Texte intégral
Mesdames et Messieurs les préfets,
J'ai souhaité vous entretenir le plus tôt possible de la loi sur le renforcement et la simplification de la coopération intercommunale qui sera promulguée dans quelques jours.
Je vous ai tenu régulièrement informé de son cheminement au Parlement. Nous sommes maintenant à pied d'uvre. C'est un grand chantier, pour plusieurs années, que vous allez devoir engager en collaboration étroite avec les élus locaux.
La loi elle-même vous place au cur de son application et sa réussite d'ici cinq ans vous devra beaucoup, et en la matière, encore plus que dans d'autres, il s'agira d'un "art tout d'exécution".
Je veux vous rappeler les grandes orientations de la loi (I), vous décrire l'architecture nouvelle de l'intercommunalité (II) et vous fournir quelques indications de méthode (III). Vous pourrez ensuite passer aux travaux pratiques avec le directeur général des collectivités locales, Didier LALLEMENT.
I. - Trois orientations guident cette loi.
L'accord intervenu en commission mixte paritaire est très satisfaisant.
D'abord parce qu'il assure une promulgation précoce de la loi qui permet de gagner quelques mois, utiles aux simulations et à l'élaboration des projets des élus locaux pour une première application au 1er janvier 2000.
Ensuite parce qu'il augure bien de la mise en uvre de la loi. On peut escompter que les attachements partisans ne seront pas un obstacle dressé entre les conseils municipaux.
Enfin et surtout parce que ce consensus sur l'intercommunalité est sous-tendu par trois orientations.
1) Cette loi constitue d'abord un nouvel élan pour la décentralisation.
Par delà les fausses oppositions, artificiellement gonflées par commodité entre jacobins et girondins, entre centralisateurs et décentralisateurs, cet accord marque plutôt le succès d'une décentralisation rationalisée aux dépens du "laisser-faire territorial".
Et, après l'accord sur la loi relative aux polices municipales, je ne vous cache pas que ce nouveau consensus constitue à mes yeux un signe de bonne santé de la décentralisation.
Ce texte, chacun l'a bien compris, traduit un équilibre collectivement et volontairement recherché : donner une forte impulsion au développement local sans compromettre le cadre territorial existant. En ce sens, il constitue une nouvelle étape dans le processus continu de la décentralisation. Il réaffirme la solidité et la pertinence de nos institutions locales.
En effet le renforcement et le développement de l'intercommunalité s'appuient sur l'institution communale qu'il faut préserver. C'est le lieu privilégié pour organiser la démocratie locale et faire l'apprentissage de la citoyenneté.
La loi respecte les libertés communales, écarte toute tutelle d'une collectivité sur une autre, et l'intercommunalité reste volontaire tout en favorisant la naissance d'espaces rationnels de projets.
Face à des évolutions démographiques et économiques qui ne les servent pas toujours, il est nécessaire de réaffirmer et de soutenir la solidarité entre les communes. Il en va de leur avenir : loin de tuer les communes, l'intercommunalité peut seule les sauver. Il en va du maintien d'un service public local digne de notre temps. Il en va même de la restauration de l'égalité des citoyens devant le service public puisqu'aussi bien, la décentralisation n'a pas placé toutes les communes sur la même ligne.
2) Cette loi constitue également la deuxième phase de la réforme de la taxe professionnelle.
La généralisation de la taxe professionnelle unique complète l'allégement de la part salaires décidé en 1998. Ouverte aux trois formules d'intercommunalité et obligatoire pour les communautés d'agglomération et les nouvelles communautés urbaines, la mutualisation de cet impôt le rend plus moderne et assure sa pérennité.
L'encouragement à la taxe professionnelle unique vise à réduire localement les inégalités entre les communes et les concurrences stériles, pour aider à la constitution de groupements puissants. La taxe professionnelle unique ne constitue pas seulement un instrument d'équité fiscale, elle permet également de rationaliser les choix d'aménagement, d'organiser les services, de planifier les équipements, et donc d'améliorer l'efficacité économique de la gestion publique territoriale.
3) Enfin, troisième orientation, la loi met en place les outils décentralisés de la politique d'aménagement du territoire.
L'intercommunalité occupe aujourd'hui une place originale et de plus en plus importante dans le développement local. Elle mobilise près de 55 milliards de francs. Ses domaines d'intervention ne se limitent plus à la gestion de services au public, mais concernent également des opérations de grandes envergures.
Son développement depuis 1992 a accru ses capacités d'intervention dans des secteurs qui touchent les domaines économiques et sociaux. Ainsi s'expliquent les compétences qui sont en particulier accordées aux communautés d'agglomération et aux communautés urbaines.
La possibilité de contractualiser, ouverte par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, et l'adoption de la taxe professionnelle unique et de compétences structurantes conduisent les communes à rechercher le territoire pertinent du groupement de coopération intercommunale.
En effet, afin d'assurer la cohérence spatiale et économique ainsi que la solidarité financière nécessaire au développement de l'EPCI, la loi permet de rationaliser certains périmètres intercommunaux, manifestement étroits, au regard des compétences transférées ou de la mutualisation des charges.
Ainsi les communautés pourront constituer les cellules de base de la politique d'aménagement et de développement du territoire sur lesquelles se construiront les mécanismes de contractualisation initiés par le Gouvernement à l'occasion de l'élaboration des contrats de plan entre l'Etat et les régions.
II. - La nouvelle architecture de l'intercommunalité
La loi met en place des outils puissants au service d'objectifs ambitieux, mais également simplifiés et dans le respect des principes de la décentralisation.
Elle simplifie l'architecture intercommunale en limitant à trois le nombre de catégories juridiques, tout en unifiant les règles d'organisation et de fonctionnement de l'ensemble des EPCI à fiscalité propre. Elle renforce parallèlement les capacités d'intégration des groupements désormais mieux adaptés aux différents territoires, qu'il s'agisse des communautés urbaines, des communautés d'agglomération ou des communautés de communes.
1) Dans les agglomérations, l'objectif est de bâtir des espaces de solidarité où seront mises en commun les charges et les ressources sur un projet s'attaquant aux problèmes de la ville et notamment à la ségrégation spatiale qui vient redoubler la ségrégation sociale. Grâce aux communautés d'agglomération, il sera possible de définir et de mettre en uvre à une échelle pertinente les politiques d'urbanisme, d'habitat et de logement, d'aménagement de l'espace et de transports, de développement économique et de solidarité sociale qui permettront de favoriser la mixité de l'habitat et l'accès à la citoyenneté de ceux qui aujourd'hui se sentent rejetés.
A ces compétences obligatoires, s'ajouteront trois compétences parmi les cinq suivantes : eau, assainissement, environnement, équipements communautaires, voirie communautaire.
Tel est l'objectif politique. Il ne sera pas atteint partout au même rythme car la loi a marié exigence et souplesse, s'agissant des compétences transférées. L'introduction de la notion d'intérêt communautaire permet de définir, lors du pacte initial, ce que sont précisément les actions menées et les équipements gérés en commun. Cet accord permet aussi de préserver les politiques de proximité qui doivent rester aux communes.
La cible comporte 141 aires urbaines, définies par l'INSEE comme un espace comptant au moins 5000 emplois et où au moins 40 % de la population résidente a un emploi. La notion d'aire urbaine n'est pas un critère normatif de la loi qui n'impose que les conditions minimales de seuil (50000 habitants regroupés et une ville-centre de 15000 habitants) et la continuité territoriale. Néanmoins, ces seuils correspondent bien aux 141 aires urbaines qui concentrent 75 % de la taxe professionnelle. Cela étant, les périmètres pourront très bien être inférieurs à ceux des aires urbaines, et être étendus plus tard. Inversement, ils pourront être plus larges si les élus urbains et ruraux souhaitent établir une large solidarité à partir d'un établissement public de coopération.
Quant aux communautés urbaines, elles sont désormais réservées aux groupements de plus de 500000 habitants, dans un retour à l'esprit de la loi de 1966 qui visait à favoriser l'émergence de métropoles régionales d'équilibre et disposent de compétences renforcées.
Elles peuvent opter pour un élargissement des compétences et pour la taxe professionnelle unique à la majorité simple du conseil communautaire et des conseils municipaux si elles remplissent les conditions de seuil précités.
2) Dans les espaces ruraux, une intercommunalité de projet appuyée sur des communautés de communes consistantes aussi bien sur le plan démographique que sur le plan de leurs compétences et reposant également sur la taxe professionnelle unique, permettra de sauver les petites communes en maintenant un service public de base digne de notre temps et en animant le développement économique.
L'urbain et le rural ont des problèmes qui requièrent des traitements adaptés.
Les résultats du recensement confirment la pertinence des objectifs de la loi. Certaines grandes villes se densifient en même temps que le développement péri-urbain aggrave les difficultés d'habitat et de transport. Et dans les campagnes, les pertes de population ne sont plus liées à des départs mais au seul déficit naturel. L'intercommunalité peut donc favoriser la fixation des habitants et la création d'emplois et contribuer à rajeunir la population.
La loi, améliorée par les débats, permet de donner à travers la communauté de communes, un avenir à nos communes rurales. Une de nos forces par rapport à nos voisins européens est l'étendue de notre espace rural. Il constitue, à n'en pas douter, un facteur d'équilibre pour notre pays, une source d'activités économiques et agricoles qu'il faut continuer à soutenir et à développer. La loi y contribue, notamment en encourageant par une dotation globale de fonctionnement améliorée, les communautés de communes à taxe professionnelle unique qui vont ainsi devenir des pôles structurants du monde rural.
3) Les structures existantes connaîtront deux types d'évolution. La loi facilite la transformation des districts, des communautés de villes et des SAN.
Pour les deux premiers, le délai a été fixé au 1er janvier 2002 et il est prévu qu'à défaut de transformation en communautés d'agglomération ou en communautés urbaines, ils deviendront des communautés de communes.
S'agissant du cas particulier des SAN, deux évolutions sont possibles : une transformation en communauté d'agglomération pour ceux dans lesquels les opérations d'aménagement et d'équipement sont achevées ; pour les autres, une évolution rendant possible ultérieurement ce retour au droit commun.
Dans les trois cas, cette transformation peut être l'occasion de revoir les périmètres, en concertation avec les élus, même si la loi vous en confie l'initiative, avant consultation de l'ensemble des conseils municipaux.
Lorsque le périmètre d'un établissement public de coopération intercommunale souhaitant se transformer en une autre catégorie ne vous paraît pas correspondre à l'étendue des compétences obligatoires et optionnelles de cette catégorie ou à l'objet communautaire lui-même (notamment au critère de solidarité), vous pouvez initier et conduire la procédure d'extension du périmètre prévue par la loi à l'occasion de la transformation de cet établissement public, après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale.
Vous pouvez également, à tout moment pendant les trois ans qui suivront la publication de la loi, puis à nouveau pendant trois ans tous les douze ans, étendre le périmètre des communautés urbaines et des communautés d'agglomération. Mais vous ne pouvez pas inclure contre son gré une commune membre d'une communauté de communes éligible à la dotation globale de fonctionnement bonifiée.
La loi ne légifère pas directement sur les SIVU et les SIVOM, mais contribue à leur nécessaire réorganisation en ménageant les transitions nécessaires. C'est le cas des syndicats préexistants qui seraient englobés par une communauté d'agglomération exerçant la même compétence. C'est le cas également des chevauchements de périmètres qui obligeront les communes à sortir du syndicat et à s'y faire représenter par le nouveau groupement.
Mais il est possible, à l'issue de ces retraits, d'organiser de nouvelles coopérations dans le cadre de syndicats mixtes, incluant la totalité du territoire de la communauté et non plus une partie. Ainsi, la loi n'interdit pas les regroupements syndicaux spécialisés à une échelle plus large que l'échelle urbaine, lorsque ceux-ci permettent une réduction des coûts, ou correspondent aux caractéristiques économiques ou physiques des services publics qui sont organisés par les collectivités.
On peut attendre de ces règles une certaine rationalisation à moyen terme de ce maquis que constitue la coopération syndicale.
4) Vous serez attentifs à promouvoir le caractère plus démocratique et transparent du fonctionnement des groupements. Je vous en rappelle la disposition principale qui vise à représenter les communes au conseil communautaire par les seuls conseillers municipaux.
Vous ferez valoir que la répartition des conseillers entre les communes peut se faire soit à l'amiable, soit en fonction de la population. Et dans les deux cas, toutes les communes doivent au moins détenir un siège, la commune centre ne pouvant pas en détenir plus de la moitié.
5) Les mesures d'incitation sont importantes.
Elles concernent d'abord la DGF, portée à 250 F par habitant en moyenne dans les communautés d'agglomération, et à 175 F dans les communautés de communes à taxe professionnelle unique, comptant entre 3500 et 50000 habitants et exerçant des compétences structurantes (voirie, logement social, traitement des déchets, en plus des compétences des autres communautés de communes).
Je vous rappelle que le financement des premières est autonome, au moyen d'un prélèvement sur les recettes de l'Etat de 500 MF par an pendant cinq ans. L'intercommunalité en zone urbaine ne pèsera donc plus sur les équilibres fragiles de la DGF. Et cela rend possible le financement par la DGF actuelle de la bonification prévue pour les communautés de communes à taxe professionnelle unique.
Ces incitations financières ne peuvent pas encourager des "groupements de papier" puisque les effets d'aubaine seront mécaniquement sanctionnés. La loi corrige en effet le coefficient d'intégration fiscale (CIF), ce multiplicateur de la DGF, en neutralisant l'intérêt d'opérer des transferts financiers du groupement vers les communes.
La loi comporte aussi des dispositions sur le FCTVA, le DDR et la DGE qui viennent au soutien de l'intercommunalité.
Enfin, la péréquation volontaire des charges et des ressources sera sans doute plus difficile à réaliser en Ile-de-France. C'est pourquoi il est prévu de renforcer le mécanisme du fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France qui organise un prélèvement sur les recettes des communes les plus riches en taxe professionnelle et une redistribution aux communes à faible potentiel fiscal et aux charges, notamment sociales, élevées. Le FSRIF pourrait ainsi être porté à 1 Mds de F contre 700 MF aujourd'hui, en cinq ans et nonobstant son évolution naturelle. Il va de soi que les communes qui choisiraient la TPU seraient exonérées de ce nouveau prélèvement. Même si la zone dense de l'agglomération ne se prête pas facilement à une intercommunalité intégrée et relève sans doute dans l'immédiat de politiques contractuelles, j'imagine en revanche que des communautés d'agglomération pourront naître en grande couronne.
Quant aux mesures fiscales, je vous demande d'y prêter une grande attention puisque l'unification de la taxe professionnelle sera au cur des débats. Elle est adoptée à la majorité simple du conseil communautaire. Dans les communautés urbaines et les districts, elle sera de droit d'ici 2002 sauf majorité contraire des conseils municipaux.
Vous devez convaincre les communes que c'est leur intérêt, rassurer les conseils municipaux en procédant aux simulations sur le retour de taxe professionnelle aux communes, cette dotation de compensation qui leur permet de financer les compétences qu'elles n'ont pas transférées.
La seule perception de la taxe professionnelle unique présente pour le groupement l'inconvénient de faire dépendre son équilibre budgétaire de l'évolution des bases d'un seul impôt qui peuvent être erratiques.
Ainsi s'expliquent deux mesures qui facilitent la mise en place de la taxe professionnelle unique, la fiscalité mixte et la déliaison des taux. La fiscalité mixte permet au groupement, en sus de la taxe professionnelle, de voter en cas de besoin des taux additionnels aux trois impôts sur les ménages. Cela constitue une sécurité budgétaire pour les groupements. Mais cette souplesse est encadrée pour éviter tout excès de pression fiscale : en cas de fiscalité mixte, la dotation de solidarité, facultative et versée par le groupement aux communes, sera plafonnée.
Les groupements ayant adopté une taxe professionnelle unique ont la possibilité de délier le taux de taxe professionnelle en cas de baisse des taux des impôts ménages votés par les communes membres. Ces groupements ne se voient plus contraints de diminuer leur propre taux d'imposition à la suite des choix budgétaires et fiscaux des communes membres.
Le groupement dispose ainsi d'un pouvoir fiscal propre, adapté à ses besoins d'investissement. Et les communes peuvent trouver une capacité inédite de baisse de la taxe d'habitation et du foncier-bâti.
III. - Le rôle des préfets
Vous devrez trouver le bon équilibre en faisant preuve d'un volontarisme respectueux de la décentralisation. Je veux vous donner quelques indications sur les objectifs et la méthode.
1) Pour calibrer la dotation de 500 MF par an pendant cinq ans, j'avais fixé un objectif de création de 50 communautés d'agglomérations. C'est un objectif indicatif.
Je souhaite qu'au 1er janvier 2000, des communautés d'agglomération aient pu être créées , soit ex nihilo, soit plus probablement, par transformation de communautés de communes et de districts existants. Elles serviront d'exemple, notamment dans les grandes aires urbaines, là où les enjeux sociaux sont importants, là où la politique de la ville doit passer à la vitesse supérieure.
Elles entraîneront le débat autour de projets moins mûrs et qui seront retardés au delà des élections municipales.
Je vous indique que le calendrier des six prochains mois est tendu, en cas de transformation assortie d'une extension de périmètres. Certes la loi est d'application immédiate car les décrets nécessaires ne concernent que le fonctionnement des groupements à partir du 1er janvier 2000. Ils seront pris à l'automne. Mais le lancement de la transformation et la saisine de la CDCI pour les projets d'extension doivent être opérés dès cet été pour tenir les délais de consultation et, surtout, mener une vraie concertation avec les élus locaux.
2) Car je vous demande de vous attacher avant tout à la qualité des projets d'agglomération. La loi vous confie des pouvoirs d'appréciation et d'initiative, mais elle respecte également les principes de la décentralisation et il vous faut prendre tout le temps nécessaire au travail de persuasion des élus locaux.
Si les projets sont solides, sur des périmètres pertinents, vous les encouragerez. Mais vous devrez les différer dans le cas contraire.
Il appartient d'abord aux élus de déterminer les bons périmètres. Et vous n'utiliserez votre pouvoir d'initiative qu'à défaut de projets émanant des élus locaux, sans qui rien ne se fera d'utile en matière d'intercommunalité.
Mais vous devez également faire prévaloir l'intérêt général. Le texte vous permet d'empêcher les projets inadaptés. D'abord en interdisant les enclaves, c'est-à-dire "les paradis" cherchant à échapper à la taxe professionnelle unique et au partage des charges. Ensuite, en vous autorisant à bloquer les projets d'aubaine ou ceux qui n'associeraient pas la ville-centre et sa périphérie ou, pire, qui les opposeraient.
Enfin, la loi vous permet de ménager les rythmes, notamment dans les grandes agglomérations, parfois vierges de toute intercommunalité. Si les réticences sont fortes, il est possible de créer une simple communauté de communes, préalable à une communauté d'agglomération. La loi rend possible la création de plusieurs structures dans une même agglomération. Cela peut être, dans certains cas, une étape nécessaire.
3) Je sais qu'avec le volet territorial du contrat de plan, la négociation des contrats de ville, vous pouvez craindre le trop-plein de procédures. Mais votre tâche est précisément d'acquérir et faire partager une vue d'ensemble des enjeux et des solutions.
Les articles 25 et 26 de la loi sur l'aménagement et le développement durable du territoire, c'est-à-dire les dispositions sur les pays et les agglomérations, ont été mis en cohérence avec la loi sur l'intercommunalité. Le Gouvernement et le Parlement y ont veillé.
S'agissant des pays, ce sont des espaces de projets qui n'ont pas vocation à devenir des collectivités locales, avec un budget et des fonctionnaires. La voie la plus simple est que les pays soient couverts par une ou plusieurs structures de coopération intercommunale, préexistantes ou naissantes. Cela permet de faire l'économie de la constitution de syndicats mixtes ou de groupements d'intérêt public. Ces derniers ont été prévus afin de disposer d'une personne morale capable de contracter avec l'Etat. Enfin, troisième voie envisageable, si l'intercommunalité est absente lors de la création du pays, ce dernier peut l'engendrer, d'ici la fin du prochain contrat de plan.
Quant aux agglomérations, la cohérence entre les deux lois est encore plus forte : les critères démographiques, les compétences exigées, le nécessaire partage de la TP sont indispensables à la signature d'un contrat d'agglomération avec les villes qui bâtissent un tel projet. Et ce contrat ne pourra être renouvelé qu'à la condition que le projet intercommunal soit devenu réalité.
Mesdames et messieurs les préfets, ce texte est important. Si ses dispositions sont bien comprises par les élus locaux, la loi peut durablement donner aux agglomérations cet outil institutionnel et financier qui manquait pour repenser l'organisation urbaine et mener des politiques cohérentes et solidaires. Elle donne aux espaces ruraux des moyens supplémentaires de se défendre.
La loi n'est pas toujours d'une lecture facile, parce qu'elle tire les conséquences de sept ans d'application de la loi de 1992 et ménage les transitions. Vous devrez faire comme moi, dégager les lignes de force dans la marqueterie des outils institutionnels et financiers offerts aux communes.
La circulaire que j'ai signée et la mallette d'information qui vous sera remise vont vous y aider.
(Source http://www.interieur.gouv.fr, le 20 juillet 1999)
J'ai souhaité vous entretenir le plus tôt possible de la loi sur le renforcement et la simplification de la coopération intercommunale qui sera promulguée dans quelques jours.
Je vous ai tenu régulièrement informé de son cheminement au Parlement. Nous sommes maintenant à pied d'uvre. C'est un grand chantier, pour plusieurs années, que vous allez devoir engager en collaboration étroite avec les élus locaux.
La loi elle-même vous place au cur de son application et sa réussite d'ici cinq ans vous devra beaucoup, et en la matière, encore plus que dans d'autres, il s'agira d'un "art tout d'exécution".
Je veux vous rappeler les grandes orientations de la loi (I), vous décrire l'architecture nouvelle de l'intercommunalité (II) et vous fournir quelques indications de méthode (III). Vous pourrez ensuite passer aux travaux pratiques avec le directeur général des collectivités locales, Didier LALLEMENT.
I. - Trois orientations guident cette loi.
L'accord intervenu en commission mixte paritaire est très satisfaisant.
D'abord parce qu'il assure une promulgation précoce de la loi qui permet de gagner quelques mois, utiles aux simulations et à l'élaboration des projets des élus locaux pour une première application au 1er janvier 2000.
Ensuite parce qu'il augure bien de la mise en uvre de la loi. On peut escompter que les attachements partisans ne seront pas un obstacle dressé entre les conseils municipaux.
Enfin et surtout parce que ce consensus sur l'intercommunalité est sous-tendu par trois orientations.
1) Cette loi constitue d'abord un nouvel élan pour la décentralisation.
Par delà les fausses oppositions, artificiellement gonflées par commodité entre jacobins et girondins, entre centralisateurs et décentralisateurs, cet accord marque plutôt le succès d'une décentralisation rationalisée aux dépens du "laisser-faire territorial".
Et, après l'accord sur la loi relative aux polices municipales, je ne vous cache pas que ce nouveau consensus constitue à mes yeux un signe de bonne santé de la décentralisation.
Ce texte, chacun l'a bien compris, traduit un équilibre collectivement et volontairement recherché : donner une forte impulsion au développement local sans compromettre le cadre territorial existant. En ce sens, il constitue une nouvelle étape dans le processus continu de la décentralisation. Il réaffirme la solidité et la pertinence de nos institutions locales.
En effet le renforcement et le développement de l'intercommunalité s'appuient sur l'institution communale qu'il faut préserver. C'est le lieu privilégié pour organiser la démocratie locale et faire l'apprentissage de la citoyenneté.
La loi respecte les libertés communales, écarte toute tutelle d'une collectivité sur une autre, et l'intercommunalité reste volontaire tout en favorisant la naissance d'espaces rationnels de projets.
Face à des évolutions démographiques et économiques qui ne les servent pas toujours, il est nécessaire de réaffirmer et de soutenir la solidarité entre les communes. Il en va de leur avenir : loin de tuer les communes, l'intercommunalité peut seule les sauver. Il en va du maintien d'un service public local digne de notre temps. Il en va même de la restauration de l'égalité des citoyens devant le service public puisqu'aussi bien, la décentralisation n'a pas placé toutes les communes sur la même ligne.
2) Cette loi constitue également la deuxième phase de la réforme de la taxe professionnelle.
La généralisation de la taxe professionnelle unique complète l'allégement de la part salaires décidé en 1998. Ouverte aux trois formules d'intercommunalité et obligatoire pour les communautés d'agglomération et les nouvelles communautés urbaines, la mutualisation de cet impôt le rend plus moderne et assure sa pérennité.
L'encouragement à la taxe professionnelle unique vise à réduire localement les inégalités entre les communes et les concurrences stériles, pour aider à la constitution de groupements puissants. La taxe professionnelle unique ne constitue pas seulement un instrument d'équité fiscale, elle permet également de rationaliser les choix d'aménagement, d'organiser les services, de planifier les équipements, et donc d'améliorer l'efficacité économique de la gestion publique territoriale.
3) Enfin, troisième orientation, la loi met en place les outils décentralisés de la politique d'aménagement du territoire.
L'intercommunalité occupe aujourd'hui une place originale et de plus en plus importante dans le développement local. Elle mobilise près de 55 milliards de francs. Ses domaines d'intervention ne se limitent plus à la gestion de services au public, mais concernent également des opérations de grandes envergures.
Son développement depuis 1992 a accru ses capacités d'intervention dans des secteurs qui touchent les domaines économiques et sociaux. Ainsi s'expliquent les compétences qui sont en particulier accordées aux communautés d'agglomération et aux communautés urbaines.
La possibilité de contractualiser, ouverte par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, et l'adoption de la taxe professionnelle unique et de compétences structurantes conduisent les communes à rechercher le territoire pertinent du groupement de coopération intercommunale.
En effet, afin d'assurer la cohérence spatiale et économique ainsi que la solidarité financière nécessaire au développement de l'EPCI, la loi permet de rationaliser certains périmètres intercommunaux, manifestement étroits, au regard des compétences transférées ou de la mutualisation des charges.
Ainsi les communautés pourront constituer les cellules de base de la politique d'aménagement et de développement du territoire sur lesquelles se construiront les mécanismes de contractualisation initiés par le Gouvernement à l'occasion de l'élaboration des contrats de plan entre l'Etat et les régions.
II. - La nouvelle architecture de l'intercommunalité
La loi met en place des outils puissants au service d'objectifs ambitieux, mais également simplifiés et dans le respect des principes de la décentralisation.
Elle simplifie l'architecture intercommunale en limitant à trois le nombre de catégories juridiques, tout en unifiant les règles d'organisation et de fonctionnement de l'ensemble des EPCI à fiscalité propre. Elle renforce parallèlement les capacités d'intégration des groupements désormais mieux adaptés aux différents territoires, qu'il s'agisse des communautés urbaines, des communautés d'agglomération ou des communautés de communes.
1) Dans les agglomérations, l'objectif est de bâtir des espaces de solidarité où seront mises en commun les charges et les ressources sur un projet s'attaquant aux problèmes de la ville et notamment à la ségrégation spatiale qui vient redoubler la ségrégation sociale. Grâce aux communautés d'agglomération, il sera possible de définir et de mettre en uvre à une échelle pertinente les politiques d'urbanisme, d'habitat et de logement, d'aménagement de l'espace et de transports, de développement économique et de solidarité sociale qui permettront de favoriser la mixité de l'habitat et l'accès à la citoyenneté de ceux qui aujourd'hui se sentent rejetés.
A ces compétences obligatoires, s'ajouteront trois compétences parmi les cinq suivantes : eau, assainissement, environnement, équipements communautaires, voirie communautaire.
Tel est l'objectif politique. Il ne sera pas atteint partout au même rythme car la loi a marié exigence et souplesse, s'agissant des compétences transférées. L'introduction de la notion d'intérêt communautaire permet de définir, lors du pacte initial, ce que sont précisément les actions menées et les équipements gérés en commun. Cet accord permet aussi de préserver les politiques de proximité qui doivent rester aux communes.
La cible comporte 141 aires urbaines, définies par l'INSEE comme un espace comptant au moins 5000 emplois et où au moins 40 % de la population résidente a un emploi. La notion d'aire urbaine n'est pas un critère normatif de la loi qui n'impose que les conditions minimales de seuil (50000 habitants regroupés et une ville-centre de 15000 habitants) et la continuité territoriale. Néanmoins, ces seuils correspondent bien aux 141 aires urbaines qui concentrent 75 % de la taxe professionnelle. Cela étant, les périmètres pourront très bien être inférieurs à ceux des aires urbaines, et être étendus plus tard. Inversement, ils pourront être plus larges si les élus urbains et ruraux souhaitent établir une large solidarité à partir d'un établissement public de coopération.
Quant aux communautés urbaines, elles sont désormais réservées aux groupements de plus de 500000 habitants, dans un retour à l'esprit de la loi de 1966 qui visait à favoriser l'émergence de métropoles régionales d'équilibre et disposent de compétences renforcées.
Elles peuvent opter pour un élargissement des compétences et pour la taxe professionnelle unique à la majorité simple du conseil communautaire et des conseils municipaux si elles remplissent les conditions de seuil précités.
2) Dans les espaces ruraux, une intercommunalité de projet appuyée sur des communautés de communes consistantes aussi bien sur le plan démographique que sur le plan de leurs compétences et reposant également sur la taxe professionnelle unique, permettra de sauver les petites communes en maintenant un service public de base digne de notre temps et en animant le développement économique.
L'urbain et le rural ont des problèmes qui requièrent des traitements adaptés.
Les résultats du recensement confirment la pertinence des objectifs de la loi. Certaines grandes villes se densifient en même temps que le développement péri-urbain aggrave les difficultés d'habitat et de transport. Et dans les campagnes, les pertes de population ne sont plus liées à des départs mais au seul déficit naturel. L'intercommunalité peut donc favoriser la fixation des habitants et la création d'emplois et contribuer à rajeunir la population.
La loi, améliorée par les débats, permet de donner à travers la communauté de communes, un avenir à nos communes rurales. Une de nos forces par rapport à nos voisins européens est l'étendue de notre espace rural. Il constitue, à n'en pas douter, un facteur d'équilibre pour notre pays, une source d'activités économiques et agricoles qu'il faut continuer à soutenir et à développer. La loi y contribue, notamment en encourageant par une dotation globale de fonctionnement améliorée, les communautés de communes à taxe professionnelle unique qui vont ainsi devenir des pôles structurants du monde rural.
3) Les structures existantes connaîtront deux types d'évolution. La loi facilite la transformation des districts, des communautés de villes et des SAN.
Pour les deux premiers, le délai a été fixé au 1er janvier 2002 et il est prévu qu'à défaut de transformation en communautés d'agglomération ou en communautés urbaines, ils deviendront des communautés de communes.
S'agissant du cas particulier des SAN, deux évolutions sont possibles : une transformation en communauté d'agglomération pour ceux dans lesquels les opérations d'aménagement et d'équipement sont achevées ; pour les autres, une évolution rendant possible ultérieurement ce retour au droit commun.
Dans les trois cas, cette transformation peut être l'occasion de revoir les périmètres, en concertation avec les élus, même si la loi vous en confie l'initiative, avant consultation de l'ensemble des conseils municipaux.
Lorsque le périmètre d'un établissement public de coopération intercommunale souhaitant se transformer en une autre catégorie ne vous paraît pas correspondre à l'étendue des compétences obligatoires et optionnelles de cette catégorie ou à l'objet communautaire lui-même (notamment au critère de solidarité), vous pouvez initier et conduire la procédure d'extension du périmètre prévue par la loi à l'occasion de la transformation de cet établissement public, après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale.
Vous pouvez également, à tout moment pendant les trois ans qui suivront la publication de la loi, puis à nouveau pendant trois ans tous les douze ans, étendre le périmètre des communautés urbaines et des communautés d'agglomération. Mais vous ne pouvez pas inclure contre son gré une commune membre d'une communauté de communes éligible à la dotation globale de fonctionnement bonifiée.
La loi ne légifère pas directement sur les SIVU et les SIVOM, mais contribue à leur nécessaire réorganisation en ménageant les transitions nécessaires. C'est le cas des syndicats préexistants qui seraient englobés par une communauté d'agglomération exerçant la même compétence. C'est le cas également des chevauchements de périmètres qui obligeront les communes à sortir du syndicat et à s'y faire représenter par le nouveau groupement.
Mais il est possible, à l'issue de ces retraits, d'organiser de nouvelles coopérations dans le cadre de syndicats mixtes, incluant la totalité du territoire de la communauté et non plus une partie. Ainsi, la loi n'interdit pas les regroupements syndicaux spécialisés à une échelle plus large que l'échelle urbaine, lorsque ceux-ci permettent une réduction des coûts, ou correspondent aux caractéristiques économiques ou physiques des services publics qui sont organisés par les collectivités.
On peut attendre de ces règles une certaine rationalisation à moyen terme de ce maquis que constitue la coopération syndicale.
4) Vous serez attentifs à promouvoir le caractère plus démocratique et transparent du fonctionnement des groupements. Je vous en rappelle la disposition principale qui vise à représenter les communes au conseil communautaire par les seuls conseillers municipaux.
Vous ferez valoir que la répartition des conseillers entre les communes peut se faire soit à l'amiable, soit en fonction de la population. Et dans les deux cas, toutes les communes doivent au moins détenir un siège, la commune centre ne pouvant pas en détenir plus de la moitié.
5) Les mesures d'incitation sont importantes.
Elles concernent d'abord la DGF, portée à 250 F par habitant en moyenne dans les communautés d'agglomération, et à 175 F dans les communautés de communes à taxe professionnelle unique, comptant entre 3500 et 50000 habitants et exerçant des compétences structurantes (voirie, logement social, traitement des déchets, en plus des compétences des autres communautés de communes).
Je vous rappelle que le financement des premières est autonome, au moyen d'un prélèvement sur les recettes de l'Etat de 500 MF par an pendant cinq ans. L'intercommunalité en zone urbaine ne pèsera donc plus sur les équilibres fragiles de la DGF. Et cela rend possible le financement par la DGF actuelle de la bonification prévue pour les communautés de communes à taxe professionnelle unique.
Ces incitations financières ne peuvent pas encourager des "groupements de papier" puisque les effets d'aubaine seront mécaniquement sanctionnés. La loi corrige en effet le coefficient d'intégration fiscale (CIF), ce multiplicateur de la DGF, en neutralisant l'intérêt d'opérer des transferts financiers du groupement vers les communes.
La loi comporte aussi des dispositions sur le FCTVA, le DDR et la DGE qui viennent au soutien de l'intercommunalité.
Enfin, la péréquation volontaire des charges et des ressources sera sans doute plus difficile à réaliser en Ile-de-France. C'est pourquoi il est prévu de renforcer le mécanisme du fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France qui organise un prélèvement sur les recettes des communes les plus riches en taxe professionnelle et une redistribution aux communes à faible potentiel fiscal et aux charges, notamment sociales, élevées. Le FSRIF pourrait ainsi être porté à 1 Mds de F contre 700 MF aujourd'hui, en cinq ans et nonobstant son évolution naturelle. Il va de soi que les communes qui choisiraient la TPU seraient exonérées de ce nouveau prélèvement. Même si la zone dense de l'agglomération ne se prête pas facilement à une intercommunalité intégrée et relève sans doute dans l'immédiat de politiques contractuelles, j'imagine en revanche que des communautés d'agglomération pourront naître en grande couronne.
Quant aux mesures fiscales, je vous demande d'y prêter une grande attention puisque l'unification de la taxe professionnelle sera au cur des débats. Elle est adoptée à la majorité simple du conseil communautaire. Dans les communautés urbaines et les districts, elle sera de droit d'ici 2002 sauf majorité contraire des conseils municipaux.
Vous devez convaincre les communes que c'est leur intérêt, rassurer les conseils municipaux en procédant aux simulations sur le retour de taxe professionnelle aux communes, cette dotation de compensation qui leur permet de financer les compétences qu'elles n'ont pas transférées.
La seule perception de la taxe professionnelle unique présente pour le groupement l'inconvénient de faire dépendre son équilibre budgétaire de l'évolution des bases d'un seul impôt qui peuvent être erratiques.
Ainsi s'expliquent deux mesures qui facilitent la mise en place de la taxe professionnelle unique, la fiscalité mixte et la déliaison des taux. La fiscalité mixte permet au groupement, en sus de la taxe professionnelle, de voter en cas de besoin des taux additionnels aux trois impôts sur les ménages. Cela constitue une sécurité budgétaire pour les groupements. Mais cette souplesse est encadrée pour éviter tout excès de pression fiscale : en cas de fiscalité mixte, la dotation de solidarité, facultative et versée par le groupement aux communes, sera plafonnée.
Les groupements ayant adopté une taxe professionnelle unique ont la possibilité de délier le taux de taxe professionnelle en cas de baisse des taux des impôts ménages votés par les communes membres. Ces groupements ne se voient plus contraints de diminuer leur propre taux d'imposition à la suite des choix budgétaires et fiscaux des communes membres.
Le groupement dispose ainsi d'un pouvoir fiscal propre, adapté à ses besoins d'investissement. Et les communes peuvent trouver une capacité inédite de baisse de la taxe d'habitation et du foncier-bâti.
III. - Le rôle des préfets
Vous devrez trouver le bon équilibre en faisant preuve d'un volontarisme respectueux de la décentralisation. Je veux vous donner quelques indications sur les objectifs et la méthode.
1) Pour calibrer la dotation de 500 MF par an pendant cinq ans, j'avais fixé un objectif de création de 50 communautés d'agglomérations. C'est un objectif indicatif.
Je souhaite qu'au 1er janvier 2000, des communautés d'agglomération aient pu être créées , soit ex nihilo, soit plus probablement, par transformation de communautés de communes et de districts existants. Elles serviront d'exemple, notamment dans les grandes aires urbaines, là où les enjeux sociaux sont importants, là où la politique de la ville doit passer à la vitesse supérieure.
Elles entraîneront le débat autour de projets moins mûrs et qui seront retardés au delà des élections municipales.
Je vous indique que le calendrier des six prochains mois est tendu, en cas de transformation assortie d'une extension de périmètres. Certes la loi est d'application immédiate car les décrets nécessaires ne concernent que le fonctionnement des groupements à partir du 1er janvier 2000. Ils seront pris à l'automne. Mais le lancement de la transformation et la saisine de la CDCI pour les projets d'extension doivent être opérés dès cet été pour tenir les délais de consultation et, surtout, mener une vraie concertation avec les élus locaux.
2) Car je vous demande de vous attacher avant tout à la qualité des projets d'agglomération. La loi vous confie des pouvoirs d'appréciation et d'initiative, mais elle respecte également les principes de la décentralisation et il vous faut prendre tout le temps nécessaire au travail de persuasion des élus locaux.
Si les projets sont solides, sur des périmètres pertinents, vous les encouragerez. Mais vous devrez les différer dans le cas contraire.
Il appartient d'abord aux élus de déterminer les bons périmètres. Et vous n'utiliserez votre pouvoir d'initiative qu'à défaut de projets émanant des élus locaux, sans qui rien ne se fera d'utile en matière d'intercommunalité.
Mais vous devez également faire prévaloir l'intérêt général. Le texte vous permet d'empêcher les projets inadaptés. D'abord en interdisant les enclaves, c'est-à-dire "les paradis" cherchant à échapper à la taxe professionnelle unique et au partage des charges. Ensuite, en vous autorisant à bloquer les projets d'aubaine ou ceux qui n'associeraient pas la ville-centre et sa périphérie ou, pire, qui les opposeraient.
Enfin, la loi vous permet de ménager les rythmes, notamment dans les grandes agglomérations, parfois vierges de toute intercommunalité. Si les réticences sont fortes, il est possible de créer une simple communauté de communes, préalable à une communauté d'agglomération. La loi rend possible la création de plusieurs structures dans une même agglomération. Cela peut être, dans certains cas, une étape nécessaire.
3) Je sais qu'avec le volet territorial du contrat de plan, la négociation des contrats de ville, vous pouvez craindre le trop-plein de procédures. Mais votre tâche est précisément d'acquérir et faire partager une vue d'ensemble des enjeux et des solutions.
Les articles 25 et 26 de la loi sur l'aménagement et le développement durable du territoire, c'est-à-dire les dispositions sur les pays et les agglomérations, ont été mis en cohérence avec la loi sur l'intercommunalité. Le Gouvernement et le Parlement y ont veillé.
S'agissant des pays, ce sont des espaces de projets qui n'ont pas vocation à devenir des collectivités locales, avec un budget et des fonctionnaires. La voie la plus simple est que les pays soient couverts par une ou plusieurs structures de coopération intercommunale, préexistantes ou naissantes. Cela permet de faire l'économie de la constitution de syndicats mixtes ou de groupements d'intérêt public. Ces derniers ont été prévus afin de disposer d'une personne morale capable de contracter avec l'Etat. Enfin, troisième voie envisageable, si l'intercommunalité est absente lors de la création du pays, ce dernier peut l'engendrer, d'ici la fin du prochain contrat de plan.
Quant aux agglomérations, la cohérence entre les deux lois est encore plus forte : les critères démographiques, les compétences exigées, le nécessaire partage de la TP sont indispensables à la signature d'un contrat d'agglomération avec les villes qui bâtissent un tel projet. Et ce contrat ne pourra être renouvelé qu'à la condition que le projet intercommunal soit devenu réalité.
Mesdames et messieurs les préfets, ce texte est important. Si ses dispositions sont bien comprises par les élus locaux, la loi peut durablement donner aux agglomérations cet outil institutionnel et financier qui manquait pour repenser l'organisation urbaine et mener des politiques cohérentes et solidaires. Elle donne aux espaces ruraux des moyens supplémentaires de se défendre.
La loi n'est pas toujours d'une lecture facile, parce qu'elle tire les conséquences de sept ans d'application de la loi de 1992 et ménage les transitions. Vous devrez faire comme moi, dégager les lignes de force dans la marqueterie des outils institutionnels et financiers offerts aux communes.
La circulaire que j'ai signée et la mallette d'information qui vous sera remise vont vous y aider.
(Source http://www.interieur.gouv.fr, le 20 juillet 1999)