Déclaration de M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire, sur les priorités du Conseil national de l'aménagement et du développement du territoire (CNADT), Paris le 29 mars 2006.

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Texte intégral

Monsieur le président de la commission permanente, cher Adrien ZELLER,
Monsieur le délégué, cher Pierre MIRABAUD,
Mesdames et messieurs les membres du Conseil,
Mesdames, Messieurs,
Je vous souhaite à tous la bienvenue dans cette salle prestigieuse, la salle des fêtes du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Je suis heureux de présider, au nom du Premier Ministre et au nom de Nicolas SARKOZY, le conseil national d'aménagement et de développement du territoire - le CNADT.
Pour la première fois depuis longtemps, l'aménagement du territoire est rattaché au ministère de l'intérieur. Pour ma part, je n'y trouve que des avantages. D'abord celui de travailler avec un ministre aussi dynamique et entreprenant que peut l'être Nicolas SARKOZY. Ensuite un avantage institutionnel. Car, qu'est-ce que le ministère de l'intérieur si ce n'est le ministère des territoires? Ainsi, nous savons pouvoir compter sur le formidable réseau des préfets, des sous-préfets et des secrétaires généraux aux affaires régionales pour impulser la politique du Gouvernement.
En 10 mois passés au Gouvernement, j'ai visité 55 départements. Certes, je reste un "jeune" ministre, mais - certains d'entre vous me connaissent bien - un élu de longue date. J'ai en tout cas assez pratiqué la politique pour me rendre compte que l'aménagement du territoire, c'est peut-être le domaine de l'action politique et administrative où l'on ressent le mieux notre capacité à faire, à entreprendre, à agir sur le réel, à le modifier, à l'améliorer... Nous sommes au coeur de l'action politique, et quelque part au coeur du pays.
J'ai en plus la chance d'être ministre chargé de l'aménagement du territoire à un moment où nous prenons des décisions qui engagent durablement l'aménagement et la compétitivité de nos territoires pour les années à venir.
Il faut en effet désormais parler d'aménagement et de compétitivité des territoires. D'ailleurs, la DATAR, depuis le 1er janvier 2006, a cédé la place à la DIACT, la délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires. Par ce changement de nom, par la fusion de la DATAR et de la mission interministérielle aux mutations économiques - la MIME -, le Gouvernement a souhaité confier à la délégation des missions nouvelles sur des sujets très sensibles : l'attractivité et la compétitivité de nos territoires, le traitement des mutations économiques, la présence des services publics en milieu rural... ceci sans pour autant réduire en aucune manière les missions traditionnelles de la délégation qui, bien sûr, demeurent.
La DATAR ne disparaît pas, elle mute. Elle prend de l'importance et, selon le principe des sigles, elle prend le nom de ce qu'elle est. Nous avons, avec le Gouvernement, l'intention de donner un second souffle à l'industrie française et nous voulons y associer l'ensemble du territoire.
Avant de passer à l'ordre du jour du Conseil à proprement parler, je souhaitais aborder avec vous quelques points d'actualité en matière d'aménagement de nos territoires. Cela me semblait important, presque un an après la dernière réunion du Conseil, le 29 mars 2005.
Au début de cette année 2006, nous nous étions fixé avec Nicolas SARKOZY 3 "grands" objectifs prioritaires :
- renforcer la compétitivité de nos territoires;
- rendre nos territoires plus attractifs;
- préparer l'avenir de nos territoires.
Laissez-moi-vous en dire quelques mots, sur ce que nous avons fait et sur ce qui nous reste à faire.
Renforcer la compétitivité de nos territoires.
La DATAR a changé de nom, je vous le disais. Au-delà des mots, une véritable politique de renforcement de l'attractivité de nos territoires se met en place. 2006 sera l'année de mise en oeuvre de cette politique.
C'est le cas avec les pôles de compétitivité. L'Etat sera aux côtés des acteurs locaux, pour accompagner et dynamiser les projets qui vont entrer dans leur phase opérationnelle. Désormais, après le CIACT du 6 mars dernier, la France compte 66 pôles de compétitivité. Les premiers contrats cadres ont été signés. Les premiers décrets concernant les zonages "Recherche & Développement" devraient sortir dans les toutes prochaines semaines.
En outre, et je me suis beaucoup battu pour cela aux côtés de Nicolas SARKOZY, le dernier CIACT a décidé de tout un train de mesures pour améliorer le fonctionnement des pôles de compétitivité :
- un fonds unique rassemblant les financements de l'Etat. Ce sera le fonds de compétitivité des entreprises ;
- une capacité d'intervention de l'Etat augmentée en injectant 300 M d'euros supplémentaires ;
- 3 appels à projets par an pour les projets des pôles avec un guichet unique de dépôt des dossiers, le 2ème appel venant d'être lancé ;
- un dispositif régional en offrant aux partenaires locaux la possibilité de réduire le nombre de commission, s'ils le souhaitent ;
Mais la compétitivité ne concerne pas que les grands projets industriels, les grands centres urbains, les grands laboratoires. Tous les territoires ont un droit à l'excellence. C'est pour cette raison que j'ai voulu les pôles d'excellence rurale.
Beaucoup de territoires, et souvent ruraux, disposent de potentiels encore trop peu exploités. Le formidable élan des pôles de compétitivité nous a inspiré les pôles d'excellence rurale. Le lancement de ce nouveau chantier est, pour moi, le grand pari de 2006. Et, le 1er mars, date de la clôture de la première vague d'appel à projets "pôles d'excellence rurale", 470 porteurs de projets ont fait acte de candidature dont 342 avec un dossier complet. Ce formidable succès confirme le potentiel de croissance et d'emplois qui existe dans nos campagnes et les ressources d'imagination et d'esprit d'entreprise que portent leurs habitants. J'installerai, d'ici peu, avec mon collègue Dominique BUSSEREAU, le comité national de présélection.
Rendre nos territoires plus attractifs.
Aménager les territoires, c'est les rendre plus attractifs. Beaucoup est fait pour des territoires particuliers comme les massifs de montagne, la France littorale, les territoires ruraux.
L'une de mes priorités fondamentales, c'est d'en finir avec la fracture numérique de notre territoire. L'objectif demeure de couvrir 100 % du territoire en "numérique" à la fin 2007. Cela concerne la téléphonie mobile, certes. Mais aussi le haut débit et la télévision numérique. Nous devons, en 2006, mobiliser nos énergies, celles des collectivités, celles des partenaires privés, pour atteindre cet objectif certes ambitieux, mais qui ne consiste ni plus ni moins qu'à établir une justice entre tous les contribuables français. C'est pourquoi j'ai annoncé la semaine dernière la création d'un observatoire national du haut débit qui a pour vocation de présenter une cartographie actualisée de la couverture en haut débit par les différentes technologies existantes.
Je n'oublie pas non plus dans cette mission l'accompagnement des territoires confrontés à la désindustrialisation. La semaine dernière, j'étais d'ailleurs à Romans-sur-Isère, capitale française de la chaussure de luxe touchée de plein fouet par la mondialisation, pour signer un contrat de site dans lequel l'Etat a apporté 8,5 M d'euros. C'est une mission à laquelle nous participions déjà. Aujourd'hui, nous sommes en charge de la coordination gouvernementale sur le sujet. La tâche est immense. Je veux qu'en 2006 nous devenions incontournables sur le sujet. Au-delà des textes, il nous faut prouver notre capacité à agir, mettre en évidence notre valeur ajoutée, en particulier au plan territorial. Ce n'est pas une affaire facile que de redonner de l'espoir et une confiance à des territoires en crise. Lors du CIADT de décembre 2002, le Gouvernement a fixé ses orientations en matière d'accompagnement des mutations économiques. Trois ans se sont écoulés. J'ai d'ailleurs proposé, avec Nicolas SARKOZY, que nous dressions un bilan de l'action menée au travers des contrats de site afin de dégager des pistes d'amélioration. Ce sera certainement très instructif pour définir de nouvelles orientations et de nouveaux projets.
Préparer l'avenir de nos territoires.
Je vous disais que j'avais la chance d'être ministre de l'aménagement du territoire à un moment où nous décidons de l'avenir de nos territoires.
Le CIACT du 6 mars dernier a posé pour les 7 années à venir les grandes lignes de notre politique de développement territorial. Cette politique s'appuiera notamment sur deux outils complémentaires que sont les contrats de projets et les fonds européens. La nécessaire cohérence dans la préparation de ces deux grands programmes de développement régional est d'ailleurs l'une des raisons qui, avec d'autres, a motivé la décision du Gouvernement de terminer les contrat de plan à la date prévue, c'est-à-dire fin 2006. Cela permettra ainsi aux Préfets de régions, dans le cadre de la concertation avec les collectivités, de préparer dans le même calendrier les futurs contrats de projets et les futurs programmes européens.
Pour la première fois depuis fort longtemps, le Gouvernement respecte la parole donnée en 2000, par un autre Gouvernement. En plus, nous terminons ces contrats avec un taux d'exécution supérieur à la génération précédente.
Pour les contrats de projets Etat - Régions, ce que le Gouvernement propose aujourd'hui est l'aboutissement d'une large concertation commencée dès 2004. D'ailleurs, le CNADT avait abordé le sujet dans sa séance du 29 mars 2005.
Je tiens à réaffirmer que le Gouvernement est attaché à la démarche contractuelle. Même s'il était nécessaire d'en revoir profondément et le contenu, et la méthode d'élaboration. Cette démarche contractuelle permet d'exprimer entre l'Etat, les régions et les autres collectivités territoriales une vision partagée et cohérente de l'aménagement et du développement des territoires français.
Les futurs contrats de projets Etat - Régions (CPER) seront resserrés sur un nombre limité de thématiques prioritaires, sur des projets d'investissement d'envergure nationale, suscitant des effets d'entraînement important pour les territoires.
Les trois grandes thématiques prioritaires, conformes aux engagements européens pris par la France dans le cadre des stratégies dites de Lisbonne et de Göteborg, sont :
- promouvoir la compétitivité et l'attractivité des territoires ;
- mobiliser les politiques publiques autour de la gestion durable des ressources naturelles ;
- anticiper et traiter les évolutions les plus lourdes affectant la cohésion sociale et territoriale.
Les contrats de projets comporteront bien un "volet territorial". Je sais que c'est un sujet de préoccupation pour nombre d'entre vous. Ce "volet territorial" permettra de soutenir des projets d'investissement de moindre ampleur répondant à des thématiques limitativement énumérées comme la couverture numérique, les services aux publics, les mutations économiques...
Concernant les partenaires, le Gouvernement a rappelé que les Régions étaient des partenaires privilégiés de ces contrats de projets mais non des partenaires exclusifs. J'attache la plus grande importance à l'établissement d'une véritable concertation avec les autres collectivités - en particulier les Départements et les Agglomérations. Après tout, c'est normal quand on sait que ces derniers apportent aussi une contribution financière non négligeable. C'est un juste retour des choses. Je souhaite que les contrats puissent être signés, consensuellement, avec les Régions, les Départements, les Régions.
Concernant les fonds européens, la France a obtenu 12,7 milliards d'euros au titre du FEDER (Fonds européen de développement régional) et du FSE (Fonds social européen), à comparer aux 16 milliards d'euros de la période actuelle. Il s'agit en fait d'une très bonne nouvelle, puisqu'on craignait une baisse bien plus forte en raison de la nécessaire maîtrise du budget européen et de l'effort de solidarité en faveur des nouveaux Etats membres. Nous pourrons ainsi maintenir une vraie politique européenne de cohésion, y compris dans les « anciens » Etats membres.
Le Gouvernement a annoncé au CIACT que l'Etat conserverait le rôle d'autorité de gestion des programmes européens 2007-2013 pour l'ensemble des fonds FEDER, FSE et FEADER. En effet, les programmes européens par leur nature correspondent à des compétences diversement réparties entre les différents niveaux de collectivité. Aucun n'est légitime sur l'intégralité d'un programme. De plus l'Etat apporte une garantie de neutralité et de cohésion territoriale. L'expérience "alsacienne" sera néanmoins poursuivie.
J'ajoute que le Gouvernement a pris pleinement en compte les compétences des différentes collectivités. Ainsi, la gestion des fonds européens par l'Etat sera très majoritairement déconcentrée sous l'autorité des Préfets de région, dans le cadre du partenariat régional avec l'ensemble des collectivités territoriales, qui a fait la preuve de son efficacité et de sa pertinence. De plus, les Préfets pourront proposer aux collectivités des délégations de gestion sous forme de subventions globales pouvant aller jusqu'à 40 % de l'enveloppe régionale.
Le CIACT a également annoncé la répartition des 9,1 milliards de l'objectif « Compétitivité et emploi » entre les régions métropolitaines et entre les fonds FEDER et FSE sur la base d'une répartition 56 % FEDER, 44 % FSE, pour tenir compte du triplement de la population éligible au FEDER liée à la suppression du zonage, ainsi que d'un effet de levier du FEDER deux fois plus important que celui du FSE.
Nous avons souhaité inscrire trois priorités principales pour l'utilisation des fonds européens FEDER et FSE :
- le soutien aux entreprises en particulier sur l'innovation et l'excellence territoriale ;
- la formation, l'emploi, la gestion des ressources humaines et l'inclusion sociale. Une attention particulière sera portée aux problématiques urbaines, notamment les quartiers en difficulté ;
- enfin, l'environnement et la prévention des risques.
Les fonds européens soutiendront également les stratégies interrégionales, notamment les politiques des massifs et des bassins fluviaux. Par ailleurs, le développement des technologies de l'information et de la communication est identifié comme un enjeu important transverse.
Pour conclure : vous l'avez compris, je suis passionné par ce que je fais. J'entends souvent le discours nostalgique dire : "Ah oui! L'aménagement du territoire... comme c'était bien dans les années 60, les années 70... une politique ambitieuse à cette époque-là". Mais l'ambition n'appartient ni à la nostalgie, ni à la fatalité. L'ambition, ça se décide. Et de l'ambition pour l'aménagement du territoire, moi, j'en ai! Et, Avec Nicolas SARKOZY, nous avons même l'intention de réinvestir des champs que l'aménagement du territoire a quelque peu délaissés depuis, parfois, des décennies. C'est le sens des initiatives que nous prenons à l'heure actuelle, quelques mois après la crise des banlieues, dans le domaine de la politique de la ville. C'est aussi le sens des initiatives que nous prenons en matière de compétitivité de nos territoires. C'est le sens des initiatives que nous prenons pour les territoires ruraux, pour la présence des services au public en milieu rural.
C'est le sens de notre action que d'avoir de l'ambition pour notre pays.
Dans ce contexte, je remercie le Conseil national pour le rôle qu'il joue. Je serai toujours attentif à vos suggestions. Je suis preneur de toute idée nouvelle et je serai toujours l'avocat de celles qui peuvent améliorer l'action politique.
Je vous remercie de votre attention. Et je passe la parole sans plus tarder à M. Pierre MIRABAUD, pour un point sur la mise en oeuvre des CPER et les programmes européens.

source http://www.interieur.gouv.fr, le 3 avril 2006