparer l'avenir et d'anticiper sur les besoins de recrutement qui sont importants aujourd'hui du fait des créations de postes et qui continueront de l'être dans quelques années du fait des départs à la retraite. La gestion prévisionnelle des ressources humaines est évidemment essentielle pour la justice.
La réforme des carrières des magistrats reçoit une nouvelle provision de 40 MF, le total de la réforme mobilisera 170 MF en année pleine..
Cette revalorisation était nécessaire pour aligner les carrières des magistrats judiciaires sur celles des magistrats administratifs et financiers, et pour accélérer des avancements qui étaient bloqués pour toute une génération de juges.
Mais cette revalorisation s'inscrit aussi dans cette perspective de gestion prévisionnelle car il est nécessaire de donner une plus forte attractivité au corps judiciaire.
Dans les prochaines années, il y aura une compétition de plus en plus vive entre le privé et le public et, eu sein du public, entre les ministères, pour le recrutement des meilleurs cadres de haut niveau. Cette compétition sera exacerbée par la nécessité de remplacer les départs à la retraite massifs à partir de 2007-2008. Il faut dès à présent essayer d'attirer les meilleurs bacheliers vers la magistrature.
2. L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE
Les créations d'emplois à l'administration pénitentiaire sont très importantes, puisque c'est la direction qui reçoit le plus avec 530 emplois. C'est nettement plus que les années précédentes (300 emplois en 1998, 370 en 1999, 382 en 2000).
Parmi ces emplois, il y aura 330 surveillants, ce qui est également plus que les années précédentes.
J'insiste sur le fait que sur les 530 emplois, tous participent à l'amélioration des conditions de travail dans les prisons et à l'allègement des tâches des surveillants.
D'abord les 141 postes de personnels de surveillance supplémentaires créés pour renforcer les organigrammes.
mais aussi, les 215 emplois créés pour préparer l'ouverture des deux premiers établissements du programme de 4000 : Toulouse-Seysses et Avignon-Le Pontet.
Enfin, le suivi des détenus sous surveillance électronique et des alternatives à l'incarcération mobiliseront 112 emplois de personnels d'insertion et de probation. Ce renforcement du suivi en milieu ouvert permet aussi d'alléger les charges de travail en détention.
S'agissant des personnels, je présenterai un amendement du gouvernement destiné à augmenter de 57,6 MF les crédits indemnitaires, cette somme correspondant au financement du protocole d'accord signé avec les organisations syndicales le 18 octobre dernier.
La formation
L'ENAP bénéficie, en 2001, de la création de 15 emplois et d'une augmentation de son budget de 30,8 MF. En deux ans, les effectifs de l'ENAP auront ainsi été augmentés de +20% et les crédits de +63%.
Le Premier ministre a inauguré mercredi dernier, à Agen, les nouveaux locaux de l'ENAP, qui sera transformée en établissement public administratif à partir du 1er janvier 2001. Ceux d'entre vous qui étaient présents ont pu voir que ce nouvel outil avec des moyens renforcés permettra à l'ENAP de mieux assurer ses missions de formations et de faire face aux recrutements massifs engagés depuis deux ans (1800 personnes seront formées par l'ENAP cette année et plus de 2000 l'an prochain). Ces recrutements se maintiendront à un niveau élevé dans les prochaines années pour faire face aux départs à la retraite.
Un grand programme de rénovation pénitentiaire
Le Premier ministre a également annoncé le lancement un plan de rénovation pénitentiaire pour répondre, d'une part, aux critiques des rapports parlementaires sur l'état du parc immobilier et, d'autre part, aux exigences de la loi du 15 juin 2000 sur l'encellulement individuel.
Il s'agit d'une décision majeure puisqu'on va sortir d'une logique de file d'attente dans laquelle on décidait chaque année de lancer telle ou telle rénovation en fonction des crédits disponibles, pour adopter une démarche d'ensemble, tous les établissements anciens ayant vocation a être soit rénovés, soit remplacés.
Je sais, et plusieurs députés ont insisté sur ce point en commission des lois, que l'immobilier n'est qu'une partie du problème pénitentiaire, mais c'est une condition indispensable de la réussite d'une réforme de la vie en détention.
Des douches, des sanitaires, des espaces de travail, des parloirs dignes, tout cela ne résoudra pas tous les problèmes, mais rien ne fera sans cela. On ne pourra sérieusement parler de réinsertion et de resocialisation des détenus tant que leurs conditions matérielles de vie continueront d'aggraver cette désocialisation.
Nous avons maintenant une feuille de route qui nous permettra, dans le cadre d'une baisse attendue, et souhaitable, de la population pénale, de remettre à la plat la carte pénitentiaire et d'adapter le parc aux besoins de notre pays.
Ce plan d'ensemble ne doit pas faire oublier que le projet de loi de finances qui vous est soumis était déjà très favorable en matière d'investissements :
avec 844 MF d'autorisations de programme (soit + 37,5% par rapport à 2000), dont l'essentiel, soit 500 MF, va à la rénovation des grandes maisons d'arrêts (Fleury Mérogis, Fresnes, La Santé, Les Baumettes, Loos-les-Lille).
3. LA PROTECTION JUDICIAIRE DELA JEUNESSE
Le traitement de la délinquance des mineurs est une des priorités du Gouvernement. Le budget 2001 confirme le changement d'échelle dans les moyens mis au service de cette action. Changement d'échelle d'abord pour les créations d'emplois puisque l'on ouvre 380 postes, comme en 2000 contre 150 en 1999 et 100 en 1998. Dans le même temps, les crédits de fonctionnement du secteur public augmenteront de +8,5% et ceux du secteur associatif habilité de +10,3%.
Le rythme des ouvertures de centres c'est accéléré : 30 Centres de placement immédiat (CPI) seront ouverts avant la fin de l'année (22 sont déjà en activité), l'objectif de 50 fin 2001 est maintenu.
47 Centre éducatifs renforcés (CER) seront en activité avant la fin de l'année, 13 autres sont en cours d'instruction. L'objectif de 100 CER à la fin 2001 est également maintenu.
Un des résultats les plus tangibles de cette politique est la meilleure prise en charge des mesures de réparations ordonnées par les juges. En 1998, il y en avait 7500, en 1999 nous avons passé le cap des 10.000. Nous serons autour de 12.000 cette année. Depuis 1997 les mesures de réparation auront augmenté de 72%.
4. LES FRAIS DE JUSTICE
Le ministère de la justice fait depuis 3 ans des efforts de gestion importants, pour la bonne utilisation des moyens que vous lui accordez. Les résultats sont là puisque les mesures nouvelles en frais de justice sont entièrement auto-financées par 200 MF d'économies en 2001.
Le total du chapitre est même en légère baisse, ce qui est une grande satisfaction puisque les frais de justice, qui représentent 1,8 MdF, avaient tendance à déraper depuis des années et pesaient de plus en plus sur le budget de mon ministère.
Ces économies annoncées ne sont pas des promesses en l'air, elles s'appuient sur les résultats constatés en 1999. Les juridictions, grâces aux contrats de gestion mis en place en 1998, ont réalisé 150 MF d'économies par rapport aux crédits inscrits au budget 1999. Nous en attendons autant en 2000.
5. AIDE JURIDIQUE
Comme vous le savez, j'ai engagé des discussions avec les barreaux pour examiner la remise à plat de notre système d'aide juridique. J'ai déjà rencontré leurs représentants institutionnels et je me suis rendu au congrès du Syndicat des avocats de France, vendredi dernier pour avoir un contact direct avec les avocats qui expriment les inquiétudes les plus fortes.
Comme je l'ai déjà annoncé devant votre assemblée, je suis favorable à une remise du système d'aide juridique et je vais demander à un groupe de réflexion de haut de me faire des propositions avant l'été 2001.
Je recevrai également l'ensemble des organisations professionnelles à la Chancellerie pour examiner des propositions pour des mesures d'urgence.
S'agissant du budget 2001, la priorité a été donnée à la revalorisation des seuils afin de combattre l'érosion des admissions constatée depuis 2 ans.
Grâce à une hausse de 4,2% (la 1ère depuis la loi réformant l'aide juridictionnelle de 1991) des plafonds de ressources : au 1er janvier 2001, les seuils seront portés à 5175 F mois pour l'aide juridictionnelle totale et 7.764 F par mois pour l'aide juridictionnelle partielle, le supplément pour charge de famille passera de 656 F à 588 F par enfant.
Environ 500.00 foyers sont potentiellement concernés par cette mesure et on attend une augmentation d'environ 15.000 des dossiers admis à l'AJ en 2001 (coût 30 MF).
Voilà les principales mesures du budget 2001, que je vous demande de bien vouloir voter comme vous l'avez fait pour les trois premiers exercices de cette législature.
Je vous remercie.
(Source http://www.justice.gouv.fr, le 21 novembre 2000)
Déclaration au Sénat le 11 décembre :
Monsieur le Président,
Mesdames et messieurs les sénateurs,
Je tiens à remercier Messieurs les rapporteurs pour avis de la commission des Lois et Monsieur le rapporteur spécial.
L'actualité ayant placé le budget de la justice au centre de plusieurs débats, un peu désordonnés, je tiens à répondre sur ces sujets que l'on doit aborder avec beaucoup de sang-froid et de raison.
· On entend essentiellement trois reproches :
1) le budget de la justice serait insuffisant pour faire face aux besoins de la réforme ;
2) les postes ne seront pas pourvus avant plusieurs années, car nous n'aurions pas anticipé les besoins ;
3) la situation se dégrade dans les juridictions parce qu'il y a trop de textes nouveaux à appliquer.
Je répondrai à ces critiques dans l'ordre pour en montrer la fragilité et les contradictions.
· Sur le budget lui-même, je rappelle que nous avons très largement financé, tant en crédits qu'en postes budgétaires, la loi du 15 juin 2000.
Au budget 2001, nous aurons 237 emplois de magistrats et 135 greffiers pour la réforme des assises et pour la nouvelle procédure d'application des peines.
Je rappelle que 108 postes de magistrats pour le juge des libertés et de la détention et 108 greffiers avaient été inscrits en 1999 et 2000, avant même que la loi ne soit votée !
Au total, sur trois budgets de 1999 à 2001, nous avons 345 magistrats et 243 greffiers, soit 588 emplois, pour l'application de cette réforme.
Nous avons aussi 350 MF de crédits supplémentaires pour l'application de cette loi :
73 MF pour l'aide juridique et l'assistance des prévenus devant les cours d'assises et le JAP
92 MF pour l'intervention des avocats lors de la première heure de garde à vue
157 MF pour les frais de justice comportant les indemnités journalières des jurys, l'indemnisation des personnes abusivement détenues et les enquêtes en faveur des victimes
enfin 49 MF pour le fonctionnement des juridictions.
Avec 588 créations de postes et des crédits pour 350 MF, les moyens mis en uvre pour ces réformes n'ont guère de précédent.
Je sais bien qu'une organisation professionnelle de magistrats estime que le double est nécessaire, mais cette estimation a été démentie par l'inspection générale des services judiciaires.
Voyant que les crédits sont corrects, on passe à d'autres critiques : les postes resteraient vacants faute de recrutements.
Il est contradictoire de nous reprocher à la fois l'insuffisance des créations des postes et l'incapacité à pourvoir l'existant. Nos contradicteurs ne disent pas comment ils feraient avec 1000 postes supplémentaires par an.
Plus sérieusement, il faut examiner les recrutements et les arrivées sur le terrain.
Je rappelle que l'ENM produit une promotion chaque année dont l'effectif des postes mis aux concours. Ceux-ci étant organisés en flux continu, le délai de trois qui existerait entre la création d'un emploi et la nomination correspondante n'existe pas.
Dès 1998, les recrutements ont été accélérés, puisqu'on est passé de 140 à 185 auditeurs par promotion. En outre, deux concours exceptionnels ont permis à 100 magistrats supplémentaires d'arriver sur le terrain en 1999 et autant l'année suivante.
Au total, l'augmentation nette des effectifs de magistrats a été très importante depuis 3 ans grâce à la faiblesse des départs en retraite. Les effectifs réels auront ainsi augmenté de plus de 606 magistrats entre le 1er janvier 1998 et le 31 décembre 2000, pour 422 nouveaux postes. Nous avons donc pourvu les créations d'emplois budgétaires ainsi que les 200 postes laissés vacants par nos prédécesseurs !
En 2001, 230 magistrats supplémentaires seront nommés pour seulement 50 départs à la retraite. Il en ira de même en 2002 et en 2003.
Comment peut-on dire que les recrutements de magistrats n'ont pas été anticipés ?
A ceux qui viennent parler d'héritage, je rappelle qu'avec 307 créations de postes de magistrats judiciaires, on atteindra en 2001 un niveau jamais atteint sous la Vème République ! En 4 ans, ce gouvernement, avec Elisabeth Guigou, aura créé 729 postes de magistrats, alors que tous les ministres entre 1981 et 1997 en avaient créé 727. Tous ces postes seront pourvus, puisque près de 800 arriveront sur le terrain avec 1000 recrutements pour 200 départs en retraite.
Malheureusement, il en va différemment pour les greffiers. Il nous manquera quelques mois pour accueillir les nouvelles promotions de greffiers.
Mais il faut ici encore rappeler quelques chiffres.
C'est ce Gouvernement qui a accéléré les recrutements de greffiers dès 1998 : 134 sorties en 1999, 269 sorties cette année, 405 sorties en 2001 et nous portons à 500 les promotions suivantes.
Je rappelle qu'en 1997 aucun concours de greffiers n'avait été organisé par nos prédécesseurs. L'année 1998 a donc été blanche pour les arrivées de greffiers sur le terrain ! Ces 200 greffiers manquants auraient bien facilité les tâches des juridictions depuis 3 ans. Ils nous manqueront cruellement en début d'année prochaine.
Il était évidemment impossible d'anticiper en 1999 les besoins créés par des amendements votés en juin 2000, même s'il est vrai que ces amendements utiles marquent un progrès du droit.
Je réfute donc tous les discours outranciers qui saluent les progrès depuis 3 ans mais présentent la réalité actuelle en noir.
Là encore, il faut éviter la polémique et les jugements à l'emporte pièce, pour traiter le calendrier avec sérénité.
Reste la dernière critique, la plus étrange à mes yeux : la multiplication des réformes aurait gêné le fonctionnement des juridictions !
Mais elles ne sont encore entrées en vigueur ! Comment auraient-elles pu surcharger les juridictions ?La vérité est que l'encombrement des juridictions diminue.
Au cours des trois dernières années, les affaires civiles nouvelles dans les TGI comme en appel, on diminué de 10%. Cette baisse n'a pas été compensée par l'activité pénale qui n'a augmenté que de 2%.
L'objectivité conduit à constater que la pression a diminué, avec les arrivées massives de magistrats sur le terrain et la baisse du contentieux.
Certes, les juridictions avaient besoin de souffler après la terrible période 1992-1996, pendant laquelle le contentieux civil des cours d'appel avait augmenté de 20% et celui des TGI de 30%, sans créations de postes ni recrutements massifs.
Mais, me dira-t-on, si tout va bien, pourquoi cette agitation ?
Je ne crois pas que tout aille bien. Le retard accumulé n'est pas encore comblé. Il faudra encore bien d'autres budgets pour poursuivre le redressement engagé depuis 3 ans. Ce travail de longue haleine n'est pas achevé, mais il ne faut pas renier les premières étapes.
Les conflits actuels témoignent à mes yeux de frustrations accumulées qui devaient s'exprimer.
Le discours tenu depuis 3 ans sur la priorité accordée à la justice est crédible. Il y a une vraie prise de conscience nationale de cette priorité, que ce soit pour les juridictions, les prisons ou la délinquance des mineurs. Vous le savez comme moi : les revendications apparaissent lorsque les perspectives d'amélioration sont réelles.
J'observe enfin que ces revendications sont contradictoires : certains manifestent pour la totalité de la loi du 15 juin 2000 soit appliquée immédiatement, d'autres pour que certains de ses éléments soient décalés.
Ceux-là ne sont pas d'accord entre eux sur ce qu'il faudrait différer. Certains, plus cohérents avec le discours sur les moyens, montrent le problème des JAP, d'autres s'attaquent au juge de la liberté et de la détention, alors même que cette partie de la loi est celle qui a été le mieux anticipée ! Je crains que cette opposition ne s'empare d'arguments budgétaires que par tactique.
Si tous ces contradicteurs avaient le pouvoir de décision, ils seraient bien en peine de s'entendre !
S'agissant de l'aide juridictionnelle, un mouvement de protestation des avocats a été engagé. Il porte principalement sur la revalorisation de ses tarifs, mais il traduit aussi le malaise de cette profession.
- Depuis la réforme de 1991, voulue par M. Nallet, le nombre des avocats est passé de 24.000 à 36.000. Je rappelle que les barreaux ont la responsabilité de la formation et de l'accès à la profession. Il n'existe pas de numerus clausus.
-
Ces nouveaux arrivants n'ont pas tous trouvé leur place. Une appellation unique regroupe en fait trois activités : les avocats généralistes bien implantés, pour qui l'aide juridictionnelle joue un rôle et les avocats du secteur aide, souvent jeunes, dont l'aide juridictionnelle représente une part importante de l'activité.
Ainsi, les principes de solidarité et d'indemnisation des barreaux qui fondaient le système de 1991 ne correspond plus à la réalité sociologique de la profession.
Tous les professionnels concernés estiment que l'aide juridictionnelle doit être repensée pour tenir compte des évolutions récentes et de la crise de la profession d'avocat.
C'est pourquoi, j'ai annoncé une refonte du système, dès mon arrivée à la Chancellerie, afin de présenter un projet de loi au Parlement avant la fin 2001.
J'ai immédiatement mis en place un groupe de travail, présidé par M. BOUCHET, président de l'association Aide à toute détresse-Quart monde, et doit proposer une réforme globale en avril 2001. Une large concertation sera ensuite organisée.
S'agissant des mesures immédiates, une négociation a été engagée et après un rapprochement qui laisse présager un accord, elle a dû être suspendue pour des motifs qui m'échappent. Je crois qu'un accord est possible à condition qu'on ne cherche pas à régler trop de problèmes de la profession par des mesures transitoires qui n'ont pas vocation à se substituer à une réforme d'ensemble.
Je rappelle que le budget 2001 présente des mesures nouvelles pour 102 MF, dont 72 pour la loi renforçant la présomption d'innocence et 30 MF pour le relèvement des plafonds de ressources, dont la réévaluation de 4,2% est la première d'une telle ampleur depuis 10 ans.
2) L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE
J'en viens à l'administration pénitentiaire. Les 530 créations emplois y sont remarquables, puisque c'est la direction qui en reçoit le plus. Ils participent tous à l'amélioration des conditions de travail dans les prisons, soit par renforcement des organigrammes, soit par le renforcement des personnels d'insertion et de probation.
S'agissant des recrutements et de la formation, vous savez que le Premier ministre a inauguré le 8 novembre dernier, à Agen, les nouveaux locaux de l'ENAP. La nouvelle construction permettra de faire face aux recrutements massifs engagés depuis deux ans : 1800 personnes seront formées par l'ENAP cette année, plus de 2000 l'an prochain.
Un grand programme de rénovation pénitentiaire.
Le Premier ministre a également annoncé le lancement d'un plan de rénovation pénitentiaire pour répondre aux critiques des rapports parlementaires sur le parc immobilier et satisfaire à la loi du 15 juin 2000 sur l'encellulement individuel.
On a parfois reproché à la Chancellerie de ne pas consommer tous ses crédits. Mais il en va d'un ministère comme d'une collectivité locale : la phase d'étude préalable n'exige pas de forte consommation de moyens, dont le rythme d'utilisation devient très élevé en fin de programme. Avec l'accord du ministère du Budget, les crédits non utilisés sont reportés. Nous avons créé un établissement public administratif - doté d'un conseil d'administration et d'un conseil d'orientation comportant des parlementaires - pour que le programme de 10 MF bénéficie d'un outil adapté.
Il y aura des parloirs dignes, des douches et des installations sanitaires, car on ne peut pas réinserer des personnes quand les conditions de vie aggravent la désocialisation.
3 La protection judiciaire de la jeunesse
Le traitement de la délinquance des mineurs est une des priorités du gouvernement. Le budget 2001 confirme le changement d'échelle dans les moyens mis au service de cette action. Changement d'échelle d'abord pour les créations d'emplois puisque l'on ouvre 380 postes, comme en 2000 contre 150 en 1999 et 100 en 1998. Dans le même temps, les crédits de fonctionnement du secteur public augmenteront de 8,5% et ceux du secteur associatif habilité de 10,3%.
Le rythme des ouvertures de centres s'est accéléré : 30 Centres de placement immédiat (CPI) seront ouverts avant la fin de l'année (22 sont déjà en activité), l'objectif de 50 fin 2001 étant maintenu.
47 Centre éducatifs renforcés (CER) seront en activité avant la fin de l'année, 13 autres sont en cours d'instruction, l'objectif de 100 CER à la fin 2001 est également maintenu.
Un des résultats les plus tangibles de cette politique est la meilleure prise en charge des mesures de réparations ordonnées par les juges. En 1998, il y en avait 7500, en 1999 nous avons passé le cap des 10.000. Nous serons autour de 12.000 cette année. Depuis 1997 les mesures de réparation auront augmenté de 72%.
Je vous remercie.
(Source http://www.justice.gouv.fr, le 18 décembre 2000)