Interview de Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique, au "Portail du Gouvernement" le 11 avril 2013, sur les grandes orientations du projet de loi de décentralisation et de réforme de l'action publique.

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- Cette réforme engage-t-elle un nouvel acte de décentralisation ?
La décentralisation est une réalité depuis déjà 30 ans. Elle fonctionne. Mais après deux lois en 2004 et 2010 qui avaient perturbé l'ensemble des élus de France, la question qui se pose est : comment moderniser l'action publique territoriale au 21e siècle ? Et c'est bien l'ambition de cette réforme : simplifier l'action publique, la rendre plus efficace, plus proche des citoyens et moins coûteuse.
- Comment moderniser et "rationaliser" ?
Par une clarification des responsabilités des collectivités territoriales et de l'Etat. L'organisation de l'action publique locale va être simplifiée grâce à la désignation de "chefs de file" par grande compétence. La région est chef de file pour le développement économique et l'organisation des transports. Le département agira en faveur de l'égalité des territoires, notamment des plus fragilisés, qu'ils soient urbains ou ruraux, pour les solidarités sociales et territoriales ; et la commune pour la mobilité durable et la qualité de l'air. En outre, certaines compétences, jusque-là exercées par l'Etat, vont être transférées : c'est le cas de la formation professionnelle et de l'apprentissage par exemple.
- Donc décentralisation mais aussi réforme de l'action publique ?
Dans une société en crise, les Français ont besoin de services publics efficaces, à la hauteur de leurs attentes et capables de répondre à leurs besoins sur tous les territoires. Ces dernières années s'est produit un divorce entre l'Etat et les élus locaux, qui en ont eu assez d'entendre dire qu'ils étaient laxistes et dépensiers. Le Gouvernement s'est donné pour objectif de réconcilier l'Etat et les collectivités via leurs élus, mais aussi de réconcilier les citoyens avec l'action publique.
- La nouveauté, c'est l'instauration d'un nouvel établissement public de coopération intercommunale : la métropole, au-delà de Paris, Lyon et Marseille. Quelles seront ses missions ?
Ces métropoles devront être des moteurs de la croissance, en confortant les facteurs du développement économique : l'innovation technologique mais aussi culturelle, la recherche-développement, l'enseignement supérieur, le rayonnement international… Ces fonctions ne peuvent être assumées et portées que par des entités urbaines fortes, en cohérence avec les régions. L'objectif n'est pas d'aboutir à une métropolisation où Lyon se retrouverait en concurrence avec Marseille comme Barcelone l'est par rapport à Madrid. Pour nous, tous les territoires de France, urbains ou ruraux, sont importants, et tous ont besoin que nos grandes villes soient moteurs en matière de recherche et d'enseignement supérieur, de transition énergétique, d'innovation et de compétitivité. Elles devront également répondre aux attentes de leurs habitants, en matière de cadre de vie et de logement notamment.
- A l'heure où le Gouvernement prône la simplification, n'est-ce pas ajouter une couche au "millefeuille" territorial que de créer un nouvel échelon ?
Ce n'est pas un nouvel échelon, c'est une nouvelle famille d'intercommunalités. Nous avions besoin de l'outil "métropole" pour les très grandes agglomérations de notre pays, dotées des fonctions métropolitaines.
- Selon vous, quelle est l'avancée majeure portée par cette réforme ?
Incontestablement, la création des conférences territoriales de l'action publique : c'est au sein de cette nouvelle instance que les élus se mettront d'accord sur l'organisation et l'adaptation des compétences pour le périmètre régional. Dans le respect de la diversité des territoires au sein de l'unité de la République, les collectivités signeront le pacte de gouvernance territoriale, qui dira précisément "qui fait quoi" sur chaque territoire. La signature de ce pacte conditionnera le maintien des financements croisés. Ce sera un outil majeur de l'efficacité de l'action publique.
- Pourquoi avoir présenté trois projets de loi au Conseil des ministres du 10 avril ?
Il s'agit de trois projets de loi pour une seule ambition : bâtir une réforme équilibrée de la décentralisation et de l'action publique. Nous avons simplement décidé d'échelonner l'examen de la réforme au Parlement lorsque nous avons réalisé qu'il ne pourrait tenir dans les délais au Sénat. Cet examen débutera à la fin du mois de mai.
Source http://www.gouvernement.fr, le 12 avril 2013