Texte intégral
Mesdames et messieurs,
Mon cher Fabrice,
Après les visites à la fois passionnantes et émouvantes, simples, que nous avons effectuées à linstant avec Claude Guéant, au fond, ce discours est assez superflu. Cette visite que javais voulue pour illustrer la politique de proximité de lEtat est parfaitement symbolisée par les haltes que nous avons faites sur les projets de la commune de La Mure.
Je voudrais remercier tous les élus qui ont accepté de participer à cette journée qui incarne le respect que la République se porte et je voudrais, en particulier, remercier le président du Conseil général de sa présence.
Enfin, je voudrais dire à Fabrice que je savais, en venant à La Mure, que je serais impressionné, impressionné par son dynamisme, impressionné par son éloquence, impressionné par sa capacité à réaliser des projets qui peuvent parfois paraître sans doute aux habitants de La Mure, lorsquil les leur présente, inatteignables. Je veux juste lui dire que 27 ans, cest un très bel âge, cest celui auquel jai été élu maire de Sablé, auquel je suis rentré au Parlement. Voilà, je vous laisse simplement imaginer quel peut être lavenir de Fabrice.
Jai voulu venir à La Mure pour évoquer avec vous laction de lEtat dans les territoires. Si nous avons voulu, avec le Président de la République, engager des réformes profondes de notre pays, et au fond si nos concitoyens nous ont confié ce mandat, cest pour remettre un certain nombre de structures anciennes au diapason des mouvements qui traversent notre société et qui traversent le monde qui nous entoure.
LEtat est là pour soutenir lambition des territoires, leur activité économique, leur offre de service, leur offre culturelle, comme on a pu le voir tout à lheure avec linauguration de cette magnifique médiathèque. Il doit être là aussi pour garantir légalité territoriale, la même sécurité, la même protection, la même santé, le même accès aux nouvelles technologies, pour tous nos concitoyens sans distinction.
Et pour répondre à tous ces enjeux, il est impératif que lEtat se renouvelle, se renouvelle dans ses structures, dans son organisation.
On le voit bien avec lexemple de la sécurité, nos territoires ont traversé des mutations très profondes, mais en même temps on est resté très longtemps figé sur des schémas, sur des organisations, sur des découpages entre police et gendarmerie, quasiment immuables. Eh bien, cest cela que nous avons choisi de changer.
En inaugurant la gendarmerie de La Mure, je suis venu rendre hommage aux gendarmes et à lensemble des forces de sécurité qui sont engagées ces dernières années dans des évolutions qui sont des évolutions importantes et qui ont suscité naturellement bien des craintes et des critiques et des appréhensions.
Je suis venu leur dire toute la confiance et tout le respect que leur action, leur sens des responsabilités, leur dignité dans lépreuve inspirent au Gouvernement et au-delà du Gouvernement, à lensemble de nos concitoyens. Je suis venu pour évoquer les enjeux du présent et de lavenir que symbolisent dune certaine façon les nouveaux bâtiments que nous avons vus tout à lheure.
La loi Gendarmerie du 3 août 2009 est venue se substituer à une loi qui remontait au 17 avril 1789 et à un décret organique du 20 mai 1903. Eh bien, il fallait sadapter aux réalités économiques et sociales. Il fallait répondre aux mutations de la délinquance. Il fallait resserrer les liens entre les gendarmes et les policiers.
Mais l'unité n'est pas l'uniformité. La Gendarmerie nationale a conservé dans la réforme son originalité, c'est-à-dire ce statut de force à statut militaire, au service de missions d'ordre civil en France, ou en opérations extérieures, comme ce fut le cas récemment en Haïti il y a un an ou tout récemment en Côte d'Ivoire, et je veux dire combien les gendarmes s'y sont particulièrement distingués. Je veux aussi évoquer l'Afghanistan, où près de 200 gendarmes assurent en ce moment même l'encadrement et la formation des futurs policiers afghans.
Avec le rapprochement entre la police et la gendarmerie, nous avons cherché à rationaliser des moyens dont nous savons qu'ils ne sont pas illimités. Mais surtout ce rapprochement relève d'une logique opérationnelle, parce que les deux forces sont appelées à lutter contre les mêmes phénomènes de délinquance. D'un côté la Police nationale a développé le concept de police d'agglomération, de l'autre la Gendarmerie met en place celui de police des territoires. Et l'objectif est simple : il s'agit d'assurer partout et pour chaque citoyen un niveau de sécurité identique, une même réponse en matière d'assistance, de prévention et de répression.
Sous l'impulsion du Président de la République et grâce à l'action qui est celle des gendarmes et des policiers, cette politique de sécurité a gagné en impact et elle a donné des résultats. Je n'ai pas besoin de rappeler les chiffres, je veux simplement dire quune politique de sécurité qui réussit c'est une politique qui fait reculer la délinquance, c'est une politique qui permet d'augmenter le taux d'élucidation des affaires, c'est une chaîne pénale qui fonctionne. Mais, nous sommes en face d'une délinquance qui évolue presque plus vite que les méthodes nouvelles que nous mettons en place, que les réformes que nous réalisons, que les adaptations qui sont les nôtres, et donc, il faut en permanence avoir présent à l'esprit cette nécessité d'adapter les structures, de faire appel aux technologies les plus modernes, comme on l'a vu tout à l'heure, tout en respectant les traditions et les valeurs qui sont celles de nos forces sécurité.
Je veux évoquer la lutte pour la Sécurité routière qui a connu elle aussi une évolution marquée, c'est un sujet évidemment extrêmement sensible, et je ne peux pas en venant ici dans ce département ne pas me souvenir du terrible accident de la descente de Laffrey il y a quatre ans, où étaient décédés des pèlerins polonais. Vous savez, en 1976, il y avait 20.000 morts sur les routes françaises. Il y a dix ans, il y avait encore 8.000 morts sur les routes françaises, et en 2010, on est passé pour la première fois en dessous des 4.000 morts, et 4.000 morts c'est encore beaucoup trop.
Je regardais les chiffres tout à l'heure pour votre département ; même s'ils sont en baisse, 27 décès, je crois, pour l'année passée, ce sont des chiffres qui sont considérables à léchelle de notre pays et nous avons le devoir de continuer la lutte pour assurer la sécurité de nos concitoyens sur les routes.
Et assurer la sécurité de nos concitoyens sur les routes, cest dabord leur demander de respecter les règles. Jentends bien toutes les remarques et toutes les critiques de tous ceux qui sont confrontés, parce quils roulent beaucoup, aux contrôles, mais enfin, les règles sont les mêmes pour tout le monde. Elles doivent être respectées, elles doivent être respectées parce quelles sauvent des vies, la limitation de la vitesse, le respect du code de la route, le respect des règles qui conduisent à ne pas prendre la route après avoir bu ou encore pire sêtre drogué. Mais le respect des règles cest aussi et tout simplement le respect de la vie en société. Et quand on commence à choisir les règles que lon veut respecter et celles que lon ne veut pas respecter, alors cest lensemble de lorganisation de notre société qui est menacé.
Nous ne nous satisfaisons pas de ce bilan sur la sécurité routière comme sur la lutte contre la délinquance. On ne peut pas seulement produire des chiffres. Il faut répondre à lattente légitime des Français dont linsécurité mine la confiance dans lavenir. Nous devons poursuivre notre effort face aux nouvelles formes de délinquance et nous devons continuer à chercher les solutions les plus efficaces et les modes de fonctionnement les plus pertinents.
Cest dans cet esprit que le ministre de lIntérieur, Claude Guéant, vient de donner des directives pour renforcer la synergie entre les forces et il sest appuyé sur un certain nombre dexpériences qui ont été conduites et en particulier sur des expériences qui ont été conduites ici dans lIsère. Il y a en effet des problématiques de sécurité communes à la police et à la gendarmerie qui demeurent dans les zones charnières entre les agglomérations, les territoires ou les départements cest-à-dire entre les aires de compétences respectives des gendarmes et des policiers.
Cest lobjet de la coordination opérationnelle renforcée entre les agglomérations et les territoires que dy remédier et le préfet de lIsère, Eric Le Douaron, en est lun des promoteurs depuis sa prise de fonction, il y a près dun an maintenant.
Cette coordination opérationnelle cest un atout.
En Isère, les résultats sont là avec une délinquance qui continue denregistrer une baisse avec un taux de résolution des affaires qui progresse de près de 8 % par rapport à la même période en 2010. Mais la sécurité nest pas le domaine exclusif de lEtat. Les élus et leur police municipale sont tout particulièrement impliqués. Les contacts directs entre les maires, les gendarmes et les policiers ainsi que la coordination entre les polices municipales et les forces de gendarmerie ou de police nationale garantissent une sécurité globale qui bénéficie de tous les leviers daction locaux.
Le renforcement du lien de confiance noué entre les forces de lordre et les habitants, permet également dassocier la population à sa propre sécurité. Il sagit de promouvoir la solidarité citoyenne pour une meilleure sécurité de tous. Je veux dire que la sécurité cest laffaire des forces de sécurité, cest laffaire de la justice, cest laffaire des responsables publiques, mais cest aussi laffaire de chaque citoyen et cest en éduquant ses enfants, cest en veillant à ce quils aillent à lécole, cest en leur donnant lexemple, sagissant du respect des règles, y compris en matière de sécurité routière, que lon participe à construire une société plus sûre.
Ce renouveau de notre politique de sécurité, il est à limage de lambition de réforme qui nous anime depuis 2007. La France est un pays riche de traditions anciennes et profondes et cela nest pas renier notre héritage que de les moderniser. Tout le monde reconnaissait lenchevêtrement, la complexité accumulée au fil du temps de notre organisation territoriale. Tout le monde le reconnaissait, mais lorsque des habitudes sont en passe dêtre bousculées, beaucoup préfèrent trouver soudain des vertus au statu quo. Est-ce quil fallait une fois de plus ne rien faire, ne rien changer pour ne bousculer personne ? Ca nest pas lesprit qui nous anime. Et nous avons engagé la loi sur la réforme des collectivités locales en 2010 et le tableau des effectifs des conseillers territoriaux vient dêtre voté par le Parlement. Cest donc une réforme qui est maintenant en ordre de marche.
Dès 2014, le conseiller territorial sera lacteur essentiel de cette nouvelle décentralisation. Elu dans un canton, ce sera un élu de terrain, cest le conseiller territorial qui portera la voix de la Matheysine, à la fois à Grenoble et à Lyon. Et cest par cet élu que la cohérence se fera entre le département et la région.
Cest une évolution dautant plus essentielle que la répartition des compétences et des financements sera clarifiée, avec une clause de compétence générale maintenue pour les communes et une spécialisation des compétences des départements et des régions et la possibilité pour toutes les collectivités de sinvestir dans des domaines nouveaux dintervention non encore prévus par la loi, comme ce fut le cas pour les technologies de linformation et de la communication au cours des dernières années.
Cette réforme des collectivités locales produit déjà ses premiers effets, les tableaux de rationalisation de lintercommunalité sont entamés sur lensemble du territoire.
La procédure délaboration des schémas départementaux de coopération intercommunale a été engagée.
Cette démarche accorde une place très importante au dialogue avec les élus. Je sais quici en Isère cette concertation est intervenue très en amont, et je sais que lassociation des maires y a joué un rôle très important.
Je sais aussi que dans la Matheysine, il y a un enjeu fort de rapprochement de trois intercommunalités, qui existent sur ce territoire du sud de lIsère.
Ici comme dans dautres départements, des élus ont regretté les délais délaboration du schéma qui leur paraissait court au regard des ambitions affichées. Ces délais ont été voulus par le Parlement, qui a souhaité que la rationalisation de lintercommunalité soit achevée suffisamment longtemps avant les élections municipales de 2014. Et cest donc la date du 1er juin 2013 qui simpose, parce quelle a été votée par lAssemblée nationale et le Sénat.
Mais jai déjà eu loccasion de le dire et je veux le répéter devant vous, il ne faut pas sattacher à la seule question du respect scrupuleux des délais, ce qui compte cest lintensité de la concertation, cest la solidité des orientations posées. Et cest la raison pour laquelle avec le ministre de lIntérieur nous avons offert la possibilité dans les cas où cest nécessaire de se donner un peu plus de temps pour conduire les discussions. Limportant cest daboutir. Si on aboutit dans les délais cest mieux, si on aboutit un peu après les délais, cela nest pas grave du moment que létat desprit général qui préside à la réflexion et à la concertation est bien celui de rationaliser notre organisation, dêtre plus efficace, daller vers une plus grande mutualisation des moyens et au fond dadapter notre pays aux enjeux quil doit chaque jour affronter.
Donner une nouvelle impulsion aux territoires cest aussi consolider les finances des collectivités locales.
Depuis la loi de finances pour 2010, nous avons mis en uvre la réforme de la taxe professionnelle. Elle a été évidemment considérablement critiquée. Je pense que chacun constate aujourdhui quune bonne partie de ces critiques étaient très excessives. Et nous avons en face de cette réforme une reprise considérable des investissements des entreprises. Pour lannée 2011, cest près de 17 % dinvestissements supplémentaires que les entreprises vont faire. Il y a une part naturellement qui est liée à la reprise de lactivité, à la croissance économique. Mais il y a une part aussi qui est liée aux mesures que nous avons prises pour alléger de 5 milliards deuros la fiscalité des investissements des entreprises ou encore pour aider les entreprises qui investissent dans la recherche et dans linnovation.
Après une année de transition en 2011, tous les nouveaux outils fiscaux seront donc en place en 2012. Au-delà des ajustements qui ont été nécessaires pour une réforme dune ampleur considérable, je retiens que les nouveaux outils créent des ressources dynamiques en lien direct avec les activités économiques dans un contexte de croissance qui repart.
Nous avons aussi porté une attention particulière à la péréquation des ressources entre collectivités et cette péréquation bénéficie largement aux communes des espaces ruraux.
Des ressources fiscales plus efficaces, des ressources fiscales plus dynamiques, une péréquation renforcée, cest autant de marges de gestion pour les collectivités locales, tout en restant dans la trajectoire de redressement des comptes publics qui conditionne lindépendance financière de notre pays.
Nous ne sommes pas dans une compétition entre lEtat dun côté et les collectivités territoriales pour savoir qui fait le plus, qui fait le moins, qui aide le plus, qui aide le moins. Nous sommes devant un défi à relever qui est de réduire lendettement de notre pays.
1.500 milliards deuros de dettes accumulées depuis 36 ans, 45 milliards dintérêts payés chaque année aux banques qui nous prêtent de largent, cest une situation dangereuse. Et cest une situation qui ne peut pas durer. Et on a bien vu, on voit bien avec ce qui se passe autour de nous en Europe que lépoque où on pouvait considérer que les Etats étaient intouchables et que leur situation financière était sans conséquence, cette époque-là est révolue. Et désormais, si nous voulons rester un pays indépendant, si nous voulons continuer à emprunter à des taux bas, cest-à-dire à financer notre développement, si nous voulons que les générations qui nous suivent ne portent pas un regard extrêmement critique sur laction qui a été la nôtre, alors il faut désendetter notre pays . Et pour désendetter notre pays, il ny a pas trente six solutions, il faut que toutes les sources de la dépense publique fassent lobjet dun effort de rationalisation, de modernisation, lEtat, les collectivités territoriales, lensemble de notre système social. Cest un impératif. Je dis dailleurs que cet impératif, au-delà des joutes préélectorales, cest un impératif qui simposera à tout le monde.
Nous avons aussi décidé de redonner des marges de manuvre aux collectivités locales en desserrant les contraintes des normes.
Nous avons mis en place en 2010 un moratoire des normes nouvelles.
Une commission délus a été mise en place qui examine désormais les projets de textes réglementaires avant leur publication.
Et cette commission est de plus en plus exigeante, et cest normal, vis-à-vis des services de lEtat qui élaborent les normes, souvent sans se préoccuper des conséquences quelles auront sur les collectivités locales, et sur leurs finances.
A lautomne, une proposition de loi dallègement de normes opposables aux collectivités territoriales sera examinée.
Je tiens à ce que ces travaux dallègement soient menés à bien avant 2012.
Enfin, notre attention aux territoires ruraux est renforcée.
Il y a un peu plus dun an, le comité interministériel daménagement du territoire consacré aux territoires ruraux, qui a fait suite dailleurs à une large consultation, a pris des décisions pour favoriser légalité territoriale.
Je veux évoquer la mobilisation des investissements davenir sur le haut et le très haut débit.
Nous avons en effet décidé de consacrer près de 30 milliards deuros aux investissements davenir pour stimuler la reprise de notre économie, une partie importante de ces dépenses davenir sera dirigée vers les nouvelles technologies de linformation, et dans ce cadre-là, vers laccès de tous les territoires à ces nouvelles technologies.
Cest aussi le financement de 250 maisons médicales.
Cest la signature dun accord avec 11 opérateurs de services publics pour expérimenter, dans 23 départements, la mutualisation des points daccès aux services au public.
Cest lengagement dune deuxième génération de pôles dexcellence rurale, aujourdhui mise en place.
Cest encore la création dune dotation déquipement des territoires ruraux, dun montant de 615 M, destinée à cofinancer les projets locaux.
Javais aussi, à loccasion des 25 ans de la loi « montagne », annoncé le lancement dun bilan de ce texte emblématique.
Les inspections générales et le Conseil national de la Montagne viennent dachever ce travail de bilan.
Je réunirai donc à lautomne le Conseil national de la Montagne pour tirer tous les enseignements du travail qui a été fait, et je sais que vous y serez très attentifs.
Voilà, mesdames et messieurs, monsieur le maire et mon cher ami, le mouvement de réforme que nous avons lancé en 2007 est en train de porter ses fruits et je veux croire quavec le temps, malgré les débats, malgré les difficultés, sa pertinence simposera de plus en plus dans les esprits et dans les faits.
Mais il y a une chose quil me tient à cur de dire ici aujourdhui : cest que contrairement à ce discours convenu, que jentends dailleurs depuis trente ans, dans la bouche des élus de droite quand ils sont dans lopposition, et dans la bouche des élus de gauche quand ils sont dans lopposition, cette politique nest pas une politique de «casse des services publics». Ça nest pas une politique dabandon des territoires. Rien nest plus faux et rien nest plus injuste.
Il sagit dadapter la France. Il sagit dadapter la France pour lui permettre de tenir son rang dans la mondialisation. Nous modernisons les structures de notre pays pour améliorer les missions, pour améliorer les services. Nous réformons notre organisation pour soutenir nos territoires. Nous essayons simplement de faire vivre la République. Et faire vivre la République, ce nest pas sans arrêt invoquer ses mânes, cest mettre au goût du jour une organisation qui doit être au service de la liberté, de légalité et de la fraternité.
Source http://www.gouvernement.fr, le 21 juin 2011
Mon cher Fabrice,
Après les visites à la fois passionnantes et émouvantes, simples, que nous avons effectuées à linstant avec Claude Guéant, au fond, ce discours est assez superflu. Cette visite que javais voulue pour illustrer la politique de proximité de lEtat est parfaitement symbolisée par les haltes que nous avons faites sur les projets de la commune de La Mure.
Je voudrais remercier tous les élus qui ont accepté de participer à cette journée qui incarne le respect que la République se porte et je voudrais, en particulier, remercier le président du Conseil général de sa présence.
Enfin, je voudrais dire à Fabrice que je savais, en venant à La Mure, que je serais impressionné, impressionné par son dynamisme, impressionné par son éloquence, impressionné par sa capacité à réaliser des projets qui peuvent parfois paraître sans doute aux habitants de La Mure, lorsquil les leur présente, inatteignables. Je veux juste lui dire que 27 ans, cest un très bel âge, cest celui auquel jai été élu maire de Sablé, auquel je suis rentré au Parlement. Voilà, je vous laisse simplement imaginer quel peut être lavenir de Fabrice.
Jai voulu venir à La Mure pour évoquer avec vous laction de lEtat dans les territoires. Si nous avons voulu, avec le Président de la République, engager des réformes profondes de notre pays, et au fond si nos concitoyens nous ont confié ce mandat, cest pour remettre un certain nombre de structures anciennes au diapason des mouvements qui traversent notre société et qui traversent le monde qui nous entoure.
LEtat est là pour soutenir lambition des territoires, leur activité économique, leur offre de service, leur offre culturelle, comme on a pu le voir tout à lheure avec linauguration de cette magnifique médiathèque. Il doit être là aussi pour garantir légalité territoriale, la même sécurité, la même protection, la même santé, le même accès aux nouvelles technologies, pour tous nos concitoyens sans distinction.
Et pour répondre à tous ces enjeux, il est impératif que lEtat se renouvelle, se renouvelle dans ses structures, dans son organisation.
On le voit bien avec lexemple de la sécurité, nos territoires ont traversé des mutations très profondes, mais en même temps on est resté très longtemps figé sur des schémas, sur des organisations, sur des découpages entre police et gendarmerie, quasiment immuables. Eh bien, cest cela que nous avons choisi de changer.
En inaugurant la gendarmerie de La Mure, je suis venu rendre hommage aux gendarmes et à lensemble des forces de sécurité qui sont engagées ces dernières années dans des évolutions qui sont des évolutions importantes et qui ont suscité naturellement bien des craintes et des critiques et des appréhensions.
Je suis venu leur dire toute la confiance et tout le respect que leur action, leur sens des responsabilités, leur dignité dans lépreuve inspirent au Gouvernement et au-delà du Gouvernement, à lensemble de nos concitoyens. Je suis venu pour évoquer les enjeux du présent et de lavenir que symbolisent dune certaine façon les nouveaux bâtiments que nous avons vus tout à lheure.
La loi Gendarmerie du 3 août 2009 est venue se substituer à une loi qui remontait au 17 avril 1789 et à un décret organique du 20 mai 1903. Eh bien, il fallait sadapter aux réalités économiques et sociales. Il fallait répondre aux mutations de la délinquance. Il fallait resserrer les liens entre les gendarmes et les policiers.
Mais l'unité n'est pas l'uniformité. La Gendarmerie nationale a conservé dans la réforme son originalité, c'est-à-dire ce statut de force à statut militaire, au service de missions d'ordre civil en France, ou en opérations extérieures, comme ce fut le cas récemment en Haïti il y a un an ou tout récemment en Côte d'Ivoire, et je veux dire combien les gendarmes s'y sont particulièrement distingués. Je veux aussi évoquer l'Afghanistan, où près de 200 gendarmes assurent en ce moment même l'encadrement et la formation des futurs policiers afghans.
Avec le rapprochement entre la police et la gendarmerie, nous avons cherché à rationaliser des moyens dont nous savons qu'ils ne sont pas illimités. Mais surtout ce rapprochement relève d'une logique opérationnelle, parce que les deux forces sont appelées à lutter contre les mêmes phénomènes de délinquance. D'un côté la Police nationale a développé le concept de police d'agglomération, de l'autre la Gendarmerie met en place celui de police des territoires. Et l'objectif est simple : il s'agit d'assurer partout et pour chaque citoyen un niveau de sécurité identique, une même réponse en matière d'assistance, de prévention et de répression.
Sous l'impulsion du Président de la République et grâce à l'action qui est celle des gendarmes et des policiers, cette politique de sécurité a gagné en impact et elle a donné des résultats. Je n'ai pas besoin de rappeler les chiffres, je veux simplement dire quune politique de sécurité qui réussit c'est une politique qui fait reculer la délinquance, c'est une politique qui permet d'augmenter le taux d'élucidation des affaires, c'est une chaîne pénale qui fonctionne. Mais, nous sommes en face d'une délinquance qui évolue presque plus vite que les méthodes nouvelles que nous mettons en place, que les réformes que nous réalisons, que les adaptations qui sont les nôtres, et donc, il faut en permanence avoir présent à l'esprit cette nécessité d'adapter les structures, de faire appel aux technologies les plus modernes, comme on l'a vu tout à l'heure, tout en respectant les traditions et les valeurs qui sont celles de nos forces sécurité.
Je veux évoquer la lutte pour la Sécurité routière qui a connu elle aussi une évolution marquée, c'est un sujet évidemment extrêmement sensible, et je ne peux pas en venant ici dans ce département ne pas me souvenir du terrible accident de la descente de Laffrey il y a quatre ans, où étaient décédés des pèlerins polonais. Vous savez, en 1976, il y avait 20.000 morts sur les routes françaises. Il y a dix ans, il y avait encore 8.000 morts sur les routes françaises, et en 2010, on est passé pour la première fois en dessous des 4.000 morts, et 4.000 morts c'est encore beaucoup trop.
Je regardais les chiffres tout à l'heure pour votre département ; même s'ils sont en baisse, 27 décès, je crois, pour l'année passée, ce sont des chiffres qui sont considérables à léchelle de notre pays et nous avons le devoir de continuer la lutte pour assurer la sécurité de nos concitoyens sur les routes.
Et assurer la sécurité de nos concitoyens sur les routes, cest dabord leur demander de respecter les règles. Jentends bien toutes les remarques et toutes les critiques de tous ceux qui sont confrontés, parce quils roulent beaucoup, aux contrôles, mais enfin, les règles sont les mêmes pour tout le monde. Elles doivent être respectées, elles doivent être respectées parce quelles sauvent des vies, la limitation de la vitesse, le respect du code de la route, le respect des règles qui conduisent à ne pas prendre la route après avoir bu ou encore pire sêtre drogué. Mais le respect des règles cest aussi et tout simplement le respect de la vie en société. Et quand on commence à choisir les règles que lon veut respecter et celles que lon ne veut pas respecter, alors cest lensemble de lorganisation de notre société qui est menacé.
Nous ne nous satisfaisons pas de ce bilan sur la sécurité routière comme sur la lutte contre la délinquance. On ne peut pas seulement produire des chiffres. Il faut répondre à lattente légitime des Français dont linsécurité mine la confiance dans lavenir. Nous devons poursuivre notre effort face aux nouvelles formes de délinquance et nous devons continuer à chercher les solutions les plus efficaces et les modes de fonctionnement les plus pertinents.
Cest dans cet esprit que le ministre de lIntérieur, Claude Guéant, vient de donner des directives pour renforcer la synergie entre les forces et il sest appuyé sur un certain nombre dexpériences qui ont été conduites et en particulier sur des expériences qui ont été conduites ici dans lIsère. Il y a en effet des problématiques de sécurité communes à la police et à la gendarmerie qui demeurent dans les zones charnières entre les agglomérations, les territoires ou les départements cest-à-dire entre les aires de compétences respectives des gendarmes et des policiers.
Cest lobjet de la coordination opérationnelle renforcée entre les agglomérations et les territoires que dy remédier et le préfet de lIsère, Eric Le Douaron, en est lun des promoteurs depuis sa prise de fonction, il y a près dun an maintenant.
Cette coordination opérationnelle cest un atout.
En Isère, les résultats sont là avec une délinquance qui continue denregistrer une baisse avec un taux de résolution des affaires qui progresse de près de 8 % par rapport à la même période en 2010. Mais la sécurité nest pas le domaine exclusif de lEtat. Les élus et leur police municipale sont tout particulièrement impliqués. Les contacts directs entre les maires, les gendarmes et les policiers ainsi que la coordination entre les polices municipales et les forces de gendarmerie ou de police nationale garantissent une sécurité globale qui bénéficie de tous les leviers daction locaux.
Le renforcement du lien de confiance noué entre les forces de lordre et les habitants, permet également dassocier la population à sa propre sécurité. Il sagit de promouvoir la solidarité citoyenne pour une meilleure sécurité de tous. Je veux dire que la sécurité cest laffaire des forces de sécurité, cest laffaire de la justice, cest laffaire des responsables publiques, mais cest aussi laffaire de chaque citoyen et cest en éduquant ses enfants, cest en veillant à ce quils aillent à lécole, cest en leur donnant lexemple, sagissant du respect des règles, y compris en matière de sécurité routière, que lon participe à construire une société plus sûre.
Ce renouveau de notre politique de sécurité, il est à limage de lambition de réforme qui nous anime depuis 2007. La France est un pays riche de traditions anciennes et profondes et cela nest pas renier notre héritage que de les moderniser. Tout le monde reconnaissait lenchevêtrement, la complexité accumulée au fil du temps de notre organisation territoriale. Tout le monde le reconnaissait, mais lorsque des habitudes sont en passe dêtre bousculées, beaucoup préfèrent trouver soudain des vertus au statu quo. Est-ce quil fallait une fois de plus ne rien faire, ne rien changer pour ne bousculer personne ? Ca nest pas lesprit qui nous anime. Et nous avons engagé la loi sur la réforme des collectivités locales en 2010 et le tableau des effectifs des conseillers territoriaux vient dêtre voté par le Parlement. Cest donc une réforme qui est maintenant en ordre de marche.
Dès 2014, le conseiller territorial sera lacteur essentiel de cette nouvelle décentralisation. Elu dans un canton, ce sera un élu de terrain, cest le conseiller territorial qui portera la voix de la Matheysine, à la fois à Grenoble et à Lyon. Et cest par cet élu que la cohérence se fera entre le département et la région.
Cest une évolution dautant plus essentielle que la répartition des compétences et des financements sera clarifiée, avec une clause de compétence générale maintenue pour les communes et une spécialisation des compétences des départements et des régions et la possibilité pour toutes les collectivités de sinvestir dans des domaines nouveaux dintervention non encore prévus par la loi, comme ce fut le cas pour les technologies de linformation et de la communication au cours des dernières années.
Cette réforme des collectivités locales produit déjà ses premiers effets, les tableaux de rationalisation de lintercommunalité sont entamés sur lensemble du territoire.
La procédure délaboration des schémas départementaux de coopération intercommunale a été engagée.
Cette démarche accorde une place très importante au dialogue avec les élus. Je sais quici en Isère cette concertation est intervenue très en amont, et je sais que lassociation des maires y a joué un rôle très important.
Je sais aussi que dans la Matheysine, il y a un enjeu fort de rapprochement de trois intercommunalités, qui existent sur ce territoire du sud de lIsère.
Ici comme dans dautres départements, des élus ont regretté les délais délaboration du schéma qui leur paraissait court au regard des ambitions affichées. Ces délais ont été voulus par le Parlement, qui a souhaité que la rationalisation de lintercommunalité soit achevée suffisamment longtemps avant les élections municipales de 2014. Et cest donc la date du 1er juin 2013 qui simpose, parce quelle a été votée par lAssemblée nationale et le Sénat.
Mais jai déjà eu loccasion de le dire et je veux le répéter devant vous, il ne faut pas sattacher à la seule question du respect scrupuleux des délais, ce qui compte cest lintensité de la concertation, cest la solidité des orientations posées. Et cest la raison pour laquelle avec le ministre de lIntérieur nous avons offert la possibilité dans les cas où cest nécessaire de se donner un peu plus de temps pour conduire les discussions. Limportant cest daboutir. Si on aboutit dans les délais cest mieux, si on aboutit un peu après les délais, cela nest pas grave du moment que létat desprit général qui préside à la réflexion et à la concertation est bien celui de rationaliser notre organisation, dêtre plus efficace, daller vers une plus grande mutualisation des moyens et au fond dadapter notre pays aux enjeux quil doit chaque jour affronter.
Donner une nouvelle impulsion aux territoires cest aussi consolider les finances des collectivités locales.
Depuis la loi de finances pour 2010, nous avons mis en uvre la réforme de la taxe professionnelle. Elle a été évidemment considérablement critiquée. Je pense que chacun constate aujourdhui quune bonne partie de ces critiques étaient très excessives. Et nous avons en face de cette réforme une reprise considérable des investissements des entreprises. Pour lannée 2011, cest près de 17 % dinvestissements supplémentaires que les entreprises vont faire. Il y a une part naturellement qui est liée à la reprise de lactivité, à la croissance économique. Mais il y a une part aussi qui est liée aux mesures que nous avons prises pour alléger de 5 milliards deuros la fiscalité des investissements des entreprises ou encore pour aider les entreprises qui investissent dans la recherche et dans linnovation.
Après une année de transition en 2011, tous les nouveaux outils fiscaux seront donc en place en 2012. Au-delà des ajustements qui ont été nécessaires pour une réforme dune ampleur considérable, je retiens que les nouveaux outils créent des ressources dynamiques en lien direct avec les activités économiques dans un contexte de croissance qui repart.
Nous avons aussi porté une attention particulière à la péréquation des ressources entre collectivités et cette péréquation bénéficie largement aux communes des espaces ruraux.
Des ressources fiscales plus efficaces, des ressources fiscales plus dynamiques, une péréquation renforcée, cest autant de marges de gestion pour les collectivités locales, tout en restant dans la trajectoire de redressement des comptes publics qui conditionne lindépendance financière de notre pays.
Nous ne sommes pas dans une compétition entre lEtat dun côté et les collectivités territoriales pour savoir qui fait le plus, qui fait le moins, qui aide le plus, qui aide le moins. Nous sommes devant un défi à relever qui est de réduire lendettement de notre pays.
1.500 milliards deuros de dettes accumulées depuis 36 ans, 45 milliards dintérêts payés chaque année aux banques qui nous prêtent de largent, cest une situation dangereuse. Et cest une situation qui ne peut pas durer. Et on a bien vu, on voit bien avec ce qui se passe autour de nous en Europe que lépoque où on pouvait considérer que les Etats étaient intouchables et que leur situation financière était sans conséquence, cette époque-là est révolue. Et désormais, si nous voulons rester un pays indépendant, si nous voulons continuer à emprunter à des taux bas, cest-à-dire à financer notre développement, si nous voulons que les générations qui nous suivent ne portent pas un regard extrêmement critique sur laction qui a été la nôtre, alors il faut désendetter notre pays . Et pour désendetter notre pays, il ny a pas trente six solutions, il faut que toutes les sources de la dépense publique fassent lobjet dun effort de rationalisation, de modernisation, lEtat, les collectivités territoriales, lensemble de notre système social. Cest un impératif. Je dis dailleurs que cet impératif, au-delà des joutes préélectorales, cest un impératif qui simposera à tout le monde.
Nous avons aussi décidé de redonner des marges de manuvre aux collectivités locales en desserrant les contraintes des normes.
Nous avons mis en place en 2010 un moratoire des normes nouvelles.
Une commission délus a été mise en place qui examine désormais les projets de textes réglementaires avant leur publication.
Et cette commission est de plus en plus exigeante, et cest normal, vis-à-vis des services de lEtat qui élaborent les normes, souvent sans se préoccuper des conséquences quelles auront sur les collectivités locales, et sur leurs finances.
A lautomne, une proposition de loi dallègement de normes opposables aux collectivités territoriales sera examinée.
Je tiens à ce que ces travaux dallègement soient menés à bien avant 2012.
Enfin, notre attention aux territoires ruraux est renforcée.
Il y a un peu plus dun an, le comité interministériel daménagement du territoire consacré aux territoires ruraux, qui a fait suite dailleurs à une large consultation, a pris des décisions pour favoriser légalité territoriale.
Je veux évoquer la mobilisation des investissements davenir sur le haut et le très haut débit.
Nous avons en effet décidé de consacrer près de 30 milliards deuros aux investissements davenir pour stimuler la reprise de notre économie, une partie importante de ces dépenses davenir sera dirigée vers les nouvelles technologies de linformation, et dans ce cadre-là, vers laccès de tous les territoires à ces nouvelles technologies.
Cest aussi le financement de 250 maisons médicales.
Cest la signature dun accord avec 11 opérateurs de services publics pour expérimenter, dans 23 départements, la mutualisation des points daccès aux services au public.
Cest lengagement dune deuxième génération de pôles dexcellence rurale, aujourdhui mise en place.
Cest encore la création dune dotation déquipement des territoires ruraux, dun montant de 615 M, destinée à cofinancer les projets locaux.
Javais aussi, à loccasion des 25 ans de la loi « montagne », annoncé le lancement dun bilan de ce texte emblématique.
Les inspections générales et le Conseil national de la Montagne viennent dachever ce travail de bilan.
Je réunirai donc à lautomne le Conseil national de la Montagne pour tirer tous les enseignements du travail qui a été fait, et je sais que vous y serez très attentifs.
Voilà, mesdames et messieurs, monsieur le maire et mon cher ami, le mouvement de réforme que nous avons lancé en 2007 est en train de porter ses fruits et je veux croire quavec le temps, malgré les débats, malgré les difficultés, sa pertinence simposera de plus en plus dans les esprits et dans les faits.
Mais il y a une chose quil me tient à cur de dire ici aujourdhui : cest que contrairement à ce discours convenu, que jentends dailleurs depuis trente ans, dans la bouche des élus de droite quand ils sont dans lopposition, et dans la bouche des élus de gauche quand ils sont dans lopposition, cette politique nest pas une politique de «casse des services publics». Ça nest pas une politique dabandon des territoires. Rien nest plus faux et rien nest plus injuste.
Il sagit dadapter la France. Il sagit dadapter la France pour lui permettre de tenir son rang dans la mondialisation. Nous modernisons les structures de notre pays pour améliorer les missions, pour améliorer les services. Nous réformons notre organisation pour soutenir nos territoires. Nous essayons simplement de faire vivre la République. Et faire vivre la République, ce nest pas sans arrêt invoquer ses mânes, cest mettre au goût du jour une organisation qui doit être au service de la liberté, de légalité et de la fraternité.
Source http://www.gouvernement.fr, le 21 juin 2011