Image principale 1
Image principale 1
© UlyssePixel - stock.adobe.com

Le Conseil constitutionnel rejette une proposition de loi relative aux prestations sociales des étrangers

Temps de lecture  3 minutes

Par : La Rédaction

Saisi d’une proposition de loi référendaire "visant à réformer l’accès aux prestations sociales des étrangers", portée par un cinquième des parlementaires, dans le cadre de la procédure du référendum d’initiative partagée (RIP), le Conseil constitutionnel a jugé inconstitutionnel l’un des articles de la proposition, écartant dès lors le texte.

Une proposition référendaire soumise au contrôle du Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel a été saisi d’une proposition de loi référendaire "visant à réformer l’accès aux prestations sociales des étrangers" via le mécanisme du référendum d’initiative partagée (RIP). À ce titre, première condition dans le cadre d'un RIP, il a constaté que la proposition soumise à son contrôle était bien soutenue par un cinquième des parlementaires.

Le texte reprend des dispositions portant sur le droit social des étrangers, écartées comme cavaliers législatifs lors de l’examen de la loi immigration (décision 2023-863 DC du 25 janvier 2024), sur lesquelles le Conseil ne s'était pas prononcé au fond.

Seconde condition posée dans le cadre du RIP : le Conseil constitutionnel a jugé que la proposition déférée à son contrôle portait bien "au sens de l’article 11 de la Constitution, sur une réforme relative à la politique sociale de la nation". Bien que le but du texte soit de limiter l'immigration, le Conseil a considéré que limiter l'accès à des prestations relevait bien de la politique sociale.

Le texte de la proposition comporte cinq articles, visant notamment à instaurer :

  • pour les étrangers non ressortissants de l’Union européenne en situation régulière, une condition de durée minimale de résidence en France ou d’affiliation à un régime obligatoire de Sécurité sociale au titre d’une activité professionnelle, afin de bénéficier de certaines prestations sociales (article 1er) ;
  • le remplacement de l’aide médicale d’État (AME) bénéficiant à certains étrangers en situation irrégulière par une "aide médicale d’urgence" plus restrictive ;
  • des conditions modifiées pour le maintien de demandeurs d’asile dans un lieu d’hébergement et pour l’évacuation de ses occupants.

Raisonnement du Conseil et portée de la décision

Dans la procédure du RIP, il suffit qu’une des dispositions de la proposition de loi soit déclarée inconstitutionnelle pour que la proposition soit totalement écartée. Le Conseil constitutionnel "juge contraire à la Constitution l’article 1er de la proposition de loi" (décision 2024-6 RIP du 11 avril 2024) en se référant au droit à la protection sociale.

"Les étrangers doivent jouir des droits à la protection sociale, dès lors qu’ils résident de manière stable et régulière sur le territoire de la République." 

Ces exigences constitutionnelles ne s’opposent pas à ce que le bénéfice des prestations dont jouissent les étrangers en situation régulière soit soumis à une condition de durée de résidence ou d’activité, mais cette durée ne saurait être telle qu’elle "prive de garanties légales ces exigences" (article 12), au titre du principe de solidarité. Le Conseil a jugé que les délais prévus par la proposition de loi étaient disproportionnés.

En définitive, la décision du 11 avril 2024 précise qu'il est possible de rendre plus restrictifs les critères d’octroi de certaines prestations sociales aux étrangers sans contrevenir aux exigences constitutionnelles de solidarité.

  • Vie publique vous explique le référendum prévu à l’article 11 de la Constitution.
  • Un référendum vise à demander directement aux citoyens de se prononcer sur un texte ou sur une question.
  • L’article 11 de la Constitution de 1958 permet d’organiser des référendums législatifs sur un projet de loi.
  • Qui décide de l’organisation d’un référendum législatif ?
  • Le président de la République porte cette décision.
  • Mais cette initiative doit reposer sur une proposition du gouvernement ou bien sur une proposition conjointe de l’Assemblée nationale et du Sénat.
  • Quels projets de loi peuvent-être soumis au référendum législatif ?
  • Le texte soumis au référendum peut porter sur :
  • L'organisation des pouvoirs publics.
  • Des réformes sur la politique économique, sociale ou environnementale et aux services publics concernés.
  • L’autorisation de ratifier un traité international.
  • En faveur de quels sujets les électeurs se sont-ils prononcés depuis 1958 ?
  • L'autodétermination en l'Algérie en 1961 et les accords d'Evian en 1962.
  • L’élection du président de la République au suffrage universel direct, également en 1962.
  • Ce référendum a fait l’objet de vifs débats car il s'agissait d'une révision constitutionnelle. Or ces révisions relèvent en principe de l'article 89 de la Constitution.
  • L'adhésion de nouveaux États à la Communauté européenne, comme cela a été le cas pour le Royaume-Uni.
  • Le statut de la Nouvelle-Calédonie en 1988.
  • Ou encore la ratification du "traité de Maastricht" sur l’Union européenne en 1992.
  • Sur quels sujets le "non" l’a-t-il emporté ?
  • Le projet de régionalisation et de réforme du Sénat en 1969, porté par le président de la République, Charles de Gaulle.
  • Le traité pour établir une Constitution européenne, rejeté en 2005.
  • L’article 11 prévoit-il d’autres formes de référendums ?
  • Le référendum d’initiative partagé, qu’on appelle le RIP, est entré en vigueur en 2015.
  • Le RIP permet à des parlementaires, députés ou sénateurs, de provoquer un référendum. 
  • Le RIP porte sur les mêmes domaines que le référendum législatif, hors ratification de traités internationaux.
  • Les parlementaires doivent pour cela obtenir le soutien de 10% du corps électoral, soit environ 4,8 millions de personnes.