Déclarations de M. André Vallini, secrétaire d'Etat à la réforme territoriale, et de Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la fonction publique, sur les principaux objectifs de la réforme territoriale, à l'Assemblée nationale le 27 mai 2014.

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Circonstance : Débat sur la réforme territoriale, à l'Assemblée nationale le 27 mai 2014

Texte intégral

M. André Vallini, secrétaire d'État chargé de la réforme territoriale. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je veux, pour ma part, vous livrer quelques éléments pour répondre à la plupart des interlocuteurs du Gouvernement. Je les remercie de l'avoir éclairé ce soir,…
M. Jean-Frédéric Poisson. Il était temps !
M. André Vallini, secrétaire d'État. …par leurs propositions, par leurs critiques aussi – elles sont toujours utiles –, à l'initiative du groupe UDI, particulièrement de Michel Piron, dont je salue l'engagement puisqu'il s'intéresse à ces questions territoriales depuis longtemps.
D'abord, les objectifs de cette réforme sont au nombre de trois.
Le premier, auquel nous souscrivons sur tous les bancs, je le dis après vous avoir écoutés attentivement, est de rendre l'organisation territoriale de la République plus claire, plus simple, plus lisible. Plus lisible par nos concitoyens d'abord, bien sûr – c'est la règle en démocratie : que les citoyens y voient clair dans le fonctionnement de leurs institutions –, mais aussi par les élus locaux. Plusieurs d'entre vous l'ont dit : les élus locaux, communaux notamment, ne s'y retrouvent plus toujours vraiment devant l'empilement des structures territoriales depuis une vingtaine d'années et l'enchevêtrement de leurs compétences.
Le deuxième objectif découle du premier : avec une organisation plus simple et plus lisible, le fonctionnement de l'organisation territoriale de la République sera plus efficace. Ce souci d'efficacité a été évoqué par la plupart d'entre vous, c'est le souci du Gouvernement.
Il est évident qu'en supprimant les doublons, pas tous mais beaucoup de ceux qui existent aujourd'hui en termes de compétences des communes, des intercommunalités, des départements et des régions, et en réalisant des économies d'échelle, nous pourrons faire des économies budgétaires.
M. Maurice Leroy. Très bien !
M. André Vallini, secrétaire d'État. C'est le troisième objectif, qui découle directement des deux précédents. J'insiste sur cet objectif : nous ne devons pas avoir les économies budgétaires honteuses, notamment sur le plan territorial. Manuel Valls l'a rappelé dimanche, au soir de ce triste jour d'élections. Il a fait une déclaration dans laquelle il a évoqué la réforme territoriale, en lui fixant ces trois objectifs : une organisation plus simple et plus claire, un fonctionnement plus efficace et des économies. Les économies, elles existent. Des chiffres ont été avancés, par moi-même, dans la presse ; je les assume, et je vais y revenir. Mais avant de parler de ces fameux 12 à 25 milliards d'euros, je veux évoquer quelques exemples qui figurent dans de nombreux rapports à votre disposition. Vous connaissez ces rapports ; il s'agit du rapport Malvy-Lambert, le dernier en date, du rapport Queyranne sur les interventions économiques en faveur des entreprises, de rapports de l'OCDE, de rapports de la Cour des comptes.
Prenons donc quelques exemples.
Les fonctions achat et charges externes représentent 7,6 milliards d'euros pour les départements et les régions. En regroupant les appels d'offres, des économies substantielles peuvent être faites.
M. Maurice Leroy. C'est vrai !
M. André Vallini, secrétaire d'État. Vous l'avez fait en Loir-et-Cher, avec le département voisin, monsieur Leroy. Le rapport Malvy-Lambert montre que les groupements d'achats permettent des gains substantiels estimés entre 10 % et 15 % du total. Appliquez ce pourcentage à 7,6 milliards d'euros, et vous mesurerez les économies budgétaires potentielles que cette réforme territoriale peut entraîner.
M. Maurice Leroy. Tout à fait !
M. André Vallini, secrétaire d'État. Deuxième exemple, le développement économique représente aujourd'hui, entre communes, intercommunalités, départements et régions, un total de 33 milliards d'euros de dépenses locales. Le rapport Malvy-Lambert, toujours lui, et le rapport Queyranne sur les aides économiques sont édifiants : 14 500 emplois en équivalent temps plein pour s'occuper du développement économique si l'on ajoute aux collectivités les agences de développement, des coûts salariaux qui approchent 600 millions d'euros, des flux croisés de financement entre collectivités à hauteur de 5,7 milliards d'euros, chaque niveau de collectivité versant à peu près 1,7 milliard d'euros de subventions aux autres collectivités. Le transfert du développement économique aux seules régions et le maintien de l'aide à l'immobilier d'entreprise au seul bloc communal permettraient des économies de l'ordre de 10 %, soit 3,3 milliards d'euros. Limitons-nous à 5 %, cela fera encore 1,6 milliard d'euros.
Troisième exemple, en matière d'organisation communale et intercommunale, beaucoup d'entre vous l'ont dit, les gisements d'économies sont considérables, grâce à la mutualisation évidemment et aux fusions d'EPCI, pour arriver à la taille critique de 10 000, voire 20 000 habitants. On peut considérer qu'en faisant 5 % d'économies sur le seul bloc des communes, intercommunalités et syndicats intercommunaux – ceux-ci sont encore au nombre de 13 400, avec 17 milliards d'euros de budget, dont 9 milliards d'euros en fonctionnement –, en faisant 5 % d'économies sur ce bloc, donc, on arrive à 7 milliards d'euros d'économies.
Quatrième exemple, qui concerne la question des personnels : si l'on stabilise les effectifs de la fonction publique territoriale, qui compte 1,9 million d'agents territoriaux, sur les cinq prochaines années, on économise à peu près 6 milliards d'euros, puisque, depuis cinq ans, ces effectifs ont crû de 1,6 % par an.
M. Charles de Courson. Ce ne sont pas des économies, ce sont des non-dépenses !
M. André Vallini, secrétaire d'État. Enfin, dernier exemple, au-delà de la réforme territoriale stricto sensu, il y a bien sûr la réforme de l'État, Marylise Lebranchu va en parler, et puis il y a les normes, qui sont à cheval, si j'ose dire, entre l'État et les collectivités locales. Le Gouvernement a décidé de stopper l'inflation normative. Il faut savoir qu'en 2013, les normes réglementaires nouvelles ont pesé pour 1,85 milliard d'euros sur les collectivités, qu'il s'agisse des communes, des intercommunalités, des départements ou des régions. Si on décide de diminuer de moitié ces normes sur cinq années, on économise près de 4,5 milliards d'euros.
Voilà les exemples précis que je voulais vous donner, mais j'en ai d'autres. Je ne veux cependant pas m'exprimer trop longuement.
Je veux aussi vous dire qu'il y a une autre méthode pour calculer les économies potentielles. C'est celle qui relève du volontarisme politique. Si l'on économise 5 % sur les 250 milliards d'euros que représentent l'ensemble des budgets locaux – communes, intercommunalités, syndicats intercommunaux, départements, régions –, on réalise 12 milliards d'euros d'économies, à moyen terme, sur plusieurs années, après une réforme globale, évidemment. Certains, plus optimistes, parlent d'aller jusqu'à 10 %, c'est-à-dire 25 milliards d'euros, mais je m'en tiens à l'objectif, plus raisonnable et plus réaliste, de 5 % à moyen terme, sur au moins cinq années.
M. Jean-Frédéric Poisson. L'État les prend déjà !
M. André Vallini, secrétaire d'État. Monsieur le député, 5 % ! Vous pensez que c'est impossible ? Alors il faut arrêter de faire de la politique ! Si on ne peut pas économiser 5 % sur cinq ans sur 250 milliards d'euros, il faut arrêter de faire de la politique.
M. Laurent Furst. Il ne fallait pas faire la réforme des rythmes scolaires, qui coûte déjà des milliards !
M. André Vallini, secrétaire d'État. Cela s'appelle le volontarisme. Un hebdomadaire satirique paraissant le mercredi appelle cela « le doigt mouillé ». Moi, j'appelle ça le volontarisme politique, et je l'assume.
M. Maurice Leroy. Très bien !
M. André Vallini, secrétaire d'État. J'en viens aux départements, aux conseils généraux. Je veux répondre à Roger-Gérard Schwartzenberg. Oui, le conseil général de l'Isère a été très utile, pas seulement depuis treize ans, pas seulement, donc, depuis que j'ai accédé à sa présidence, en 2001, mais depuis trente ans, avec des présidents de droite comme de gauche. Le conseil général, en Isère, comme en Savoie, cher Hervé Gaymard, comme dans tous les départements de France, fait du bon travail. Depuis trente ans, ils ont assumé de lourdes compétences, lourdes à tous les sens du terme, notamment sur le plan social : les routes, les collèges et les transports scolaires, bien sûr. On sait bien qu'il y a trente ans, Gaston Defferre et Pierre Mauroy ont transféré beaucoup plus de compétences aux départements qu'aux régions. Je le répète, les conseils généraux se sont montrés dignes de la confiance qui leur a été faite au début des années quatre-vingt.
Mais depuis trente ans un élément nouveau est apparu dans le paysage administratif territorial : les intercommunalités. Elles ont évidemment remis en cause la pertinence des conseils généraux, non dans tous les départements mais dans de nombreux départements.
Prenons l'exemple de l'Isère. L'agglomération de Grenoble, bientôt une métropole, passe des conventions avec la communauté d'agglomération du Pays voironnais, autour de Voiron, et avec la communauté de communes du Pays du Grésivaudan, chère à votre collègue François Brottes, du côté de Chambéry. Ces conventions sur les transports, sur le développement économique entre ces trois communautés se font sans le conseil général. Je ne suis même pas invité à leur signature, sauf peut-être lorsqu'il s'agit d'inaugurer une nouvelle ligne de transport ou l'implantation d'une entreprise. Dans cette partie du département de l'Isère, le conseil général est moins pertinent qu'il y a trente ans, parce que, depuis trente ans, je le répète, depuis quinze ans surtout, avec la loi Joxe et, plus particulièrement, la loi Chevènement de 1999, les intercommunalités sont montées en puissance.
Personne ne veut supprimer le département : il y aura toujours, bien sûr, mesdames et messieurs les députés, un département de la Savoie, un département du Maine-et-Loire, un département du Finistère, un département du Morbihan, un département d'Ille-et-Vilaine, un département des Côtes-d'Armor et un département de la Loire-Atlantique. (Sourires.) Il n'est pas question de supprimer le département, il est question de remettre en cause le rôle actuel des conseils généraux. Je reprendrai l'expression de François Hollande puisque vous l'avez beaucoup cité. Il est bien de citer le Président de la République, mais il faut le citer correctement. À Tulle, en Corrèze, il a dit qu'il n'était pas question de la suppression pure et simple des conseils généraux. J'insiste sur ces mots : suppression pure et simple. (Exclamations et sourires sur de nombreux bancs.) Je sens que cet éclairage vous manquait.
J'en viens à la fiscalité et aux finances locales. Monsieur de Courson, vous avez raison : la réforme territoriale ne va pas sans la réforme de l'État, et les deux ne vont pas sans la réforme de la fiscalité nationale et locale. Et nous y travaillons avec Marylise Lebranchu, Christian Eckert et Michel Sapin.
En ce qui concerne, enfin, le découpage des régions, j'ai entendu tout ce qui s'est dit ce soir. C'est passionnant, et je suis comme vous, comme la plupart des Français : j'adore l'histoire de France, j'aime aussi la géographie. On se passionne pour ce découpage : chacun essaie de voir quelle région pourrait aller avec quelle autre, quel département pourrait être détaché de quelle région pour être rattachée à une autre. Le découpage idéal n'existe pas. Il y a plusieurs façons d'envisager ce futur découpage. Ça compte, l'histoire, y compris l'histoire de l'Ancien Régime. On peut être républicain et se souvenir des provinces de la monarchie. Il faut prendre en compte la géographie, les bassins de vie, bien sûr, et la démographie. Il faut prendre en compte, aussi, comme l'a dit M. Fromantin – c'est un éclairage tout à fait nouveau, novateur, innovant –, la question des hinterlands et les ports maritimes. J'en ai parlé avec lui la semaine dernière et tout cela est passionnant.
Je veux simplement vous dire que l'on peut consulter à l'infini. On peut demander leur avis aux élus nationaux, sénateurs et députés, aux élus régionaux et aux conseillers généraux ; on peut aussi organiser des référendums locaux… In fine, faudra bien trancher. Michel Piron l'a rappelé : il y a cinq ans déjà, en 2009, le rapport du Comité pour la réforme des collectivités territoriales – dit comité Balladur – s'intitulait Il est temps de décider. Aujourd'hui, il est temps d'agir. L'État prendra ses responsabilités : le Gouvernement proposera une carte des régions après avoir écouté tout le monde.
Les conseils généraux font connaître leur opinion, non seulement à propos de l'avenir du département comme collectivité territoriale, mais aussi au sujet du rattachement éventuel de tel ou tel département à telle ou telle région ; les présidents de région, eux aussi, se font entendre – Marylise Lebranchu et moi-même en recevons beaucoup – ; mais à la fin, je le répète, c'est au Gouvernement qu'il reviendra de prendre ses responsabilités et de proposer au Parlement une nouvelle carte des régions.
Quant aux élections régionales et cantonales, je veux rassurer M. Marleix, M. Gaymard et tous ceux qui s'inquiètent de savoir si elles auront bien lieu : oui, elles auront lieu en temps utile, lorsque la réforme aura été adoptée par le Parlement. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Maurice Leroy. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique. Je ne ferai qu'ajouter quelques éléments à ce que vient de dire André Vallini.
Tout d'abord, il faut se féliciter de la qualité du débat que nous avons eu ce soir. On nous a beaucoup reproché des hésitations, mais je n'ai pas eu le sentiment, en écoutant les orateurs des différentes familles politiques, que leurs positions étaient totalement verrouillées. Si nous devions voter la réforme ce soir, peut-être même atteindrions-nous la majorité requise pour réviser la Constitution ! N'est-ce pas, monsieur Leroy et monsieur Piron ?
M. Maurice Leroy et M. Michel Piron. C'est ce que nous devrions faire !
M. Marc Dolez. Nous sommes ici par la volonté du peuple, mais nous n'en sortirons qu'après avoir adopté la réforme ! (Sourires.)
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Nous pouvons nous accorder sur le constat que ce débat transcende les clivages partisans. Avant de répondre à Jean-Yves Le Bouillonnec – qui me fait savoir qu'il nous regarde derrière un écran, non loin d'ici –, je voudrais répondre à M. Gaymard et aux autres députés qui se sont inquiétés du rapport entre les métropoles et la ruralité.
On ne peut pas légiférer de la même manière pour tous les territoires. Il faudra sans doute, pour la montagne comme pour les zones rurales, prendre en compte un coefficient de densité : j'en ai déjà discuté avec quelques-uns d'entre vous.
M. Michel Piron et M. Maurice Leroy. Très bien !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. On ne peut pas retenir que la distance ; deux intercommunalités comptant 20 000 habitants peuvent être très différentes de ce point de vue. Le coefficient de densité est ainsi le correctif le plus intéressant pour mieux prendre en compte la ruralité.
M. Michel Piron. Certainement !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Quoi qu'il en soit, je trouve que certains discours, qui opposent les métropoles et la ruralité, posent problème. Il faut faire attention à cette manière de parler de la ruralité. Tous les territoires ont un rôle à jouer dans le redressement de la France. J'ai souvent dit que tous, quels qu'ils soient, sont des facteurs de production : l'indépendance alimentaire, par exemple, est à ce prix. On a parfois tendance à se reposer sur de vieux réflexes, au lieu de parler politique et de suivre la voie de la raison : nous devons tous renoncer à ces attitudes, à ces prises de position irréfléchies qui peuvent parfois déboucher sur des scrutins comme celui de dimanche dernier.
Je crois que le point de vue exposé par Jean-Yves Le Bouillonnec mérite d'être repris. C'est pourquoi je prolonge, ce soir, l'intervention d'André Vallini. Il est vrai que dans la métropole parisienne, l'hyper-richesse et l'hyper-pauvreté forment un contraste terrible. C'est parce que nous avons fait ce constat, parce que nous avons observé que l'hyper-richesse côtoie l'hyper-pauvreté dans une région métropolitaine qui représente 31 % du PIB et 35 % des bases de CVAE – madame Pirès-Beaune, vous savez tous ces chiffres par cœur –, que nous avons décidé de faire la métropole du Grand Paris. La solidarité sera la base même de cette métropole capitale.
Jean-Yves Le Bouillonnec a évoqué le fameux article 12 de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles. Il est vrai que la notion de territoire pose problème dans la métropole du Grand Paris. En effet, en de nombreux endroits, des habitudes ont été prises qui favorisent l'entre-soi. Il peut s'agir d'une solidarité choisie par ceux qui détiennent assez de richesses, ou d'une solidarité en quelque sorte forcée. Des établissements publics intercommunaux ont été créés pour accueillir tel ou tel pôle de développement – je pense, par exemple, à la communauté d'agglomération Plaine Commune en Seine-Saint-Denis.
J'ai bien pris note des arguments développés tout à l'heure par Jean-Yves Le Bouillonnec. Autant les arbitrages n'ont pas été rendus sur ce sujet-là, autant je suis d'accord néanmoins avec la nécessité de repenser ces fameux territoires, mais en respectant une ligne rouge : si nous y remettons de la fiscalité, nous ferons exploser le système de développement solidaire de la capitale que nous avons essayé de construire. Il est en revanche possible de parler des ressources à partir des communes ou à partir de la métropole.
Sur cette question, je pense que nous devons travailler avec l'ensemble des parlementaires volontaires, ici comme au Sénat. Je suis d'accord avec l'idée que nous devons permettre une évolution pour aider ceux qui construisent la métropole du Grand Paris. Je réponds donc oui à Jean-Yves Le Bouillonnec : nous pouvons parler à nouveau de l'article 12 de la loi d'affirmation des métropoles, mais sans franchir la ligne rouge de la fiscalité.
J'ajouterai encore un mot à propos de la réforme de l'État. Même si certains d'entre vous les ont défendus plus que d'autres, vous avez tous reconnu que les départements ont du mal à exister dans le système institutionnel français parce que les intercommunalités prennent de plus en plus d'importance. Mais indépendamment du choix que fera le législateur à propos des régions et des départements, l'État doit se poser des questions à propos de son organisation territoriale. Que deviendront les différentes zones thématiques : zones de défense, zones de gendarmerie, zones de ceci, zones de cela comme je l'ai entendu cet après-midi ? Que deviendront les ressorts des cours d'appel ? Le préfet de région pourra-t-il discuter avec le directeur de l'Agence régionale de santé, avec le recteur d'académie ? Faut-il imaginer, comme certains l'ont proposé, une « tour de contrôle unique de l'État » ?
Si l'on veut redonner de la cohérence à l'action de l'État, il faut que ses services arrêtent de fonctionner en silos – on le sait depuis longtemps – et prennent en compte les territoires. À l'heure actuelle, dans les territoires reconnus comme en difficulté, les services de l'État agissent en ordre dispersé : on définit une zone de sécurité prioritaire, suivie ou précédée d'une zone d'éducation prioritaire, elle-même suivie ou précédée d'une zone d'aménagement prioritaire ou d'une zone d'urbanisme prioritaire, etc. On ne peut pas continuer à agir ainsi ! Ne pourrait-on pas mettre en place, dans les territoires connaissant des difficultés – quelle que soit la nature de ces difficultés, qui diffèrent beaucoup d'un territoire à l'autre –, des zones d'action publique prioritaire de l'État afin de leur permettre de s'en sortir ?
À force de définir des priorités les unes après les autres, on manque sans doute de cohérence. Pour gagner en cohérence, l'État doit remettre en question les zonages qu'il définit, ses propres interventions. Ce dossier, la réforme de l'État, doit être abordé dès la fin de cette semaine. Il faut l'examiner de façon cohérente, avec beaucoup de calme, de sérénité et d'apaisement, et pour cela il faut étudier de concert l'organisation territoriale de la République et l'administration territoriale de l'État conduite par le ministre de l'Intérieur. J'ai bien pris note de ce que vous avez dit, les uns et les autres : nous nous engageons à ce que cette réforme des institutions s'accompagne d'une réforme de l'organisation territoriale de l'État. Elle doit être mise en cohérence avec la réforme de l'État tout court.
M. Maurice Leroy. Très bien !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Il est vrai que cela va se faire facilement. Mesdames et messieurs les députés, vous avez parlé – André Vallini l'a rappelé – des simplifications réalisées grâce au Conseil national d'évaluation des normes applicables aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, instance que vous avez créée. Elle donnera encore des résultats.
Dès demain, nous pourrons – si nous en avons le temps – relire toutes les interventions de ce soir. Compte tenu des engagements qui ont été pris, notamment au sujet de la réforme de l'État, je pense que le redressement de la France est possible. Je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)
source http://www.assemblee-nationale.fr, le 2 juin 2014