Déclaration de M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, sur le rôle des les promoteurs immobiliers dans le cadre de la loi sur la solidarité et le renouvellement urbain, contribuant à la production de logements et à la qualité de l'aménagement urbain, Marseille, le 9 juin 2000.

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Circonstance : XXXème congrès de la Fédération nationale des promoteurs constructeurs à Marseille, le 9 juin 2000

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
C'est avec plaisir que je me retrouve parmi vous pour cette rencontre désormais traditionnelle qui nous permet de faire le point sur l'année écoulée et de dessiner les perspectives pour le futur.
Les aléas du calendrier parlementaire m'avaient empêché, il y a un an, d'être présent physiquement pour clôturer vos travaux. Je tenais donc tout particulièrement à être parmi vous aujourd'hui, d'autant que le thème que vous avez choisi comme fil conducteur, le rôle du promoteur et de la promotion immobilière dans la fabrication de la ville, est au coeur de l'actualité et s'articule parfaitement avec les réflexions du Gouvernement et avec les réformes en cours, en particulier la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
Avec ce texte, nous abordons en effet une nouvelle étape dans le programme que le Gouvernement s'était fixé, et que j'ai déjà eu l'occasion de vous présenter lors de nos rencontres précédentes.
La première phase a consisté à redéfinir les fondements d'une offre de logements qui soit à la fois :
- suffisante pour répondre aux besoins de nos concitoyens,
- équilibrée et diversifiée pour offrir une certaine liberté de choix,
- assortie de mécanismes de sécurité et de solvabilisation pour s'adapter à la mobilité croissante, et parfois la précarité, qui marquent les situations personnelles et professionnelles,
- pérenne pour offrir aux acteurs, élus, professionnels, associations, la visibilité nécessaire pour engager des projets,
- et enfin, de qualité, ce qui suppose une amélioration et une adaptation permanente du parc existant.
Je ne détaillerai pas -ce serait trop long- les mesures budgétaires, fiscales, règlementaires, contractuelles correspondant à ces différents objectifs, et je n'en dresserai pas non plus un bilan, ne serait-ce que parce que nombre d'entre elles sont en phase de montée en régime, et nous en escomptons bien dans l'avenir des résultats encore supérieurs à ceux que nous pouvons déjà enregistrer aujourd'hui.
Mais je ferai, comme vous, le constat global que, pour la deuxième année consécutive, l'immobilier et le bâtiment sont des moteurs de la croissance économique dans notre pays, avec une progression de l'ordre de 12% en 2 ans. Et réciproquement, les bonnes performances de l'économie nourrissent la confiance de nos concitoyens, cette confiance qui -vous l'avez dit- est si importante pour la bonne tenue du secteur immobilier. J'ajouterai que les mesures fiscales très importantes prises il y a quelques mois -baisse de la TVA sur les travaux dans l'ancien, baisse des droits de mutation- s'ajoutant au dispositif d'amortissement locatif que vous connaissez bien, constituent un signal important de nature à alimenter cette confiance, cet attachement à la pierre que vous évoquiez : en effet cela aboutit en pratique à inverser la tendance qui prévalait depuis des années, voire des décennies et qui faisait de l'immobilier l'un des biens les plus taxés (car sans doute facile à identifier).
Pour ce qui est de la construction de logements -c'est évidemment le point qui vous intéresse le plus directement- les indicateurs avancés incitent à un certain optimisme puisque nous nous situons toujours au-dessus du seuil symboliquement important des 300 000 logements commencés dans l'année, un seuil qui avant 1999 n'avait plus été atteint depuis près de dix ans.
La promotion immobilière devrait -selon vos propres estimations, Monsieur le Président- prendre une part significative dans ce résultat, les chiffres de commercialisation du début d'année 2000 faisant apparaître une reprise après le "trou d'air" prévisible et prévu que vous avez enregistré au 2è semestre 1999.
Les statistiques font également apparaître, pour la promotion comme pour l'ensemble de la production de logements, une tendance à l'augmentation de la taille et de la surface des logements. Il y a là les effets de l'évolution de la demande et de la solvabilité de cette demande, il y a également les effets des mécanismes fiscaux, qui ont soutenu, peut être plus que de raison, la production de petits logements jusqu'à l'an dernier et qui encouragent désormais, avec le statut du bailleur privé, les logements familiaux.
Aussi, les perspectives d'activité, mesurées en surfaces construites, voire en chiffres d'affaires sont encore plus encourageantes, M. le Président. Le statut du bailleur privé devrait poursuivre sa montée en régime au fil des mois. J'ai bien noté et je ne perds pas de vue la principale demande qui émane des professionnels et qui reste en suspens.
Je voudrais aussi vous encourager à exploiter pleinement la convention que nous avons signée le 1er septembre dernier avec le mouvement du 1% logement, l'Union d'Economie Sociale du Logement, et qui prévoit des conditions très favorables de financement de l'investissement et des garanties locatives en contrepartie de réservations pour les salariés du 1% logement. Je vous invite, comme j'invite les collecteurs du 1% logement, à développer des partenariats locaux pour pleinement profiter de cette formule.
Il me semble aussi qu'il vous appartient de renouveler et d'adapter l'offre pour dynamiser la demande, en lançant de nouvelles opérations en phase avec les attentes du marché. Là aussi, j'ai l'impression qu'il y a eu un petit trou d'air, un certain attentisme, qui est désormais derrière nous à en juger par les derniers chiffres dont je dispose.
Plusieurs paramètres déterminants de la conjoncture immobilière ont évolué ces derniers temps : la production mais aussi le niveau des prix : prix du foncier, prix des travaux, prix de vente, taux d'intérêt, pouvoir d'achat des acquéreurs, etcMais nous savons tous que la demande dans sa très grande majorité est très peu élastique aux prix . Il faudra donc bien que tout ceci se stabilise pour que s'établisse un nouveau régime d'équilibre durable du marché, ce que l'on pourrait qualifier d'"atterrissage en douceur". Je suis convaincu que vous êtes sensibilisé à cet enjeu et que vous serez vigilants à ne pas créer ou entretenir des phénomènes de bulle comme nous en avons connu il y a dix ans.
Nous suivrons bien sûr de très près l'évolution de la conjoncture, en gardant à l'esprit que les analyses comparatives doivent se baser pour être exploitables sur des références moyennes et non sur les années exceptionnelles.
M. le Président, si notre dispositif d'offre est pérenne, il est bien sûr toujours susceptible d'améliorations ponctuelles et nous y sommes attentifs. Il faudra en particulier, et nous y travaillons avec nos partenaires, moderniser ou renouveler le PPLS (ancien PLA du Crédit Foncier de France) pour en faire un véritable produit "petit intermédiaire" avec des caractéristiques de taux et de durée qui le rendent attractif.
Dans le même esprit, nous avons pris en février une mesure qui permet dorénavant d'utiliser la formule de vente en l'état futur d'achèvement (VEFA) pour réaliser des logements sociaux. Cet outil supplémentaire, va dans le sens de la diversité de l'offre, par exemple dans les villages de maisons qui commencent à se développer un peu partout.
Vous avez également évoqué, Monsieur le Président, votre souhait d'une meilleure utilisation de l'épargne-logement. C'est là un sujet, plus prospectif bien sûr, un axe éventuel pour une phase ultérieure de réformes, mais qui mérite que l'on y réfléchisse à l'avance. Car nous sommes, comme vous, conscients qu'une partie plus importante de cette épargne mériterait d'être effectivement utilisée pour le logement. C'est pourquoi je suis bien d'accord pour que nous puissions confronter nos analyses, comme vous le souhaitez.
J'en viens maintenant, Monsieur le Président, à ce que je qualifiais tout à l'heure de deuxième phase de notre programme, avec la loi SRU qui a été au cur de vos travaux.
Quels sont nos objectifs avec cette loi ? En premier lieu, il s'agit de concrétiser sur le terrain, à l'échelle de l'agglomération, de la commune, du quartier, cette offre de logement diversifiée et équilibrée que nous avons mise en place à l'échelle nationale, à l'échelle macro-économique. Il s'agit d'articuler des politiques locales de l'habitat équilibrées avec des politiques d'urbanisme enrichies, avec des politiques de déplacement renouvelées, avec des politiques de développement commercial maîtrisées, l'ensemble devant être mis en cohérence à l'échelle pertinente qui est celle de l'agglomération. A cet égard, le développement actuel de l'intercommunalité, l'émergence politique des agglomérations et des pays, est un facteur favorable et la loi SRU vient compléter ou tirer parti, sur certains aspects, des lois Chevènement et Voynet qui ont permis des avancées certaines.
Il s'agit enfin pour nous de définir les nouveaux outils et les nouvelles démarches pour accompagner ces évolutions et en particulier renouveler les outils de l'urbanisme des prochaines décennies, les outils de la reconstruction de la ville sur elle-même, du renouvellement urbain, de la même manière que la loi d'orientation foncière de 1967 avait fondé les outils de l'extension urbaine.
Notre démarche n'est pas guidée par un quelconque souci d'uniformité, comme on a pu l'entendre ici ou là, exprimé d'ailleurs de manière parfois caricaturale. Elle vise à préserver la cohésion sociale derrière le tissu urbain, à faire en sorte que nos villes continuent à être, comme elles l'ont été depuis le Moyen-Age, le creuset de la solidarité, de l'échange, du vivre-ensemble, de la citoyenneté, et non la juxtaposition de communautés ou de fragments de territoire repliés sur eux-mêmes.
Il me semblait utile, M. le Président, Mesdames et Messieurs, de vous fournir ces quelques éléments d'éclairage sur la loi SRU, dont le contenu, qui est d'ailleurs susceptible de quelques évolutions puisqu'une prochaine lecture est prévue à l'Assemblée Nationale à partir du 27 juin, vous a été présenté ce matin par Patrick RIMBERT et Pierre-René LEMAS. Là encore, je n'entrerai donc pas dans le détail mais je voudrais rebondir sur quelques aspects qui vous intéressent directement.
- Les champs d'intervention des différentes familles d'opérateurs en premier lieu. Qui dit mixité sociale dit également mixité des opérations et, dans une certaine mesure, mixité des opérateurs.
Depuis la disparition du PAP, l'activité des organismes d'HLM en matière d'accession à la propriété n'était plus encadrée, il y avait un vide juridique et pas mal d'errements. Qui plus est la possibilité existait que les aléas d'opérations d'accession, donc à risques, comme vous le rappeliez, viennent peser sur les moyens destinés au logement locatif social. La loi SRU crée un encadrement de cette activité d'accession sociale que certains organismes HLM pratiquent depuis longtemps. Elle sera donc reconnue, mais à titre complémentaire de l'activité locative, et là où l'offre privée est insuffisante, dans un souci de mixité sociale.
Bien entendu le même objectif de mixité sociale, de diversité de l'offre, peut et doit recevoir des réponses de la part du secteur privé, qu'il s'agisse des promoteurs ou des constructeurs de maisons individuelles.
Pour ce qui est de l'urbanisme, il est exact que le Sénat a fortement retravaillé et amendé le texte issu de l'Assemblée Nationale, et pas uniquement sur la question des recours. Le Gouvernement a indiqué à chaque fois sa position, au cours du débat, il n'y a donc pas de surprise, et je préfère vous tenir un langage de vérité. On ne peut porter atteinte de manière excessive au droit de recours qui a valeur constitutionnelle. Notre avis est donc différent selon les mesures. Si certaines, comme l'évocation de tous les moyens dans les arrêts des tribunaux administratifs, nous semblent sources de progrès indiscutables pour tous les citoyens, d'autres nous paraissent en l'état peu efficaces ou excessives.
L'un de nos objectifs est que la concertation -c'était le thème d'une de vos tables rondes- se développe et s'enrichisse notamment sur le contenu du projet urbain et du projet de développement qui sous-tend le PLU, le plan local d'urbanisme. Cela devrait réduire à la fois les contentieux de pure forme et les contentieux qui résultent de malentendus.
Je voudrais enfin bien préciser notre position sur le débat logement collectif/logement individuel. Il n'est bien sûr pas question de s'opposer aux aspirations de nos concitoyens qui souhaitent vivre en maison individuelle. Mais nous devons veiller à ce que ces secteurs d'habitat individuel puissent par la qualité de leur aménagement, constituer de véritables quartiers vivants et pourquoi pas rappeler l'ambiance de nos bourgs et de nos villages d'autrefois. Faute de quoi nous y connaîtrons dans quelques années ou quelques décennies des situations de déshérence et de dévalorisation comme nous en connaissons aujourd'hui dans certains grands ensembles construits trop vite il y a quarante ans. Ensuite, il faut que l'habitat collectif conserve ou retrouve une certaine attractivité pour éviter que l'individuel ne soit une option par défaut ou par dépit. C'est une question de liberté de choix. Mais pour cela, il faut que le choix existe réellement. Et nous avons donc besoin d'un habitat collectif, d'une architecture facilitant la cohabitation, le vivre-ensemble, adapté aux nouvelles attentes et aux nouveaux modes de vie.
Les professionnels que vous êtes ont évidemment un rôle éminent à jouer et je me réjouis que vous ayez abordé ces questions dans vos débats. J'ai eu l'occasion ces derniers mois de m'intéresser à deux opérations de promotion tout à fait remarquables : l'une est un village de maisons, près de Toulouse, l'autre un immeuble à l'architecture innovante près de Montpellier. Ce qui est intéressant, dans ces exemples, c'est la démarche qui a consisté à remettre en question les habitudes, et qui a été validée par le marché.
Je ne puis qu'encourager votre profession à aller dans ce sens, à avoir une approche de qualité et d'innovation, confrontée bien sûr en permanence au marché, c'est à dire aux attentes de nos concitoyens. Mais en la matière, les goûts sont beaucoup moins conformistes qu'on ne le croit si on présente des projets de qualité.
M. le Président, Mesdames et Messieurs, nous avons encore bien du travail en commun devant nous, même si bien des choses ont déjà été faites, et nous pourrions citer des dossiers comme l'agrément pour les locaux d'activité en Ile de France, qui a été allégé et simplifié, en particulier en supprimant l'agrément utilisateur, tout en conservant sa vocation qui est de veiller aux équilibres habitat-emploi sur l'agglomération parisienne. Nous pourrions citer également la loi sur l'archéologie préventive, qui vous inquiétait encore beaucoup il y a quelques mois, et qui a bien évolué à l'occasion de son examen par le Parlement. Avec des procédures et barèmes de redevance désormais bien encadrés, et qui tiennent largement compte de la spécificité du logement, il me semble que les professionnels de la construction et de l'aménagement disposeront à l'avenir d'un cadre plus clair d'action et de dialogue avec les responsables du patrimoine archéologique.
Je suis convaincu, Monsieur le Président, que nous pourrons de même avancer sur d'autres questions en suspens, que nous évoquons lors de nos rencontres régulières. Permettez-moi de saluer la qualité et la loyauté, et aussi l'efficacité, des relations de travail que nous entretenons avec vous et votre équipe depuis un an, dans la continuité du travail mené avec le Président DIAZ.
Car fondamentalement et ce sera ma conclusion, nous partageons les mêmes objectifs : soutenir et développer la production de logements, parce que cela répond à des besoins essentiels de nos concitoyens ; contribuer à l'attractivité, à la qualité de nos villes, de nos cités. Vous êtes des acteurs majeurs du développement et du renouvellement urbains avec plusieurs dizaines de milliers de logements réalisés chaque année. C'est donc pour vous une responsabilité citoyenne -au sens d'acteur de la cité- en même temps que la garantie d'une activité soutenue pour de longues années encore.
Nous souhaitons donc votre réussite, et nous vous soutenons et soutiendrons pour cela, d'autant plus que, quelque part, nous la partagerons, moralement, avec vous.
Plein succès à la FNPC et aux promoteurs dans la ville !
Merci de votre attention.
Merci de votre attention.

(source http://www.logement.gouv.fr, le 21 juin 2000)