Image principale 1
Image principale 1
© Jerome Gilles / NurPhoto / NurPhoto via AFP

Viol, consentement, soumission chimique : le point en 8 questions

Temps de lecture  22 minutes

Par : La Rédaction

Les violences sexistes et sexuelles constituent la manifestation la plus aiguë de l'inégalité hommes-femmes. Le point sur les notions de viol et d'agression sexuelle, dont les femmes et les enfants sont les premières victimes, et sur la notion de consentement, qui s'est progressivement imposée dans le débat public.

Une violence sexiste s'exerce contre une personne en raison de son genre, de son identité de genre ou de son orientation sexuelle. Une violence sexuelle s'exerce lorsqu'une personne impose à autrui un propos (oral ou écrit), un comportement, un contact à caractère sexuel.

Ce type de violence porte atteinte :

  • aux droits fondamentaux de la personne (notamment à sa dignité) ;
  • à son intégrité psychologique ;
  • à son intégrité physique.

Les statistiques montrent que 85% des victimes enregistrées pour violences sexuelles hors cadre familial sont des femmes, dont plus de la moitié sont mineures. Les auteurs sont quasi exclusivement des hommes (96%). Il existe ainsi une violence des hommes à l'égard des femmes.

Les violences sexuelles et sexistes sont sanctionnées pénalement.

Elles recouvrent : 

  • l'outrage sexiste et sexuel (articles 222-33-1-1 et R625-8-3 du code pénal), qui impose à une personne tout propos ou tout comportement à connotation sexuelle ou sexiste soit portant atteinte à sa dignité en raison de son caractère dégradant ou humiliant, soit créant à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
  • l'agression sexuelle (article 222-22 du code pénal), constituée par toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise ou, dans les cas prévus par la loi, ou commise sur un mineur par un majeur ;
  • le voyeurisme ou atteinte à l'intimité de la personne (article 226-3-1 du code pénal), qui est le fait d'user de tout moyen afin d'apercevoir les parties intimes d'une personne alors qu'elles sont cachées à la vue des tiers, à son insu ou sans le consentement de la personne ;
  • l'exhibition sexuelle (article 222-32 du code pénal), imposée à la vue d'autrui dans un lieu accessible aux regards du public. Même en l'absence d'exposition d'une partie dénudée du corps, l'exhibition sexuelle est constituée si la commission explicite d'un acte sexuel, réel ou simulé est imposée à la vue d'autrui, dans un lieu accessible aux regards du public ;
  • le harcèlement sexuel (article 222-33 du code pénal), qui est le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste, soit portant atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créant à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. L'infraction est également constituée dans le cas de l'usage de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, même non répété ;
  • le viol (article 222-23 du code pénal), caractérisé par tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d'autrui ou sur la personne de l'auteur par violence, contrainte, menace ou surprise ;
  • les mutilations sexuelles, qui sont punies par l'article 227-24-1 du code pénal ;
  • l'exploitation sexuelle, constituée par :
    • le recours à la prostitution : sollicitation ou obtention de relations de nature sexuelle d'une personne qui se livre à la prostitution, y compris de façon occasionnelle, en échange d'une rémunération, d'une promesse de rémunération, de la fourniture d'un avantage en nature ou de la promesse d'un tel avantage (article 611-1) ;
    • le proxénétisme : aide, assistance ou protection de la prostitution d'autrui (article 225-5) ;
    • le tourisme sexuel : recours à la prostitution et proxénétisme commis à l'étranger par un Français ou par une personne résidant habituellement sur le territoire français (articles 225-11-2 et 225-12-3).

Par ailleurs, le mariage forcé constitue une atteinte aux droits humains fondamentaux, notamment à la liberté et à l’intégrité physique. Selon l'article 146 du code civil : "Il n'y a pas de mariage lorsqu'il n'y a point de consentement."

La prévalence de violences sexuelles en France est considérable : selon l'enquête Virage, 14,5% des femmes et 3,9% des hommes ont subi des violences sexuelles au cours de leur vie. Parmi eux, 3,7% des femmes et 0,6% des hommes ont subi une tentative de viol ou un viol. La majorité de ces faits reste sans poursuites.

Au cours de l'année 2024, 122 600 victimes de violences sexuelles ont été enregistrées par les services de sécurité. Les victimes de violences sexuelles sont très majoritairement des femmes, quel que soit le contexte de commission et l'âge des victimes (85%). 3/4 des victimes majeures et 69% des victimes mineures ont subi ces violences en dehors du cadre familial ou conjugal.  77% des victimes majeures de violences sexuelles, soit 39 838, ont subi une agression physique : agression sexuelle, viol, atteinte sexuelle sur mineur... 

Le nombre de victimes de violences sexuelles a augmenté de 7% en 2024. Si la hausse enregistrée en 2024 est inférieure à la moyenne enregistrée entre 2016 et 2023 (+12% en moyenne par an), le nombre de victimes de violences sexuelles enregistrées par les services de sécurité a doublé sur la période 2016-2024 (51 900 en 2016).

En 2024, 107 femmes ont été victimes de féminicides liés aux violences au sein du couple, soit 13 de plus qu'en 2023 (94 féminicides). 270 femmes ont été victimes d'une tentative de féminicide, toujours en 2024. 

Une forme particulière de violence sexuelle est la soumission chimique. Au total, sur 2 197 déclarations en 2022, 1 229 soumissions et vulnérabilités chimiques vraisemblables ont été analysées par le centre de référence des agressions facilitées par les substances (CRAFS), marquant une augmentation de 69,1% par rapport à 2021. La majorité des victimes de soumission chimique sont des femmes, parmi lesquelles des mineures.

Si la prévalence des violences sexistes et sexuelles est importante, les données montrent également un faible taux de poursuites et de condamnation. Les affaires sont majoritairement classées au motif de manque de preuves, bien que l’auteur soit souvent connu et identifié. 37 800 condamnations ont été prononcées entre 2017 et 2022, soit environ 7 500 par an :

  • 76% concernent les agressions sexuelles ;
  • 17% des viols ;
  • 4% des atteintes sexuelles sur mineurs ;
  • 3% du harcèlement sexuel.

Ces dernières années, la réponse judiciaire à l'égard des violences conjugales s’est durcie

Plus de 4 200 ordonnances de protection ont été délivrées en 2024. Entre 2017 et 2023, le nombre d'ordonnances de protection délivrées a augmenté de 187% (seulement 1 392 en 2017).

Le nombre de condamnations pour violences conjugales a augmenté de 123% entre 2017 et 2022 (94% sont des hommes), et celles pour violences sexuelles ont augmenté de 14%. Les mineurs représentent 23% des condamnés. 31% des viols et agressions sexuelles sur mineurs sont commis par un autre mineur. Si on prend l'ensemble des auteurs majeurs de viols, 93% ont été condamnés à une peine privative de liberté ferme et, pour 69% d’entre eux, celle-ci est supérieure ou égale à 10 ans. 

En amont d'un éventuel traitement judiciaire de ces infractions, le nombre de plaintes déposées par les victimes demeure très faible, particulièrement en matière de violences sexuelles. Selon l'enquête "vécu et ressenti en matière de sécurité" en 2024, seules 3% des victimes de violences sexuelles ont porté plainte contre leur agresseur. Les raisons sont multiples : manque de connaissances, incompréhension ou crainte des dispositifs légaux et du système judiciaire, pressions ou menaces de l'auteur de violences, incapacité à s'exprimer en raison du traumatisme, sentiment de culpabilité...

Les politiques menées contre les violences sexuelles et sexistes relèvent à la fois du droit pénal, de la connaissance des phénomènes, de la prévention et de la protection des victimes, notamment : 

  • la création d'une infraction d’outrage sexiste (harcèlement de rue, par exemple), les sanctions contre le cyber-harcèlement et l'allongement du délai de prescription de 20 à 30 ans pour les crimes sexuels commis sur mineurs ;
  • les études spécifiques, comme l'enquête Virage ;
  • les dispositifs facilitant la libération de la parole et l'accompagnement des victimes : la plateforme numérique de signalement des atteintes aux personnes et d'accompagnement des victimes (PNAV) permet de signaler des violences sexistes et sexuelles et de s'entretenir avec un policier ou un gendarme 7 jours sur 7 ;
  • les dispositifs de prise en charge globale et de protection des victimes (centres régionaux de psycho-traumatismes, par exemple).

Au travail, les employeurs doivent informer leurs salariés en matière de harcèlement sexuel et choisir un référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes. Dans la fonction publique, les employeurs ont l'obligation de mettre en place un dispositif de signalement, de traitement et de suivi des violences sexuelles, du harcèlement et des agissements sexistes (loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019).

Les violences conjugales font l'objet de mesures spécifiques : 

  • un numéro national d'écoute téléphonique, anonyme et gratuit : le 3919 "Violences Femmes info" ;
  • les actions de la justice : bracelet anti-rapprochement, ordonnances de protection, Téléphone Grave Danger (TGD), suspension de l'autorité parentale... Depuis le 1er janvier 2024, les plaintes pour violences conjugales sont traitées sous le pilotage des pôles spécialisés dans la lutte contre les violences intrafamiliales ;
  • des dispositifs d'accompagnement et de prise en charge, notamment l'hébergement pour les femmes victimes de violences conjugales (une plateforme de géolocalisation des places d’hébergement d'urgence est mise à disposition des forces de l'ordre), les accueils de jour, les lieux d’accueil, d'écoute et d'orientation (LAEO), les "référents pour les femmes victimes de violences au sein du couple" qui ont une mission de coordination de proximité.

Quant aux violences sexuelles sous emprise de drogue, la loi du 3 août 2018 a qualifié de circonstance aggravante l'usage de drogue par l'auteur lors d'une agression sexuelle ou d'un viol. Mais en l'état actuel du droit, le fait que la victime soit sous emprise de stupéfiants ou d'alcool ne constitue pas une circonstance aggravante de l'infraction. 

L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) réalise chaque année, depuis 2003, une enquête "Soumission chimique" pour identifier les substances en cause dans l'usage criminel et délictuel, définir les types d’agression associés et le modus operandi des auteurs notamment.

En 2022, la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) a lancé une campagne d'information, de prévention et de réduction des risques liés au GHB (produit anesthésiant) et au GBL (solvant industriel précurseur du GHB) dans les établissements de nuit (bars, discothèques...). 

Outre les produits illicites, des mesures préventives portent sur l'utilisation détournée de certains médicaments, notamment une prescription restreinte et surveillée.

Aujourd'hui, le code pénal prévoit deux infractions pénales distinctes : l'agression sexuelle (délit) et le viol (crime).

Leur définition est le fruit d'une longue histoire jurisprudentielle et législative. Avant la Révolution française, le viol n'est ni défini, ni nommé précisément. L'analyse du viol par les juges s'articule alors autour de l'atteinte à l'honneur de la famille de la victime. 

En 1791, le viol est inscrit pour la première fois dans le code pénal, mais il n'y est pas défini (seule la peine est mentionnée). Le code pénal napoléonien de 1810 apporte quelques précisions en son article 3, qui dispose : "Quiconque aura commis le crime de viol, ou sera coupable de tout autre attentat à la pudeur, consommé ou tenté avec violence contre des individus de l’un ou de l'autre sexe, sera puni de la réclusion. ". À cette époque, le viol n’est considéré possible qu'en dehors du mariage.

La définition du viol est ensuite précisée par les juges. L'arrêt de la Cour de cassation Dubas (1857) introduit les éléments de contrainte et de surprise, tout en mentionnant le "défaut de consentement". La Cour de cassation décrit le viol comme "le fait d'abuser une personne contre sa volonté, soit que le défaut de consentement résulte de la violence physique ou morale exercée à son égard, soit qu'il résulte de tout autre moyen de contrainte ou de surprise pour atteindre, en dehors de la volonté de la victime, le but que se propose l'auteur de l'action". 

C'est ensuite une loi du 23 décembre 1980 qui reconnaît le crime de viol, défini comme "tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis sur la personne d'autrui, par violence, contrainte ou surprise". Depuis, la "menace" a été ajoutée à la liste des moyens constitutifs du viol. La logique est la même pour le délit d'agression sexuelle, qui est caractérisé en cas d'"atteinte sexuelle" commise par un de ces 4 moyens (violence, contrainte, menace ou surprise). La notion d'absence de consentement ne figure donc pas dans ces articles du code pénal.

Les définitions de l'agression sexuelle et du viol sont alors caractérisées uniquement par la commission des faits par l'auteur, le modus operandi, indépendamment du comportement de la victime. La logique est celle d'une présomption de consentement.

Depuis 1980, les définitions du viol et de l'agression sexuelle ont progressivement été complétées et consolidées : 

  • Le viol conjugal est reconnu par une loi du 4 avril 2006. Le viol commis au sein du couple devient une circonstance aggravante. La présomption de consentement des époux est supprimée par la loi du 9 juillet 2010. Dans un arrêt du 23 janvier 2025, la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a condamné la France pour un divorce prononcé pour manquement au "devoir conjugal" ;
  • Une loi du 21 avril 2021 a supprimé l'obligation de prouver la violence, la contrainte, la menace ou la surprise pour caractériser un viol ou une agression sexuelle sur mineur de moins de 15 ans (sauf si l'écart d'âge est inférieur à 5 ans) ou de moins de 18 ans en cas d'inceste ;
  • La même loi de 2021 étend le crime de viol, au-delà de l'acte de pénétration sexuelle, à "tout acte bucco-génital".

La loi du 6 novembre 2025 modifiant la définition pénale du viol et des agressions sexuelles a réintroduit une approche prenant en compte le consentement de la victime, qui avait été écartée de la définition par la loi de 1980. Le code pénal prévoit désormais que : 

"Constitue une agression sexuelle tout acte sexuel non consenti commis sur la personne d'autrui ou sur la personne de l'auteur ou, dans les cas prévus par la loi, commis sur un mineur par un majeur. Au sens de la présente section, le consentement est libre et éclairé, spécifique, préalable et révocable. Il est apprécié au regard des circonstances. Il ne peut être déduit du seul silence ou de la seule absence de réaction de la victime. Il n'y a pas de consentement si l'acte à caractère sexuel est commis avec violence, contrainte, menace ou surprise, quelle que soit leur nature. Le viol et les autres agressions sexuelles sont constitués lorsqu'ils ont été imposés à la victime dans les conditions prévues par la présente section, quelle que soit la nature des relations existant entre l'agresseur et sa victime, y compris s'ils sont unis par les liens du mariage [...]" (article 222-22 du code pénal).

Le défaut de consentement permet également de caractériser le viol, crime pour lequel l'acte "bucco-anal" a par ailleurs été ajouté par la loi de 2025 aux côtés de la pénétration sexuelle et de l'acte bucco-génital (article 222-23 du code pénal).

Le mouvement #MeToo a amené la question du consentement au centre des débats en 2017. La libération de la parole des femmes s'est accompagnée d'une affirmation : "Non, c'est non." Les femmes ont ainsi recentré le débat concernant les violences sexuelles sur leur expérience et leur point de vue. S'est alors posé la question d'intégrer le non-consentement à la définition des violences sexuelles, intégrant le point de vue de la victime.

Les détracteurs de l'intégration de la notion de consentement à la définition de l'agression sexuelle et du viol arguent que cela reviendrait à évoquer le comportement de la victime, voire à faire reposer sur elle la charge de la preuve. Une femme ayant subi une agression sexuelle ou un viol devrait prouver qu'elle n'était pas d'accord. Certains arguent également de l'inutilité d'une telle modification, considérant que le modus operandi de l'auteur (violence, menace, contrainte ou surprise) implique en lui-même l'absence de consentement de la victime. 

Ils se réfèrent également à la jurisprudence riche en la matière (voir le rapport d'information sur la définition pénale du viol paru début janvier 2025). Les juges ont développé une interprétation des éléments constitutifs du viol permettant de condamner des auteurs de violences sexuelles dans des situations diverses (situations d'abus d'un état de fragilité ou d'une vulnérabilité économique, usage d'un stratagème...). L'incidence de l'intégration du défaut de consentement pourrait dès lors être moindre. Les opposants à cette réforme insistent sur la nécessité de se concentrer davantage sur l'accueil des plaintes et les moyens insuffisants pour les traiter correctement et rapidement.

Les promoteurs d'une définition de l'agression sexuelle et du viol intégrant la notion de consentement argumentent que cette question étant au centre des débats dans les tribunaux, il est pertinent de lui donner une existence juridique. Ils considèrent qu'il serait plus aisé de prouver le non-consentement d'une victime que de prouver des faits de "violence, menace, contrainte ou surprise" de la part d'un auteur. Ils se réfèrent souvent aux législations d'autres pays comme l'Espagne, la Suède, la Belgique ou le Canada, qui ont intégré le consentement affirmatif au cœur de la définition du viol dans leur droit interne.

La notion de consentement souffre néanmoins de plusieurs lacunes. Philosophes et féministes relèvent la connotation patriarcale de la notion de consentement, puisque la femme est mise dans la position de devoir apporter une réponse au désir de l'homme : "L'homme propose, la femme dispose." 

L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) définit la soumission chimique comme "l’administration à des fins criminelles (viols, actes de pédophilie) ou délictuelles (violences volontaires, vols) de substances psychoactives à l’insu de la victime ou sous la menace".

L’ANSM recense chaque année depuis 2003 les molécules utilisées par les agresseurs et leur mode opératoire, en s’appuyant principalement sur les plaintes. Elle dénombre 1  229 agressions facilitées par des substances en 2022, soit une hausse de 69,1%, à mettre en perspective avec les mouvements de libération de la parole, la réouverture des discothèques et le déploiement du plan gouvernemental anti-GHB (acide gamma-hydroxybutyrique, appelé aussi "drogue du violeur") .

Les produits utilisés sont :

  • des médicaments sédatifs (56,7% des cas) : des benzodiazépines et apparentés (25,2%), des antihistaminiques (12,6%), des opioïdes (11%), d’autres sédatifs comme des neuroleptiques ou des antidépresseurs (7,9%) ;
  • des substances non médicamenteuses (43,3%) : MDMA (méthylène-dioxyméthamphétamine ou ecstasy), cocaïne, cannabis, GHB/GBL (acide gamma-butyrolactone, qui se transforme en GHB dans l’organisme), alcool… 

La plupart des agressions se produisent dans des lieux festifs. Les agressions sexuelles constituent la majorité des signalements (58,4%), suivies par les tentatives de soumission chimique (9,6%), les vols (7,1%) et les violences physiques (5,1%). Les cas recensés ne représentent sans doute qu’une partie de la réalité, le dépôt de plainte étant difficile en matière d’agression sexuelle, et plus encore quand la victime souffre d’amnésie.

L’expression "soumission chimique" ne figure pas dans le code pénal. Mais la loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes prévoit que "le fait d’administrer à une personne, à son insu, une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes afin de commettre à son égard un viol ou une agression sexuelle est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende" (codifié à l'article 222-30-1 du code pénal). La peine est alourdie (sept ans de prison et 100 000 euros d’amende) "lorsque les faits sont commis sur un mineur de 15 ans ou une personne particulièrement vulnérable".

Les parlementaires Sandrine Josso et Véronique Guillotin ont remis un rapport au gouvernement sur la soumission chimique en mai 2025. Elles attirent l'attention sur les chiffres très bas des faits de soumission chimique en vue d'un viol ou d'une agression sexuelle enregistrés par les forces de l'ordre. Plusieurs facteurs l'expliquent : manque de connaissance et d'information à ce sujet (aussi bien chez les victimes que du côté des professionnels), amnésie des victimes, disparition rapide des drogues ou médicaments administrés dans l'urine...

Les parlementaires recommandent, entre autres, le lancement d'une campagne nationale de sensibilisation à ce sujet et un meilleur accompagnement des victimes. Elles appellent également à intégrer au code pénal une circonstance aggravante "pour la victime en cas d'état d'ivresse ou sous l'emprise de produits stupéfiants" pour les crimes et délits sexuels. 

L'égalité entre les femmes et les hommes et la non-discrimination sont des valeurs fondamentales de l'Union européenne (UE). Des engagements plus précis concernant les violences sexistes et sexuelles sont pris par l'UE depuis une dizaine d’années.

L'UE est signataire de la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique, dite "Convention d'Istanbul". Celle-ci exige des parties qu'elles élaborent des lois, des politiques et des services de soutien pour mettre fin à la violence à l'égard des femmes et à la violence domestique. La convention d'Istanbul est entrée en vigueur en avril 2014 et a été signée par l'UE le 13 juin 2017. En février 2023, le Conseil a demandé l'approbation du Parlement européen en vue de l'adoption de la décision relative à la conclusion de la convention par l'UE. Le 1er juin 2023, le Conseil a adopté une décision relative à l'adhésion de l'UE à la convention. 

L'article 36 de la convention d'Istanbul précise : "Le consentement doit être donné volontairement comme résultat de la volonté libre de la personne considérée dans le contexte des circonstances environnantes."

En 2021, le Parlement européen a adopté une résolution sur la stratégie de l'Union en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes. Un paragraphe y indique expressément la volonté d'éliminer la violence à l'égard des femmes et la violence sexiste. Le Parlement a souligné la nécessité de prendre des mesures spécifiques pour remédier aux disparités existantes entre les États membres en matière de lois, de politiques et de services, et à l'augmentation de la violence domestique et sexiste pendant la pandémie de COVID-19. 

La directive du 14 mai 2024 relative à la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique vise à protéger les femmes victimes de violences et harmoniser les sanctions à l'encontre de ceux qui les commettent. Cette directive vise à fournir un cadre global pour prévenir et combattre efficacement la violence à l'égard des femmes et la violence domestique dans toute l'Union. La directive prévoit des lois plus strictes contre la cyberviolence, une meilleure assistance aux victimes, des mesures de prévention du viol et une meilleure compréhension du consentement sexuel. Toutefois, la directive ne donne pas de définition commune du viol. 

La définition juridique du viol doit-elle être harmonisée au niveau européen ? 

Le 8 mars 2022, la Commission européenne présente un projet de directive qui instaure, pour la première fois, une définition du viol au niveau européen. Son article 5 propose une définition du viol fondée sur l'absence de consentement en s'inspirant de la convention d’Istanbul ("seul oui veut dire oui"). Pour caractériser le viol, il suffit d'établir le défaut de consentement de la victime, que l'auteur du viol ait, ou non, utilisé des moyens de coercition.

Dans le texte présenté le 8 mars 2022, la Commission juge que "l'absence de consentement devrait être un élément central et constitutif de la définition de viol, étant donné que fréquemment, le viol est perpétré sans violence physique ni usage de la force". "Un consentement initial devrait pouvoir être retiré à tout moment durant l'acte, dans le respect de l'autonomie sexuelle de la victime, et ne devrait pas signifier automatiquement le consentement à de futurs actes", poursuit le texte.  

En juin 2023, les États membres ont finalement décidé d'exclure des négociations l'article 5 du projet de directive. Le Parlement européen et plus d'une dizaine de pays (dont l'Espagne, la Belgique, la Grèce, la Suède et l'Italie) ont adhéré à la définition du viol proposée. En revanche, une dizaine d'autres pays, notamment la France, la Hongrie ou l'Allemagne, se sont opposés à l'intégration du viol dans la législation européenne au motif que l’UE n'a pas de compétence en la matière et que le texte risquait d'être retoqué par la justice européenne en cas de recours.

Pour les pays opposés au texte, le viol n'a pas la dimension transfrontalière nécessaire pour être considéré comme un "eurocrime" susceptible de donner lieu à une harmonisation de la législation au niveau européen. Seules les infractions mentionnées dans l'article 83 du traité sur le fonctionnement de l'UE sont concernées : le terrorisme, la traite des êtres humains et l'exploitation sexuelle des femmes et des enfants, le trafic illicite de drogues, le trafic illicite d'armes, le blanchiment d'argent, la corruption, la contrefaçon de moyens de paiement, la criminalité informatique et la criminalité organisée. Le Parlement et la Commission considèrent, pour leur part, que le viol peut entrer dans le cadre de l'exploitation sexuelle des femmes.