Les services et produits en ligne ne sont pas toujours accessible à tous au sein de l'Union européenne (UE). Parfois, les consommateurs se heurtent à une barrière virtuelle liée notamment à leur localisation géographique, leur nationalité ou leur langue. C'est ce qu'on appelle un blocage géographique (dit "géoblocage"). Par exemple, ils ne peuvent pas visionner un film parce que les opérateurs du site bloquent la diffusion dans le pays où ils vivent.
Cette technique utilise les outils de géolocalisation et de suivi des appareils : l'adresse numérique (IP) permet de localiser ordinateur, tablette, smartphone et son utilisateur.
Le géoblocage injustifié est interdit dans l'Union européenne (UE) depuis le règlement du 28 février 2018 qui prévoit des mesures pour lutter contre les discriminations dont peuvent être victimes les consommateurs en ligne.
Cette technique reste toutefois autorisée dans certains cas, notamment :
- la diffusion d'œuvres protégées par le droit d'auteur (musique, vidéos à la demande, livres électroniques, jeux en ligne et services audiovisuels) ;
- les services financiers, les banques pour proposer des prêts, des assurances ou des investissements ;
- les jeux d’argent (loteries régionales, jeux de casino ou paris sportifs) ;
- les services de transport pour les vols longue distance, les trains ou les bus, par exemple.
La controverse implique les opposants au géoblocage, en particulier les associations de consommateurs regroupées au sein du Bureau européen des unions de consommateurs et les professionnels de l'audiovisuel.
Favorables au marché unique du numérique en Europe et au libre-échange, les premiers dénoncent les discriminations d'accès aux contenus en ligne. Selon un rapport de la Commission européenne en 2020 :
- un consommateur européen n'a accès en moyenne qu'à 14% des films disponibles en ligne dans l'UE ;
- des variations importantes existent selon les pays : par exemple, les Grecs peuvent regarder seulement 1,3% des films disponibles en ligne dans l'UE, contre 43,1% des films pour les Allemands ;
- le nombre de consommateurs qui tentent d’accéder à des contenus audiovisuels proposés dans d’autres États membres a presque doublé entre 2015 et 2019 (de 5% à 9%), en particulier chez les plus jeunes.
En revanche, dans le secteur de l'audiovisuel, les producteurs, diffuseurs, auteurs, réalisateurs craignent les conséquences de la suppression du géoblocage sur leur activité :
- la fin de la territorialité du droit d'auteur ne permettrait plus d'accorder l'exclusivité de la diffusion d'une œuvre dans une pays ou une région ;
- l'atteinte à diversité culturelle européenne (diversité des œuvres, des financements, des rémunérations des auteurs, notamment) ;
- un encouragement au piratage et aux contournements déjà en place.
Pour les professionnels, la portabilité des abonnements permet l'accès aux œuvres. Un citoyen de l'UE peut accéder à des services en ligne payants dans d’autres États membres selon les mêmes modalités que dans son pays d’origine. Par exemple, les abonnés peuvent télécharger et regarder les mêmes films et séries télévisuelles partout au sein de l’UE.
La Commission européenne a publié le 30 novembre 2020 une étude sur l'application du règlement de géoblocage et les possibilités d'élargir le texte aux contenus protégés par le droit d'auteur comme les contenus audiovisuels. Conclusions : un élargissement du règlement permettrait aux consommateurs européens d'avoir un choix plus large de contenus, ce qui aurait aussi un impact sur le secteur audiovisuel. Un Eurobaromètre de 2019 a confirmé l’intérêt des consommateurs pour l’accès aux contenus audiovisuels proposés dans différents États membres. La Commission appelle à un dialogue entre les parties dans le cadre du plan d'action pour les médias et l'audiovisuel.
Le 25 octobre 2023, la commission sur le marché intérieur du Parlement européen a demandé la suppression du géoblocage audiovisuel lors de la révision du règlement prévue au plus tard en 2025. Le 13 décembre 2023, le Parlement européen a toutefois renoncé à demander la suppression du géoblocage des services audiovisuels.
Une étude sur le règlement de géoblocage, publiée le 22 juillet 2024 et commandée par la Commission européenne, confirme que l'exclusion de l’audiovisuel du règlement apparaît comme "une limitation majeure" du texte.