Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,
Au lendemain d'une importante conférence de coopération régionale où Mayotte a pris toute sa place comme porte-parole de la France dans l'océan Indien, j'ai souhaité revenir dans votre archipel pour faire le point avec vous sur les actions déterminées que nous menons en faveur de l'épanouissement de votre collectivité dans la République. Les enjeux sont considérables. Nous devons agir vite. Nous avons l'obligation de réussir.
Grâce à l'appui du Président de la République et du Premier ministre, Mayotte est enfin sortie de l'incertitude constitutionnelle. Malgré une volonté clairement réitérée par sa population de maintien dans la République et d'attachement à la Nation, l'appartenance définitive de Mayotte à la République ne pouvait être consacrée par une simple loi, même renforcée par une consultation populaire sur son statut de collectivité départementale. Il était donc temps de lever définitivement une ambiguïté pesante, laissant croire que le vote des électeurs de Mayotte pouvait se voir opposer d'autres valeurs, une autre légitimité qui ouvrirait la porte à un éloignement de la France.
C'est donc l'honneur de ce Gouvernement, et du Parlement de la République, d'avoir mentionné explicitement Mayotte dans l'article 72-3 de la Constitution, au même titre que l'ensemble des autres collectivités françaises d'outre-mer. La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 ancre donc définitivement Mayotte dans la République dont l'unité et l'indivisibilité excluent tout séparatisme ou tout affaiblissement du lien avec les valeurs qui la fondent, sauf à modifier le texte de la Constitution, norme suprême de l'ordonnancement juridique français.
La démarche engagée pour que Mayotte soit prise en compte dans la future Constitution européenne comme région ultrapériphérique conforte également, sur le plan international, la révision aboutie de la Constitution française. C'est pour l'outre-mer français un des points forts de la négociation en cours, au sein de la conférence intergouvernementale, ce statut de RUP pour Mayotte étant défendu avec une grande détermination par le Président de la République lui-même.
C'est donc dans un cadre constitutionnel enfin sécurisé que Mayotte peut aujourd'hui aborder l'étape du transfert de l'exécutif de la collectivité départementale au président du Conseil général. Cette étape essentielle doit prendre effet " à compter du renouvellement du Conseil général en 2004 ", soit le 1er avril de cette année, conformément à la loi du 11 juillet 2001. Ainsi, Mayotte deviendra une collectivité départementale décentralisée, s'administrant librement par un conseil général élu en application de l'article 72 de la Constitution. L'assimilation de Mayotte au modèle départemental métropolitain se poursuivra puisqu'à compter du renouvellement du conseil général de 2007, les actes de la collectivité seront soumis strictement au même régime juridique que celui défini par le code général des collectivités locales pour les départements métropolitains. Je suis satisfaite de constater aujourd'hui que, grâce au travail de préparation et de formation des élus, grâce à la mise en place de la direction générale des services du conseil général dès juillet 2003 et grâce à une minutieuse et fructueuse collaboration entre la préfecture et vos collaborateurs, Monsieur le Président, cette étape institutionnelle cruciale va se dérouler dans les meilleures conditions de continuité et d'efficacité, comme je l'avais souhaité lors de ma visite de septembre 2002.
Dans cette démarche vers l'identité institutionnelle, l'Etat accompagne la collectivité départementale. Entre 2001 et 2003, les transferts de l'Etat vers Mayotte se sont accrus considérablement passant de 243 M en 2001 à 337 M en 2004.
La convention de développement pour Mayotte constitue une étape supplémentaire et essentielle. Conclue le 12 décembre 2002 pour une durée de cinq ans, elle connaîtra son plein essor en 2004. Elle représente un engagement de 115 M, dont l'Etat assume à lui seul 104 M. C'est un effort sans précédent qui est ainsi consenti par la Nation afin de doter Mayotte d'un outil de développement qui lui permettra de rattraper ses retards par rapport au reste de la communauté nationale. Les secteurs de l'artisanat, de l'agriculture à travers ses différentes filières, de la formation et de l'éducation, de l'environnement quotidien grâce au développement des équipements en matière d'assainissement et d'eau potable, des transports sans lesquels ne sera pas améliorée la desserte de Mayotte, bénéficieront pleinement de la solidarité de l'Etat à travers cette convention qui s'ajoute aux programmes correspondant aux politiques traditionnelles.
Dans ce cadre, la mise en place d'une desserte aérienne directe de Mayotte vers l'Europe est indispensable.
Je voudrais souligner que l'étude du schéma directeur de développement de l'aéroport de Mayotte a été menée dans les délais prévus grâce à un financement de 200 000 assuré par le ministère de l'Outre-Mer.
Cette étude privilégie la création d'une piste convergente de 2 600m capable d'accueillir des avions gros porteurs assurant la desserte de Mayotte au départ de Paris en 9 heures au lieu des 14 heures que nécessitent actuellement le passage par la Réunion. Je me félicite du travail accompli en moins de 6 mois.
Ce schéma directeur devrait être prochainement validé par le ministre des Transports. Dès cette étape franchie, des études plus détaillées pourront être engagées afin d'aboutir à un avant projet. Je serai extrêmement vigilante sur l'avancement de ce dossier, prioritaire pour le développement de Mayotte.
Regardons toutefois la réalité en face. Aussi bien tous les efforts financiers que la démarche institutionnelle engagée au bénéfice de Mayotte seront vains si la pression migratoire illégale à laquelle est soumise votre île n'est pas maîtrisée. Dans une récente publication de décembre 2003, l'INSEE vient de livrer une analyse détaillée des résultats du recensement du 30 juillet 2002. Mayotte compte 160 265 habitants. A cette même date, l'INSEE recense 55 000 étrangers vivant à Mayotte, alors que le nombre de titres de séjour réguliers n'est que de 10 000. Ces chiffres illustrent parfaitement le défi collectif que représente l'immigration irrégulière en provenance des îles voisines. De ce fait, les efforts consentis pour développer les équipements publics et les services publics sont gravement compromis.
C'est vrai en particulier à l'école, qui doit chaque année accueillir un nombre toujours plus élevé de jeunes enfants. Les projections démontrent ainsi qu'il faut construire chaque année plus de 100 classes. Il résulte notamment de cette pression démographique un niveau scolaire faible. 15 % seulement d'une génération obtient le baccalauréat. Dans de telles conditions, les chances d'insertion dans le monde du travail se trouvent réduites. Mayotte compte plus de 13 000 demandeurs d'emplois et un taux de chômage qui avoisine 29 % de la population active.
Dans le secteur de l'économie marchande, l'immigration clandestine est en outre une incitation forte à la fraude. La loi de programme pour l'outre-mer, promulguée le 21 juillet 2003, étend à Mayotte le titre de travail simplifié, les incitations à l'embauche et l'organisation du marché du travail grâce à l'implantation de l'ANPE. Les décrets d'application de la loi de programme sont prêts et seront publiés dans les prochains jours. D'ores et déjà, je constate que l'ANT a ouvert une antenne en janvier 2004 avec deux personnes. L'ANPE détachera à compter de février 2004 un agent au sein de la Direction du Travail, de l'Emploi et de la Formation Professionnelle, actuellement chargée des missions dévolues à l'agence en métropole. Dès 2005, une antenne autonome de l'ANPE sera en place. Pour l'Association pour la Formation Permanente (AFPA), son implantation à Sada est désormais programmée : l'arrêté de Déclaration d'Utilité Publique pourrait intervenir début avril et les travaux commencer en octobre 2004.
Ces améliorations essentielles justifient une attitude de très grande fermeté à l'égard de ceux qui emploient une main-d'uvre étrangère en situation irrégulière. Ces agissements illégaux sont réprimés par des peines d'emprisonnement et d'amendes pénales, comme d'amendes administratives d'un montant qui peut atteindre jusqu'à cent fois le taux horaire du SMIG. A ma demande, ces procédures ont été réactivées à Mayotte. Elles ont déjà donné lieu à quatre relevés d'infractions au cours du seul mois de décembre 2003. Car Il n'est pas acceptable que face au défi de l'immigration illégale qui contrecarre le projet collectif de Mayotte, certains employeurs continuent à recourir à une main-d'uvre clandestine.
Pour autant, il est nécessaire de tenir compte des réalités afin de réduire l'économie informelle. Par exemple, les services de l'Etat s'attachent à moraliser progressivement le secteur de la pêche, ce qui donnera aux intéressés un emploi stable, rémunéré de façon légale avec un titre de séjour. Les procédures normales seront utilisées, avec le concours du consulat de Moroni.
L'immigration clandestine est aussi un facteur de déstabilisation et de perte des valeurs qui fondent la vie collective au sein de la République française. L'Etat de droit n'est pas conciliable avec des pratiques indignes, où se conjugue l'absence de respect de la personne humaine et des règles de droit. Dans le même temps, la pratique traditionnelle à Mayotte d'un islam modéré ne doit pas être remise en cause à l'instigation de personnes extérieures à la communauté nationale.
Face au défi que représente l'immigration clandestine, le Gouvernement auquel j'appartiens a, dès sa prise de fonction, arrêté un plan pluriannuel qui est en voie de réalisation. Jamais, jusqu'alors, un effort aussi important n'a été consenti par l'ensemble des services de l'Etat pour Mayotte. La période antérieure s'était caractérisée par une mobilisation timide des autorités, alliant une sous estimation des problèmes à une réponse très insuffisante. Le " plan Mayotte " arrêté le 6 septembre 2002 représente une approche globale et déterminée. Ce plan s'appuie d'abord sur un principe. Les articles 52 et 53 de la loi de sécurité intérieure étendent à Mayotte les textes de 1995 et 2001 au terme desquels " la sécurité est un droit dû par l'Etat sur l'ensemble du territoire de la République ". La sécurité inclut bien évidemment la lutte contre les agissements illégaux dont relève l'immigration clandestine.
Je souhaite aujourd'hui, avec vous, faire le bilan d'étape de réalisation du " plan Mayotte ", dont les moyens renforcés de lutte contre l'immigration clandestine se déploient sur terre et sur mer, en même temps que le cadre juridique est progressivement adapté aux besoins.
Lorsqu'en 2002 nous avons fait le bilan de l'existant, il est apparu rapidement une coordination insuffisante des services en même temps qu'une faiblesse des moyens matériels et humains.
En premier lieu, il était indispensable, sous l'autorité du préfet, de mieux coordonner les moyens d'action de l'Etat autour d'un service référent en matière de lutte contre l'immigration clandestine. Cette mission a logiquement été dévolue à la police aux frontières (PAF). Pour que ce service puisse remplir correctement sa mission, il était indispensable de conforter ses effectifs. Un renfort de 30 fonctionnaires a été prévu. 15 d'entre eux ont d'ores et déjà rejoint Mayotte en 2003 et 15 autres y seront affectés en 2004. Au total, ce service qui comptait 58 fonctionnaires début 2002 a déjà atteint le nombre de 72 policiers en 2003 et verra ses effectifs portés à 87 hommes en 2004. Ce qui représente un accroissement de plus de 51 % en deux ans.
Le nombre des officiers de police judiciaire au sein des services de la PAF est passé de 3 à 9 personnes aujourd'hui. Ce point est important, car l'affectation de ces fonctionnaires spécialisés en procédure pénale démontre une double volonté de l'Etat : accroître d'une part les procédures de reconduite et de relevé des infractions à la législation sur les étrangers, et d'autre part veiller à ce que ces procédures soient menées dans le strict respect du droit.
Il était également indispensable que la PAF puisse exercer ses fonctions dans des conditions techniques optimales. Jusqu'à une date récente, ce service était doté de moyens de communication susceptibles d'être écoutés, notamment par les éventuels passeurs. L'un des points importants du plan Mayotte était d'équiper la PAF de moyens radio cryptés. C'est effectif depuis octobre 2003.
L'effort consenti devait aussi porter sur les moyens immobiliers. Le centre de rétention administrative (CRA) n'était visiblement pas la priorité du gouvernement précédent, traduisant ainsi la faible attention donnée à la lutte contre l'immigration clandestine.
J'ai signé, avant mon départ, l'arrêté organisant précisément le fonctionnement du centre de rétention administrative de Pamandzi (CRA). Cet arrêté a été publié au Journal officiel du 22 janvier 2004.
Cet acte n'est pas que formel. Il donne un cadre juridique à l'important projet d'extension du CRA pour un montant de 1,1 M. Ces travaux permettront de créer 60 places supplémentaires, de réaménager les locaux administratifs de la PAF et d'adjoindre 10 places en zone d'attente des passagers en instance (ZAPI). Ils seront réalisés en 2004. Je rappelle, qu'en 2003, le nombre de personnes placées en rétention au CRA de Mayotte s'est élevé à 6 446, soit un nombre similaire à celui d'un CRA de la région parisienne. L'attention portée aux conditions de retour des étrangers illégalement entrés en France démontre la volonté du gouvernement de continuer à uvrer dans le respect de la dignité des personnes et des droits de l'homme, mais sans concession sur le respect de la souveraineté nationale. Je rends ici hommage à l'ensemble des forces de police et de gendarmerie qui accomplissent dans le plus strict respect de la légalité républicaine une tâche complexe et délicate.
Car la Gendarmerie Nationale contribue également à la lutte contre l'immigration clandestine et la délinquance. Les 90 sous-officiers de gendarmerie affectés à Mayotte, reçoivent le concours dorénavant permanent de deux pelotons de gendarmerie mobile. 45 hommes, détachés des escadrons de l'océan Indien, assument des missions de sécurité et de lutte contre l'immigration sous l'autorité du commandement de la gendarmerie de Mayotte. Compte tenu de l'importance des effectifs, de l'ampleur des missions dévolues à la gendarmerie, de l'éloignement géographique par rapport à la Réunion, j'ai souhaité dès ma prise de fonctions que Mayotte devienne un groupement de gendarmerie autonome, indépendant de la Réunion.
Je suis en mesure de vous informer que le groupement de gendarmerie de Mayotte sera créé le 1er mars 2004.
D'autre part, il a été décidé qu'à l'échéance de la Loi d'Orientation Pour la Sécurité Intérieure (LOPSI), soit en 2007, le groupement de gendarmerie de Mayotte comptera 150 gendarmes. Un peloton spécialisé d'intervention de la gendarmerie (PSIG) sera créé.
Je tiens aussi à rappeler que le groupe d'intervention Mayotte (GIM), forme locale du GIR métropolitain, a été mis en place en juin 2002. Il est administrativement rattaché à la brigade de recherche de la gendarmerie de Mayotte. Le GIM permet de compléter la lutte quotidienne contre l'immigration, par des actions coordonnées de démantèlement des réseaux, de lutte contre les trafics de documents. En outre, le GIM a en charge le développement d'une coopération judiciaire et policière avec les Comores. Cette action est maintenant confortée par l'affectation d'un attaché de sécurité issu des rangs de la gendarmerie auprès de l'ambassade de France à Moroni depuis le 1er janvier 2004.
Au côté de la gendarmerie et de la PAF, la direction de la sécurité publique contribue aussi activement aux missions de sécurité. Depuis de nombreuses années, 149 agents mahorais apportent un concours réel à ces missions d'Etat. 119 sont affectés à la direction de la sécurité publique et 30 à la police aux frontières. Il n'était pas normal que ces policiers restent en dehors des cadres de la Police Nationale, puisqu'ils remplissent des fonctions exclusivement régaliennes. Le principe de leur intégration dans les cadres de la Police Nationale a été adopté dès l'été 2002 par la loi d'orientation pour la sécurité intérieure (LOPSI). L'article 137 de la loi de sécurité intérieure du 18 mars 2003 a prévu l'intégration des agents de la collectivité départementale de Mayotte dans les corps de la Police Nationale correspondant aux fonctions qu'ils exercent. Le projet de décret élaboré par le ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, qui est parvenu à mes services fin décembre 2003, prendra effet au plus tard le 1er août 2004.
Cette intégration est un acte de reconnaissance à l'égard des personnels concernés mais aussi un acte de confiance de l'Etat. Les bénéficiaires doivent être conscients du fait que leur intégration dans la Police Nationale leur donne de nouveaux droits, notamment en terme de formation pour leur permettre d'exercer pleinement les pouvoirs judiciaires qui leur sont de ce fait reconnus. Mais c'est aussi pour eux l'adhésion à de nouvelles obligations qui résultent du statut particulier de la Police Nationale dans la fonction publique de l'Etat. L'obligation de disponibilité sept jours sur sept s'accompagne de l'absence du droit de grève. La règle du non-cumul avec un autre emploi devra être strictement respectée. De même les principes déontologiques de la Police Nationale s'imposeront à chacun d'entre eux et tout manquement exposera son auteur à des sanctions disciplinaires.
La construction d'un nouveau commissariat de police représente également un signe fort, en même temps qu'un engagement financier élevé de 2 M. Ce projet est aujourd'hui concrètement en cours de réalisation, je viens de m'en assurer moi-même. Afin d'affirmer l'importance que l'Etat donne à ce dossier, le préfet a mis en place dès septembre 2002 un comité de suivi pluridisciplinaire qui réunit les différents intervenants. Le chantier a effectivement débuté le 1er octobre 2002. L'année 2004 verra donc les services de police s'installer dans des locaux fonctionnels et adaptés à leur besoin.
Cet effort exceptionnel pour doter les services de sécurité des moyens de fonctionner et surtout d'assumer leur mission à terre, s'accompagne d'une volonté claire d'assurer une réelle police de l'Etat en mer. Ce point est essentiel. Il constitue le deuxième volet du " plan Mayotte ".
Une meilleure coordination des actions en mer est assurée grâce au pôle mer, qui réunit toutes les semaines les responsables des différents services autour du préfet ou de son représentant.
D'autre part, pour être pleinement efficace la présence des navires de l'Etat dans le lagon et en mer doit s'appuyer sur des moyens de détection efficaces et discrets. Le radar mobile dont était doté Mayotte s'est révélé non seulement techniquement insuffisant, mais surtout très contreproductif. Il suffisait que le véhicule de détection quitte les locaux administratifs pour que l'ensemble des candidats à l'immigration clandestine, et surtout les passeurs, s'abstiennent de tout mouvement.
Il a donc été nécessaire de réévaluer l'ensemble du dispositif permettant de détecter les embarcations clandestines entre Anjouan et Mayotte. Ma collègue, ministre de la Défense, que j'avais saisie de ce dossier a bien voulu m'accorder le concours des services placés sous son autorité. A la suite d'une première mission d'évaluation à Mayotte de son Etat-major, la Marine Nationale assurera le préfinancement des matériels et infrastructures nécessaires qui lui seront remboursés par le ministère de l'Outre-Mer à hauteur de 2 M.
A ce jour, je suis en mesure de vous informer qu'une station de surveillance maritime composée de deux radars sera implantée à Mayotte. Ces radars permettront de détecter tous les mouvements de navire, y compris ceux que leur taille mettait jusqu'à présent à l'abri d'un repérage par les moyens existant à terre.
J'ajoute que d'ores et déjà des moyens de surveillance venus notamment de la Réunion patrouillent dans la zone. J'ai rencontré personnellement l'Amiral Chef d'Etat-major de la Marine . Nous sommes convenus d'une intensification des passages de bâtiments. Au cours du dernier semestre de 2003, c'est 105 jours de mer que les bâtiments de la Marine Nationale ont assuré aux abords de Mayotte. A partir de mars 2004, une vedette de la Marine Nationale, le BELLIS, sera définitivement affectée à Mayotte. Il complétera le dispositif actuel de la Marine Nationale constitué de deux vedettes qui ont assuré 67 sorties en 2003.
Aujourd'hui, outre les moyens de la Marine Nationale, deux autres vedettes sont en service. Les services des douanes sont dotés depuis octobre 2003 d'une vedette rapide. De même la PAF dispose d'une vedette qui a effectué 88 sorties en 2003 et 21 interceptions, permettant d'interpeller 38 passeurs et 401 immigrés clandestins.
La PAF recevra au deuxième semestre 2004 deux vedettes rapides, capables d'embarquer 25 personnes. L'achat de ces vedettes a été prévu dans le cadre du plan arrêté en septembre 2002. Le délai de mise en uvre de ce projet est lié à des difficultés de procédure de passation des marchés que l'ensemble des services concernés se sont attachés à résoudre.
Enfin une brigade nautique de la Gendarmerie Nationale sera créée le 1er mars 2004 et sera dotée d'une vedette rapide supplémentaire avant la fin de l'année.
L'année 2004 sera donc marquée par une présence très active des services de sécurité en mer. Outre la Marine Nationale, dont la présence sera affirmée, c'est cinq vedettes, contre deux aujourd'hui qui permettront de lutter contre l'immigration clandestine par voie maritime.
Des opérations coordonnées d'une ampleur jusqu'alors inégalée pourront être organisées et mieux orientées par des moyens de détection renforcés et modernisés.
D'ores et déjà, les efforts consentis se concrétisent dans les faits. Les chiffres de l'année 2003 démontrent l'action très déterminée et efficace des services de police et gendarmerie dans la lutte contre l'immigration clandestine.
d'une année sur l'autre, les reconduites à la frontière ont augmenté de 56 %, passant de 3 743 en 2001, à 3 995 en 2002 et à 6 241 en 2003. Elles ont donc presque doublé en moins de 2 ans. Ceci traduit la réalité de la pression migratoire, mais aussi et surtout l'action déterminée menée par les services de police et de gendarmerie.
le nombre de passeurs arrêtés et écroués sur décision de justice s'est accru de 150 % en 2003, passant de 16 en 2002 à 40 en 2003. De même le nombre de barques interceptées a augmenté de 200 %, passant de 7 à 21 en 2003. Les destructions sur décision de justice ont concerné 13 bateaux en 2003 contre 9 en 2002.
Ces données statistiques démontrent la contribution essentielle des autorités judiciaires à la lutte contre l'immigration clandestine mais aussi contre la délinquance générale à Mayotte. La présence des forces de sécurité, leur visibilité, leur action se traduisent d'ores et déjà concrètement dans les chiffres de la délinquance. Le nombre des faits constatés au titre de la délinquance générale a diminué de 7,12 % en 2003 par rapport à 2002 (hors infractions à la législation sur les étrangers) tandis que le chiffre de la délinquance de voie publique baisse très significativement de 15,64 %.
La maison d'arrêt de MAJICAVO compte actuellement 191 détenus. Cet établissement pénitentiaire construit il y a dix ans ne répond déjà plus aux besoins.
L'extension des capacités d'accueil de même que la création d'un quartier des mineurs sont devenus une priorité. Le gouvernement entend redonner au Parquet les moyens d'une politique pénale adaptée aux enjeux.
Comme vous pouvez le constater, les résultats obtenus par ce Gouvernement dans la lutte contre l'immigration clandestine et l'insécurité sont encourageants. Pour autant, ils s'amélioreront très certainement encore avec l'achèvement en 2004 du plan engagé en septembre 2002.
En moins de deux ans, l'Etat, grâce à un effort financier et humain sans précédent, se donne les moyens de réaffirmer son autorité et de répondre ainsi à l'attente légitime de chaque citoyen. La sécurité publique, le respect des règles de droit qui régissent le séjour des étrangers sur le territoire national sont des impératifs que l'Etat doit faire respecter.
J'ai bien conscience que le dispositif juridique, qui permet aux services de l'Etat d'agir, doit être en permanence complété et amélioré.
L'article 95 de la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France a habilité le Gouvernement à étendre par ordonnance à Mayotte les dispositions de cette loi. Ce texte est en préparation dans mes services. Il permettra de renforcer les moyens juridiques de lutte contre l'immigration clandestine. Les attestations d'accueil d'un étranger devront être justifiées et validées par le Maire de la commune, la durée de la rétention administrative sera portée de 10 à 32 jours, les sanctions pénales à l'égard des passeurs seront renforcées et pourront atteindre 10 ans d'emprisonnement et 750 000 d'amende. Compte tenu de l'importance de ce dossier, j'ai demandé que le projet d'ordonnance soit soumis pour avis à votre assemblée avant la fin du mois de février.
De même les employeurs de travailleurs clandestins seront plus durement sanctionnés puisque leurs biens meuble et immeubles pourront être confisqués.
Pour les étrangers, la délivrance de la première carte de résident sera subordonnée à la preuve de leur intégration dans la société française, appréciée en particulier au regard de leur connaissance de la langue française et des principes qui régissent la République.
Au-delà même de l'extension et de l'adaptation des textes existants, j'ai demandé à mes services d'étudier les dispositions juridiques qu'il conviendrait d'adopter pour limiter les facteurs d'attractivité de Mayotte. D'une part, il convient de veiller à ce que les conditions d'accès à la nationalité française ne soient pas frauduleusement utilisées. D'autre part, il convient de s'orienter vers une remise en cause de la gratuité des soins à l'égard des étrangers en situation irrégulière. Je souhaite, pour ma part, que le projet d'ordonnance sur l'organisation sanitaire à Mayotte, qui sera bientôt soumis à votre assemblée pour avis, prenne en compte cette exigence. Mais au-delà de toutes ces dispositions, je m'interroge sur la nécessité de prendre à l'égard de Mayotte, et à titre temporaire, des mesures de nature législatives renforçant encore les moyens juridiques de lutte contre l'immigration clandestine et adaptées à la situation exceptionnelle que connaît votre île. Une réflexion s'impose sur ce point.
Le Gouvernement a pris des orientations claires pour accompagner l'évolution de Mayotte. La récente réunion les 8 et 9 septembre 2003 du comité de suivi de l'accord du 27 janvier 2000 conclu entre l'Etat et les élus de Mayotte a démontré l'importance des mesures prises ou engagées dans le domaine institutionnel ou social notamment.
J'avais pris l'engagement de faire avec vous un nouveau bilan six mois après. Toutefois, la proximité des échéances électorales, de même que la priorité qu'il convient de donner à la lutte contre l'immigration clandestine m'ont amené à effectuer le présent déplacement sans attendre.
En tout état de cause, l'obligation de réunir chaque année le comité de suivi prévu par l'accord du 27 janvier 2000 sera bien entendu respectée en 2004.
Car au-delà des chiffres, au-delà des intentions et des moyens mis en uvre, qui parfois sont différés par des procédures qui prennent du retard ou par divers aléas, je souhaite dans cet hémicycle redire à tous les Mahorais que la volonté de ce Gouvernement de pleinement intégrer Mayotte dans la République ne souffre aucune hésitation ni faiblesse. C'est précisément parce que nous ne voulons pas que le fléau de l'immigration clandestine en vienne à priver les Mahorais de leur choix librement et démocratiquement exprimé à plusieurs reprises d'être pleinement Français, que nous manifestons une détermination sans faille. Cette détermination, parce qu'elle est l'expression de la légalité républicaine, est légitime ; parce qu'elle se traduit par une action respectant scrupuleusement les droits des personnes, elle est humaine, empreinte de dignité et incontestable. Ce sont les complicités, les filières, l'exploitation par des employeurs peu scrupuleux que nous sommes décidés à traquer. Nous remettrons les coupables à la justice, car nous voulons faire cesser ce cercle vicieux qui serait en train de réduire à néant l'avenir des jeunes Mahorais si l'on ne réagissait pas vigoureusement.
Cette action est complétée par les initiatives prises en matière de coopération régionale par ce gouvernement : nous venons d'en faire le bilan à Saint-Denis de la Réunion, le fonds de coopération régionale de Mayotte, installé en octobre 2003 a pu engager dans des délais rapprochés près de 400 000 de projets qui sont l'amorce d'actions concrètes, à l'échelle d'associations, d'entreprises ou d'institutions, qui peuvent donner chez elles de l'espoir aux candidats potentiels à l'émigration à Mayotte.
Il faudra aussi engager directement avec les pays d'émigration des discussions concrètes sur la réalité, et ces discussions viendront naturellement au fur et à mesure que Mayotte sera à même de prendre toute sa part dans le concert régional, notamment au sien de la COI.
Au total, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, chacun doit bien comprendre ici que la politique de ce Gouvernement est pour Mayotte très cohérente. Il s'agit de veiller à la mise en uvre loyale des textes antérieurement pris, quitte à en corriger les imprécisions ou les imperfections ; un gros travail à cet égard doit être fait concernant la fiscalité qui sera applicable en 2007. Mais il s'agit simultanément de développer toutes les actions qui rendent viable et fructueuse l'évolution institutionnelle. Cela va du développement du droit du travail à celui de la sécurité sociale, en passant par les moyens matériels et humains de l'éducation. A cet égard, en particulier, et c'est l'un des engagements essentiels pris lors de mon déplacement de septembre 2002, le processus d'intégration de près de 7 500 agents publics dans le statut général de la fonction publique a connu en seize mois des avancées spectaculaires qui le rendent irréversible, grâce à un travail considérable des services de l'Etat. 17 décrets en conseil d'Etat sont nécessaires à la mise en uvre d'un premier train de titularisation dans les rangs de l'Etat de 450 agents, dès 2004. Ces projets de textes statutaires seront transmis aux élus et aux syndicats pour avis dans les toutes prochaines semaines.
Sur tous les plans, nous voulons et nous faisons concrètement en sorte que la solidarité nationale s'exprime pleinement, que les Mahorais aient toujours plus d'espoir d'amélioration tangible de leur santé, de leur logement, de leur éducation, de leur emploi et de leur niveau de vie. Dois-je rappeler à ce sujet que le pouvoir d'achat des salariés au SMIG, c'est-à-dire de l'essentiel des 12 500 salariés du privé, a progressé de 1 % en 2000, de 3,5 % en 2001, de 6,1 % en 2002 et de 10 % en 2003 d'après l'INSEE ?
Dans un autre domaine, celui de l'accès de tous à un logement décent, il était nécessaire de relancer une politique du logement social au profit des personnes les plus modestes. C'est pourquoi le gouvernement a, par un décret du 7 octobre 2003 mis en place à Mayotte l'allocation logement. Cette aide personnelle aux familles allégera la charge mensuelle des loyers assumés par les occupants de logements sociaux. Ainsi pour une famille de 2 adultes et 3 enfants dont le revenu est égal au SMIG de Mayotte, l'aide représentera 214 pour un loyer de 292 correspondant à un 3 pièces en logement social, soit 84 % du montant du loyer.
Cette aide doit permettre de réorienter la politique du logement social. Compte tenu des besoins importants et de la rareté du foncier, il convient en effet désormais de s'orienter résolument vers le développement du logement locatif social groupé afin d'offrir au plus grand nombre des conditions d'habitat décente. Les textes nécessaires ont été pris par le Préfet. A ce stade une première tranche de 100 logements locatifs sera mise en chantier en 2004. J'ai demandé à la SIM d'accélérer la montée en puissance de ces produits dans la programmation annuelle.
Oui, il reste des progrès à accomplir :
- par exemple dans le domaine des allocations familiales et je confirme qu'une mission de l'Inspection Générale des Affaires Sociales arrive demain à Mayotte à ma demande ;
- par exemple dans le domaine de la bonne exécution des programmes publics comme pour le port de Longoni ;
- par exemple pour une application réaliste des engagements antérieurement pris, comme la mise en place de chambres consulaires, qui appelle une détermination adéquate de ressources.
Mais la politique que nous menons mobilise tous les services de mon ministère, tous les services de l'Etat à Mayotte et de ceux de nombreuses administrations à Paris. Je vous confirme cette mobilisation et cette détermination à mener de façon cohérente des politiques qui se conjuguent pour donner une réalité au progrès de Mayotte dans la République.
Mayotte française, c'est d'abord une affaire de cur et de fidélité ! C'est donc une affaire de passion ! Vous pouvez compter sur mon enthousiasme et mon énergie pour que les promesses de l'engagement de Mayotte dans l'ensemble français demeurent fidèlement respectées.
(source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 27 janvier 2004)
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,
Au lendemain d'une importante conférence de coopération régionale où Mayotte a pris toute sa place comme porte-parole de la France dans l'océan Indien, j'ai souhaité revenir dans votre archipel pour faire le point avec vous sur les actions déterminées que nous menons en faveur de l'épanouissement de votre collectivité dans la République. Les enjeux sont considérables. Nous devons agir vite. Nous avons l'obligation de réussir.
Grâce à l'appui du Président de la République et du Premier ministre, Mayotte est enfin sortie de l'incertitude constitutionnelle. Malgré une volonté clairement réitérée par sa population de maintien dans la République et d'attachement à la Nation, l'appartenance définitive de Mayotte à la République ne pouvait être consacrée par une simple loi, même renforcée par une consultation populaire sur son statut de collectivité départementale. Il était donc temps de lever définitivement une ambiguïté pesante, laissant croire que le vote des électeurs de Mayotte pouvait se voir opposer d'autres valeurs, une autre légitimité qui ouvrirait la porte à un éloignement de la France.
C'est donc l'honneur de ce Gouvernement, et du Parlement de la République, d'avoir mentionné explicitement Mayotte dans l'article 72-3 de la Constitution, au même titre que l'ensemble des autres collectivités françaises d'outre-mer. La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 ancre donc définitivement Mayotte dans la République dont l'unité et l'indivisibilité excluent tout séparatisme ou tout affaiblissement du lien avec les valeurs qui la fondent, sauf à modifier le texte de la Constitution, norme suprême de l'ordonnancement juridique français.
La démarche engagée pour que Mayotte soit prise en compte dans la future Constitution européenne comme région ultrapériphérique conforte également, sur le plan international, la révision aboutie de la Constitution française. C'est pour l'outre-mer français un des points forts de la négociation en cours, au sein de la conférence intergouvernementale, ce statut de RUP pour Mayotte étant défendu avec une grande détermination par le Président de la République lui-même.
C'est donc dans un cadre constitutionnel enfin sécurisé que Mayotte peut aujourd'hui aborder l'étape du transfert de l'exécutif de la collectivité départementale au président du Conseil général. Cette étape essentielle doit prendre effet " à compter du renouvellement du Conseil général en 2004 ", soit le 1er avril de cette année, conformément à la loi du 11 juillet 2001. Ainsi, Mayotte deviendra une collectivité départementale décentralisée, s'administrant librement par un conseil général élu en application de l'article 72 de la Constitution. L'assimilation de Mayotte au modèle départemental métropolitain se poursuivra puisqu'à compter du renouvellement du conseil général de 2007, les actes de la collectivité seront soumis strictement au même régime juridique que celui défini par le code général des collectivités locales pour les départements métropolitains. Je suis satisfaite de constater aujourd'hui que, grâce au travail de préparation et de formation des élus, grâce à la mise en place de la direction générale des services du conseil général dès juillet 2003 et grâce à une minutieuse et fructueuse collaboration entre la préfecture et vos collaborateurs, Monsieur le Président, cette étape institutionnelle cruciale va se dérouler dans les meilleures conditions de continuité et d'efficacité, comme je l'avais souhaité lors de ma visite de septembre 2002.
Dans cette démarche vers l'identité institutionnelle, l'Etat accompagne la collectivité départementale. Entre 2001 et 2003, les transferts de l'Etat vers Mayotte se sont accrus considérablement passant de 243 M en 2001 à 337 M en 2004.
La convention de développement pour Mayotte constitue une étape supplémentaire et essentielle. Conclue le 12 décembre 2002 pour une durée de cinq ans, elle connaîtra son plein essor en 2004. Elle représente un engagement de 115 M, dont l'Etat assume à lui seul 104 M. C'est un effort sans précédent qui est ainsi consenti par la Nation afin de doter Mayotte d'un outil de développement qui lui permettra de rattraper ses retards par rapport au reste de la communauté nationale. Les secteurs de l'artisanat, de l'agriculture à travers ses différentes filières, de la formation et de l'éducation, de l'environnement quotidien grâce au développement des équipements en matière d'assainissement et d'eau potable, des transports sans lesquels ne sera pas améliorée la desserte de Mayotte, bénéficieront pleinement de la solidarité de l'Etat à travers cette convention qui s'ajoute aux programmes correspondant aux politiques traditionnelles.
Dans ce cadre, la mise en place d'une desserte aérienne directe de Mayotte vers l'Europe est indispensable.
Je voudrais souligner que l'étude du schéma directeur de développement de l'aéroport de Mayotte a été menée dans les délais prévus grâce à un financement de 200 000 assuré par le ministère de l'Outre-Mer.
Cette étude privilégie la création d'une piste convergente de 2 600m capable d'accueillir des avions gros porteurs assurant la desserte de Mayotte au départ de Paris en 9 heures au lieu des 14 heures que nécessitent actuellement le passage par la Réunion. Je me félicite du travail accompli en moins de 6 mois.
Ce schéma directeur devrait être prochainement validé par le ministre des Transports. Dès cette étape franchie, des études plus détaillées pourront être engagées afin d'aboutir à un avant projet. Je serai extrêmement vigilante sur l'avancement de ce dossier, prioritaire pour le développement de Mayotte.
Regardons toutefois la réalité en face. Aussi bien tous les efforts financiers que la démarche institutionnelle engagée au bénéfice de Mayotte seront vains si la pression migratoire illégale à laquelle est soumise votre île n'est pas maîtrisée. Dans une récente publication de décembre 2003, l'INSEE vient de livrer une analyse détaillée des résultats du recensement du 30 juillet 2002. Mayotte compte 160 265 habitants. A cette même date, l'INSEE recense 55 000 étrangers vivant à Mayotte, alors que le nombre de titres de séjour réguliers n'est que de 10 000. Ces chiffres illustrent parfaitement le défi collectif que représente l'immigration irrégulière en provenance des îles voisines. De ce fait, les efforts consentis pour développer les équipements publics et les services publics sont gravement compromis.
C'est vrai en particulier à l'école, qui doit chaque année accueillir un nombre toujours plus élevé de jeunes enfants. Les projections démontrent ainsi qu'il faut construire chaque année plus de 100 classes. Il résulte notamment de cette pression démographique un niveau scolaire faible. 15 % seulement d'une génération obtient le baccalauréat. Dans de telles conditions, les chances d'insertion dans le monde du travail se trouvent réduites. Mayotte compte plus de 13 000 demandeurs d'emplois et un taux de chômage qui avoisine 29 % de la population active.
Dans le secteur de l'économie marchande, l'immigration clandestine est en outre une incitation forte à la fraude. La loi de programme pour l'outre-mer, promulguée le 21 juillet 2003, étend à Mayotte le titre de travail simplifié, les incitations à l'embauche et l'organisation du marché du travail grâce à l'implantation de l'ANPE. Les décrets d'application de la loi de programme sont prêts et seront publiés dans les prochains jours. D'ores et déjà, je constate que l'ANT a ouvert une antenne en janvier 2004 avec deux personnes. L'ANPE détachera à compter de février 2004 un agent au sein de la Direction du Travail, de l'Emploi et de la Formation Professionnelle, actuellement chargée des missions dévolues à l'agence en métropole. Dès 2005, une antenne autonome de l'ANPE sera en place. Pour l'Association pour la Formation Permanente (AFPA), son implantation à Sada est désormais programmée : l'arrêté de Déclaration d'Utilité Publique pourrait intervenir début avril et les travaux commencer en octobre 2004.
Ces améliorations essentielles justifient une attitude de très grande fermeté à l'égard de ceux qui emploient une main-d'uvre étrangère en situation irrégulière. Ces agissements illégaux sont réprimés par des peines d'emprisonnement et d'amendes pénales, comme d'amendes administratives d'un montant qui peut atteindre jusqu'à cent fois le taux horaire du SMIG. A ma demande, ces procédures ont été réactivées à Mayotte. Elles ont déjà donné lieu à quatre relevés d'infractions au cours du seul mois de décembre 2003. Car Il n'est pas acceptable que face au défi de l'immigration illégale qui contrecarre le projet collectif de Mayotte, certains employeurs continuent à recourir à une main-d'uvre clandestine.
Pour autant, il est nécessaire de tenir compte des réalités afin de réduire l'économie informelle. Par exemple, les services de l'Etat s'attachent à moraliser progressivement le secteur de la pêche, ce qui donnera aux intéressés un emploi stable, rémunéré de façon légale avec un titre de séjour. Les procédures normales seront utilisées, avec le concours du consulat de Moroni.
L'immigration clandestine est aussi un facteur de déstabilisation et de perte des valeurs qui fondent la vie collective au sein de la République française. L'Etat de droit n'est pas conciliable avec des pratiques indignes, où se conjugue l'absence de respect de la personne humaine et des règles de droit. Dans le même temps, la pratique traditionnelle à Mayotte d'un islam modéré ne doit pas être remise en cause à l'instigation de personnes extérieures à la communauté nationale.
Face au défi que représente l'immigration clandestine, le Gouvernement auquel j'appartiens a, dès sa prise de fonction, arrêté un plan pluriannuel qui est en voie de réalisation. Jamais, jusqu'alors, un effort aussi important n'a été consenti par l'ensemble des services de l'Etat pour Mayotte. La période antérieure s'était caractérisée par une mobilisation timide des autorités, alliant une sous estimation des problèmes à une réponse très insuffisante. Le " plan Mayotte " arrêté le 6 septembre 2002 représente une approche globale et déterminée. Ce plan s'appuie d'abord sur un principe. Les articles 52 et 53 de la loi de sécurité intérieure étendent à Mayotte les textes de 1995 et 2001 au terme desquels " la sécurité est un droit dû par l'Etat sur l'ensemble du territoire de la République ". La sécurité inclut bien évidemment la lutte contre les agissements illégaux dont relève l'immigration clandestine.
Je souhaite aujourd'hui, avec vous, faire le bilan d'étape de réalisation du " plan Mayotte ", dont les moyens renforcés de lutte contre l'immigration clandestine se déploient sur terre et sur mer, en même temps que le cadre juridique est progressivement adapté aux besoins.
Lorsqu'en 2002 nous avons fait le bilan de l'existant, il est apparu rapidement une coordination insuffisante des services en même temps qu'une faiblesse des moyens matériels et humains.
En premier lieu, il était indispensable, sous l'autorité du préfet, de mieux coordonner les moyens d'action de l'Etat autour d'un service référent en matière de lutte contre l'immigration clandestine. Cette mission a logiquement été dévolue à la police aux frontières (PAF). Pour que ce service puisse remplir correctement sa mission, il était indispensable de conforter ses effectifs. Un renfort de 30 fonctionnaires a été prévu. 15 d'entre eux ont d'ores et déjà rejoint Mayotte en 2003 et 15 autres y seront affectés en 2004. Au total, ce service qui comptait 58 fonctionnaires début 2002 a déjà atteint le nombre de 72 policiers en 2003 et verra ses effectifs portés à 87 hommes en 2004. Ce qui représente un accroissement de plus de 51 % en deux ans.
Le nombre des officiers de police judiciaire au sein des services de la PAF est passé de 3 à 9 personnes aujourd'hui. Ce point est important, car l'affectation de ces fonctionnaires spécialisés en procédure pénale démontre une double volonté de l'Etat : accroître d'une part les procédures de reconduite et de relevé des infractions à la législation sur les étrangers, et d'autre part veiller à ce que ces procédures soient menées dans le strict respect du droit.
Il était également indispensable que la PAF puisse exercer ses fonctions dans des conditions techniques optimales. Jusqu'à une date récente, ce service était doté de moyens de communication susceptibles d'être écoutés, notamment par les éventuels passeurs. L'un des points importants du plan Mayotte était d'équiper la PAF de moyens radio cryptés. C'est effectif depuis octobre 2003.
L'effort consenti devait aussi porter sur les moyens immobiliers. Le centre de rétention administrative (CRA) n'était visiblement pas la priorité du gouvernement précédent, traduisant ainsi la faible attention donnée à la lutte contre l'immigration clandestine.
J'ai signé, avant mon départ, l'arrêté organisant précisément le fonctionnement du centre de rétention administrative de Pamandzi (CRA). Cet arrêté a été publié au Journal officiel du 22 janvier 2004.
Cet acte n'est pas que formel. Il donne un cadre juridique à l'important projet d'extension du CRA pour un montant de 1,1 M. Ces travaux permettront de créer 60 places supplémentaires, de réaménager les locaux administratifs de la PAF et d'adjoindre 10 places en zone d'attente des passagers en instance (ZAPI). Ils seront réalisés en 2004. Je rappelle, qu'en 2003, le nombre de personnes placées en rétention au CRA de Mayotte s'est élevé à 6 446, soit un nombre similaire à celui d'un CRA de la région parisienne. L'attention portée aux conditions de retour des étrangers illégalement entrés en France démontre la volonté du gouvernement de continuer à uvrer dans le respect de la dignité des personnes et des droits de l'homme, mais sans concession sur le respect de la souveraineté nationale. Je rends ici hommage à l'ensemble des forces de police et de gendarmerie qui accomplissent dans le plus strict respect de la légalité républicaine une tâche complexe et délicate.
Car la Gendarmerie Nationale contribue également à la lutte contre l'immigration clandestine et la délinquance. Les 90 sous-officiers de gendarmerie affectés à Mayotte, reçoivent le concours dorénavant permanent de deux pelotons de gendarmerie mobile. 45 hommes, détachés des escadrons de l'océan Indien, assument des missions de sécurité et de lutte contre l'immigration sous l'autorité du commandement de la gendarmerie de Mayotte. Compte tenu de l'importance des effectifs, de l'ampleur des missions dévolues à la gendarmerie, de l'éloignement géographique par rapport à la Réunion, j'ai souhaité dès ma prise de fonctions que Mayotte devienne un groupement de gendarmerie autonome, indépendant de la Réunion.
Je suis en mesure de vous informer que le groupement de gendarmerie de Mayotte sera créé le 1er mars 2004.
D'autre part, il a été décidé qu'à l'échéance de la Loi d'Orientation Pour la Sécurité Intérieure (LOPSI), soit en 2007, le groupement de gendarmerie de Mayotte comptera 150 gendarmes. Un peloton spécialisé d'intervention de la gendarmerie (PSIG) sera créé.
Je tiens aussi à rappeler que le groupe d'intervention Mayotte (GIM), forme locale du GIR métropolitain, a été mis en place en juin 2002. Il est administrativement rattaché à la brigade de recherche de la gendarmerie de Mayotte. Le GIM permet de compléter la lutte quotidienne contre l'immigration, par des actions coordonnées de démantèlement des réseaux, de lutte contre les trafics de documents. En outre, le GIM a en charge le développement d'une coopération judiciaire et policière avec les Comores. Cette action est maintenant confortée par l'affectation d'un attaché de sécurité issu des rangs de la gendarmerie auprès de l'ambassade de France à Moroni depuis le 1er janvier 2004.
Au côté de la gendarmerie et de la PAF, la direction de la sécurité publique contribue aussi activement aux missions de sécurité. Depuis de nombreuses années, 149 agents mahorais apportent un concours réel à ces missions d'Etat. 119 sont affectés à la direction de la sécurité publique et 30 à la police aux frontières. Il n'était pas normal que ces policiers restent en dehors des cadres de la Police Nationale, puisqu'ils remplissent des fonctions exclusivement régaliennes. Le principe de leur intégration dans les cadres de la Police Nationale a été adopté dès l'été 2002 par la loi d'orientation pour la sécurité intérieure (LOPSI). L'article 137 de la loi de sécurité intérieure du 18 mars 2003 a prévu l'intégration des agents de la collectivité départementale de Mayotte dans les corps de la Police Nationale correspondant aux fonctions qu'ils exercent. Le projet de décret élaboré par le ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, qui est parvenu à mes services fin décembre 2003, prendra effet au plus tard le 1er août 2004.
Cette intégration est un acte de reconnaissance à l'égard des personnels concernés mais aussi un acte de confiance de l'Etat. Les bénéficiaires doivent être conscients du fait que leur intégration dans la Police Nationale leur donne de nouveaux droits, notamment en terme de formation pour leur permettre d'exercer pleinement les pouvoirs judiciaires qui leur sont de ce fait reconnus. Mais c'est aussi pour eux l'adhésion à de nouvelles obligations qui résultent du statut particulier de la Police Nationale dans la fonction publique de l'Etat. L'obligation de disponibilité sept jours sur sept s'accompagne de l'absence du droit de grève. La règle du non-cumul avec un autre emploi devra être strictement respectée. De même les principes déontologiques de la Police Nationale s'imposeront à chacun d'entre eux et tout manquement exposera son auteur à des sanctions disciplinaires.
La construction d'un nouveau commissariat de police représente également un signe fort, en même temps qu'un engagement financier élevé de 2 M. Ce projet est aujourd'hui concrètement en cours de réalisation, je viens de m'en assurer moi-même. Afin d'affirmer l'importance que l'Etat donne à ce dossier, le préfet a mis en place dès septembre 2002 un comité de suivi pluridisciplinaire qui réunit les différents intervenants. Le chantier a effectivement débuté le 1er octobre 2002. L'année 2004 verra donc les services de police s'installer dans des locaux fonctionnels et adaptés à leur besoin.
Cet effort exceptionnel pour doter les services de sécurité des moyens de fonctionner et surtout d'assumer leur mission à terre, s'accompagne d'une volonté claire d'assurer une réelle police de l'Etat en mer. Ce point est essentiel. Il constitue le deuxième volet du " plan Mayotte ".
Une meilleure coordination des actions en mer est assurée grâce au pôle mer, qui réunit toutes les semaines les responsables des différents services autour du préfet ou de son représentant.
D'autre part, pour être pleinement efficace la présence des navires de l'Etat dans le lagon et en mer doit s'appuyer sur des moyens de détection efficaces et discrets. Le radar mobile dont était doté Mayotte s'est révélé non seulement techniquement insuffisant, mais surtout très contreproductif. Il suffisait que le véhicule de détection quitte les locaux administratifs pour que l'ensemble des candidats à l'immigration clandestine, et surtout les passeurs, s'abstiennent de tout mouvement.
Il a donc été nécessaire de réévaluer l'ensemble du dispositif permettant de détecter les embarcations clandestines entre Anjouan et Mayotte. Ma collègue, ministre de la Défense, que j'avais saisie de ce dossier a bien voulu m'accorder le concours des services placés sous son autorité. A la suite d'une première mission d'évaluation à Mayotte de son Etat-major, la Marine Nationale assurera le préfinancement des matériels et infrastructures nécessaires qui lui seront remboursés par le ministère de l'Outre-Mer à hauteur de 2 M.
A ce jour, je suis en mesure de vous informer qu'une station de surveillance maritime composée de deux radars sera implantée à Mayotte. Ces radars permettront de détecter tous les mouvements de navire, y compris ceux que leur taille mettait jusqu'à présent à l'abri d'un repérage par les moyens existant à terre.
J'ajoute que d'ores et déjà des moyens de surveillance venus notamment de la Réunion patrouillent dans la zone. J'ai rencontré personnellement l'Amiral Chef d'Etat-major de la Marine . Nous sommes convenus d'une intensification des passages de bâtiments. Au cours du dernier semestre de 2003, c'est 105 jours de mer que les bâtiments de la Marine Nationale ont assuré aux abords de Mayotte. A partir de mars 2004, une vedette de la Marine Nationale, le BELLIS, sera définitivement affectée à Mayotte. Il complétera le dispositif actuel de la Marine Nationale constitué de deux vedettes qui ont assuré 67 sorties en 2003.
Aujourd'hui, outre les moyens de la Marine Nationale, deux autres vedettes sont en service. Les services des douanes sont dotés depuis octobre 2003 d'une vedette rapide. De même la PAF dispose d'une vedette qui a effectué 88 sorties en 2003 et 21 interceptions, permettant d'interpeller 38 passeurs et 401 immigrés clandestins.
La PAF recevra au deuxième semestre 2004 deux vedettes rapides, capables d'embarquer 25 personnes. L'achat de ces vedettes a été prévu dans le cadre du plan arrêté en septembre 2002. Le délai de mise en uvre de ce projet est lié à des difficultés de procédure de passation des marchés que l'ensemble des services concernés se sont attachés à résoudre.
Enfin une brigade nautique de la Gendarmerie Nationale sera créée le 1er mars 2004 et sera dotée d'une vedette rapide supplémentaire avant la fin de l'année.
L'année 2004 sera donc marquée par une présence très active des services de sécurité en mer. Outre la Marine Nationale, dont la présence sera affirmée, c'est cinq vedettes, contre deux aujourd'hui qui permettront de lutter contre l'immigration clandestine par voie maritime.
Des opérations coordonnées d'une ampleur jusqu'alors inégalée pourront être organisées et mieux orientées par des moyens de détection renforcés et modernisés.
D'ores et déjà, les efforts consentis se concrétisent dans les faits. Les chiffres de l'année 2003 démontrent l'action très déterminée et efficace des services de police et gendarmerie dans la lutte contre l'immigration clandestine.
d'une année sur l'autre, les reconduites à la frontière ont augmenté de 56 %, passant de 3 743 en 2001, à 3 995 en 2002 et à 6 241 en 2003. Elles ont donc presque doublé en moins de 2 ans. Ceci traduit la réalité de la pression migratoire, mais aussi et surtout l'action déterminée menée par les services de police et de gendarmerie.
le nombre de passeurs arrêtés et écroués sur décision de justice s'est accru de 150 % en 2003, passant de 16 en 2002 à 40 en 2003. De même le nombre de barques interceptées a augmenté de 200 %, passant de 7 à 21 en 2003. Les destructions sur décision de justice ont concerné 13 bateaux en 2003 contre 9 en 2002.
Ces données statistiques démontrent la contribution essentielle des autorités judiciaires à la lutte contre l'immigration clandestine mais aussi contre la délinquance générale à Mayotte. La présence des forces de sécurité, leur visibilité, leur action se traduisent d'ores et déjà concrètement dans les chiffres de la délinquance. Le nombre des faits constatés au titre de la délinquance générale a diminué de 7,12 % en 2003 par rapport à 2002 (hors infractions à la législation sur les étrangers) tandis que le chiffre de la délinquance de voie publique baisse très significativement de 15,64 %.
La maison d'arrêt de MAJICAVO compte actuellement 191 détenus. Cet établissement pénitentiaire construit il y a dix ans ne répond déjà plus aux besoins.
L'extension des capacités d'accueil de même que la création d'un quartier des mineurs sont devenus une priorité. Le gouvernement entend redonner au Parquet les moyens d'une politique pénale adaptée aux enjeux.
Comme vous pouvez le constater, les résultats obtenus par ce Gouvernement dans la lutte contre l'immigration clandestine et l'insécurité sont encourageants. Pour autant, ils s'amélioreront très certainement encore avec l'achèvement en 2004 du plan engagé en septembre 2002.
En moins de deux ans, l'Etat, grâce à un effort financier et humain sans précédent, se donne les moyens de réaffirmer son autorité et de répondre ainsi à l'attente légitime de chaque citoyen. La sécurité publique, le respect des règles de droit qui régissent le séjour des étrangers sur le territoire national sont des impératifs que l'Etat doit faire respecter.
J'ai bien conscience que le dispositif juridique, qui permet aux services de l'Etat d'agir, doit être en permanence complété et amélioré.
L'article 95 de la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France a habilité le Gouvernement à étendre par ordonnance à Mayotte les dispositions de cette loi. Ce texte est en préparation dans mes services. Il permettra de renforcer les moyens juridiques de lutte contre l'immigration clandestine. Les attestations d'accueil d'un étranger devront être justifiées et validées par le Maire de la commune, la durée de la rétention administrative sera portée de 10 à 32 jours, les sanctions pénales à l'égard des passeurs seront renforcées et pourront atteindre 10 ans d'emprisonnement et 750 000 d'amende. Compte tenu de l'importance de ce dossier, j'ai demandé que le projet d'ordonnance soit soumis pour avis à votre assemblée avant la fin du mois de février.
De même les employeurs de travailleurs clandestins seront plus durement sanctionnés puisque leurs biens meuble et immeubles pourront être confisqués.
Pour les étrangers, la délivrance de la première carte de résident sera subordonnée à la preuve de leur intégration dans la société française, appréciée en particulier au regard de leur connaissance de la langue française et des principes qui régissent la République.
Au-delà même de l'extension et de l'adaptation des textes existants, j'ai demandé à mes services d'étudier les dispositions juridiques qu'il conviendrait d'adopter pour limiter les facteurs d'attractivité de Mayotte. D'une part, il convient de veiller à ce que les conditions d'accès à la nationalité française ne soient pas frauduleusement utilisées. D'autre part, il convient de s'orienter vers une remise en cause de la gratuité des soins à l'égard des étrangers en situation irrégulière. Je souhaite, pour ma part, que le projet d'ordonnance sur l'organisation sanitaire à Mayotte, qui sera bientôt soumis à votre assemblée pour avis, prenne en compte cette exigence. Mais au-delà de toutes ces dispositions, je m'interroge sur la nécessité de prendre à l'égard de Mayotte, et à titre temporaire, des mesures de nature législatives renforçant encore les moyens juridiques de lutte contre l'immigration clandestine et adaptées à la situation exceptionnelle que connaît votre île. Une réflexion s'impose sur ce point.
Le Gouvernement a pris des orientations claires pour accompagner l'évolution de Mayotte. La récente réunion les 8 et 9 septembre 2003 du comité de suivi de l'accord du 27 janvier 2000 conclu entre l'Etat et les élus de Mayotte a démontré l'importance des mesures prises ou engagées dans le domaine institutionnel ou social notamment.
J'avais pris l'engagement de faire avec vous un nouveau bilan six mois après. Toutefois, la proximité des échéances électorales, de même que la priorité qu'il convient de donner à la lutte contre l'immigration clandestine m'ont amené à effectuer le présent déplacement sans attendre.
En tout état de cause, l'obligation de réunir chaque année le comité de suivi prévu par l'accord du 27 janvier 2000 sera bien entendu respectée en 2004.
Car au-delà des chiffres, au-delà des intentions et des moyens mis en uvre, qui parfois sont différés par des procédures qui prennent du retard ou par divers aléas, je souhaite dans cet hémicycle redire à tous les Mahorais que la volonté de ce Gouvernement de pleinement intégrer Mayotte dans la République ne souffre aucune hésitation ni faiblesse. C'est précisément parce que nous ne voulons pas que le fléau de l'immigration clandestine en vienne à priver les Mahorais de leur choix librement et démocratiquement exprimé à plusieurs reprises d'être pleinement Français, que nous manifestons une détermination sans faille. Cette détermination, parce qu'elle est l'expression de la légalité républicaine, est légitime ; parce qu'elle se traduit par une action respectant scrupuleusement les droits des personnes, elle est humaine, empreinte de dignité et incontestable. Ce sont les complicités, les filières, l'exploitation par des employeurs peu scrupuleux que nous sommes décidés à traquer. Nous remettrons les coupables à la justice, car nous voulons faire cesser ce cercle vicieux qui serait en train de réduire à néant l'avenir des jeunes Mahorais si l'on ne réagissait pas vigoureusement.
Cette action est complétée par les initiatives prises en matière de coopération régionale par ce gouvernement : nous venons d'en faire le bilan à Saint-Denis de la Réunion, le fonds de coopération régionale de Mayotte, installé en octobre 2003 a pu engager dans des délais rapprochés près de 400 000 de projets qui sont l'amorce d'actions concrètes, à l'échelle d'associations, d'entreprises ou d'institutions, qui peuvent donner chez elles de l'espoir aux candidats potentiels à l'émigration à Mayotte.
Il faudra aussi engager directement avec les pays d'émigration des discussions concrètes sur la réalité, et ces discussions viendront naturellement au fur et à mesure que Mayotte sera à même de prendre toute sa part dans le concert régional, notamment au sien de la COI.
Au total, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, chacun doit bien comprendre ici que la politique de ce Gouvernement est pour Mayotte très cohérente. Il s'agit de veiller à la mise en uvre loyale des textes antérieurement pris, quitte à en corriger les imprécisions ou les imperfections ; un gros travail à cet égard doit être fait concernant la fiscalité qui sera applicable en 2007. Mais il s'agit simultanément de développer toutes les actions qui rendent viable et fructueuse l'évolution institutionnelle. Cela va du développement du droit du travail à celui de la sécurité sociale, en passant par les moyens matériels et humains de l'éducation. A cet égard, en particulier, et c'est l'un des engagements essentiels pris lors de mon déplacement de septembre 2002, le processus d'intégration de près de 7 500 agents publics dans le statut général de la fonction publique a connu en seize mois des avancées spectaculaires qui le rendent irréversible, grâce à un travail considérable des services de l'Etat. 17 décrets en conseil d'Etat sont nécessaires à la mise en uvre d'un premier train de titularisation dans les rangs de l'Etat de 450 agents, dès 2004. Ces projets de textes statutaires seront transmis aux élus et aux syndicats pour avis dans les toutes prochaines semaines.
Sur tous les plans, nous voulons et nous faisons concrètement en sorte que la solidarité nationale s'exprime pleinement, que les Mahorais aient toujours plus d'espoir d'amélioration tangible de leur santé, de leur logement, de leur éducation, de leur emploi et de leur niveau de vie. Dois-je rappeler à ce sujet que le pouvoir d'achat des salariés au SMIG, c'est-à-dire de l'essentiel des 12 500 salariés du privé, a progressé de 1 % en 2000, de 3,5 % en 2001, de 6,1 % en 2002 et de 10 % en 2003 d'après l'INSEE ?
Dans un autre domaine, celui de l'accès de tous à un logement décent, il était nécessaire de relancer une politique du logement social au profit des personnes les plus modestes. C'est pourquoi le gouvernement a, par un décret du 7 octobre 2003 mis en place à Mayotte l'allocation logement. Cette aide personnelle aux familles allégera la charge mensuelle des loyers assumés par les occupants de logements sociaux. Ainsi pour une famille de 2 adultes et 3 enfants dont le revenu est égal au SMIG de Mayotte, l'aide représentera 214 pour un loyer de 292 correspondant à un 3 pièces en logement social, soit 84 % du montant du loyer.
Cette aide doit permettre de réorienter la politique du logement social. Compte tenu des besoins importants et de la rareté du foncier, il convient en effet désormais de s'orienter résolument vers le développement du logement locatif social groupé afin d'offrir au plus grand nombre des conditions d'habitat décente. Les textes nécessaires ont été pris par le Préfet. A ce stade une première tranche de 100 logements locatifs sera mise en chantier en 2004. J'ai demandé à la SIM d'accélérer la montée en puissance de ces produits dans la programmation annuelle.
Oui, il reste des progrès à accomplir :
- par exemple dans le domaine des allocations familiales et je confirme qu'une mission de l'Inspection Générale des Affaires Sociales arrive demain à Mayotte à ma demande ;
- par exemple dans le domaine de la bonne exécution des programmes publics comme pour le port de Longoni ;
- par exemple pour une application réaliste des engagements antérieurement pris, comme la mise en place de chambres consulaires, qui appelle une détermination adéquate de ressources.
Mais la politique que nous menons mobilise tous les services de mon ministère, tous les services de l'Etat à Mayotte et de ceux de nombreuses administrations à Paris. Je vous confirme cette mobilisation et cette détermination à mener de façon cohérente des politiques qui se conjuguent pour donner une réalité au progrès de Mayotte dans la République.
Mayotte française, c'est d'abord une affaire de cur et de fidélité ! C'est donc une affaire de passion ! Vous pouvez compter sur mon enthousiasme et mon énergie pour que les promesses de l'engagement de Mayotte dans l'ensemble français demeurent fidèlement respectées.
(source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 27 janvier 2004)