Interviews de Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, à RTL le 17 novembre, à Europe 1 le 2 décembre et dans "Le Monde" le 15 décembre 1999, sur son projet de loi portant réforme de la justice.

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Intervenant(s) : 

Circonstance : Projet de loi portant réforme de la justice soumis au vote du Congrès du Parlement le 24 janvier 2000

Média : Emission L'Invité de RTL - Emission la politique de la France dans le monde - Europe 1 - Le Monde - RTL

Texte intégral

RTL - Jeudi 2 décembre 1999

O. Mazerolle : Votre projet de réforme de la justice est critiqué aussi bien par la majorité que par l'opposition. Qu'est-ce qu'il faut faire pour l'améliorer ?

E. Guigou : « D'abord, il faut bien voir ce qui va être soumis au vote du congrès le 24 janvier - congrès convoqué par le président de la République il y a quelques jours. Cela va être la réforme du Conseil supérieur de la magistrature. Le Conseil supérieur de la magistrature est l'organe chargé de mettre en oeuvre la responsabilité des magistrats. Ce conseil supérieur de la magistrature, nouvelle formule, je souhaite qu'il ne soit plus composé majoritairement de magistrats, mais au contraire majoritairement de non-magistrats pour éviter le risque de corporatisme dans la mise en jeu de la responsabilité des magistrats. Par conséquent, c'est cette réforme constitutionnelle déjà voté dans les mêmes termes par chacune des deux assemblées, qui doit être confirmée par un vote au congrès convoqué par le président de la République. J'ajoute que c'est un texte qui a fait l'objet d'un très large consensus jusqu'à présent puisque non seulement le vote de la loi constitutionnelle a été fait dans les mêmes termes par les deux assemblées - à une écrasante majorité ! - aussi bien au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, mais de surcroît c'est un texte qui auparavant avait été approuvé formellement par le président de la République - c'est extrêmement important - sur deux plans : la mise en jeu de la responsabilité des magistrats par un conseil qui ne sera plus majoritairement composé de magistrats, d'autre part une garantie fondamentale pour les justiciables qui fera que, dorénavant, le Conseil supérieur de la magistrature donnera son avis pour la nomination d'un procureur. Il est indispensable que vous et moi, étant devant un procureur, nous soyons certains qu'il ait été nommé non pas par le bon vouloir d'un responsable politique, mais avec un avis conforme du conseil supérieur de la magistrature. Voilà ce qui est en cause le 24 janvier. »

O. Mazerolle : La donne a tout de même changé, parce que le président de la République prend un peu ses distances par rapport à cela, et l'opposition comme la majorité vous disent : « Attendez, il faut déjà voir la responsabilité des juges. Ce n'est pas suffisamment explicite dans le projet ? »

E. Guigou : Parce que je ne peux pas tout dire la Constitution et que cette réforme constitutionnelle est évidement une première étape extrêmement importante. De surcroît, ensuite, nous avons toute une globalité de la réforme de la justice...

O. Mazerolle : Qu'est-ce que l'on pourrait revoir sur la responsabilité des juges ?

E. Guigou : « J'ai présenté une communication au Conseil des ministres, le 22 octobre 1997, il y a deux ans, dans laquelle j'ai dit : « Voilà quelle est la globalité de ma réforme. Il y aura ce projet de loi constitutionnel, dont nous parlons, mais il faudra aussi traiter de la responsabilité des magistrats… »

O. Mazerolle : Jusqu'où cette responsabilité peut-elle aller ?

E. Guigou : « La responsabilité des magistrats est indispensable parce qu'à partir du moment où on leur donne plus d'indépendance, il faut plus de responsabilité. C'est cela la garantie de l'impartialité… »

O. Mazerolle : Dans quels domaines la responsabilité serait-elle engagée ?

E. Guigou : « … D'autre part, il faut traiter de la responsabilité des élus. Et il faut aussi voir si notre procédure pénale donne des garanties aux justiciables. Sur la responsabilité des magistrats, ce que je crois indispensable - je l'ai déjà dit à plusieurs reprises à l'Assemblée et au Sénat, mais je vais l'écrire d'ici fin novembre pour que tout le monde soit bien au courant, même si je me suis déjà exprimée dans le détail - c'est d'assurer la mobilité des magistrats. Il est important que des magistrats ne restent pas trop longtemps dans un même poste pour ne pas être soumis à des influences différentes. D'autres part, on ne pourra pas lancer dans la carrière si l'on ne change pas de poste. Il est très important aussi - et j'ai déjà donné des indications précises là-dessus, y compris dans ma communication d'octobre 97 - que les citoyens puissent porter des réclamations devant une commission : la commission de comportement professionnel inadmissible d'un magistrat - non pas remettre en cause des jugements, parce que pour cela vous avez l'appel et la cassation. Naturellement, il faut que cela soit filtré parce qu'il y aura des plaintes qui seront irrecevables - vous savez qu'il y a des gens qui sont très procéduraux. Mais, si cette plainte est recevable, il faudra qu'elle puisse donner lieu à une saisine disciplinaire du Conseil supérieur de la magistrature qui sera faite soit par la Garde des Sceaux, soit par les chefs de cour. C'est quelque chose qui est sans équivalent ailleurs dans la fonction publique et sans précédent aucun. »

O. Mazerolle : Sur l'indépendance, l'opposition dit : « Peut-être que vous ne donnez pas d'instructions, mais il y a toujours des collaborateurs qui peuvent téléphoner. » M. Dintilhac, procureur de Paris, a pu prendre un réquisitoire supplétif à l'encontre d'un ministre sans que le Garde des sceaux soit informé ?

E. Guigou : « M. Dintilhac fait ce qu'il pense devoir faire. C'est le procureur de Paris ! Je ne donne aucune instruction aux procureurs quels qu'ils soient. »

O. Mazerolle : Vous n'êtes pas informée de ce qui se passe ?

E. Guigou : « Ce n'est pas parce que je suis informée que je vais donner des instructions. Bien sûr qu'il faut que le Gouvernement et le Garde des Sceaux soient informés ! Mais ce n'est pas parce qu'on est informé que l'on va donner des instructions. Il n'y a pas eu une seule instruction donnée aux procureurs. Et c'est parce qu'on le sait que, précisément, ma réforme est crédible. Au système ancien des instructions individuelles, qui a donné lieu à toutes les dérives, qui a jeté un soupçon profond sur la crédibilité, l'impartialité de la justice, j'ai substitué un système de directives générales, parce que ce qui m'intéresse c'est l'intérêt général. C'est cela que nous faisons. Évidement pour certains, c'est difficile à croire parce qu'ils n'ont vécu que dans l'ancien système. Mais tous les procureurs vous diront que, sous aucune forme, il n'y a eu aucune forme de pression d'instructions. Les magistrats sont libres sur les dossiers individuels. »

O. Mazerolle : La présomption d'innocence, le secret de l'instruction : est-ce qu'il faut réformer la procédure pour faire en sorte que l'accusation ne soit pas publique avant même que le suspect puisse se défendre ?

E. Guigou : « C'est un autre vrai sujet. Ce n'est pas simple d'y apporter les réponses. C'est vrai que le secret de l'instruction, aujourd'hui, n'est pas respecté. Il n'est pas respecté parce que d'abord il y a des gens qui ne sont pas tenus de le respecté. Le secret de l'instruction ne s'impose ni à la presse ni aux avocats. Par conséquent, c'est tout à fait légal et ce n'est pas ré-primable. Il s'impose aux magistrats. Je crois que, dans la plupart des cas, ce secret est respecté, mais quelquefois, c'est vrai, il y a des fuites. Chaque fois que j'ai eu connaissance - avec une preuve - de violation du secret de l'instruction par un magistrat, j'ai saisi le Conseil supérieur de la magistrature dans les instances disciplinaires. »

O. Mazerolle : On dit qu'il faut aussi des débats contradictoires pour que le suspect puisse se défendre.

E. Guigou : « Oui, mais bien sûr. C'est très important, le débat contradictoire. D'ailleurs, pour la détention provisoire, c'est ce que j'organise : le débat contradictoire et le juge de la détention provisoire qui peut l'accepter ou la refuser. Le problème se pose pour la mise en examen, c'est-à-dire pour le premier acte de mise en cause par le système judiciaire. Je crois qu'il faut faire attention de ne pas prendre des solutions à la va vite et qui serait à double tranchant. Plus vous reculez la mise en cause judiciaire, plus vous donnez d'espace à la police, à l'enquête e police. Donc, avec moins de garantie pour la protection de personnes. D'autre part, si vous organisez le débat contradictoire - et je crois que c'est une bonne chose - il faut faire aussi attention à l'efficacité de l'enquête. Pensez qu'il n'y a pas seulement la délinquance en col blanc, il y a aussi la criminalité organisée dans laquelle il y a des bandes organisées. Et si vous avez une très grande publicité d'un débat contradictoire, vous risquez d'alerter des complices qui sont dans la nature. Encore une fois, j'accueille toutes les suggestions avec beaucoup d'intérêt, mais attention : pas de réponses simplistes. »


Europe 1 – 2 décembre 1999

J.-P. Elkabbach : Ce matin, estimez-vous que votre réforme peut être votée par les trois-cinquième du Parlement à Versailles le 24 janvier ?

E. Guigou : « Vous parlez de la loi constitutionnelle, là ! C'est une loi constitutionnelle qui a d'abord été approuvée par le président de la République, parce que le premier ministre et moi-même, nous avons soumis cette loi avant due la présenter en Conseil des ministres. Ensuite, c'est le président de République qui a convoqué le congrès et je rappelle que c'est une loi qui a déjà été votée massivement il y a un an par les députés et les sénateurs chacun séparément. 700 voix pour et 60 voix contre. »

J.-P. Elkabbach : Il y a eu beaucoup de choses depuis. Votre réponse c'est quoi ?

E. Guigou : « Si les députés et les sénateurs restent cohérents avec leur vote d'il y a un an, il n'y a aucun problème. En particulier, s'ils se déterminent sur le fond de la réforme. Je pense qu'à partir du moment où c'est une réforme équilibrée qu'à la fois donne des garanties d'indépendant aux magistrats, amis aussi qui engage leur responsabilité, à ce moment-là je pense que dans la ligne du vote d'il y a un an, cette réforme devrait pouvoir être votée. Mais si certains députés et sénateurs, notamment de l'opposition, se déterminent pour des raisons politiciennes, pour nuire au Gouvernement, voire pour déplaire au président de la République, alors à ce moment-là, il y un risque, en effet, que ce ne soit pas voté. »

J.-P. Elkabbach : Qu'est-ce que cela veut dire ?

E. Guigou : « Eh bien, c'est une réforme, voyez-vous, qui est comprise par les Français comme ayant une signification : de faire en sorte que désormais - et ce sera écrit dans la Constitution - les politiques ne manipuleront plus la justice. Donc, si l'on vote contre, ce sera compris comme ça : c'est que l'on ne souhaite pas faire terre réforme qui va dans le sens de l'intérêt général et de la démocratie. Je pense en plus que dans la situation où les politiques en général - c'est très injuste - souffrent, sont décrédibilisés. Le jugement porté sur les politiques est très sévère en grande partie parce qu'il y a eu cette confusion entre politique et justice. Et les Français, dans toutes les enquêtes, nous disent : « Nous ne voulons plus que les politiques manipulent la justice, qu'ils tripatouillent dans la justice. » Je pense qu'une des façons les plus éclatantes de montrer que les politiques respectent la séparation des pouvoirs et donc qu'ils sont une conception de la démocratie qui est plus élevée, c'est de voter cette réforme. Et je pense que les Français leu t'en sauront gré. Dans le cas contraire, ces qui auront voté contre auront à en assumer la responsabilité devant l'opinion. »

J.-P. Elkabbach : Aujourd'hui, l'opposition vous demande de voir votre copie - comme dit J.-L. Degré - ou de reporter le congrès. Est-ce que, ce matin, vous l'envisager ?

E. Guigou : « Mais, d'abord c'est le président de la république – c'est de sa prérogative – qui convoque le congrès. Lui seul peut prendre... »

J.-P. Elkabbach : Mais si vous retirez le texte ?

E. Guigou : « Mais, je n'ai pas à retirer le texte ! C'est une loi constitutionnelle qui a été votée par les deux assemblées, que le Président de la République a décidé de présenter au congrès. Il y a des institutions, une constitution dans ce pays, il faut la respecter. »

J.-P. Elkabbach : D'ici au 24 janvier, peut-il avoir de nouvelles retouches à vos quatre textes ?

E. Guigou : « Il y a beaucoup de textes. D'abord, il y a déjà des textes qui ont été votés dont personne ne parle. C'est dommage parce que c'est justement la justice au quotidien, mais enfin passons ! Il y a aujourd'hui cette loi constitutionnelle. Il doit y avoir deux lois organiques qui vont avec, parce qu'elles préciseront - vous savez dans la Constitution on ne dit pas tout. La première, je l'ai présentée hier aux députés et aux sénateurs. Pourquoi est-ce que j'ai décidé d'en accélérer la présentation ? C'est parce que cette loi est prête depuis un an et demi. J'avais d'ailleurs annoncé tous les mécanismes que vous trouvez là : la mobilité, la commission de réclamation des citoyens. Il y a deux ans, en octobre 97, lorsque j'avais annoncé le plan global de la réforme de la justice au Conseil des ministres, nous avons eu un débat… »

J.-P. Elkabbach : Mais, là, ce n'est pour plaire aux parlementaires ?

E. Guigou : « Non, j'entends parler de gages, de marchandage. Je vais vous dire : s'il n'y avait pas eu le Congrès, cette loi était prête, elle aurait été discutée au mois de février au lieu que je la présente maintenant. Elle sera toujours discutée au mois e février d'ailleurs. Voilà, « marchandage », « gages », ce n'est pas ça du tout… »

J.-P. Elkabbach : C'est une forme de séduction ?

E. Guigou : « Non, c'est une présentation anticipée. Les députés et les sénateurs m'ont dit - ce que j'ai compris : « Nous voudrions avoir la vue d'ensemble avant le congrès. » J'ai dit : Qu'à cela ne tienne ! Les textes qui manquent encore, dont celui-là, je vous les présenterai avant le 15 décembre. » Ce que j'ai fait hier. »

J.-P. Elkabbach : Le principe de la responsabilité des magistrats est déjà légalement réglementé : responsabilité civile, pénale, disciplinaire…

E. Guigou : « Bien sûr, il ne faut pas croire qu'elle n'existe pas. »

J.-P. Elkabbach : Alors pourquoi ces soupçons et ces menaces sur les juges ? Qui gênent-ils les juges aujourd'hui ?

E. Guigou : « Cette responsabilité existe déjà, vous avez tout à fait raison de le rappeler. Les juges ne sont pas des intouchables. S'ils conduisent en état d'ivresse, ils seront condamnés comme n'importe qui. »

J.-P. Elkabbach : De temps en temps, ils se comportent comme des intouchables.

E. Guigou : « Quelquefois ils commettent des fautes, et là, il y a des sanctions disciplinaires. D'ailleurs j'ai saisi le Conseil supérieur de la magistrature vingt fois depuis que je suis là. Mais, vous voyez bien que dans notre société où le droit a de plus en plus de place, où le pouvoir des juges augmente parce que la place du droit augmente, il faut perfectionner cette responsabilité. Il faut le faire de deux façons. Il faut d'abord que dans leurs décisions juridictionnelles, il y ait des contre-pouvoirs à l'intérieur du système. Ce ne sont pas les politiques qui peuvent faire cela, ce sont les avocats, le droit de la défense, et puis d'autre part, les juges à l'intérieur du système. Par exemple, pour la détention provisoire - décision extrêmement grave -, dans le projet de loi « présomption d'innocence » qui est déjà discuté au Parlement… »

J.-P. Elkabbach : Celui qui en fera trop sera sanctionné ou risque d'être sanctionné ?

E. Guigou : « Attendez, ça c'est pour les décisions juridictionnelles. Pour la détention provisoire, je crée un juge de la détention provisoire. Ce ne sont pas les politiques qui vont discuter de cela. Maintenant, pour les fautes, il faut des sanctions disciplinaires. Et à ce moment-là, ce que je dis dans ce projet de loi que j'ai présenté hier, c'est que désormais, d'abord les citoyens pourront saisir une commission de réclamations des plaintes, d'autre part que les audiences disciplinaires seront publiques et que les décisions seront publiées. »

J.-P. Elkabbach : Quand vous lisez que, depuis l'été, la Garde des Sceaux a repris en main la justice, qu'il y a des nominations qui tardent, des mutations politiques, des juges qui attendent les moyens qui leur sont nécessaires pour agir ?

E. Guigou : « Je dis que cela relève du procès d'intention et que ce n'est pas sérieux. Que l'on me cite des cas précis ? Pour les nominations des magistrats, il y a des règles extrêmement précises qui s'imposent à tout le monde. Imaginez-vous qu'à chaque fois qu'un magistrat est nommé, d'abord il faut que cela soit sur un poste vacant. Ensuite, on publie la liste de tous les candidats deux mois avant la nomination. Dans cette liste de candidats, le Garde des Sceaux dit : « Voilà, moi je propose celui-ci, mais il peut y avoir des réclamations et c'est finalement le Conseil supérieur de la magistrature qui donne un avis conforme. Soyons sérieux ! Je vais vous dire quelque chose J.-P. Elkabbach ! Depuis que je suis là, il n'y a pas eu une nomination de magistrat, que cela soit de magistrat du siège ou de magistrat du parquet, qui ait été faire sans avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature alors que mes prédécesseurs ne se sont pas privés, eux, de nommer même en cas d'avis contraire du Conseil supérieur de la magistrature. »

J.-P. Elkabbach : De temps en temps, on sent que vous êtes remontée !
E. Guigou : « Mais, parce que là, c'est de l'ordre du procès d'intention et je trouve qu'il y a quelquefois de la malhonnêteté intellectuelle. »

J.-P. Elkabbach : Est-il vrai que vos rapports, vos relations avec le président de la République sont plus que fraises, glaciales ?

E. Guigou : « Non, je ne dirais pas cela, non. »

J.-P. Elkabbach : Comment vous les qualifiez vous-même ?

E. Guigou : « Je n'ai pas à les qualifier. C'est le président de la République et je suis le Garde des Sceaux. »

J.-P. Elkabbach : C'est cela qui veut dire glacial… non ?

E. Guigou : « Non, pourquoi ? Nous avons des rapports institutionnels. D'ailleurs le président de la République préside le Conseil supérieur de la magistrature que je vice-préside, et par conséquent je crois que c'est comme cela que ça doit fonctionner en démocratie. Un respect à la fois des institutions et des personnes. »

J.-P. Elkabbach : L. Jospin recevra tous les élus corses, probablement le 14 et le 15 décembre à Matignon. Ministre de la justice y serez-vous ?

E. Guigou : « Je ne sais pas. Le premier ministre n'a pas encore décidé s'il serait accompagné de ministre ou pas. »

J.-P. Elkabbach : Est-ce une seule réunion ou une série de rendez-vous ?

E. Guigou : « Pour l'instant il est prévu qu'une seule réunion mais naturellement le premier ministre décidera si ça doit être suivi d'autres, en fonction de ce qui aura été dit, j'imagine, à cette réunion. »

J.-P. Elkabbach : Au bout il y a quoi ? Un nouveau statut, une autonomie rafraichie ? Une belle autonomie toute neuve ?

E. Guigou : « Le premier ministre a dit, quand il est allé en Corse, que rien n'était exclu mais à partir du moment où il y avait des avancées constructives. Alors qu'est-ce que c'est que la politique du Gouvernement ? Elle reste la même : application de la loi, développement de la Corse, identité culturelle corse. Ce sont les trois axes de la politique du Gouvernement. Je pense que le premier ministre demandera aux élus de l'Assemblée de Corse : qu'est-ce que vous proposez, qu'est-ce que nous pouvons faire ensemble ? L'État a beaucoup fait déjà. Le contrat de plan état-région, qui détermine pour les sept ans qui viennent, les crédits de l'État aux régions, pour la Corse, la Corse est devenue la première région française pour ces aides publiques et par habitant. Elle reçoit trois fois plus que la moyenne nationale. Alors on ne peut pas dire… »

J.-P. Elkabbach : De quoi elle se plaint !

E. Guigou : « Non, ce n'est pas cela ! Il y a d'énormes problèmes en Corse. Simplement on ne peut pas tout demander à l'État. Il faut aussi que les élus corses et la société civile en rose se mobilisent et se prennent en charge, parce que c'est comme cela dans une démocratie moderne que les choses peuvent aller mieux. »

J.-P. Elkabbach : Est-il vrai que L. Jospin vous a demandé de réduire les dysfonctionnements de la justice en Corse ?

E. Guigou : « D'abord moi je compte tirer les conclusions des rapports qui, d'ailleurs, font beaucoup de louanges au fonctionnement de la justice en Corse, je tiens à le souligner. »

J.-P. Elkabbach : Et des critiques…

E. Guigou : « Quelques critiques mais finalement assez peu nombreuses. En tout cas lorsqu'il y a des critiques, j'en tirerai les conclusions. Le premier ministre n'a pas à me le demander. Je le fais spontanément parce que je respecte beaucoup les travaux parlementaires. »

J.-P. Elkabbach : Vous confirmez qu'il y en aura ?

E. Guigou : « J'ai demandé un rapport sur la justice criminelle en Corse. Et d'ailleurs sur la lutte contre l'argent sale. Je tiens à dire, ici, devant vous, parce qu'ils nous écoutent peut-être, que d'abord les magistrats de Corse ont fait un effort formidable, et qu'ils travaillent dans des conditions extrêmement difficiles, et que c'est cela aussi qu'il faut arriver à faire comprendre. Voilà. Merci pour ce que font les magistrats et les fonctionnaires. »