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Protection des mineurs non accompagnés : des manquements dénoncés par la CNCDH

Temps de lecture  4 minutes

Par : La Rédaction

La France a été condamnée en janvier 2025 par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) pour absence de protection d'un mineur non accompagné (MNA). Plus récemment, le 12 juin 2025, la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) a dénoncé le manquement des autorités françaises à leurs obligations envers les MNA.

Dans son arrêt A.C. contre France du 16 janvier 2025, la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a condamné la France pour son absence de protection d'un jeune ressortissant guinéen. 

En France, les mineurs non accompagnés (MNA) sont pris en charge, dans le cadre de la protection de l'enfance, par l'aide sociale à l'enfance (ASE). Ce sont les conseils départementaux qui ont la responsabilité de déterminer la qualité de MNA. Celle-ci est attribuée aux personnes mineures et privées de la protection de leur famille. 

Dans un avis adopté le 12 juin 2025, la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) dénonce le manquement des autorités françaises à leurs obligations envers les MNA. Elles formule également plusieurs recommandations : publier annuellement les statistiques relatives au nombre de MNA présents en France afin de mieux les inclure dans la protection de l'enfance, appliquer une présomption de minorité, garantir un accompagnement vers l'autonomie à l'atteinte de la majorité...

La détermination de la minorité et l'accueil provisoire

En France, les jeunes revendiquant la qualité de MNA bénéficient d'une présomption de minorité, qui peut être renversée par le président du conseil départemental. Le service de l'ASE doit organiser un accueil provisoire d'urgence, le temps que l'âge du jeune soit déterminé. Le jeune requérant devant la CEDH a bénéficié de cet accueil provisoire d'urgence jusqu'à ce qu'il soit considéré comme majeur par les services départementaux. Ceux-ci ont fondé leur décision sur des suspicions d'inauthenticité des documents d'acte d'état civil, ainsi que sur une expertise osseuse et dentaire. La fiabilité des tests osseux est contestée, notamment par le Défenseur des droits et le Conseil constitutionnel (décision du 21 mars 2019). 

La minorité du requérant a finalement été constatée par une décision de justice (arrêt de la Cour d'appel de Limoges du 21 janvier 2021). Néanmoins, jusqu'à cette décision, le requérant n'a pas pu bénéficier d'une prise en charge par l'ASE, à laquelle il avait pourtant droit. Il se plaint de ses conditions de vie pendant cette période : absence de ressources, d'hébergement, de relations, de nourriture...

La violation du droit au respect de la vie privée

La CEDH condamne la France pour violation du droit au respect de la vie privée et familiale du jeune guinéen. Ce droit, garanti par l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, s'étend selon la jurisprudence de la Cour à l'âge d'une personne. Dans une décision du 21 juillet 2022, la CEDH avait déjà considéré que "la procédure d’évaluation de l’âge d’un individu se déclarant mineur ainsi que les garanties procédurales y afférentes sont essentielles pour garantir à l’intéressé tous les droits découlant de son statut de mineur." (arrêt Darboe et Camara contre Italie). 

Dans le cas d'espèce, la Cour relève l'incomplétude et l'imprécision des informations qui ont été fournies au requérant, le privant des garanties procédurales suffisantes. Elle considère que les services départementaux n'ont "pas [...] agi avec la diligence raisonnable et ont manqué à leur obligation positive de garantir le droit du requérant au respect de la vie privée". 

En revanche, la CEDH a estimé que le mineur avait bien eu accès à des recours effectifs en droit interne, en conformité avec l'article 13 de la Convention européenne des droits de l'Homme.