Texte intégral
J'ai voulu réunir les enquêteurs qui ont travaillé avec détermination et professionnalisme sur les deux affaires sensibles d'enlèvement et de meurtre d'enfants les 6 et 7 mai derniers, à Eyguières dans les Bouches du Rhône et à Moulins-Engilbert dans la Nièvre.
Dans les deux cas ce sont deux petites victimes innocentes qui ont été la proie d'une folie meurtrière.
La petite Madison Castel à Eyguières et le petit Mathias Duchemin à Moulins-Engilbert étaient tous deux âgés de cinq ans, un âge où l'on est sans défense et où l'on a tendance à accorder une confiance presque aveugle aux adultes.
L'émotion des parents, des proches et de toute la population a été immense. Elle est proportionnelle à l'ignominie et l'atrocité des faits.
Je veux d'abord, en saluant la mémoire de ces deux jeunes innocents, rendre un hommage à leurs parents pour leur dignité et la force d'âme qu'ils ont manifestée dans cette épreuve terrible qui les marquera à tout jamais.
Je veux également saluer tous leurs proches, voisins, élus municipaux, pompiers et volontaires qui, au delà de leur affliction sincère, ont spontanément manifesté leur solidarité concrète et proposé leur aide pour participer aux recherches de grande envergure qui ont été engagées.
Mais je veux aussi tout particulièrement remercier l'ensemble des services de gendarmerie et, à travers eux, tous les enquêteurs qui se sont totalement mobilisés pour que ces deux enquêtes très difficiles aboutissent rapidement à l'identification des auteurs présumés et à la manifestation de la vérité.
Il était primordial pour les parents de Madison et de Mathias que l'on retrouve leurs enfants et qu'ils sachent ce qu'il s'est passé. En effet, au-delà de la douleur née de la disparition d'un enfant, il y a d'autres douleurs également insupportables, dues à l'ignorance de la vérité ou encore au fait de savoir que celui qui a fait du mal à leur enfant puisse échapper à la Justice, voire commettre de nouveaux crimes.
Si j'ai réuni aujourd'hui les enquêteurs, c'est d'abord pour les remercier en mon nom, au nom des familles également, qui ont été sensibles à tout ce qui a été fait, et au nom de la société enfin. Ils méritent cet hommage particulier et chacun a bien compris que nous le faisons dans la dignité, avec retenue et en pensant d'abord aux petites victimes.
Mesdames et messieurs les enquêteurs, je veux aussi vous porter témoignage du rôle capital qui est le vôtre dans ce type de situation éminemment complexe à gérer. J'associe à ces remerciements les deux procureurs qui, dans le cadre de leurs attributions vous ont épaulés et ont su vous faire confiance dans l'ensemble de vos investigations.
Les services de gendarmerie et de police saisis de tels faits mesurent parfaitement ce qui est attendu d'eux et s'organisent en conséquence, en tirant à chaque fois les enseignements qui s'imposent et en intégrant au fur et à mesure les capacités juridiques et les outils scientifiques et techniques nouveaux, mis à leur disposition.
Cette mobilisation des services et la rigueur dont ils font preuve dans le traitement des affaires sont d'autant plus nécessaires que sont commis dans notre pays chaque année de l'ordre de 5 à 6000 viols sur des mineurs et 80 homicides de mineurs. Nous nous devons de prendre toutes les dispositions pour que notre société protège ses membres les plus vulnérables.
La lutte contre la délinquance sexuelle est pour moi une priorité absolue. C'est pourquoi j'ai décidé de doter les forces de l'ordre des moyens modernes d'enquête qui sont plus spécialement nécessaires dans ce champ de la criminalité. Ainsi, j'ai eu l'occasion de créer depuis 2002 :
o - Le fichier des empreintes génétiques. Son champ d'application a été considérablement élargi par la loi du 18 mars 2003. A ce jour, le fichier contient près de 200.000 profils et a permis plus de 2.600 rapprochements.
o Le fichier des auteurs d'infractions sexuelles, qui recense les noms et les adresses des délinquants sexuels, afin qu'ils soient contrôlés régulièrement par les forces de l'ordre. Celui-ci est pleinement opérationnel depuis le 30 juin 2005, et constitue un outil privilégié de lutte contre la récidive et d'élucidation des crimes et délits de cette nature. A mon initiative, il a été étendu depuis 2005 pour que le « pointage » du délinquant sexuel au commissariat se fasse tous les 6 mois (contre tous les ans précédemment), et que les délits sexuels (et non plus seulement les crimes) y figurent. Nous devons désormais réduire les délais entre le moment où le délinquant est inscrit sur le fichier, et sa convocation par les forces de l'ordre.
o Le guide pratique des personnes disparues, diffusé dans tous les postes de police et de gendarmerie de France. Il détaille les diligences immédiates à mettre en oeuvre en cas de disparition d'enfants, et rend plus efficace et plus homogène les pratiques des forces de l'ordre en ce domaine.
Par ailleurs, j'ai aussi beaucoup oeuvré pour la loi de lutte contre la récidive de 2005, qui met en place deux nouvelles mesures :
o Le placement sous bracelet électronique mobile, mis en oeuvre à titre expérimental sur 40 détenus pour 6 mois à compter de juin 2006, à Caen et à Loos. Une deuxième phase expérimentale sera conduite de décembre 2006 à mai 2008 sur 4 sites supplémentaires et portera sur 150 bracelets. La généralisation est prévue à partir de mai 2008.
Là encore, nous devons aller beaucoup plus vite. Je vais demander au Garde des sceaux de hâter la mise en oeuvre de ce dispositif qui a fait ses preuves dans de nombreux pays. Nous devons nous doter de tous les moyens, car des obstacles de nature financière ne sauraient en aucun cas constituer un argument recevable quand il s'agit de protéger nos enfants.
o Le suivi socio-judiciaire est un bon outil pour suivre les délinquants sexuels une fois qu'ils sont sortis de prison. Il permet par exemple d'interdire à un délinquant sexuel de fréquenter certains lieux, de rencontrer certaines personnes, ou encore de se soigner, pour une durée pouvant aller jusqu'à 20 ans. J'ai obtenu du Garde des Sceaux en 2005 le vote d'une disposition selon laquelle aucune remise en liberté anticipée ne sera plus possible si le condamné n'accepte pas la mise en place d'un suivi médical et psychologique. Cette disposition est essentielle pour prévenir la récidive.
Enfin, dans le cadre de la réforme des services de mon ministère, j'ai créé il y a quelques semaines un office central pour la répression des violences aux personnes, et notamment les mineurs. Il vise notamment les homicides, les viols, les enlèvements, et permettra un traitement tout particulier de ce type de délinquance criminelle.
Vous le voyez, beaucoup a été fait depuis 2002. Pour autant, personne ne peut juger tout cela suffisant.
Quelles sont concrètement les pistes que je propose pour que l'on organise efficacement la protection des mineurs à l'égard des délinquants sexuels ?
Je souhaite que l'on veille davantage à l'effectivité du suivi. Pour cela, il faut aussi revoir son contenu. L'exemple canadien est à cet égard intéressant car il institue un contrôle pendant au moins deux ans, six heures par semaine avec un agent de probation dédié à ce suivi. Le taux de récidive y est quasiment nul. Le contrôle doit en effet être suffisamment étroit pour être réellement dissuasif : Quand on ne respecte pas les obligations de pointage et de soins médicaux, des sanctions doivent être prises en temps réel, soit par la pose d'un bracelet électronique quand cela n'était pas déjà le cas, soit par de l'enfermement.
- Au fond, ce qui est important, c'est qu'on trouve un moyen pour que ces individus se soignent. A cet égard, l'expérience menée par l'INSERM sur un nouveau traitement visant à faire baisser la libido des criminels sexuels apparaît particulièrement intéressante. Celle-ci va commencer dès septembre prochain sur 48 volontaires déjà traités sans succès par la psychothérapie, et condamnés en récidive pour des agressions sexuelles sur mineurs. Les résultats de cette expérience seront une source précieuse d'informations pour l'avenir.
Pourquoi d'ailleurs serait-ce à la société d'assumer le coût de ces traitements ? C'est aux délinquants sexuels de le faire.
- Enfin, je souhaite que l'on accompagne mieux le traitement des auteurs de crimes sexuels lorsqu'ils sont en détention. Il existe trois centres pénitentiaires spécialisés en France, dont un particulièrement performant à Caen. Il faut qu'il en existe davantage, et pourquoi pas que l'on crée des hôpitaux-détention pour fournir des soins plus appropriés à ces délinquants particuliers.
Je considère également qu'il faut durcir considérablement les règles de l'amnistie concernant les délinquants sexuels. Entre l'oubli et la mémoire, notre société doit faire un choix, celui de la protection des plus vulnérables. Il y a en effet une grande hypocrisie juridique à dire qu'un individu est au regard de la loi un primo délinquant alors que l'on sait qu'il a été condamné pour des agressions sexuelles et que l'on ne peut pas ignorer qu'il peut à tout moment repasser à l'acte.
Je voudrais que soit conservée la trace des condamnations sexuelles sans qu'une prescription automatique ne s'applique à ces faits. Je souhaite aussi exclure expressément du champ de la réhabilitation de plein droit, les crimes à caractère sexuel.
Il faut par ailleurs ouvrir le débat de la durée de certaines peines incompressibles. Pour les crimes de sang commis par des pervers, je considère qu'une peine de trente ans incompressible a vraiment du sens.
Nous devons ensuite progresser dans deux domaines précis, la traçabilité des délinquants et leur accompagnement médical.
- Sur la traçabilité, tout d'abord, nous disposons bien sûr du bracelet électronique mobile. Il m'apparaît néanmoins nécessaire d'informer l'environnement social de la présence d'un délinquant sexuel : il faut lui imposer l'obligation de déclarer leur adresse au commissariat ou à la brigade de gendarmerie. De la même façon, toute absence du domicile d'une durée supérieure à une semaine devra faire l'objet d'une déclaration aux forces de l'ordre. Je ne suis pas non plus opposé au fait que le maire, responsable du pouvoir de police, reçoive cette même information.
- Par ailleurs, toute condamnation doit impérativement être assortie d'un dossier médical comprenant des obligations de soins. Il faut dès maintenant envisager de se doter d'un corps de médecins contrôleurs chargés de suivre individuellement chaque condamné à des infractions sexuelles.
Il faut que l'obligation de soin accompagne la peine, y compris au-delà de la détention.
Bien entendu, tout manquement à une obligation imposée au délinquant sexuel pour favoriser sa réinsertion devra être sanctionnée avec la plus grande sévérité.
Enfin, je souhaite que l'on ouvre le champ de la réflexion concernant les mesure préventives. Il peut arriver en effet que des individus fassent état dans leur entourage de leurs pulsions et ce, en amont de tout passage à l'acte. Aujourd'hui, il n'est donné aucune suite à ces alertes. Dotons-nous des outils et des structures nécessaires pour proposer ou imposer des traitements médico-psychologiques.
Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je tenais à vous dire. Il ne suffit pas de s'émouvoir lorsqu'un drame se produit, même si cette émotion est parfaitement légitime. Il faut tout faire pour en éviter d'autres. Je crois que dans ce domaine, nous avons encore du chemin à faire, même s'il n'est pas toujours facile, pour protéger les victimes. En tout cas cela doit être une priorité absolue. Je vous remercie.
Source http://www.interieur.gouv.fr, le 17 mai 2006
Dans les deux cas ce sont deux petites victimes innocentes qui ont été la proie d'une folie meurtrière.
La petite Madison Castel à Eyguières et le petit Mathias Duchemin à Moulins-Engilbert étaient tous deux âgés de cinq ans, un âge où l'on est sans défense et où l'on a tendance à accorder une confiance presque aveugle aux adultes.
L'émotion des parents, des proches et de toute la population a été immense. Elle est proportionnelle à l'ignominie et l'atrocité des faits.
Je veux d'abord, en saluant la mémoire de ces deux jeunes innocents, rendre un hommage à leurs parents pour leur dignité et la force d'âme qu'ils ont manifestée dans cette épreuve terrible qui les marquera à tout jamais.
Je veux également saluer tous leurs proches, voisins, élus municipaux, pompiers et volontaires qui, au delà de leur affliction sincère, ont spontanément manifesté leur solidarité concrète et proposé leur aide pour participer aux recherches de grande envergure qui ont été engagées.
Mais je veux aussi tout particulièrement remercier l'ensemble des services de gendarmerie et, à travers eux, tous les enquêteurs qui se sont totalement mobilisés pour que ces deux enquêtes très difficiles aboutissent rapidement à l'identification des auteurs présumés et à la manifestation de la vérité.
Il était primordial pour les parents de Madison et de Mathias que l'on retrouve leurs enfants et qu'ils sachent ce qu'il s'est passé. En effet, au-delà de la douleur née de la disparition d'un enfant, il y a d'autres douleurs également insupportables, dues à l'ignorance de la vérité ou encore au fait de savoir que celui qui a fait du mal à leur enfant puisse échapper à la Justice, voire commettre de nouveaux crimes.
Si j'ai réuni aujourd'hui les enquêteurs, c'est d'abord pour les remercier en mon nom, au nom des familles également, qui ont été sensibles à tout ce qui a été fait, et au nom de la société enfin. Ils méritent cet hommage particulier et chacun a bien compris que nous le faisons dans la dignité, avec retenue et en pensant d'abord aux petites victimes.
Mesdames et messieurs les enquêteurs, je veux aussi vous porter témoignage du rôle capital qui est le vôtre dans ce type de situation éminemment complexe à gérer. J'associe à ces remerciements les deux procureurs qui, dans le cadre de leurs attributions vous ont épaulés et ont su vous faire confiance dans l'ensemble de vos investigations.
Les services de gendarmerie et de police saisis de tels faits mesurent parfaitement ce qui est attendu d'eux et s'organisent en conséquence, en tirant à chaque fois les enseignements qui s'imposent et en intégrant au fur et à mesure les capacités juridiques et les outils scientifiques et techniques nouveaux, mis à leur disposition.
Cette mobilisation des services et la rigueur dont ils font preuve dans le traitement des affaires sont d'autant plus nécessaires que sont commis dans notre pays chaque année de l'ordre de 5 à 6000 viols sur des mineurs et 80 homicides de mineurs. Nous nous devons de prendre toutes les dispositions pour que notre société protège ses membres les plus vulnérables.
La lutte contre la délinquance sexuelle est pour moi une priorité absolue. C'est pourquoi j'ai décidé de doter les forces de l'ordre des moyens modernes d'enquête qui sont plus spécialement nécessaires dans ce champ de la criminalité. Ainsi, j'ai eu l'occasion de créer depuis 2002 :
o - Le fichier des empreintes génétiques. Son champ d'application a été considérablement élargi par la loi du 18 mars 2003. A ce jour, le fichier contient près de 200.000 profils et a permis plus de 2.600 rapprochements.
o Le fichier des auteurs d'infractions sexuelles, qui recense les noms et les adresses des délinquants sexuels, afin qu'ils soient contrôlés régulièrement par les forces de l'ordre. Celui-ci est pleinement opérationnel depuis le 30 juin 2005, et constitue un outil privilégié de lutte contre la récidive et d'élucidation des crimes et délits de cette nature. A mon initiative, il a été étendu depuis 2005 pour que le « pointage » du délinquant sexuel au commissariat se fasse tous les 6 mois (contre tous les ans précédemment), et que les délits sexuels (et non plus seulement les crimes) y figurent. Nous devons désormais réduire les délais entre le moment où le délinquant est inscrit sur le fichier, et sa convocation par les forces de l'ordre.
o Le guide pratique des personnes disparues, diffusé dans tous les postes de police et de gendarmerie de France. Il détaille les diligences immédiates à mettre en oeuvre en cas de disparition d'enfants, et rend plus efficace et plus homogène les pratiques des forces de l'ordre en ce domaine.
Par ailleurs, j'ai aussi beaucoup oeuvré pour la loi de lutte contre la récidive de 2005, qui met en place deux nouvelles mesures :
o Le placement sous bracelet électronique mobile, mis en oeuvre à titre expérimental sur 40 détenus pour 6 mois à compter de juin 2006, à Caen et à Loos. Une deuxième phase expérimentale sera conduite de décembre 2006 à mai 2008 sur 4 sites supplémentaires et portera sur 150 bracelets. La généralisation est prévue à partir de mai 2008.
Là encore, nous devons aller beaucoup plus vite. Je vais demander au Garde des sceaux de hâter la mise en oeuvre de ce dispositif qui a fait ses preuves dans de nombreux pays. Nous devons nous doter de tous les moyens, car des obstacles de nature financière ne sauraient en aucun cas constituer un argument recevable quand il s'agit de protéger nos enfants.
o Le suivi socio-judiciaire est un bon outil pour suivre les délinquants sexuels une fois qu'ils sont sortis de prison. Il permet par exemple d'interdire à un délinquant sexuel de fréquenter certains lieux, de rencontrer certaines personnes, ou encore de se soigner, pour une durée pouvant aller jusqu'à 20 ans. J'ai obtenu du Garde des Sceaux en 2005 le vote d'une disposition selon laquelle aucune remise en liberté anticipée ne sera plus possible si le condamné n'accepte pas la mise en place d'un suivi médical et psychologique. Cette disposition est essentielle pour prévenir la récidive.
Enfin, dans le cadre de la réforme des services de mon ministère, j'ai créé il y a quelques semaines un office central pour la répression des violences aux personnes, et notamment les mineurs. Il vise notamment les homicides, les viols, les enlèvements, et permettra un traitement tout particulier de ce type de délinquance criminelle.
Vous le voyez, beaucoup a été fait depuis 2002. Pour autant, personne ne peut juger tout cela suffisant.
Quelles sont concrètement les pistes que je propose pour que l'on organise efficacement la protection des mineurs à l'égard des délinquants sexuels ?
Je souhaite que l'on veille davantage à l'effectivité du suivi. Pour cela, il faut aussi revoir son contenu. L'exemple canadien est à cet égard intéressant car il institue un contrôle pendant au moins deux ans, six heures par semaine avec un agent de probation dédié à ce suivi. Le taux de récidive y est quasiment nul. Le contrôle doit en effet être suffisamment étroit pour être réellement dissuasif : Quand on ne respecte pas les obligations de pointage et de soins médicaux, des sanctions doivent être prises en temps réel, soit par la pose d'un bracelet électronique quand cela n'était pas déjà le cas, soit par de l'enfermement.
- Au fond, ce qui est important, c'est qu'on trouve un moyen pour que ces individus se soignent. A cet égard, l'expérience menée par l'INSERM sur un nouveau traitement visant à faire baisser la libido des criminels sexuels apparaît particulièrement intéressante. Celle-ci va commencer dès septembre prochain sur 48 volontaires déjà traités sans succès par la psychothérapie, et condamnés en récidive pour des agressions sexuelles sur mineurs. Les résultats de cette expérience seront une source précieuse d'informations pour l'avenir.
Pourquoi d'ailleurs serait-ce à la société d'assumer le coût de ces traitements ? C'est aux délinquants sexuels de le faire.
- Enfin, je souhaite que l'on accompagne mieux le traitement des auteurs de crimes sexuels lorsqu'ils sont en détention. Il existe trois centres pénitentiaires spécialisés en France, dont un particulièrement performant à Caen. Il faut qu'il en existe davantage, et pourquoi pas que l'on crée des hôpitaux-détention pour fournir des soins plus appropriés à ces délinquants particuliers.
Je considère également qu'il faut durcir considérablement les règles de l'amnistie concernant les délinquants sexuels. Entre l'oubli et la mémoire, notre société doit faire un choix, celui de la protection des plus vulnérables. Il y a en effet une grande hypocrisie juridique à dire qu'un individu est au regard de la loi un primo délinquant alors que l'on sait qu'il a été condamné pour des agressions sexuelles et que l'on ne peut pas ignorer qu'il peut à tout moment repasser à l'acte.
Je voudrais que soit conservée la trace des condamnations sexuelles sans qu'une prescription automatique ne s'applique à ces faits. Je souhaite aussi exclure expressément du champ de la réhabilitation de plein droit, les crimes à caractère sexuel.
Il faut par ailleurs ouvrir le débat de la durée de certaines peines incompressibles. Pour les crimes de sang commis par des pervers, je considère qu'une peine de trente ans incompressible a vraiment du sens.
Nous devons ensuite progresser dans deux domaines précis, la traçabilité des délinquants et leur accompagnement médical.
- Sur la traçabilité, tout d'abord, nous disposons bien sûr du bracelet électronique mobile. Il m'apparaît néanmoins nécessaire d'informer l'environnement social de la présence d'un délinquant sexuel : il faut lui imposer l'obligation de déclarer leur adresse au commissariat ou à la brigade de gendarmerie. De la même façon, toute absence du domicile d'une durée supérieure à une semaine devra faire l'objet d'une déclaration aux forces de l'ordre. Je ne suis pas non plus opposé au fait que le maire, responsable du pouvoir de police, reçoive cette même information.
- Par ailleurs, toute condamnation doit impérativement être assortie d'un dossier médical comprenant des obligations de soins. Il faut dès maintenant envisager de se doter d'un corps de médecins contrôleurs chargés de suivre individuellement chaque condamné à des infractions sexuelles.
Il faut que l'obligation de soin accompagne la peine, y compris au-delà de la détention.
Bien entendu, tout manquement à une obligation imposée au délinquant sexuel pour favoriser sa réinsertion devra être sanctionnée avec la plus grande sévérité.
Enfin, je souhaite que l'on ouvre le champ de la réflexion concernant les mesure préventives. Il peut arriver en effet que des individus fassent état dans leur entourage de leurs pulsions et ce, en amont de tout passage à l'acte. Aujourd'hui, il n'est donné aucune suite à ces alertes. Dotons-nous des outils et des structures nécessaires pour proposer ou imposer des traitements médico-psychologiques.
Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je tenais à vous dire. Il ne suffit pas de s'émouvoir lorsqu'un drame se produit, même si cette émotion est parfaitement légitime. Il faut tout faire pour en éviter d'autres. Je crois que dans ce domaine, nous avons encore du chemin à faire, même s'il n'est pas toujours facile, pour protéger les victimes. En tout cas cela doit être une priorité absolue. Je vous remercie.
Source http://www.interieur.gouv.fr, le 17 mai 2006