Combien de maires et comment sont-ils élus ?
Un maire pour les 35 000 communes de France
Il existe à ce jour 34 875 maires en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer (DOM) selon le recensement des communes effectué par le décret du 31 décembre 2024 authentifiant les chiffres des collectivités, soit 90 communes de moins qu'en janvier 2021.
Il faut ajouter les 33 communes de Nouvelle-Calédonie, les 48 de Polynésie française et les 2 de Saint-Pierre et Miquelon. Il faut retrancher de ce chiffre les 6 communes dites "mortes pour la France" lors de la Première Guerre mondiale, jamais reconstruites et qui sont administrées directement par le préfet de la Meuse, n'ayant plus aucun habitant.
Seules les collectivités territoriales de Wallis et Futuna, dans l'océan Pacifique, et les Terres australes et antarctiques françaises ne connaissent pas de maire, la seconde faute d'une population permanente susceptible de constituer un corps électoral. Quant à Wallis et Futuna, c'est la persistance du système local datant d'avant la présence française qui explique l'absence de maires. Les deux "anciennes" communes de Guadeloupe, Saint-Barthélemy et Saint-Martin, devenues des collectivités territoriales d'outre-mer (ou COM) sont administrées par les organes de ces deux collectivités et ne nécessitent plus l'existence d'un maire. Au total, la France compte alors 34 958 maires de plein exercice.
Les maires sont donc, de loin, les autorités politiques et administratives les plus nombreuses. Désignés par le conseil municipal depuis 1882, ils sont ainsi issus du suffrage universel indirect, en dehors de la période du régime de Vichy au cours duquel les maires des communes de plus de 2000 habitants étaient nommés par l'État. À Paris, ville du pouvoir central mais aussi des émeutes et des révolutions, il a fallu attendre la loi du 31 décembre 1975 pour que cette collectivité retrouve la présence d'un maire élu par le Conseil de Paris.
Si la France se caractérise par un très grand nombre de communes (et donc de maires), elle n'a jamais voulu procéder à une réduction autoritaire de ce chiffre. 40% des communes de l'Union européenne sont des communes françaises qui se caractérisent très souvent par une faible population.
Pour remédier à ce qui est présenté comme une anomalie ne permettant pas une gestion efficace des services publics, faute de moyens pour beaucoup de communes, un mouvement de fusion de communes a été commencé par la loi du 16 juillet 1971, mais par le biais d'une incitation financière au profit des communes acceptant de fusionner. Cette loi n'a pas donné les résultats escomptes et les communes sont restées très (trop ?) nombreuses.
La loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales a substitué à cette législation celle sur les communes nouvelles afin de ne pas employer le terme de "fusions" susceptible d'effrayer les communes appelées à disparaître. Néanmoins, afin de trouver une solution à la présence des anciennes communes, plusieurs lois adoptées entre 2015 et 2019 ont donné la possibilité aux communes nouvelles de maintenir ces communes sous la forme de communes déléguées non dotées de la personnalité juridique. Au sein de ces dernières, des maires délégués peuvent ainsi être institués qui peuvent participer, sous la présidence du maire de la commune nouvelle, à la conférence des maires au sein de laquelle peut être débattue toute question de coordination de l'action publique sur le territoire de la commune nouvelle.
Un mode d'élection de plus en plus harmonisé
Le maire est élu, dans toutes les communes, par et parmi le conseil municipal de la commune. Si les conditions d'éligibilité ne sont guère différentes de celles intéressant les conseillers municipaux, notamment quant à l'âge qui est de 18 ans pour tous, les non-nationaux, même citoyens de l'Union européenne, ne peuvent être élus maires, du fait des fonctions exercées par les maires en tant que représentants de l'État.
Le mode de scrutin servant à faire élire les conseils municipaux a évolué depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. La loi du 19 novembre 1982 a introduit une distinction entre les communes de 3 500 habitants et plus et celles situées en dessous de ce seuil de population. Elle a eu un effet sur l'élection des maires car, dans les communes de 3 500 habitants et plus, les listes de candidats étaient des listes bloquées, sans possibilité pour les électeurs de les modifier ou de rayer des noms. Sauf cas très exceptionnels, le maire était ainsi placé en tête de la liste ayant remporté le plus de voix. Ces listes sont devenues ensuite paritaires avec la loi du 6 juin 2000 avec une présence alternée d'une femme et d'un homme. Il était ainsi élu "presque" directement pas les électeurs, du fait de la personnalisation des listes constituées sous l'autorité de ceux qui aspirent à la fonction de maire.
Le seuil d'application de ce mode de scrutin a été abaissé par la loi du 17 mai 2013 à des communes de 1 000 habitants (environ 24 000 en France), pour des raisons tenant à la désignation proportionnelle des membres des conseils communautaires et métropolitains au sein des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Dans les plus petites communes, le mode de scrutin plurinominal était alors maintenu, avec des listes de candidats incomplètes et sur lesquelles les électeurs pouvaient pratiquer le vote préférentiel (rayer des noms) et le panachage (soit mixer des candidats de plusieurs listes sur la liste de leur choix). Dans ces communes, la réunion du conseil municipal consacré à l'élection du maire (et des adjoints) pouvait conduire à la désignation, en tant que maire, d'une personne qui n'était pas nécessairement celle ayant obtenu le plus de voix de la part des électeurs. Ce ne sera plus possible à compter des élections municipales de mars 2026.
En effet, la loi du 21 mai 2025 visant à harmoniser le mode de scrutin aux élections municipales afin de garantir la vitalité démocratique, la cohésion municipale et la parité a voulu mettre fin à la distinction entre les petites communes et les autres et a harmonisé le mode d'élection des conseils municipaux. À compter des élections municipales de mars 2026, toutes les listes arrivées en tête après le premier ou le second tour des élections municipales auront placé en tête de liste celle ou celui qui aura vocation à être élu maire. Il ne sera plus possible de rayer ou ajouter des noms sur un bulletin de vote ou de modifier l'ordre des candidats. Il n'est pas certain, cependant, que ce mode de scrutin qui peut être perçu comme rigide, soit parfaitement adapté aux petites communes qui sont de loin les plus nombreuses en France.
Dans toutes les communes, les maires sont entourés d'adjoints. Mais les trois plus grandes villes de France, Paris, Marseille et Lyon dans l'ordre décroissant de leur population, connaissent aussi des maires d'arrondissement (ou de secteurs lorsque deux ou plus arrondissements sont réunis dans un seul secteur électoral comme c'est le cas à Paris et à Marseille). Ces maires d'arrondissement ou de secteur sont chargés, au sein de leur conseil d'arrondissement, de gérer un certain nombre de compétences de proximité, comme les écoles maternelles et primaires, les bibliothèques ou certains équipements sportifs. Néanmoins, ces arrondissements n'étant pas des collectivités territoriales et n'ayant pas la personnalité morale, agissent dans le cadre juridique de la collectivité centrale (Ville de Paris et communes de Marseille et Lyon).
La loi du 31 décembre 1982 avait fait élire les conseillers d'arrondissement et les conseillers "centraux" en même temps, par des listes uniques, les élus de chaque arrondissement se réunissant ensuite pour désigner le maire central et les adjoints de la collectivité. Ce fractionnement de l'élection faisait en sorte que le maire de ces trois grandes villes était nécessairement élu, dans son arrondissement et non pas par l'ensemble des électeurs de la collectivité, avant d'être élu par le conseil central. Ce système n'était pas sans rappeler celui de l'élection du Président des États-Unis d'Amérique qui est élu par des grands électeurs délégués de chaque État.
Pour mettre fin à cette différence entre toutes les communes françaises, la loi du 11 août 2025 a prévu - toujours pour l‘horizon des élections de 2026 - que celles-ci se dérouleraient avec des listes municipales élaborées sur l'ensemble de la commune (ou Ville de Paris), les conseillers d'arrondissements continuant d'être élus dans chacune de ces circonscriptions infracommunales. Les maires d'arrondissement ou de secteur continueront d'être élus au sein de ces conseils, le statut des arrondissements n'étant pas modifié par la nouvelle loi.
Les électeurs parisiens, marseillais et lyonnais voteront ainsi, le même jour, avec deux urnes distinctes, d'une part pour les élus municipaux et d'autre part pour les élus d'arrondissement. Le Conseil constitutionnel, saisi de cette, loi, n'a pas considéré qu'il y avait atteinte au principe d'égalité compte tenu des spécificités des trois villes, tenant à la fois à leur population plus importante et à leur nombre d'élus municipaux plus important que dans les autres communes françaises.
La place particulière des maires au sein de l'organisation administrative locale
Du fait de la place des communes dans l'ensemble des collectivités territoriales, elles constituent nécessairement le niveau d'administration le plus proche des citoyens et des administrés. Les maires sont alors considérés comme les meilleures courroies de transmission entre le citoyen et la République. La figure du maire occupe la première place parmi les élus. Selon le baromètre Odoxa réalisé en 2025 avec Mascaret pour Public Sénat, le maire demeure aujourd'hui l'élu préféré des Français, avec 60% d'opinions favorables.
Les maires, des hommes et des femmes à tout faire
Les maires sont, selon une formule imagée, à "portée d'engueulade", y compris quand les difficultés de leurs concitoyens ne relèvent pas des compétences des communes. Il est vrai qu'ils gèrent les finances municipales, font des choix d'investissements, s'occupent des écoles, des logements, du cadre de vie, de la propreté de la voirie, des problèmes de voisinage, de l'environnement, de la santé, des activités festives, de la culture ou encore de la sécurité.
Cette vision positive a un revers, celui du découragement ou de la lassitude de certains maires. Il est parfois difficile de trouver des candidats prêts à s'investir dans les moyennes et petites communes où polyvalence et responsabilité sont importantes et où les maires sont au four et au moulin. De surcroît, le manque de moyens en personnels et sur le plan financier empêche les petites et moyennes communes de pouvoir exercer au mieux les compétences que la loi leur confie. Selon une enquête réalisée pour l'Association des maires de France par le Cevipof en 2025, en l'espace de trois mandats municipaux (entre 2008 et 2026), le nombre moyen de démissions de maires par an a été multiplié par 4 (129 contre 417). Avec 2 189 démissions depuis juillet 2020 (dernière date d'installation des conseils municipaux), ce chiffre en nette augmentation par rapport aux mandats précédents confirme la fragilité de la fonction et les difficultés à l'exercer. Cela correspond à plus d'une démission quotidienne transmise qui doit être acceptée par les préfets. En 2020, 40% de maires occupaient pour la première fois cette fonction. Le mandat en cours a produit des effets de déception car parmi les démissionnaires, on décompte 53% de nouveaux maires.
Selon cette étude, trois causes de démission dominent :
- la difficulté à mener jusqu'au bout les projets municipaux sur lesquels les élus se sont engagés mais qui ont créé des tensions au sein des conseils municipaux (30,9% des cas) ;
- les passations de pouvoir anticipées et organisées dès le début de la mandature (13,7 % des cas) ;
- les questions de santé physique (13,1 % des cas) et de santé mentale (5,1 % des cas).
Les raisons de ces démissions justifient le dépôt d'une proposition de loi en 2024 au Sénat visant à encourager, à faciliter et à sécuriser l'exercice du mandat d'élu local, non encore adoptée définitivement.
Si les communes de petite taille restent les plus touchées (mais dans une proportion moindre que lors du mandat précédent), les communes de plus de 1 000 habitants font face à une vague de démissions sans précédent. Un maire démissionnaire sur quatre avait été élu dans une commune de 1 000 à 3 500 habitants.
Il est vrai que le mandat 2020-2026 n'aura ressemblé à aucun autre. Il a commencé avec la crise du Covid-19 et s'achève dans un climat d'instabilité nationale depuis la dissolution, une situation financière difficile et une incertitude politique grandissante.
Les médias se sont fait l'écho de certaines affaires emblématiques d'agressions ou d'atteintes aux biens visant des maires causées par des administrés mécontents. Même si ces cas restent, heureusement, minoritaires, ils créent un climat général générateur d'anxiété pour les élus.
Quel est leur statut et de qui dépendent-ils vraiment ?
Une des caractéristiques du maire, dont l'origine est ancienne, est qu'il est à la fois un représentant de l'État et un organe de la commune. Cette dualité des fonctions, souvent qualifiée de "double casquette", remonte à la loi napoléonienne du 28 pluviôse an VIII (17 février 1800) faisant des préfets, des sous-préfets et des maires des autorités publiques dont la fonction unique était de représenter l'État dans les départements, les arrondissements infradépartementaux et les communes selon une organisation hiérarchisée entre ces trois types d'autorités qui relevaient d'une organisation administrative déconcentrée.
Ce n'est que progressivement au XIXe siècle que les maires ont reçu, en même temps que les communes, des compétences se rattachant à la décentralisation, c'est-à-dire exercées afin de gérer des affaires qui n'étaient plus celles de l'État. La grande loi municipale du 5 avril 1884 a accentué et consacré ce mouvement et elle a notamment donné aux maires des compétences destinées à assurer l'ordre public se définissant, à l'époque, comme la protection de la sécurité, de la tranquillité et de la salubrité publiques. Pour cette compétence essentielle dans la vie locale, les maires n'étaient plus sous l'autorité des préfets mais sous leur seule surveillance.
Si les contours de l'ordre public se sont élargis au fil des lois et de l'évolution de la société, les maires exercent cette compétence dite "propre" c'est-à-dire sans le concours du conseil municipal. Il est ainsi seul responsable sur le plan :
- politique car les électeurs peuvent le sanctionner en ne réélisant pas ;
- administratif car il est soumis au contrôle de l'État, tant sur ses actes que sa personne ;
- judiciaire notamment sur le plan pénal. Certains maires ont été personnellement poursuivis sur le plan pénal pour n'avoir pas pris les mesures nécessaires à la protection de l'ordre public, par exemple en présence de graves inondations ou d'installations mal scellées dans des jardins publics. Ces cas sont néanmoins assez rares.
Parallèlement, la double casquette des maires, autorités déconcentrées et décentralisées, se traduit par la tutelle qui est exercée sur eux. Ils sont les seuls élus locaux à pouvoir être destitués par décret pris en conseil des ministres en cas de fautes graves commises dans l'exercice de leurs fonctions ou en dehors mais qui rendent impossible le maintien de leur mandat. Cette destitution qui n'est pas une sanction pénale, mais qui peut s'ajouter à cette dernière, conduit à une inéligibilité à la fonction de maire qui ne peut pas excéder un an selon les termes du code général des collectivités territoriales (CGCT). Elle peut être prononcée pour des faits relevant des fonctions du maire exercées en tant que représentant de l'État mais aussi pour des faits qui relèvent des fonctions en tant qu'autorité de la commune. Le maire, qui n'est pas un fonctionnaire, exerce des fonctions d'élu local dont la rémunération se limite à une indemnité qui varie selon la taille, c'est-à-dire le nombre d'habitants, de la ville considérée.
Les maires et les intercommunalités
Depuis la fin du XIXe siècle et les premières lois sur les syndicats de communes, ces dernières ont été amenées à se renforcer selon des modalités plus ou moins contraignantes et différentes selon leur taille, c'est-à-dire leur nombre d'habitants depuis les syndicats de communes jusqu'aux métropoles. L'intégration des communes au sein des EPCI pose nécessairement la question de la place des maires au sein des organes des EPCI, à la fois en tant que membres des assemblées délibérantes que sont désormais les conseils communautaires ou métropolitains, mais aussi en qualité d'organes exécutifs des EPCI.
La législation a petit à petit évolué afin d'assurer la présence des maires dans ces instances. Dans les communes de 1 000 habitants et plus, les élections municipales servent, selon un mécanisme de fléchage, à faire élire en même temps les conseillers municipaux et les membres du conseil de l'EPCI dont la commune est membre. Les candidats sur les deux listes, municipale et intercommunale, doivent être identiques et présentés dans le même ordre. Le candidat placé en tête a ainsi toutes les chances, en fonction des résultats électoraux, de siéger au sein de l'organe délibérant.
Pour les communes de moins de 1 000 habitants alors que le mode de scrutin servant à désigner les conseillers municipaux a changé par la loi du 21 mai 2025, le code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit toujours que les élus de la commune, désignés pour siéger au conseil communautaire, sont choisis dans l'ordre du tableau résultant des élections, le maire y occupant la première place. Comme le nombre potentiel de représentants des petites communes au sein de l'EPCI se limite souvent à un seul membre par commune, les maires sont ainsi assurés de siéger dans l'instance délibérante.
S'agissant de l'élection du président et des vice-présidents, la loi n'impose pas de règles et le maire de la commune la plus importante n'est pas assuré de cumuler les deux fonctions exécutives. Selon les choix des élus et les équilibres à trouver entre les communes parfois de tailles très diverses, le maire de la commune centre sera ou ne sera pas le président de l'intercommunalité.
Le poids des structures intercommunales, du fait des compétences très nombreuses et importantes qu'elles exercent à la place des communes (il y en a plus d'une trentaine qui vont de l'aménagement de l'espace jusqu'à la contribution à la transition énergétique en passant par l'habitat ou l'organisation de la mobilité, mais qui varient selon le degré d'intégration des communes au sein des EPCI, depuis le syndicat de communes jusqu'à la métropole), a tendance à marginaliser le rôle de ces dernières et, par voie de conséquence, celui des maires. En voulant renforcer ces intercommunalités, la loi du 7 août 2015 dite NOTRe a créé, en sens inverse, un mouvement de réaction voulant corriger ce que certains ont appelé "les irritants de la loi NOTRe".
Tel fut notamment le sens de la loi du 27 décembre 2019 dite "Engagement et proximité" dont le titre premier annonçait vouloir "Conforter chaque maire dans son intercommunalité". Pour ce faire, la loi a notamment prévu l'existence d'un pacte de gouvernance entre les communes et l'établissement public et la création obligatoire d'une conférence des maires, sauf lorsque le bureau de l'établissement public comprend déjà l'ensemble des maires des communes membres.
Cette conférence qui comprend, outre le président de l'établissement public de coopération intercommunale qui la préside, les maires de toutes les communes membres, assure ainsi une forme d'égalité, au moins théorique, entre les communes et, partant, entre les maires. Cette structure supplémentaire ne résout pas toutes les difficultés nées de la superposition des niveaux d'administration et n'empêche pas le poids variable des différents maires en présence, notamment celui de la commune centre, lorsque l'EPCI est constituée autour d'une ville susceptible d'exercer une influence sur les autres communes.