Texte intégral
MICHELE COTTA
Bonjour. Permettez-moi d'abord au nom de toute l’équipe de POLEMIQUES de vous présenter nos meilleurs vœux pour 1998. Mondial de football, élections régionales, fixation du taux de l’euro, la monnaie unique européenne et des pays qui ont vocation à l'adopter, l’année 98 sera comme 1997 une année naturellement fertile en événements, ceux que l’on prévoit bien sûr et ceux que l'on a oublié de prévoir comme la dissolution en 1997 qui a entraîné l’arrivée de Lionel JOSPIN à Matignon et les débuts d'une nouvelle cohabitation, la troisième sous la Ve République. Nous consacrerons la deuxième partie de cette émission à une revue de presse sur l’année qui vient de s'écouler et sur celle qui arrive où, j'espère, mes collègues journalistes brilleront par l’originalité de leurs prévisions. Tout de suite, noire invité est Alain MADELIN, ancien Ministre, Président de Démocratie libérale et vice-président de l'UDF que nous allons interviewer avec Philippe REINHARD de L'EVENEMENT DU JEUDI. ALAIN MADELIN, bonjour.
ALAIN MADELIN
Bonjour Michèle COTTA.
MICHELE COTTA
Merci d'être avec nous en ce début d'année.
ALAIN MADELIN
Bonne année !
MICHELE COTTA
Des mouvements de chômeurs... je ne sais pas si à eux aussi vous leur dites « bonne année ! » des mouvements de chômeurs sur fond... se font ressentir depuis déjà quelques semaines pour réclamer une prime de Noël. Alors cette prime, est-ce que vous trouvez qu’on peut la leur donner indistinctement à tout le monde ? Est-ce que c'est compatible avec le déficit annoncé de l'assurance chômage ? Qu'est-ce que vous feriez vous si vous étiez ministre des Finances ou ministre des Affaires sociales ?
ALAIN MADELIN (PRESIDENT DE DEMOCRATIE LIBÉRALE)
Eh bien, je vais d'abord vous donner ma réaction de citoyen. Je pense que c'est une révolte légitime. Je mesure bien évidemment les petites manipulations politiques qu'il peut y avoir derrière de tels comités mais il est vrai que nous avons là l'illustration d'un thème à nouveau qui m'est cher, celui de la déchirure sociale, celui de cette misère qui est en train de ronger la société française, de ces familles entières, de ces jeunes qui se retrouvent sans espoir, trop vieux pour avoir un travail, trop jeunes, pas d'expérience pour prétendre aussi a un emploi. Ces sacrifices quotidiens pour élever des enfants dans des conditions difficiles sans aucune perspective d'avenir. J'ai appelé cela la panne de l'ascenseur social. Cela veut dire quoi ? Cela veut dire pas d'avenir, pas de futur, la pauvreté... on peut être pauvre pendant un moment, il y a beaucoup gens qui ont été pauvres un moment dans leur vie mais il faut au moins avoir une perspective. Et là, on sent bien qu'il y a des familles entières qui sont enfermées dans la dépendance, dans l'assistance, dans la pauvreté, dans une pauvreté qui devient héréditaire quand le RMI devient héréditaire, eh bien moi je suis heureux que...
MICHELE COTTA
Oui mais ça, c'est plus facile à dire quand on est dans l’opposition que quand on est dans la majorité.
ALAIN MADELIN
Je ne sais pas si c'est facile ou pas facile à dire, ce que j'aurais envie de faire ce n'est pas de dire « agir contre le chômage »... bien sûr agir contre le chômage mais « agir pour l'emploi » et c'est vrai que je suis moi à ma façon aussi un peu révolté parce que je sais que des emplois on peut en créer je regarde ce que font d'autres pays autour de nous, à condition d'arrêter un peu la politique de l'autruche, de faire preuve d'un peu de courage pour remettre en cause un certain nombre de nos habitudes. Comment ne pas rapprocher ces mouvements de chômeurs de l'autre côté, je crois, c'était le Mondial de football. Quand nous voyons une grève dans les transports parisiens parce que l'on prévoit qu'il y aura trop de monde dans les transports au moment du Mondial de football alors on fait grève... mais décidément, il y a deux poids deux mesures dans ce pays ! Il y a les politiquement faibles et notamment les chômeurs, eh bien, je trouve qu’ils ont raison de se révolter.
PHILIPPE REINHARD (L'EVENEMENT DU JEUDI)
ALAIN MADELIN, vous avez parlé de « révolte légitime » mais vous avez aussi parlé d'une « manipulation ». Je pense que vous faites allusion à la CGT et au Parti communiste dans cette affaire mais pourquoi la droite laisse-t-elle le monopole de l'intérêt pour les chômeurs à la gauche ?
ALAIN MADELIN
Eh bien, vous avez raison. C'est une question qui m'interpelle comme on dit. Et moi, je voudrais essayer avec mes amis aussi à la base de créer des comités non plus « agir contre le chômage », mieux encore « agir pour l'emploi » parce qu''il y a des solutions ! Je vais prendre un exemple, un seul : vous avez des familles entières qui se trouvent aujourd'hui enfermées dans l'exclusion avec leurs enfants. De l'autre côté, nous, les maires, nous pouvons créer des emplois d'utilité sociale dans nos mairies. On sait en créer quelques-uns. Qu'est-ce que fait Martine AUBRY et le gouvernement ? Ils offrent ces emplois d'utilité sociale que nous pouvons créer, nous les maires, comme perspective d’emploi à des jeunes et à des jeunes diplômés. Ce ne sont pas des vraies perspectives d'avenir. En revanche, pour des personnes qui sont enfermées dans des minima sociaux et des minima sociaux insuffisants, c'est vrai, insuffisants dans un certain nombre de cas, eh bien, ces personnes leur permettent de retrouver non plus un revenu d'assistance mais un revenu d'activité. Voilà une réforme simple que l'on nous donne le pouvoir à nous les maires de gérer ces minimums sociaux et je vous garantis que l'on saura remettre des gens dans des activités d'utilité sociale. Ce n'est pas la panacée bien sûr mais les gens auront le sentiment d'être utiles.
« - Qu'est-ce que tu fais papa ? Tu es au chômage ? - Non, je travaille pour la ville » C'est déjà mieux !
MICHELE COTTA
Alain MADELIN, vous voyez bien naturellement ce que l’on peut vous dire. Vous dites « qu’on nous donne… à nous le pouvoir », mais vous l’avez eu ! C’est un peu facile quand même maintenant non ?
ALAIN MADELIN
Eh bien écoutez, si vous voulez me faire dire que depuis des décennies nous appliquons en France toute une série de politiques dirigistes de droite, de gauche, qu'on les mélange parfois et que ceci n'a aucun résultat contre le chômage, la réponse est « oui » ! Si vous voulez me faire dire qu'il faudrait une politique de davantage de liberté et de créations entreprises, d'allègement de toute une série de contraintes qui pèsent aujourd'hui sur ceux qui peuvent créer des emplois, vous savez, créer des emplois vous savez, créer des emplois, cela s'appelle des entrepreneurs. Voilà pourquoi je défends les entrepreneurs. Je ne les défends pas en tant que tels, je les défends parce que eux seuls sont capables de créer les emplois dont nous avons besoin pour retrouver la cohésion sociale dans ce pays.
PHILIPPE REINHARD
François MITTERRAND disait qu'on avait tout essayé contre le chômage mais apparemment, il y a une chose que l’on n'a pas encore essayé c'est les 35 heures. Or, les 35 heures mises en place par le gouvernement JOSPIN, vous êtes tout à fait contre et on a même l'impression que c'est vous qui faites la campagne de Monsieur SEILLIERE et du CNPF aujourd'hui.
ALAIN MADELIN
Écoutez, moi, je vais faire campagne contre les 35 heures parce que j’estime... je ne dirais pas cela de toutes les décisions du gouvernement, je ne les critique pas systématiquement mais là, nous avons de la part du Premier ministre, à mes yeux, une décision profondément irresponsable. Autant l'aménagement du temps de travail, la souplesse qui parfois peut aboutir à une réduction du temps de travail...
Philippe REINHARD
Comme la loi ROBIEN…
ALAIN MADELIN
Comme la loi ROBIEN d'une certaine façon. Ce que j'ai regretté c'est qu'elle soit un peu coûteuse mais d'une certaine façon... peut permettre de créer des emplois autant la réduction autoritaire du temps de travail est quelque chose qui non seulement ne va pas créer des emplois mais va créer du chômage. Monsieur GERHARD SHROEDER (phon) qui est le leader socialiste allemand a dit « si les Français appliquent les 35 heures en France, ce sera une bonne chose pour l'emploi en Allemagne ». C'est une mauvaise chose aussi pour la feuille de paie. Nous allons voir et Martine AUBRY ne dit d'ailleurs pas autre chose, nous allons voir en compensation de... que la mise en œuvre, là où on pourra le mettre en œuvre d'ailleurs, des 35 heures, le gel de la feuille de paie. Et moi, je suis angoissé par cette affaire de voir les salaires en permanence tirés vers le bas. L'économie française, la feuille de paie, sont tirées vers le bas. Ce sera une mauvaise chose pour les heures supplémentaires. Supprimer les heures supplémentaires actuelles... or pour beaucoup de familles, c'est l'équilibre d'un budget ces heures supplémentaires, c'est inapplicable !
MICHELE COTTA
On ne parle pas de les supprimer, on parle même qu'elles aient 25 % de plus…
ALAIN MADELIN
Michèle COTTA, ceci mériterait un petit peu quelques mots d'explication. On ne parle pas de supprimer le principe des heures supplémentaires mais ce qui est sûr c'est que si on applique la loi sur les 35 heures, on pourra faire quelques heures supplémentaires pour arriver à 37, 38 votre 39 mais les gens qui à l'heure actuelle font des heures supplémentaires, au-delà de 39 heures, celles-là seront supprimées. Or, elles comptent pour beaucoup de familles pour rembourser les traites d'un pavillon. Donc, je crois que ceci va tirer l’économie vers le bas et je ne parle pas du caractère totalement surréaliste qui consiste à appliquer les 35 heures à votre café, à votre taxi ou à votre boucher ou à votre boulanger ! Ceci est inapplicable, bien évidemment dans l'artisanat. C'est un remède franco-français, c'est un remède socialiste, c'est un remède qui bien évidemment ne créera pas d'emplois, au contraire ! Voilà pourquoi je crois que c'est une mesure irresponsable qui mérite d'être combattue et je la combats avec mes amis de Démocratie libérale, c'est vrai.
PHILIPPE REINHARD
Et avec le CNPF.
MICHELE COTTA
ALAIN MADELIN, est-ce que l’on peut revenir à la prime de Noël ? Vous ne m’avez pas répondu. Est-ce que vous, vous la donneriez ? Est-ce que vous la donneriez à tout le monde ? Est-ce que vous le feriez, malgré le déficit de l’assurance chômage ?
ALAIN MADELIN
Peut-on gérer autrement les sommes de l’UNEDIC ? Sûrement. Et j’ai regretté à un moment donné quand il y avait des excédents il y a deux ans qu’on n’en fasse sans doute pas le meilleur usage. Mais sûrement, on peut faire des efforts mais le véritable remède, ce n'est pas la prime, une fois de temps en temps une prime de charité. Si l'on veut lutter contre le chômage, c'est la création d'emplois, si nous appliquions à notre tour une politique… moi, j'appelle cela une politique libérale, comme l’ont fait d'autres pays, sans parler des Etats-Unis, sans même parler de l'Angleterre. Il suffit de regarder les Pays-Bas autour de nous, nous pourrions créer les millions d'emplois dont les Français ont besoin Ce n'est qu'un problème de courage et de volonté.
MICHELE COTTA
Alors, deuxième sujet d'actualité, le Conseil constitutionnel vient de déclarer que l’adoption du traité d'Amsterdam nécessite une révision constitutionnelle. Alors, est-ce que vous imaginez que cela se fasse, que cela puisse se faire par référendum une fois de plus ou simplement par consultation du Congrès à la majorité des deux tiers ? Qu’est-ce que vous souhaitez et quel référendum finalement ?
ALAIN MADELIN
Alors, cela mérite un petit peu d'explications parce que personne ne comprend rien dans cette affaire hein !
MICHELE COTTA
Justement, d'autant que tout le monde réclame des référendums différents, alors...
ALAIN MADELIN
Bien alors, qu'est-ce qui s'est passé ? Vous avez un traité qui est le traité d'Amsterdam dont le président de la République et le Premier ministre ont voulu vérifier s'il était conforme à la Constitution avant de l'adopter en France. Et on s'est aperçu que sur un point, il n'était pas conformé à la Constitution. C'est l’article 73 K de ce traité.
MICHELE COTTA
La liberté de circulation.
ALAIN MADELIN
Oui, c'est-à-dire que sur un point, les Européens se sont dits, nous sommes obligés d'avoir une politique coordonnée en matière d'immigration. Et ça, c'est le bon sens ! Prenons un exemple : si je rentre facilement en Italie pour ensuite aller circuler librement en Europe et si je suis attiré par des droits sociaux par exemple plus généreux en France, tout le monde comprend que la politique d'immigration, elle a besoin d'être coordonnée Donc, les Européens, avec sagesse se sont dits « nous avons besoin de coordonner ces politiques d'immigration et dans 5 ans, nous mettrons en place à la règle de la majorité et qui est qualifiée, nous mettrons en place ces politiques d'immigration. ». Ceci n'est pas conforme à notre Constitution nous dit le Conseil constitutionnel. Il nous faut donc réviser notre Constitution sur ce point. Eh bien, c'est ce que nous allons devoir faire. Ce n'est pas un point fondamental comme l’adoption hier du traité de Maastricht qui nécessitait un référendum. Je ne pense pas que sur ce point l’arme du référendum soit nécessaire.
PHILIPPE REINHARD
Alors on comprend mal.
MICHELE COTTA
Alain MADELIN, il ne s'agit pas de réviser la politique sur l'immigration, il s'agit de mettre le traité d’Amsterdam... de mettre la Constitution en conformité avec le traité d'Amsterdam, c'est différent !
ALAIN MADELIN
MICHELE COTTA, c'est sur ce point, c'est la politique... nous sommes un même espace commun. Nous rentrons par n’importe quel pays.
MICHELE COTTA
Ca, on a bien compris !
ALAIN MADELIN Il faut donc qu’il y ait une politique coordonnée d'entrée et de séjour sur l'ensemble du territoire européen:...
MICHELE COTTA
Ce n’est pas l’objet de la révision constitutionnelle.
ALAIN MADELIN
Ceci nécessite un transfert de souveraineté donc une révision constitutionnelle.
PHILIPPE REINHARD
Ce que l'on ne comprend pas c'est que vous même et vos amis avez demandé sur la nationalité et l'immigration, c'est-à-dire sur les lois GUIGOU et CHEVENEMENT un référendum sur ces sujets. Vous nous dites « Amsterdam touche à ces sujets » alors pourquoi pas le référendum sur ce-sujet-là ?
ALAIN MADELIN
Parce qu’il ne faut pas mélanger les choses, Monsieur REINHARD. Alors…
MICHELE COTTA
C'est déjà assez mélangé comme cela oui !
PHILIPPE REINHARD
C'est vous même qui les mélangez ! Vous nous dites que ça touche l'immigration...
ALAIN MADELIN
Non, non, vous essayez de faire un sac et de mettre un petit nœud autour. Non !
Reprenons... défaisons le sac, regardons. D'un côté il y a la réforme sur la nationalité française. La nationalité française, c'est quelque chose de très précieux. C'est le bien précieux de tous les Français et même comme le disait JAURES des plus modestes et des plus pauvres d'entre eux, la nationalité française. On y tient. Et donc cela regarde les Français. Oh bien sûr, un gouvernement peut y toucher mais il doit y toucher les mains tremblantes et si on modifie les règles d'acquisition de la nationalité française, moi je dis qu'il faut le faire par consensus. C'est ce qu'avait fait le précédent gouvernement, c'est ce qu'avait fait Jacques CHIRAC, la commission de la nationalité etc. Bien. Le gouvernement là veut faire passer un texte en force contre la volonté des Français. C'est la raison pour laquelle nous avons dit effectivement, si vous voulez faire adopter cette loi, vous n'avez pas le droit de la faire adopter comme cela, vous devez le faire par référendum. Il n'en reste pas moins que dans ce débat sur l'immigration, la France vraiment là mène une politique dangereuse en matière d'immigration, sur l'entrée et le séjour, cela va augmenter le nombre d'irréguliers, cela va augmenter le nombre d'étrangers sur notre territoire alors que nous avons déjà beaucoup de mal avec l’immigration régulière.
MICHELE COTTA
Les Kurdes par exemple.
ALAIN MADELIN
Par exemple, si vous voulez, on ne va pas rentrer dans les détails de ce texte mais c'est un texte là aussi qui est un texte dangereux et irresponsable. Ce que nous n'avons cessé de dire dans le débat à l'Assemblée nationale, ce que nous allons continuer de dire parce que ce débat va se prolonger, c'est qu'il y a besoin d'une politique européenne en matière d'immigration. On ne peut pas faire une politique à part chez nous. Il faut que l'on considère la politique des autres et c'est ce que le gouvernement se refuse à faire…
MICHELE COTTA
C'est un transfert de souveraineté au fond que vous demandez...
ALAIN MADELIN
Ce que je veux dire, le projet de loi de Monsieur CHEVENEMENT est rattrapé par le traité d'Amsterdam. Alors maintenant, l'opposition, le Sénat et le président de la République ne sont pas sans pouvoir sur la suite des événements. Et moi, mon sentiment personnel c'est que le gouvernement devrait faire preuve de sagesse. S'il veut que nous fassions marche avant constitutionnellement sur le traité d'Amsterdam, il doit faire marche arrière sur le texte CHEVENEMENT. Il doit reconsidérer la politique de l’immigration française pour la mettre à l'heure européenne. On ne peut pas nous demander d'un côté de mettre notre Constitution sur cette question d'immigration et de 1’entrée et séjour des étrangers à l'heure européenne et de l'autre côté refuser de le faire pour nos lois.
PHILIPPE REINHARD
Alain MADELIN, puisque vous parlez de l'opposition et de ses pouvoirs, comment va-t-elle, cette opposition, sept mois après la dissolution hasardeuse, à droite vous êtes trois à l'UDF – vous-même, François LEOTARD, François BAYROU – à gauche... à droite toujours au RPR on trouve et Philippe SEGUIN et Nicolas SARKOZY et au-dessus de vous tous, le président de la République que l'on a cru affaibli après la dissolution mais finalement, est-ce que ce n'est pas lui qui est en train de tirer les marrons du feu de cette opposition ?
MICHELE COTTA
Est-ce que cela vous déplaît ? Est-ce que cela vans déplairait...
ALAIN MADELIN
Écoutez, le président de la République à la fonction qui est la sienne et je ne vais pas du tout mésestimer le rôle du président de la République, je viens de vous le rappeler il y a un instant et je crois que ceux qui voudraient passer… le président de la République par pertes et profits feraient une erreur. Cela étant, il y a besoin d'un formidable... d'une formidable reconstruction de l'opposition. Je crois que cet échec des dernières élections législatives a été un tremblement de terre. Un tremblement de terre ! Cela a détruit énormément de choses. Et maintenant il faut reconstruire. Et moi, j'essaie de reconstruire en faisant du neuf. J'essaie de reconstruire d'abord sur des convictions et pas sur des ambitions. D'abord des convictions parce que ce qui manque le plus souvent ce sont des idées solides, bien arrêtées, bien fermes que l'on ait envie de faire partager à ses concitoyens. Donc, je m'emploie avec mon mouvement Démocratie libérale dans l'alliance avec mes amis de l'UDF, avec mes amis de l’ensemble de l’opposition, je m'emploie aujourd'hui à l'ouverture, au rajeunissement, au renouveau...
PHILIPPE REINHARD
Il y a les idées mais il y a aussi des élections...
ALAIN MADELIN
... Au renouvellement de la vie politique française.
PHILIPPE REINHARD
Alain MADELIN, il va y avoir des élections le 15 mars, des élections régionales et cantonales et on voit déjà un certain nombre de candidats et de leaders appartenant à votre formation tenter des manœuvres d'approche en direction du Front national, c'est un sujet sur lequel vous ne vous exprimez que très rarement, et nous aimerions savoir ce que vous dites à messieurs VASSEUR ou BLANC qui sont manifestement décidés à passer le pont ?
MICHELE COTTA
Alors, une question complémentaire, Jean-Marie LE PEN vient d'être condamné à nouveau pour une déclaration sur l’allusion au fameux « détail », vous ne l'avez pas condamné vous-même.
ALAIN MADELIN
Si, si très clairement ! Écoutez, non, non, je crois que de tels propos sont des propos ignobles que je n'accepte pas. Cela étant, je ne parle pas effectivement matin, midi et soir du Front national. Ce n'est pas du tout mon obsession et je crois qu’il faut affronter le Front national autrement que par les croisades un peu médiatiques, l'exorcisme le grand Satan que représenterait le Front national. Dans une démocratie, l'arme du débat, l'arme de la démocratie, c'est le débat, le débat des idées. Et je crois qu’il faut combattre une à une les idées du Front national, condamner fermement des propos tels que ceux que vous avez évoqués, mais généralement combattre chacune des propositions tranquillement, calmement et ne pas céder à une sorte d'hystérie anti-Front national.
MICHELE COTTA
Mais ça veut dire quoi ça ? Cela veut dire vie que vous accepteriez par exemple, éventuellement, après discussion des accords de désistement...
ALAIN MADELIN
Non, non, non...
MICHELE COTTA
... Après discussion puisque vous voulez un débat…
ALAIN MADELIN
Là aussi, j'ai répondu clairement sur ces questions, il n'y aura pas d'accord sur la table ni d'accord sous la table avec le Front national.
MICHELE COTTA
Ou bien un débat par exemple avec Jean-Marie LE PEN...
PHILIPPE REINHARD
Vous dites quoi à Jacques BLANC et à Philippe VASSEUR qui sont de votre formation ?
ALAIN MADELIN
Mais il n’y aura pas d'accord ! Il n'y aura pas d'accord avec le Front national. Cela étant, il y a des électeurs qui nous ont quittés pour aller vers le Front national. Il y a des gens qui votent encore pour nous mais qui se demandent si la prochaine fois ils ne vont pas voter pour le Front national si on ne change pas. Et moi, je n'ai pas envie de perdre définitivement ces électeurs et j'ai envie de m'adresser à eux. Et de m'adresser à eux avec les armes de la raison. Je pense que s'ils votent pour le Front national, ce n'est pas parce qu'ils pensent au fond d'eux-mêmes que le Front national à les clefs de l’avenir de la France et de leurs enfants. Ils le font pour d'autres raisons. De bonnes raisons, c'est à nous de nous corriger, de mauvaises raisons parce qu'on cède toujours aux « y a qu'a » et aux « faut qu'on » démagogiques de la politique et là, il faut combattre ces mauvaises raisons. Donc, voilà le combat très calme et très résolu dans le cadre d'un débat démocratique que j'engage contre le Front national mais mon véritable adversaire...
MICHELE COTTA
À propos de début, est-ce que...
ALAIN MADELIN
... Permettez-moi peut-être de terminer par là…
MICHELE COTTA
Non, mais je voulais vous vouliez un débat… si vous feriez un débat avec Jean-Marie LE PEN ici ?
ALAIN MADELIN
... Mon véritable adversaire, ce n'est pas le Front national, mon véritable adversaire, c'est le chômage.
MICHELE COTTA
D'accord mais Jean-Marie LE PEN, vous-même, un débat ?
ALAIN MADELIN
Je pense que ce serait un débat qui serait peut-être le jeu des petites phrases et des postures médiatiques.
MICHELE COTTA
Vous devriez, pouvoir éviter cela.
ALAIN MADELIN
Oui, eh bien, pourquoi pas mais... je préfère un débat si vous voulez d'abord avec les électeurs du Front national. C'est le sens de la tournée que j'ai entreprise avec mes amis de Démocratie libérale dans la France profonde. Beaucoup d'électeurs du Front national viennent nous voir à nos réunions, écouter ce que l’on dit...
MICHELE COTTA
Ils ne vous sentent pas si éloignés du Front national ?
ALAIN MADELIN
Non, ce n'est pas cela... c'est parce qu’ils pensent aussi à 1’avenir de leur pays et ils ont envie d'espérer et j'aimerais leur donner ces raisons d’espérer. Si je pouvais le faire avec qui que ce soit du Front national, pourquoi pas ?
MICHELE COTTA
Alain MADELIN, merci. Vous restez avec nous pour la deuxième partie de cette émission avec les éditorialistes de la presse écrite qui font l’opinion, comme on dit, tous les matins ou toutes les semaines. Alors retour en forme de bilan rétrospectif sur l’année 1997. La mort de Lady DIANA qui a bouleversé le monde entier, les massacres en Algérie qui nous bouleversent tous, le procès PAPON, la dissolution décidée par le président CHIRAC et l’arrivée pas vraiment prévue de la gauche au pouvoir, le rappel de Jean-Michel MERCUROL.