Déclaration de Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer, sur les objectifs du projet de loi de programmation pour les DOM et sur l'organisation des aides européennes pour le développement régional des régions ultra-périphériques, Mairie de Saint-Denis de La Réunion le 25 juillet 2002.

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Circonstance : Voyage de Mme Girardin à La Réunion du 25 au 29 juillet 2002

Texte intégral

Monsieur le Député-Maire, Cher René-Paul,
Mesdames et Messieurs les Elus,
Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi d'abord de vous dire mon bonheur et mon émotion de me trouver aujourd'hui parmi vous dans votre département que je connais bien, dans cette mairie de Saint-Denis, où j'ai, moi aussi, quelques souvenirs forts, où vous m'accueillez, avec la chaleur et la convivialité que les Réunionnais et les Réunionnaises savent si bien exprimer, et qui me vont droit au coeur.
Vous le savez, c'est ici à La Réunion, que le Président de la République a défini le contenu de son projet pour l'outre-mer.
La visite de travail que je commence aujourd'hui dans votre département a pour principal objectif de préparer la mise en oeuvre des engagements pris devant vous par le Chef de l'Etat et je tiens à être claire sur ce point : tous les engagements seront tenus et j'y mettrai toute ma volonté, mon énergie et ma détermination pour qu'ils soient tenus le plus rapidement possible.
Nous allons construire ensemble une Réunion plus forte, plus prospère et plus juste.
Je suis confiante car votre collectivité, en dépit de ses difficultés, offre l'image rayonnante du dynamisme. Grâce à votre travail et à votre créativité, votre île exporte dans le monde entier. Par la diversité et la richesse de votre culture et de votre identité, vous portez l'image d'une France ouverte et généreuse, consciente de ses valeurs universelles.
Ce résultat, vous le devez d'abord à votre capacité de mobilisation et d'engagement. Car ici, la solidarité et la concertation, au service du bien commun, ne sont pas de vains mots. Vous tous, élus, représentants socio-professionnels, simples citoyens, je veux que vous sachiez que j'aurai à coeur de soutenir et d'accompagner vos efforts.
Vous connaissez tous, est-il besoin de le rappeler, l'attachement du Président de la République aux collectivités d'outre-mer, qui a voulu, avec le Premier Ministre, qu'un ministère de plein exercice leur soit consacré.
Cela signifie que l'outre-mer est de nouveau au cur de l'organisation et de l'action gouvernementales. Cela signifie aussi que vous ne devez pas rester à l'écart du renouveau économique que le gouvernement veut imprimer au pays par la voie de réformes indispensables, trop longtemps retardées, trop longtemps négligées. Le Gouvernement s'est mis au travail sans attendre. Les Français en voient les premiers résultats : la loi de programmation sur la sécurité, le dispositif sur l'emploi des jeunes en entreprises, la loi de programmation pour la justice... Toutes ces mesures ont été bien sûr adaptées et renforcées pour répondre aux besoins de l'Outre-Mer.
Je veux, au-delà de ces mesures de portée nationale, vous apporter des réponses concrètes à vos besoins spécifiques. Et il y a aujourd'hui urgence à le faire. L'immobilisme que vous avez subi ces dernières années ou les demi-mesures n'ont fait qu'aggraver les difficultés de la Réunion et exacerber la désespérance des plus fragiles.
Vous le savez, depuis 3 mois, je travaille à l'élaboration de la loi-programme de 15 ans promise par le Président de la République.
Ce texte, dont l'ambition est de réaliser l'égalité économique avec la métropole, se prépare, comme je l'ai souhaité, dans la concertation et la transparence.
J'aurai ici des discussions avec les élus et les milieux socio-professionnels que je poursuivrai avec eux à Paris, en septembre prochain.
Ces échanges sont essentiels, car c'est dans le domaine économique et social que se joue l'avenir des Français d'outre-mer et que doivent être réaffirmées les valeurs qui fondent notre pacte républicain.
Vous connaissez les principaux volets de cette loi, à savoir la relance de la création d'emplois durables dans les entreprises, grâce à des mesures d'exonération ou d'abaissement des charges, et celle de l'investissement grâce à un nouveau système de défiscalisation. Mais pour affiner les dispositifs à mettre en place, je ne peux imaginer mon travail dans la solitude d'un bureau parisien. Je continue donc à me nourrir de vos réflexions et suggestions. C'est à mes yeux la condition indispensable pour ne pas bâtir des mesures décalées par rapport aux réalités du terrain.
Pour faire reculer l'exclusion, l'assistanat humiliant et la précarité, pour redonner espoir à notre jeunesse, dans cette bataille pour l'activité que nous mènerons ensemble, il faut faire de l'Union européenne un atout. L'article 299-2 du Traité d'Amsterdam a fait entrer dans le droit primaire communautaire le constat de la spécificité des régions ultrapériphériques, dont nos DOM constituent la majeure partie, et a posé le principe à la fois de mesures particulières pour pallier leurs handicaps et celui de l'adaptation à leur cas des politiques communes. Cet article 299-2 est le meilleur outil dont nous disposons pour faire prendre en compte à Bruxelles les intérêts à long terme de l'économie de nos DOM. Il faut donc en obtenir le plein effet. A cet égard, les conclusions du dernier Conseil européen de Séville, constituent un progrès notable. Elles intègrent, en effet, à l'initiative du Président de la République, un important passage consacré aux régions ultra-périphériques et invitent le Conseil des Ministres et la Commission " à approfondir la mise en oeuvre de l'article 299, paragraphe 2 du traité ".
Par ailleurs, pour permettre une bonne consommation des fonds européens par les collectivités d'outre-mer dans le cadre des DOCUP, j'ai, vous le savez, demandé que soit mis en place un dispositif de préfinancement des subventions européennes, avec l'appui de l'Agence française de développement. Ce dispositif vise à pallier l'insuffisance de trésorerie des collectivités et à leur permettre de produire ainsi, dans les délais imposées par la Commission européenne , les justificatifs nécessaires à la liquidation des subventions. Enfin, le gouvernement annoncera prochainement des mesures visant à améliorer le dispositif de gestion, de suivi et de contrôle des programmes cofinancés par les fonds structurels européens. Le ministère de l'Outre-Mer entend jouer un rôle majeur d'animation pour la mise en oeuvre de ces programmes dans les DOM. Mes services travailleront en étroite relation avec les Conseils régionaux et les conseils généraux, en respectant les méthodes de travail déjà utilisées lorsque, comme c'est le cas ici, elles semblent avoir fait leur preuve. L'objectif général de toutes ces mesures doit être d'assouplir les procédures.
Mais il faut aussi que la politique de cohésion régionale européenne prenne mieux en compte les investissements des entreprises, ce qui passe par l'adaptation de la définition de la PME européenne à la réalité des régions ultra-périphériques afin d'augmenter la dotation des DOCUP affectée au financement de projets du secteur privé.
Votre environnement régional est aussi important. Je sais que La Réunion souhaite participer à la reconstruction de Madagascar. C'est un témoignage de solidarité et la marque de votre sentiment d'appartenance et de votre volonté d'intégration à un ensemble régional plus vaste. Au moment où la Grande Ile panse ses plaies, je crois que grâce au fonds de coopération régionale, à ses capacité d'expertise et à ses entreprises, La Réunion est bien placée pour participer à la reconstruction malgache. Je m'en réjouis. C'est une preuve de dynamisme. Grâce à votre présence, la France est active dans l'océan Indien, trait d'union de trois grandes zones de civilisation. Il faut amplifier votre rôle régional. Je m'attache à renforcer l'action des collectivités d'outre-mer dans leur environnement direct et je veillerai à ce que dans toutes les instances de coopération régionale, la France soit représentée par ses élus d'outre-mer, comme l'a voulu le Président de la République.
Permettez-moi de conclure mon propos sur la jeunesse réunionnaise qui est votre atout principal. Le retour à l'activité par le développement économique, le soutien aux initiatives locales ne sont possibles que si nous mettons sur pied un véritable effort en matière de formation, pour donner aux jeunes Réunionnais de vraies perspectives d'emplois durables en leur évitant ainsi l'exclusion ou la précarité. Le " passeport mobilité ", élément essentiel de la continuité territoriale, engagement fort du Président de la République, sera effectif à la rentrée prochaine. Je détaillerai ce soir devant les jeunes Réunionnais ce dispositif important qui permettra la prise en charge intégrale des billets d'avion, en combinant le système des bourses universitaires et les conventions avec les organisations de formation. Nous travaillons également à la mise en oeuvre d'un système permettant d'abaisser le coût de la desserte aérienne et maritime pour les personnes et le frêt entre l'outre-mer et la métropole. C'est la clef du développement économique. Cela passe par la pluralité de l'offre en matière de compagnies aériennes, peut-être par la création d'une compagnie spécialisée sur l'outre-mer et aussi par un partenariat financier avec l'Europe, car la continuité territoriale doit être une notion européenne et pas seulement nationale.
Créer le cadre dans lequel vous travaillerez et vous évoluerez dans les 15 années qui viennent, créer l'environnement le plus favorable à votre travail, à votre créativité et à vos initiatives, restaurer la capacité d'action de la puissance publique et l'Etat de droit, rétablir un climat de confiance : telles sont les missions de l'Etat, telle est la conception que je me fais de ma mission. Ce travail ne pourra se faire évidemment sans se mettre à l'écoute de vos besoins et de vos difficultés, sans l'indispensable concertation et transparence, gage à mes yeux de la meilleure efficacité.
(Source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 31 juillet 2002)