Interview de M. Alain Vidalies, ministre des relations avec le Parlement, à I-Télé le 20 mars 2014, sur la tribune de Nicolas Sarkozy dans "Le Figaro" du jour, l'indépendance de la justice et les élections municipales.

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Média : Itélé

Texte intégral

CHRISTOPHE BARBIER
Alain VIDALIES, bonjour.
ALAIN VIDALIES
Bonjour.
CHRISTOPHE BARBIER
Bienvenu. Dans les affaires, dans l'affaire SARKOZY, la droite riposte, elle explique que la fuite de toutes ces écoutes vous arrange bien, à trois jours des municipales. Que répondez-vous ?
ALAIN VIDALIES
Je pense que la droite a un discours assez nouveau cette semaine. Si j'ai bien entendu monsieur COPE hier, il appelait à la retenue. Je dois dire qu'en comparaison de ce que l'on a entendu la semaine dernière, il a droit au prix du repenti de la semaine, et je pense que de ce point de vue là, effectivement, le seul discours que tous les élus, tous les républicains, devraient tenir, c'est celui, effectivement, de la retenue, c'est-à-dire les principes qui ont été posés par le Président de la République, le respect de la séparation des pouvoirs, le respect de l'indépendance de la justice, le respect du droit de la défense et de la présomption d'innocence. Il n'y a pas d'autre solution dans une affaire de ce genre.
CHRISTOPHE BARBIER
Mais comment respecter les droits de la défense et la présomption d'innocence, quand tout sort, quand ça fuite et que les intéressés n'ont pas accès au dossier ?
ALAIN VIDALIES
Monsieur BARBIER, dans ce cas-là, il y a un autre problème, c'est celui de la liberté de la presse, et si on veut essayer de conjuguer tout cela, on arrive à une impasse. Le problème de l'indépendance de la justice, du suffrage universel, de la liberté de la presse, comme disait Victor HUGO, c'est les fondements de la République.
CHRISTOPHE BARBIER
C'est le problème de la liberté de la presse ou c'est le problème du gouvernement qui laisse fuiter, par les policiers ou par les juges, parce que ça l'arrange bien ?
ALAIN VIDALIES
Je ne peux pas vous dire ça, le gouvernement n'y est strictement pour rien. Le gouvernement il applique ces principes, le président de la République applique ces principes, personne ne peut dire, personne ne peut soutenir, même par incidence, que le gouvernement était au courant du contenu des écoutes, que le gouvernement serait pour quoi que ce soit dans cette affaire. Il y a des juges qui travaillent, ce n'est pas le gouvernement qui a inventé ces histoires de téléphone avec des faux noms, ce n'est pas le gouvernement qui a fait les démarches éventuelles, si c'était confirmé, qui pourraient entrainer des poursuites, le gouvernement est totalement étranger à cette situation-là.
CHRISTOPHE BARBIER
Mais le gouvernement pourrait demander que l'on ouvre une enquête pour savoir comment le secret de l'instruction a été violé.
ALAIN VIDALIES
Mais, le gouvernement, les procureurs de la République, les juges d'instruction, s'ils estiment qu'effectivement c'est nécessaire, ils le feront. Le gouvernement respecte l'indépendance de la justice, dans cette affaire, comme dans les autres, et c'est assez nouveau. C'est assez nouveau, et j'ajoute qu'il n'y a pas simplement les mots qui comptent, mais les actes, et le gouvernement a annoncé, le président le souhaite, que l'on reprenne la réforme du Conseil supérieur de la magistrature, là on verra vraiment qui est pour l'indépendance de la justice, qui finalement ne l'est que dans les mots et jamais dans les faits, puisque la droite a été absente au rendez-vous que l'on avait déjà donné sur la réforme du CSM.
CHRISTOPHE BARBIER
Quand est-ce que ça sera programmé, cette réforme du CSM ? C'est une réforme constitutionnelle, c'est important.
ALAIN VIDALIES
C'est une réforme constitutionnelle, il nous faut une majorité des 3/5ème, comme nous n'avons pas à nous tout seul, l'ensemble des groupes de gauche, cette majorité, il nous faut des voix des républicains de droite. La première fois ils ont voté contre, en disant que c'était une opération politicienne. On voit bien que c'est une question qui est fondamentale pour la République, donc avant la fin de cette année, de toute façon, ces textes reviendront devant le Parlement, avec l'objectif, effectivement, d'avoir une majorité des 3/5ème.
CHRISTOPHE BARBIER
Et un congrès, donc, pour le ratifier. François HOLLANDE veut aussi limiter les remontées d'informations du Parquet vers le garde des Sceaux. Honnêtement personne ne croit que le pouvoir cessera d'être au courant des affaires. Comment établir cette étanchéité ?
ALAIN VIDALIES
Ça on peut effectivement reprendre la question, le débat. Il y a l'instruction qui a été donnée par madame TAUBIRA, vous savez que l'on a divisé par 5 le nombre de remontées. Est-ce qu'il faut aller au-delà, le président de la République a ouvert cette piste, elle est tout à fait possible. Le nombre d'affaires, qui au fond méritent d'être remontées, ce sont lesquelles ? Ce sont celles dans lesquelles ce n'est pas les personnes en cause qui comptent, mais la nature du droit. Si on parle de l'affaire que tout le monde a à l'esprit, c'est vrai que la question de, dans quelle possibilité on peut écouter la conversation entre un avocat et son client, c'est une question, je l'ai dit, que d'ailleurs le procureur de Paris en parle, qui était, qui est difficile, qu'il a tranché, sur laquelle il a émis une opinion.
CHRISTOPHE BARBIER
Mais c'est normal que le garde des Sceaux soit au courant de certaines affaires, quand même, c'est la sûreté de l'Etat, parfois, qui est engagée.
ALAIN VIDALIES
Si c'est… voilà, vous avez fait la question et la réponse. Si c'est le terrorisme, et si c'est des questions de ce type, c'est normal que le gouvernement…
CHRISTOPHE BARBIER
Même si c'est de la politique ?
ALAIN VIDALIES
Même les affaires pénales, vous savez, c'est un problème de culture. Il faut que l'on change de culture. Ce qui me frappe, par exemple, c'est que parfois, à l'Assemblée nationale, vous avez des députés, encore récemment, un député UMP qui a posé une question au gouvernement, sur un procès d'Assises en cours. Il faut qu'on change de culture. Soit on est pour l'indépendance, et nous le sommes tous, et alors il faut respecter le travail de la justice.
CHRISTOPHE BARBIER
Selon certains journaux, Yamina BENGUIGUI aurait oublié de déclarer une somme d'argent qu'elle possédait en Belgique, lors de sa déclaration de patrimoine. On apprend ce matin qu'Anne HIDALGO la retirera de sa liste entre les deux tours, si c'est confirmé. Est-ce que vous, vous confirmez ça ?
ALAIN VIDALIES
Non, je ne confirme pas. Il y a, j'ai vu les articles de presse, il y a la réponse qu'elle a donnée, et puis nous avons voté une loi. C'est une loi sur la transparence, d'abord c'est le résultat de cette loi, il faut quand même le remarquer. La déclaration de patrimoine obligatoire, la publication de cette déclaration, je précise que les membres du gouvernement ont fait une nouvelle déclaration il y a quelques semaines, comme la loi que j'avais portée, les y obligeaient, et puis il y a la Haute autorité. Aujourd'hui, c'est la Haute autorité qui doit contrôler, poser les questions à l'intéressé s'il y a des questions à poser, je n'en sais rien, et il faut bien rappeler que sur cette question de la transparence, là aussi, comme sur l'indépendance de la justice, il n'y a pas que les mots, il y a les actes. Nous avons fait une loi sur la transparence, il y a une Haute autorité qui va contrôler…
CHRISTOPHE BARBIER
Donc Yamina BENGUIGUI donnera…
ALAIN VIDALIES
Bien sûr, et nous étions tout seul, la droite n'était pas non plus à ce rendez-vous.
CHRISTOPHE BARBIER
Dernière affaire, sans lien, Jérôme KERVIEL ira en prison, mais la justice veut un nouveau procès pour savoir ce qui s'est passé avec l'argent de la SOCIETE GENERALE. Est-ce que vous vous en félicitez ?
ALAIN VIDALIES
Ecoutez, je vais essayer d'être cohérent, je ne vais pas me féliciter ou pas me féliciter d'une décision de justice, je la respecte et j'en prends acte.
CHRISTOPHE BARBIER
Jean-Marc AYRAULT vient de déclarer qu'il ne doit pas y avoir de maire FN et que les citoyens doivent tout faire pour cela. Est-ce à dire que la gauche tendra la main à l'UMP, pour faire des fronts républicains, là où le FN peut gagner ?
ALAIN VIDALIES
La gauche a une seule position dans cette affaire, qui est une position claire, nous ferons tout, dans chaque ville, pour éviter qu'il y ait un maire Front national, y compris la circonstance que vous évoquez.
CHRISTOPHE BARBIER
Mais la gauche va gagner, ou garder des villes grâce aux triangulaires du Front national, vous vous en frottez les mains, quand même, de la hausse du FN.
ALAIN VIDALIES
Est-ce que la hausse du Front national est le résultat de la politique menée par le gouvernement…
CHRISTOPHE BARBIER
Un peu, échec sur le chômage, colère sociale, vote FN.
ALAIN VIDALIES
C'est votre appréciation. Je pense que, y compris ceux qui ont fait tomber les digues entre la droite républicaine et le Front national, ceux qui encore aujourd'hui, pour faire suite à votre question, sur qu'est-ce qu'il faut faire au second tour, n'ont pas un discours républicain, comme monsieur COPE qui dit : ni Front national, ni…
CHRISTOPHE BARBIER
Ni PS.
ALAIN VIDALIES
Ni PS. Franchement, nous on ne dit pas ça, on a une réponse, et quand on voit…On peut parler des affaires de monsieur BUISSON etc., quand on voit ce qui s'est passé entre la droite et l'Extrême droite, pendant la campagne des élections présidentielles, oui, la digue est tombée, mais ceux qui en portent la responsabilité, sur le plan politique, sont ceux qui aujourd'hui voudraient s'en laver les mains.
CHRISTOPHE BARBIER
Un remaniement après les municipales, c'est naturel.
ALAIN VIDALIES
C'est une question à poser au président de la République.
CHRISTOPHE BARBIER
Mais, ça serait assez logique.
ALAIN VIDALIES
Il y a une sorte de cohérence.
CHRISTOPHE BARBIER
Vincent PEILLON va faire campagne en péniche pour les européennes. On peut rester ministre et faire campagne en péniche ?
ALAIN VIDALIES
Oui, ça a déjà… enfin, surtout faire campagne, après sur les moyens, chacun prend ses choix, mais je crois que, aujourd'hui, il y a déjà eu des parlementaires, des ministres, qui ont fait des campagnes électorales, il va le faire et il va bien le faire.
CHRISTOPHE BARBIER
Toute dernière question. Les négociations s'achèvent sur l'assurance chômage aujourd'hui. Confirmez-vous que : les intermittents du spectacle, on ne touche pas ?
ALAIN VIDALIES
On n'y touche pas, c'est la position qui a été donnée par le gouvernement, qui a été réitérée, il circule beaucoup de fausses informations sur cette affaire et notamment sur ce que ça coûte globalement. Nous souhaitons que le système reste tel qu'il est.
CHRISTOPHE BARBIER
Alain VIDALIES, merci, bonne journée.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 21 mars 2014