Déclaration de M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire de la ville et de l'intégration, sur les priorités et les moyens financiers prévus en 1997 pour la politique d'aménagement du territoire, à l'Assemblée nationale le 7 novembre 1996, et au Sénat le 5 décembre.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Jean-Claude Gaudin - Ministre de l'aménagement du territoire de la ville et de l'intégration

Circonstance : Présentation du budget 1997 de l'aménagement du territoire de la ville et de l'intégration, à l'Assemblée nationale le 7 novembre 1996, et au Sénat le 5 décembre

Texte intégral

Monsieur le Président,

Messieurs les Présidents,
Messieurs les Rapporteurs et Orateurs,
Mesdames et Messieurs les Députés,

Il y a exactement un an, jour pour jour, je faisais mon entrée au Gouvernement. La tâche qui n'était confiée par le Premier ministre était claire : lutter contre les déséquilibres et redonner une perspective d'avenir à l'ensemble des territoires les plus défavorisés de notre pays, qu'ils soient urbains ou ruraux.

Réunir au sein d'un même ministère, les politiques de la ville et de l'Aménagement du Territoire, c'était aussi donner un signal clair à nos concitoyens. C'était réaffirmer que l'aménagement du territoire concerne notre pays dans toutes ses composantes, rurale, urbaine, montagnarde et littorale. C'était aussi vouloir tout mettre en œuvre pour qu'à la fracture Sociale si justement dénoncée par le Président de la République, ne vienne se rajouter une fracture territoriale.

Un an plus tard, je considère qu'un travail considérable a été accompli dans ces domaines, et c'est avec une certaine satisfaction que je viens vous en présenter le bilan et les perspectives, notamment à travers le budget que j'ai l'honneur de soumettre, aujourd'hui, à l'approbation de votre Assemblée.

Je devrais présenter mon budget sans distinguer les crédits de l'aménagement du territoire, de ceux de la ville et de l'intégration tant il est vrai que la politique de la ville fait partie intégrante de la politique d'aménagement du territoire, les quartiers en difficulté constituant bien des portions de notre territoire parmi les plus défavorisées.

Je préfère détailler les choses pour vous expliquer clairement mon budget, en particulier pour ce qui crédits de l'aménagement du territoire, que je traiterai dans un premier temps. J'aborderai ensuite, le budget de la Ville et de l'Intégration, mais plus rapidement puis qu’Eric Raoult complétera non propos.

Je voudrais tout d'abord remercier les rapporteurs, Yves Deniaud et Claude Girard pour la Commission des Finances, Patrick Ollier Et Thierry Mariani pour la Commission de la Production et des Échanges, et Michel Ghysel pour la Commission des Affaires sociales, pour la qualité et l'importance de leur travail et la pertinence de leurs observations.

Le budget de l'Aménagement du Territoire est en baisse en 1997 puisque les crédits de paiements s'élèvent, dans le projet qui vous est soumis, à 1.670 millions, et les moyens d'engagement à 1 869 millions.

Je crois avoir expliqué en détail, lors des auditions en commissions, ce que la seule lecture des c permettait pas toujours de comprendre. Messieurs les rapporteurs, j'ai bien relevé vos conclusions et je suis rassuré, mes arguments ont été entendus et compris. Je n'y reviendrai donc pas.

Je vais plutôt m'attacher à vous préciser ce qui sera fait pour l'aménagement du territoire en 1997, et préciser sur certains points ma capacité réelle d'intervention l'année prochaine, ne serait-ce que pour répondre à plusieurs interrogations qui ont été émises par les orateurs qui se sont succèdés avant moi.

Premièrement, 1997 sera une année très importante pour l'aménagement du territoire.

1996 a été la première année de pleine mise en œuvre de la loi d'orientation votée en février 1995.

Mon ministère a en effet, accompli un travail considérable : des dizaines de décrets et de circulaires ont été pris pour mettre en application la loi d'orientation. On dit que je m'occupe beaucoup de la ville. C'est pourtant moi qui ai fait sortir le décret qui délimite les zones de revitalisation rurale (ZRR), pour lesquelles j'ai débloqué, deux mois seulement après ma prise de fonctions, l'accord qui tardait depuis un an de Bruxelles.

Mon rôle ne s'est d'ailleurs pas limité à la mise en œuvre des ZRR telles qu'elles ressortaient de la loi d'orientation. J'ai en effet constaté que le dispositif devait être amélioré puisqu'il comportait des lacunes. J'ai donc, dans le projet de loi mettant en œuvre le Pacte de relance pour la ville, amélioré le dispositif des ZRR en ajoutant, comme M. Sauvadet l'avait si bien préconisé dans une proposition de loi, d'une part, l'exonération des cotisations sociales patronales pour les deuxième et troisième salariés alors que la loi d'orientation ne prévoyait des exonérations qu'à compter du quatrième salarié. J'ai, d'autre part, élargi le champ des entreprises éligibles à ces exonérations. Au terme de ces améliorations le coût des ZRR est évalué à 1 milliard, somme qui, pour ne pas figurer dans mon budget n'en intervient pas moins en faveur de l'aménagement du territoire.

Je compte apporter d'autres améliorations encore, car la loi d'orientation restreint, par exemple, les exonérations de taxe professionnelle à certains secteurs d'activité et les seuils d'éligibilité sont si- élevées que le cumul de ces conditions prive la mesure d'une part de l'effet qui était recherché.

C'est pourquoi, je vais proposer d'étendre le bénéfice des exonérations de taxe professionnelle applicables dans les ZRR, aux entreprises du secteur du commerce et de l'artisanat, actuellement exclues, aux termes même de la loi d'orientation.

Ainsi je fais mieux qu'appliquer la loi d'orientation. Je l'ai améliorée en 1996 et je continuerai de l'améliorer.

Vous avez bien sûr, appelé mon attention sur quelques aspects de la loi qui n'avaient pas encore fait l'objet de décisions concrètes.

Vous avez été plusieurs à rappeler l'absence de dotation du FNDE, le fonds national de développement des entreprises. Je vous rappellerai seulement que le Gouvernement a pris d'autres mesures qui répondent en partie aux objectifs assignés au FNDE, comme par exemple la création d'une banque des PME. J'envisage, pour ma part, des mesures complémentaires dans le plan pour le monde rural que je prépare et sur lequel je reviendrai tout à l'heure.

Messieurs Ollier et Faure ont rappelé que la loi d'orientation avait prévu la création d'un groupement d'intérêt public d'observation et d'évaluation de l'aménagement du territoire.

Cette structure est sans aucun doute très utile pour assurer une meilleure évaluation des politiques d'aménagement du territoire et le recueil de l'ensemble des informations dans ce domaine. J'y suis très favorable et ça fait plusieurs mois que j'essaie de créer ce GIP. Mais cet organisme d'un type nouveau pose de sérieux problèmes juridiques dont le moindre n'est pas la participation du Parlement à son financement.

Je viens donc de saisir le vice-Président du Conseil d’État, en lui demandant une réponse rapide sur la meilleure façon de créer ce GIP.

Quoi qu'il en soit 1996 m'aura permis de donner une réalité très concrète à la loi d'orientation et de ne pas faire, n'en déplaise à M. Balligand, que du papier car, au-delà du travail de fond, se sont ajoutés, cette année, beaucoup de vigilance et de persuasion. Je ne citerai que le cas de la Banque de France, auquel M. SAUMADE a fait allusion hier soir, dont j'ai récemment obtenu du Gouverneur qu'elle renonce à son programme brutal de fermeture de ses succursales de province.

1997, sera à son tour une importante année pour l'aménagement du territoire.

J'ai en effet d'ores et déjà engagé deux chantiers qui, bien qu'ils n'aient pas de traduction budgétaire à ce stade, n'en restent pas moins majeurs.

En premier lieu, j'ai préparé un plan en faveur du monde rural, qui est d'ores et déjà soumis à la concertation interministérielle, et qui constitue, après le Pacte de Relance pour la ville et le dossier de la zone franche Corse, le troisième grand volet de mon action en faveur des zones les plus défavorisées de notre territoire.

Par souci d'équité, ce plan pour le monde rural est pour moi une priorité. L'effort important engagé par l’État en faveur des quartiers en difficulté et de la Corse doit en effet être équilibré par une action d'ampleur comparable en direction des campagnes car les Français ne comprendraient pas que nos campagnes ne fassent pas l'objet de la même sollicitude.

Le plan pour l'avenir du monde rural traitera de quatre grands thèmes :
      - premièrement, le maintien et le développement des activités, au moyen de dispositions s'adressant plus particulièrement aux petites entreprises ;
      - deuxièmement, l'habitat ;
      - troisièmement, des mesures viseront à assurer non seulement la présence mais aussi la qualité des services publics collectifs essentiels ;
      - enfin, des mesures viseront à améliorer l'organisation du territoire, d'une part, en confortant les petites villes et les bourgs-centres, et d'autre part, en donnant une nouvelle impulsion à la politique des pays.
      
Bien sûr les nombreuses propositions de ce plan pour le monde rural ne pourront toutes être retenues à l'issue de la concertation interministérielle en cours.

Il reste que ce plan permettra de mieux organiser les politiques publiques et de focaliser, vers les zones rurales, des moyens supplémentaires qui ne figurent pas encore dans mon budget. Mais puis-je à ce stade redire une nouvelle fois que je ne disposais pas non plus de crédits dans mon budget 1996 pour faire le Pacte de Relance pour la ville et que ceci ne m'a pourtant pas empêché de faire progresser la politique de la ville de manière décisive.

Deuxième grand chantier en 1997 : la présentation au Parlement du Schéma National d'Aménagement et du Territoire.

Ce schéma qui a pour vocation de définir le cadre d'une France mieux équilibrée et plus compétitive, sera, après une large concertation, soumis au printemps au Parler constituera un acte majeur en faveur de l'aménagement du territoire, puisqu'il dictera les orientations que devront respecter toutes les politiques publiques, sans exception, qui ont une incidence territoriale.

Ainsi vous le voyez, faire progresser l'aménagement du territoire c'est avant tout conduire une démarche de projets, dont l'examen des crédits inscrits au budget de mon ministère ne rend que très imparfaitement compte : les zones de revitalisation rurale, la zone franche Corse, le Plan pour le monde rural, le schéma national, n'ont pas de traduction dans mon budget mais constituent pourtant des maillons essentiels de la politique d'aménagement du territoire.

J'ai noté avec satisfaction que Patrick Ollier souscrivait largement à cette idée dans son rapport établi au nom de la commission de la production et des échanges.

II. - Après les projets, je souhaite à présent aborder les moyens financiers consacrés à l'aménagement du territoire en 1997

Tout d'abord, la Prime à l'Aménagement du territoire (PAT), qui permet d'aider les créateurs d'emplois, bénéficiera en 1997 d'une capacité d'intervention comparable à celle de 1996. Et je parle bien en autorisations de programmes, M. Balligand, les crédits de paiements respectant, quant à eux, un échéancier d'ouverture établi de longue date et qui n'est pas modifié.

Sachant que je dispose d'importantes réserves, aurait-il été raisonnable de continuer à ouvrir des crédits nouveaux sur la PAT ? C'est vrai que je suis sorti des sentiers battus pour construire mon budget pour 1997, en allant chercher des crédits là où on n'y pense pas toujours, mais il fallait faire preuve à la fois de rigueur et d'imagination car on ne peut pas vouloir la réduction des impôts, des déficits, des dépenses, et refuser les économies à bon escient, c'est-à-dire celles qui n'entament pas la capacité d'intervention de l’État.

Deuxième instrument d'intervention inscrit sur mon budget, le fonds national d'aménagement et de développement du territoire. Il disposera lui aussi de toutes les ressources nécessaires pour faire face aux besoins de 1997.

Les engagements au titre des contrats de plan État/Régions sont intégralement honorés pour les dépenses de fonctionnement, et les investissements tiennent compte du report d'une année de l'échéance des contrats de plan.

Cet étalement de l'exécution des contrats de plan auquel les régions ne sont pas dans leur majorité hostiles, se justifie pleinement tant par des raisons de calendrier, puisque les schémas régionaux d'aménagement du territoire ne pourront être prêts avant 1998, que par des raisons politiques liées à la date des prochaines élections régionales de 1998. Il est en effet souhaitable que ces contrats soient parachevés et adoptés par les assemblées régionales qui auront à les mettre en œuvre puisque leur durée couvre à peu près celle du mandat des conseils régionaux. Enfin, le décalage d'une année permettra aussi de faire coïncider le démarrage des nouveaux contrats avec celui des programmes financés par les fonds structurels européens qui y participent largement. Néanmoins si des régions souhaitent maintenir un rythme de financements plus élevés, notamment en faisant des avances, je vous précise que le Gouvernement prendra les dispositions utiles pour le permettre.

Les autres crédits du FNADT, qui permettent de financer les opérations non prévues dans les contrats de plan, sont, quant à eux, reconduits, contrairement à ce que M. BALLIGAND a déclaré hier.

Je vous confirme d'ailleurs, car je sais que vous y êtes très attentifs et Patrick OLLIER me l'a rappelé, que les crédits consacrés au développement des zones de montagne s'élèveront au minimum à 27 millions en 1997. Je suis en train de regarder M. OLLIER, s'il ne m'est pas possible de donner un coup de pouce supplémentaire à cette dotation. J'ai également réservé, ce que je n'avais pu faire en 1996, de l'ordre de 100 millions pour les crédits d'investissement libres d'emplois délégués aux préfets, de façon à permettre d'engager de nouvelles actions décidées et gérées directement au plan local.

Enfin, le Premier Ministre vient de m'indiquer d'une part, que je pourrais disposer de 70 millions supplémentaires sur 1996 et d'autre part, que si des économies pouvaient être réalisées dans la discussion parlementaire sur d'autres départements ministériels, elles pourraient venir abonder les crédits de l'aménagement du territoire.

Voilà pour les crédits directement inscrits sur mon budget.

S'agissant des fonds créés par la loi d'orientation sur d'autres budgets que le mien, ce que Yves Coussain et Patrick Ollier ont regretté, je vous précise que le fonds de péréquation des transports aériens (FPTA) et le fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN) disposeront, de plus de 3 milliards en 1997.

Dans leurs rapports, Yves Deniaud et Patrick Ollier, s'interrogent sur l'articulation entre le FITTVN et les crédits du budget général pour le financement des opérations d'investissements. Je crois utile de rappeler combien la création du FITTVN est précieuse dans une période où les deniers publics sont comptés car ce fond, alimenté par une taxe non soumise aux aléas budgétaires, même si son produit dépend de la conjoncture économique, permet de maintenir la capacité d'investissement de l'Etat à un niveau élevé, ce qui autorise par exemple la poursuite à un rythme soutenu du désenclavement routier du Massif Central. J'ajoute que si ces fonds ne sont pas placés sous mon autorité directe, je n'en veille pas moins très attentivement à ce qu'ils participent au financement des grands programmes d'aménagement du territoire.

Pour ce qui concerne le fonds de gestion de l'espace rural (FGER), inscrit sur le budget de l'agriculture, et qui, n'avait pas été doté dans le projet initial de loi de finances, M. Philippe VASSEUR que j'avais fortement sensibilisé, c'est un euphémisme, à cette question, vient de l'abonder de 100 millions lors du vote de son budget à l'Assemblée Nationale. Je vois mal en outre comment il pourrait ne pas devoir faire une concession supplémentaire au Sénat.

Dernier point très important : à tous ces crédits nationaux dont je viens de parler viennent s'ajouter des financements européens en forte progression.

J'ai en effet obtenu de Bruxelles que plusieurs programmes européens disposent de crédits en forte augmentation pour la période 1997/1999 que ce soit pour l'accompagnement des restructurations de la défense, les reconversions industrielles, ou le développement rural.

Au total, ce sont 800 millions par an, je dis bien par an, de crédits européens supplémentaires qui s'ajouteront, dès 1997 et les années ultérieures, aux moyens consacrés à l'aménagement du territoire.

Yves Deniaud a insisté sur le risque de sous consommation de ces crédits qui pourraient résulter de la lenteur des procédures administratives permettant leur affectation. Je crois utile de lui préciser que les retards constatés proviennent surtout d'un décalage initial dans le lancement des opérations et qu'aujourd'hui, un rythme de croisière plus satisfaisant me semble atteint. Je vous précise en outre que j'ai donné des instructions aux préfets afin que la préparation des opérations éligibles aux financements européens soit accélérée.

Pour ce qui concerne la question des contreparties nationales, j'observe que les crédits européens ne représentent qu'environ 16 % des financements annuels des contrats de plan et les contreparties nationales les 84 % restants. Ce n'est donc pas le report de l'échéance des contrats, qui joue sur quelques pour-cent, qui mettra en défaut le principe de l'additionnalité.

Vous le voyez la capacité d'intervention financière dans le domaine de l'aménagement du territoire, loin de baisser demeure entière, puisque la baisse des crédits inscrits à mon budget (300 millions) est beaucoup plus que compensée par l'existence de reports (700 millions), et que s'ajoutent les importants compléments de crédits que j'ai obtenus de la commission européenne (800 millions).

Ces moyens nouveaux qui ne tiennent pas compte de en année pleine des mesures d'exonération applicables aux zones de revitalisation rurale et à la Corse permettront d'engager des opérations nouvelles, en particulier dans les secteurs touchés par les restructurations de la Défense ou les conversions industrielles.

J'ajoute enfin que les moyens consacrés en 1997 à l'aménagement du territoire par l'ensemble des ministères s'élèvent à plus de 56 milliards. Vous le voyez, l’État est très fortement présent dans les projets concourant à l'aménagement du territoire et auxquels il apporte, en complément des collectivités locales, des moyens considérables.

Je souhaiterai aborder maintenant plus rapidement la deuxième partie de non budget qui concerne la politique de la ville.

L'ensemble des moyens financiers consacrés à la politique de la ville augmentent en 1997, de 30 % pour atteindre 13,3 milliards. Cet effort est, je le souligne, le plus important qui ait jamais été accompli. Cette augmentation de 30 % est le résultat direct de la mise en œuvre du pacte de relance qui fait l'objet, vous le savez, d'une détermination sans faille du Gouvernement puisqu'annoncé le 18 janvier 1996 par le Premier Ministre, il entrera pleinement en vigueur dès le 1er janvier 1997.

Ce sont conformément à la philosophie du Pacte, les mesures destinées à relancer l'activité dans les quartiers qui expliquent pour l'essentiel la forte progression des moyens consacrés à la politique de la ville.

Il faut en effet s'attaquer en priorité au chômage, et en particulier celui des jeunes, dans les quartiers difficiles.

Aussi, les emplois de ville seront-ils dotés de 1049 millions en 1997, ce qui permettra, d'en pourvoir 50.000. Je vous précise que j'ai amorcé une négociation avec l'UNEDIC pour trouver une solution en matière d'assurance chômage au bout des 5 ans du contrat de ville.

En réponse à une interrogation de Claude Girard, je voudrais également insister sur la complémentarité entre les emplois de ville et les futurs contrats d'initiative locale. En effet les emplois de ville possèdent une double spécificité : d'une part, ils s'adressent aux jeunes de 18 à 2 d'autre part, ils sont ciblés sur les jeunes issus des quartiers en difficulté.

Le puissant régime d'allégement des charges en faveur des entreprises situées en Zones de Redynamisation Urbaine et en Zones Franches bénéficie quant à lui, au total, de 2,55 milliards en 1997.

Vous le voyez, avec un coût total de 3,6 milliards, ces deux mesures - emplois de ville et allégement de charges pour les entreprises - confirment bien la priorité donnée à l'économie par le pacte de relance.

Le Pacte a également resserré la géographie d'application de la politique de la ville afin de rendre les dispositifs d'autant plus puissants que les difficultés auxquelles sont confrontés les quartiers sont importantes. Le Pacte a aussi pour ambition d'améliorer la cohérence des zonages dont se sont dotées les diverses politiques publiques. A ce propos, je voudrais préciser à Thierry MARIANI et à Jean Claude ABRIOUX que la lutte contre la violence à l'école a été prise en compte par le Pacte de relance. Il est en effet prévu, et j'y veille en liaison avec François BAYROU, que les écoles situées dans les secteurs les plus difficiles, et notamment les zones franches, puissent bénéficier des dispositifs applicables aux zones d'éducation prioritaire.

La deuxième évolution majeure pour 1997 concerne l'augmentation des concours financiers mis à la disposition des communes urbaines les plus défavorisées.

L'augmentation de 700 millions de la dotation de solidarité urbaine issue de la réforme de mars 1996 confirme l'effort de solidarité en faveur des communes les plus démunies.

Au-delà de ces deux importantes priorités, le projet de budget pour 1997 permet de financer l'ensemble des mesures inscrites dans le pacte de relance pour la ville. Pour cela les crédits directement inscrits sur mon budget sont, en crédits de paiement, en légère augmentation de 0,5 %, pour s'élever à 1276,2 millions.

Premièrement, les contrats de ville seront financés, en 1997, par le Fonds interministériel d'intervention pour la ville (FIV) qui sera doté de 675 millions, ce qui permet de soutenir, dans les 214 villes concernées, les programmes qui concourent à une meilleure insertion des populations des quartiers défavorisés.

Deuxièmement, l'investissement dans les quartiers est vigoureusement soutenu pour que ceux-ci connaissent de visibles transformations en 1997.

Tous crédits d’État confondus, les grands projets urbains disposeront en 1997 de financements sans précédent à hauteur de 400 millions.

En outre, le Fonds Social Urbain (FSU), est doté de 200 millions d'autorisations de programmes, afin de permettre la poursuite du financement des appels à projets prévus par le pacte de relance ainsi que des investissements les zones franches urbaines.

Troisièmement, les actions en faveur des jeunes et des habitants des quartiers feront également l'objet d'un soutien particulier. Je ne citerai que deux exemples :
      - en premier lieu, le montant des crédits consacrés aux opérations ville-vie-vacances est reconduit à un niveau proche de celui de 1996. Je rappelle qu'en 1996, près de 800.000 jeunes issus des quartiers en difficulté auront bénéficié de ce dispositif contre 12.000 à l'origine et que ces opérations n'ont donné lieu, cet été, à aucun incident notable sur les sites ayant accueilli les jeunes ;
      - en second lieu, le développement des services publics de proximité bénéficie de 81 millions. La création du Fonds interministériel pour la réforme de l’État contribuera également à l'amélioration des services publics dans les quartiers en difficulté. M. MARIANI a signalé, dans son rapport, que l'inscription de ces crédits au titre 3 du budget pouvait constituer une rigidité en s'opposant notamment aux interventions en faveur des services gérés par des personnes autre que l’État. A cet égard, je voudrais préciser, d'une part, que les services publics qui ne relèvent pas de l’État bénéficieront en 1997 de l'intervention du Fonds interministériel de la ville dont la nomenclature budgétaire sera complétée à cet effet, et, d'autre part, que la nomenclature du titre 3 sera également modifiée afin de permettre l'adoption de conventions de partenariat entre l’État et les collectivités locales pour le développement de plates-formes de services publics.
      
Bien entendu, la politique de la ville comme celle de l'aménagement du territoire ne se résume pas aux seules actions financées sur mon budget, ni aux emplois de ville et aux allégements de charges.

Il s'agit, par nature, d'une politique interministérielle.

C'est pour cela qu'aux crédits dont je viens de parler, s'ajoutent environ 5,5 milliards qui seront, en 1997, affectés de façon à soutenir les priorités du Pacte de relance, que ce soit dans le domaine du logement, de l'éducation, de la sécurité, ou, encore, du soutien au commerce.

Pour ce qui concerne le renforcement de la sécurité dans les quartiers, dont M. Michel GHYSEL a souligné toute l'importance, car cela constitue souvent un préalable au retour de l'activité économique, je voudrais rappeler que le Pacte de relance renforce les effectifs de policiers dans les quartiers en difficulté de 4.000 emplois.

Enfin, aux crédits nationaux s'ajoutent, là encore, d'importants financements européens dont j'ai obtenu une forte augmentation. 1997 verra ainsi la barre des 1 milliards de francs de crédits communautaires consacrés à la politique de la ville être franchie.

Je suis d'ailleurs fier que Bruxelles vienne de mettre en place un dispositif d'encadrement des aides aux politiques de la ville pour l'ensemble de l'Union Européenne s'inspirant directement du Pacte de relance.

Je ne dirai rien sur les deux derniers volets de mon budget, ceux consacrés à l'intégration et à la prévention de la toxicomanie, car Eric RAOULT vous en parlera dans quelques instants.

Je ne bornerai à souligner que le pacte de relance pour la ville est très largement un programme d'intégration, d'intégration urbaine et sociale, qui s'adresse aux quartiers en difficulté dans lesquels résident d'importantes populations étrangères. Il contribue donc fortement à la politique d'intégration conduite par le Gouvernement.

Voilà, Monsieur le Président, Messieurs les Rapporteurs, Messieurs les Orateurs, Mesdames et Messieurs les Députés, mon projet de budget pour 1997.

L'effet Pacte de relance dope le budget de la ville.

Pour l'aménagement du territoire, je vous ai expliqué ce que les chiffres ne traduisent pas, à savoir qu'un travail considérable est, sans annonces tonitruantes, effectué. Je vous ai aussi démontré que les moyens financiers que je gère, - crédits nationaux et européens - sont non pas en diminution mais en augmentation. Au-delà des crédits, 1997 sera l'année du plan pour le monde rural et du schéma national, sur lesquels votre Assemblée aura à se prononcer.

Ces deux projets majeurs feront converger des moyens nouveaux vers les zones rurales mais permettront également de mieux utiliser les ressources existantes en améliorant la pertinence des choix d'investissement et en fédérant davantage les actions conduites par l’État et les collectivités territoriales.

Permettez-moi d'exprimer le souhait que votre Assemblée veuille bien, à l'issue de ces explications et de celles qu'Eric Raoult vous donnera dans quelques instants, approuver le projet de budget que nous avons l'honneur de lui soumettre.

 

 

Sénat - Jeudi 5 décembre 1996

Discours prononce par monsieur Jean-Claude Gaudin, Ministre de l’aménagement du territoire, de la ville et de l’intégration - Sénat PLF 1997 - budget de l'aménagement du territoire

Monsieur le Président,
Messieurs les Rapporteurs et Orateurs,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,

Je vous dois la vérité, et c'est toujours avec l'honnêteté la plus totale que je me suis exprimé lors des auditions auxquelles les commissions de la Haute Assemblée ont bien voulu me convier.

Je ne vous l'ai donc pas caché : le budget de l'aménagement du territoire est en baisse pour la deuxième année consécutive. J'ai expliqué aux commissions les détails de cette évolution, et les conclusions des rapporteurs montrent que mes arguments ont été entendus. Je n'y reviendrai donc pas.

Permettez-moi, à cette occasion, de remercier les rapporteurs, Messieurs Roger BESSE pour la Commission des finances, Jean PEPIN et Henri REVOL pour la Commission des Affaires Économiques et du Plan, pour la qualité et l'importance de leur travail et pour la pertinence de leurs observations.

C'est grâce à l'initiative de la Haute Assemblée, et notamment de son Président, René MONORY, du Président de la Commission des Finances, Christian PONCELET, du rapporteur général du Budget, Alain LAMBERT et du Président de la Commission des Affaires Économiques et du Plan, Jean FRANCOIS-PONCET, que le Premier Ministre a décidé de dégeler 70 millions de crédits sur 1996, et d'augmenter de 70 millions supplémentaires les crédits du FNADT en 1997.

Un amendement gouvernemental sera soumis à votre approbation à cet effet lors du vote.

A ces 140 millions, s'ajoutent plusieurs autres contributions importantes qui n'apparaissent pas dans le budget qui vous est présenté :
      - sur la PAT, je dispose de 700 millions de réserves qui proviennent de crédits ouverts dans le passé mais non dépensés à ce jour. Aurait-il été raisonnable de continuer à ouvrir des crédits nouveaux alors même que je peux utiliser cette épargne de 700 millions ?
      - s'ajoutent également 800 millions de crédits européens annuels que j'ai obtenus de Bruxelles pour les 3 années à venir. Plusieurs programmes européens disposeront en effet de crédits en forte augmentation pour la période 1997-1999 ; les crédits consacrés aux restructurations militaires bénéficieront de 100 millions de francs supplémentaires et les fonds européens destinés aux reconversions industrielles ont été augmentés de 1,9 milliards et portés à 13 milliards (+17%).
      
Au total, les 300 millions de baisse sur mon budget sont plus que composés par les 800 millions de crédits européens nouveaux auxquels s'ajoutent des réserves sur la PAT (700 millions) et les 140 millions obtenus grâce à votre aide.

Je vous précise également que les engagements au titre de contrats de plan seront honorés pour les dépenses de fonctionnement, sur le FNADT, et que les investissements tiennent compte du report d'un an de l'échéance de ces contrats.

J'ai également réservé sur le FNADT, ce que je n'avais pu faire en 1996, de l'ordre de 100 millions pour les crédits d'investissement libres d'emplois délégués au préfet, de façon à permettre d'engager de nouvelles actions décidées et gérées directement au plan local.

Dans ces conditions, les moyens consacrés à l'aménagement du territoire en 1997, loin de baisser, sont en fait en augmentation, et même si on pouvait souhaiter qu'ils soient encore supérieurs, ils me permettront d'engager une politique vigoureuse en faveur de l'aménagement du territoire.

1997, sera une importante année pour l'aménagement du territoire, et pour cela, ni les moyens, ni la volonté politique du gouvernement ne feront défaut.

J'ai en effet engagé deux chantiers qui, bien qu'ils n'aient pas de traduction budgétaire à ce stade, n'en restent pas moins majeurs et attendus.

En premier lieu, j'ai préparé un plan en faveur du monde rural, qui est actuellement soumis à la concertation interministérielle, et qui constitue, après le Pacte de Relance pour la Ville et le dossier de la zone franche Corse, le troisième volet de mon action en faveur des zones les plus défavorisées de notre territoire.
Par souci d'équité, ce plan pour le monde rural est pour moi une priorité.

L'effort important engagé par l'Etat en faveur des quartiers en difficulté et de la Corse doit en effet être équilibré par une action d'ampleur comparable en direction des campagnes car les Français ne comprendraient pas que celles-ci, qui couvrent l'essentiel de notre territoire et participent à notre identité nationale, ne fassent pas l'objet de la même sollicitude.

Bien sûr les propositions de ce plan pour le monde rural, que ce soit dans le domaine du soutien aux entreprises, de l'habitat, ou des services publics collectifs, ne pourront toutes être retenues à l'issue de la concertation interministérielle en cours.

Il reste que ce plan permettra de mieux organiser les politiques publiques et de concentrer, vers les zones rurales, des moyens supplémentaires qui ne figurent pas encore dans mon budget. Mais puis-je à ce stade redire une nouvelle fois que je ne disposais pas non plus de crédits dans mon budget 1996 pour faire le Pacte de Relance pour la Ville et que ceci ne m'a pourtant pas empêché de faire progresser la politique de la ville de manière décisive.

Deuxième grand chantier en 1997 : la présentation au Parlement du Schéma National d'Aménagement et de Développement du Territoire, dont je me suis entretenu, aujourd'hui même, avec le Premier ministre.

Ce schéma qui vise à construire une FRANCE mieux équilibrée et plus compétitive, sera soumis au Parlement au printemps prochain après une large phase de consultation qui concernera les régions, les départements, les associations représentatives de communes ainsi que le Conseil Économique et Social et le Conseil National de l'Aménagement et de Développement du territoire.

Ce schéma constituera un acte majeur en faveur de l'aménagement du territoire, puisqu'il dictera les orientations que devront respecter toutes les politiques publiques, sans exception, qui ont une incidence territoriale.

Vous le voyez, 1997 sera une année très importante pour l'aménagement du territoire et elle verra mûrir les fruits d'une année de travail de fond que je viens d'accomplir.

Car contrairement à ce que certains peuvent dire, 1996 n'a pas été une année de pause mais une année de travail intense mené sans effets d'annonces, sans déclarations tonitruantes, mais avec sérieux, conviction et efficacité.

1996 a été la première année de pleine mise en œuvre de la loi d'orientation votée en février 1995, et mon ministre a accompli un travail considérable : des dizaines de décrets et de circulaires ont été pris. Et croyez bien que ce n'est pas le plus facile que l'on m'avait laissé.

Il est, par exemple, plus facile de prendre un décret pour préciser les modalités de gestion d'un fonds prévu par la loi, plutôt que de défendre l'année suivante les crédits correspondants, surtout quand ce fond est inscrit sur le budget d'un autre ministère (FGER, FITTVN, FPTA).

En réponse à Roger RIGAUDIERE, je vous précise que la création d'une taxe pour alimenter le FGER est examinée dans le plan pour le monde rural que j'ai proposé, mais je dois avouer que cette idée se heurte à quelques réticences interministérielles.

Vous avez été plusieurs à rappeler l'absence de dotation du FNDE, le fonds national de développement des entreprises. Je vous rappellerai seulement que le gouvernement a pris d'autres mesures qui répondent en partie aux objectifs assignés au FNDE, comme par exemple la création d'une banque des PME.

Vous avez attiré mon attention, Monsieur BESSE, sur les seuils nécessaires pour bénéficier de la PAT. Je partage largement votre analyse selon laquelle les créations d'activité dans les départements comme le Cantal sont, et seront, vraisemblablement générés par des petites entreprises.

C'est la raison pour laquelle divers dispositifs ont été mis en place à cet effet, comme par exemple, la création du fonds de développement des PME dans les contrats de plan, destiné à accompagner les projets d'investissement de taille modeste, ou encore les mesures prévues par la loi d'orientation en faveur des entreprises qui se développent dans les zones rurales comme, par exemple, l'exonération d'impôt sur les sociétés qui se créent, ou la réduction des droits de mutation et de charges sociales.

Ces dispositifs s'adressent, plus particulièrement aux petites entreprises et sont complémentaires de la PAT qui est, elle, destinée à des projets plus importants.

Toutefois, si pour un projet précis, cette complémentarité ne s'avérait pas satisfaisante, je serais prêt à l'examiner.

On dit aussi que je me suis beaucoup occupé de la ville, mais c'est pourtant moi qui ai fait sortir le décret qui délimite les zones de revitalisation rurale (ZRR), pour lesquelles j'ai débloqué, deux mois seulement après ma prise de fonctions, l'accord qui tardait depuis un an de Bruxelles. Là encore, on ne m'avait pas laissé le plus facile.

Mon rôle ne s'est d'ailleurs pas limité à la mise en œuvre des ZRR telles qu'elles ressortaient de la loi d'orientation. J'ai en effet constaté que le dispositif devait être amélioré puisqu'il comportait des lacunes. J'ai donc, dans le projet de loi mettant en œuvre le Pacte de Relance pour la Ville, amélioré le dispositif des ZRR en ajoutant, d'une part, l'exonération des cotisations sociales patronales pour les deuxième et troisième salariés alors que la loi d'orientation ne prévoyait des exonérations qu'à compter du quatrième salarié, et d'autre part, considérablement élargi le champ des entreprises éligibles à ces exonérations.

Au total, le coût des ZRR est évalué à 1,2 milliards, somme qui, pour ne pas figurer dans mon budget n'en intervient pas moins en faveur de l'Aménagement du territoire.

Je compte apporter d'autres améliorations encore aux ZRR dans le Plan pour le monde rural.

Pour ce qui concerne les critères de classement en ZRR, vous avez souligné, Monsieur BESSE, les inévitables imperfections qu'ils pouvaient entraîner, çà et là, en laissant quelques "trous" dans le zonage.

Vous avez raison, il faut veiller à la plus grande homogénéité possible dans les zonages car cela renforce l'efficacité des mesures qui y sont associées. Pour autant, vous savez que toute batterie de critères a nécessairement ses avantages et ses limites, et nous nous souvenons tous des débats passionnés auxquels cela a donné lieu lors du vote de la loi d'orientation. Toutefois, la coexistence de ces nouveaux zonages (ZRR), avec les autres zonages nationaux (PAT) et européens, a conduit le gouvernement à engager une réflexion visant à simplifier pour en améliorer la lisibilité et l'efficacité, notamment dans la perspective de l'échéance des fonds européens au 31 décembre 1999.

A ce travail de fond se sont ajoutées aussi beaucoup de vigilance et de persuasion, comme cela a été par exemple le cas avec la Banque de France dont j'ai récemment obtenu du gouverneur qu'elle renonce à son programme brutal de fermeture de ses succursales de province.

Ainsi, j'ai, en 1996, mis en application et amélioré la loi d'orientation. Sachez que je continuerai ce lourd travail en 1997 et soyez assurés que ni les moyens, ni la volonté politique ne manqueront.

Telles sont, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, les grandes lignes du budget pour 1997 que j'ai l'honneur de soumettre à votre Haute Assemblée.