La mission interministérielle concernant les pratiques illicites dans l’adoption internationale en France a remis son rapport au gouvernement le 14 mars 2024. La mission fait état de manquements dans la protection due aux enfants qui ont pu affecter jusqu’à leur vie d’adulte.
L’essor de l’adoption internationale s’est accompagné de dérives
120 000 Français ont été adoptés à l’étranger depuis 1945. L’adoption internationale se développe rapidement à partir des années 1960. Elle est peu régulée dans les pays en développement et résulte souvent d’un arrangement direct avec les parents biologiques ou les responsables d’orphelinat validé par le juge local puis transcrit en droit français.
Selon le rapport, l’adoption devient un "marché potentiellement très lucratif" qui suscite l’émergence d’intermédiaires (versement de fortes sommes d’argent pour faciliter les opérations…) et de trafics (falsification de pièces pour rendre un enfant adoptable, "production" d’enfants pour adoption, vol d’enfants à la maternité…). Dès les années 1980, des diplomates français signalent ces dérives aux autorités, qui tardent à prendre des mesures.
Construction d’un cadre juridique et recul des adoptions
Des traités internationaux régulent la procédure au nom de l’intérêt supérieur de l’enfant :
- la Convention relative aux droits de l’enfant (1989) en fait le critère central pour l’adoption et pose les principes de consentement éclairé des parents biologiques et d’absence de bénéfice financier ;
- la Convention sur l’adoption internationale (1993) reprend ces principes en prévoyant des garanties et en définissant les responsabilités des États d’origine et d’accueil.
Les adoptions internationales baissent fortement dès 2005 à l’échelle mondiale. En France, elles passent de 4 079 en 2004 à 232 en 2022.
Le dispositif français actuel de l’adoption internationale minimise les risques. La loi du 21 février 2022 le renforce encore en interdisant les démarches individuelles d’adoption et en durcissant le contrôle des organismes intermédiaires. Une zone de risque demeure cependant : les modalités selon lesquelles l’enfant, dans son pays de naissance, est déclaré adoptable et proposé à l’adoption. Par ailleurs, de "nouveaux risques" apparaissent, notamment la gestation pour autrui et le recours à l'adoption nationale par des ressortissants français expatriés.
La recherche des origines constitue le défi majeur des années à venir, d’autant plus que de nombreux individus craignent d’avoir fait l’objet de pratiques illicites lors de leur adoption.
Lutter contre les dérives et aider les adoptés
La mission préconise notamment :
- de mettre en place un "cadre organisé et sécurisé pour la recherche des origines". Son point d’entrée pourrait être le Conseil national pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP) ;
- d’engager une réflexion sur l’usage des tests ADN interdits en France. Les associations d’adoptés souhaitent pouvoir y recourir sans tarder, du vivant de leurs parents biologiques ;
- d’instituer dans chaque pays un "interlocuteur reconnu" à même d’accompagner les adoptés.