La diplomatie féministe d'un État place les droits des femmes et des filles et l'égalité de genre au cœur de sa politique étrangère.
La diplomatie féministe est un outil stratégique permettant de promouvoir l'effectivité des droits des femmes et des filles comme une condition nécessaire à la démocratie et à la paix.
Une diplomatie féministe permet de refuser les régressions dans un contexte de montée des conservatismes et des mouvements anti-droits dans le monde.
En 2018, la Suède, premier État à se doter d'une diplomatie féministe et à la promouvoir, présente un Manuel de diplomatie féministe. La diplomatie féministe est une méthode de travail et une perspective ayant pour fondement le renforcement des "trois R", les droits, la représentation et les ressources des femmes et des filles ("all women’s and girls’ Rights, Representation and Resources" en anglais). La diplomatie féministe suédoise consiste aussi à atteindre la parité dans les ambassades : le pays comptait 10% d'ambassadrices en 1996, 40% en 2016 et 51% en 2024. En 2024, la France compte 36% d'ambassadrices, le Canada 53%.
Le Canada définit ainsi sa politique d'aide internationale féministe : "L'objectif premier de cette politique est de contribuer aux efforts déployés à l'échelle internationale pour éliminer la pauvreté dans le monde. Pour y arriver, il faut travailler sur les inégalités. Plus particulièrement, il faut permettre aux femmes et aux filles de développer leur plein potentiel pour qu'elles soient en mesure d'assurer leur propre bien-être qui profitera également à celui de leur famille ainsi qu'à la croissance économique de leur communauté et de leur pays."
Les 22 et 23 octobre 2025, réunis pour la quatrième édition de la conférence ministérielle des diplomaties féministes, 31 États ont adopté une déclaration politique qui réaffirme leur attachement aux cadres internationaux existants pour l'égalité de genre.
La diplomatie féministe se réfère notamment à un cadre juridique international relatif aux droits des femmes et des filles.
Plusieurs textes internationaux prônent l'interdiction des discriminations et le respect des droits et des libertés fondamentales sans distinction de sexe, notamment :
- l'article 55 de la Charte des Nations unies du 26 juin 1945 ;
- l'article 2 de la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 ;
- l'article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes du 18 décembre 1979 ;
- les pactes sur les droits civils et politiques, économiques, sociaux et culturels ;
- les textes conventionnels à valeur universelle en matière de droits de l'homme.
L'objectif de développement durable 5 (ODD 5) relatif à l'égalité entre les sexes vise à autonomiser les femmes et les filles et à défendre leurs droits. Le corpus normatif de traités, pactes et conventions ainsi que l'ODD 5 contribuent à placer l'égalité de genre parmi les priorités internationales et à mettre en avant son caractère indispensable au développement pacifique et durable des sociétés.
La France a adopté une diplomatie féministe en 2019. La stratégie internationale de la France pour une diplomatie féministe 2025-2030 se structure autour de cinq piliers :
- Défendre les droits et les libertés ;
- Favoriser la participation et la représentation dans tous les processus de décision ;
- Lutter contre les inégalités fondées sur le genre ;
- Combattre les violences fondées sur le genre et faites aux femmes ;
- Mobiliser des financements pour avancer vers l'égalité de genre.
Cette diplomatie féministe est portée par une méthodologie féministe s'articulant autour de quatre principes directeurs :
- Transversalité et cohérence de l'action européenne et internationale de la France (entre ministères, réseau diplomatique, opérateurs) ;
- Partenariats et coalitions (partenaires bilatéraux, multilatéraux, société civile) ;
- Formation et expertise (renforcer les compétences des agentes et agents) ;
- Résultats et redevabilité (prendre en compte les spécificités des contextes).
La diplomatie féministe de la France met en avant cinq priorités :
- Réaffirmer les priorités historiques :
- Défendre les droits et santé sexuels et reproductifs (DSSR), dont le droit à l'avortement sécurisé ;
- Promouvoir l'éducation des filles et l'égalité de genre dans et par l'éducation ;
- Éliminer toutes les formes de la violences faites aux femmes, aux filles, et fondées sur le genre ;
- Soutenir la participation citoyenne et politique des femmes et favoriser leur représentation dans toutes les sphères de la société ;
- Agir pour l’autonomisation économique des femmes ;
- Promouvoir un multilatéralisme fort et efficace au service de la diplomatie féministe :
- Porter les priorités de la diplomatie féministe aux Nations unies et dans toutes les enceintes multilatérales ;
- Promouvoir les normes internationales garantissant les droits et les libertés des femmes et des filles et refuser toute régression ;
- Œuvrer pour une gouvernance féministe des organisations et des fonds multilatéraux ;
- Mener une politique étrangère féministe commune à l’échelle européenne ;
- Mobiliser l’ensemble des instruments financiers pour contribuer à l’égalité de genre :
- Accroître la part des investissements solidaires et durables en faveur de l’égalité de genre ;
- Continuer de soutenir politiquement et financièrement les mouvements, organisations et activistes féministes ;
- Répondre aux enjeux globaux par la diplomatie féministe :
- Promouvoir une action climatique et environnementale féministe ;
- Défendre les droits des femmes et des filles et promouvoir l’égalité de genre dans l’environnement numérique et l’intelligence artificielle ;
- Faire de l’égalité de genre une clé du développement humain ;
- Mobiliser la diplomatie économique et la politique commerciale pour atteindre l’égalité de genre ;
- Porter l’approche féministe comme condition indispensable à la paix et à la sécurité, la prévention des conflits et la réponse aux crises et aux conflits armés :
- Assurer la participation pleine, égale et significative des femmes et des filles à la prévention des conflits et aux processus de paix ;
- Lutter contre les violences sexuelles et fondées sur le genre liées aux conflits et combattre l’impunité ;
- Renforcer la prise en compte des femmes et des filles, et du genre dans la prévention et la réponse aux crises et conflits.
La diplomatie féministe est aussi portée en interne dans les ambassades et les services du ministère de l'Europe et des affaires étrangères.