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Les achats électroniques de biens et services par les particuliers sont estimés à 37 milliards d'euros en 2011, dont sept pour les courses de Noël. Ils ont triplé en 5 ans, si bien que la France se détache de la moyenne européenne pour se rapprocher de l'Allemagne, voire du Royaume-Uni. La Délégation à la prospective s'est interrogée, à un horizon de 10 ans, sur la durabilité et les conséquences de la croissance d'un secteur si bien-portant malgré la crise.
SYNTHÈSE
INTRODUCTION
COMMERCE ÉLECTRONIQUE : NOUVELLE VISIBILITÉ, NOUVEAUX QUESTIONNEMENTS
A. UN CHAMP D’ÉTUDE DÉLAISSÉ APRÈS L’EXPLOSION DE LA « BULLE INTERNET »...
1. Une crise profonde
2. Un scepticisme durable
B. ... QUI RENAÎT À LA FAVEUR D’UNE CROISSANCE APPAREMMENT ROBUSTE
1. Un dynamisme remarquable
a) Une croissance qui pousse le commerce électronique hors du périmètre traditionnel de la vente à distance
b) Une croissance singulière à l’échelle internationale
c) Une croissance concentrée sur certains biens et services
2. Un dynamisme durable ?
a) Un marché ouvert et un contexte technologique désormais facilitateur
b) Des acteurs volontaires et innovants
c) Un bilan incertain, une dynamique à risque, des réussites souhaitables
DES VARIABLES CLÉ GLOBALEMENT FAVORABLES AU DÉVELOPPEMENT DE L’E-COMMERCE
I. COMPORTEMENT DES CONSOMMATEURS
A. CONTRAINTES PESANT SUR LES CONSOMMATEURS
1. Contrainte de temps
2. Contrainte de lieu
3. Contrainte économique : facteur prix et coût des transports
B. ASPIRATIONS DES CONSOMMATEURS
1. Attrait pour les nouveautés
2. Préférence tendancielle pour les « biens supérieurs »
3. Liberté d’accéder à un choix élargi et à des produits rares
4. Goût pour une consommation moins « fordiste », de plus en plus individualisée
5. Intérêt pour les offres de « solution globale » dans le cadre d’une « économie de la fonctionnalité »
6. Développement durable
II. ATTRACTIVITÉ DU COMMERCE ÉLECTRONIQUE
A. NIVEAU DES PRIX
1. Les facteurs d’amélioration de la concurrence...
2. ... semblent l’emporter sur les freins et les anomalies…
3. ... au regard de l’évolution constatée des prix
B. COMPÉTITIVITÉ HORS PRIX
1. Attractivité des sites et niveau de service
2. Souplesse et fiabilité de l’acheminement
III. UNIVERSALITÉ D’ACCÈS AU COMMERCE ÉLECTRONIQUE
A. DIFFUSION ET AMÉLIORATION DES TIC
1. Accès au haut et au très haut débit
2. Persistance d’effets d’apprentissage et de cohorte
3. Multiplicité, disponibilité et performance des points d’accès
B. ACCESSIBILITÉ DES BIENS ET SERVICES VIA LE COMMERCE ÉLECTRONIQUE
C. PERMÉABILITÉ DU COMMERCE PHYSIQUE A L’E-COMMERCE
1. Une « électronisation » du commerce
2. Des stratégies « multicanal » aux stratégies « cross-canal »
D. PERSPECTIVES D’HYBRIDATION AVEC UNE SOCIABILITÉ ÉLECTRONIQUE EN PLEIN ESSOR
E. COMPLÉMENTARITÉ AVEC LE COMMERCE ÉLECTRONIQUE « C TO C »
1. Une articulation cohérente pour les consommateurs
2. Des interactions économiques complexes, qui restent à explorer
IV. QUELQUES FACTEURS DE RISQUE D’UNE APPRÉCIATION DIFFICILE
A. FRAGILITÉ DE CERTAINS MODÈLES ÉCONOMIQUES
1. Une logistique exigeante
2. Un accès au marché onéreux
3. Des ressources problématiques
4. Crise et risque d’exacerbation de la concurrence par les prix
B. CONTRAINTES JURIDIQUES ET FISCALES
1. Le risque d’une protection excessive des consommateurs
2. Le risque d’une fiscalité fragilisante
C. DÉFIANCE DES CONSOMMMATEURS
1. Le risque de tromperie
2. L’aléa d’un cas de force majeure
3. Les risques tenant au traitement des données bancaires et personnelles
4. D’éventuelles réticences face à un certain envahissement psychologique
QUEL AVENIR ?
I. QUELLES TRAJECTOIRES ENVISAGEABLES POUR L’E-COMMERCE ET LES AUTRES TYPES DE COMMERCES ?
A. RETOUR SUR L’EVOLUTION RÉCENTE DE LA STRUCTURE DE LA
DISTRIBUTION
B. UN ESSOR PRÉVISIBLE DU COMMERCE ÉLECTRONIQUE, SELON DES
MODALITÉS OUVERTES
1. Des perspectives de conquête qui font plutôt consensus
2. Un chemin de croissance sensible au contexte macroéconomique
C. DES COMMERCES PHYSIQUES AUX TRAJECTOIRES DÉVIÉES ET AUX PHYSIONOMIES MODIFIÉES
1. Grandes surfaces alimentaires
2. Grandes surfaces spécialisées
3. Commerce de proximité
4. Autres formes
D. UN IMPACT DIRECT SUR L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
II. TROIS SCÉNARIOS DE CROISSANCE POUR 2022
A. LE SCÉNARIO CENTRAL : UN COMMERCE « ÉLECTRONISÉ », DES MENAGES
LIBÉRÉS
B. VARIANTE N° 1 : L’E-COMMERCE, CORRECTIF PRO-CYCLIQUE A UN NIVEAU DE VIE DÉCLINANT
C. VARIANTE N° 2 : L’ACCÉLÉRATION « HÉDONISTE » DE L’E-COMMERCE, RELAIS DE CROISSANCE ÉCONOMIQUE
EXAMEN EN DÉLÉGATION
ANNEXES
COMPTES RENDUS DES AUDITIONS
I. JEAN-RÉMI GRATADOUR, VICE-PRÉSIDENT DE L’ACSEL, DIRECTEUR E-
COMMERCE DE GÉOPOST ET MARIE GIROUD, CHARGÉE DE MISSION
(ACSEL)
II. PHILIPPE MOATI, PROFESSEUR À L’UNIVERSITÉ PARIS DIDEROT
III. FRANÇOIS MOMBOISSE, PRÉSIDENT DE LA FEVAD ET MARC LOLIVIER, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL
IV. BENOÎT TABAKA, DIRECTEUR DES RELATIONS INSTITUTIONNELLES, PRICEMINISTER
V. FRANÇOIS COPIGNEAUX, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE COLIPOSTE
VI. ALAIN RALLET, PROFESSEUR DE SCIENCES ÉCONOMIQUES, DIRECTEUR DE L’ADIS – ANALYSE DES DYNAMIQUES INDUSTRIELLES ET SOCIALES, UNIVERSITÉ PARIS-SUD
VII. PIERRE VOLLE, PROFESSEUR DE MARKETING MANAGEMENT À L’UNIVERSITÉ PARIS-DAUPHINE
VIII. LUDOVIC DUPREZ, DIRECTEUR GÉNÉRAL ET COFONDATEUR DE CHRONODRIVE
IX. MARC SCHILLACI, PRÉSIDENT ET FONDATEUR D’OXATIS
X. PHILIPPE DE CLERMONT-TONNERRE, STAR SERVICE
XI. NATHALIE HOMOBONO, DIRECTRICE GÉNÉRALE DE LA DGCCRF, CÉCILE PENDARIES, SOUS-DIRECTRICE DES AFFAIRES JURIDIQUES, DES POLITIQUES, DE LA CONCURRENCE ET DE LA CONSOMMATION, ET DIDIER GAUTIER, CHEF DU SERVICE NATIONAL DES ENQUÊTES DE LA DGCCRF
COMPTES RENDUS DES VISITES
I. SHOWROOMPRIVE.COM (SIÈGE ET ATELIERS), ENTRETIEN AVEC THIERRY PETIT, FONDATEUR ET DIRECTEUR ASSOCIÉ
II. PIXMANIA (SIÈGE), ENTRETIEN AVEC ULRIC JEROME, DIRECTEUR EXÉCUTIF
III. CASINO (MAGASIN EXPÉRIMENTAL DESTINÉ AUX MALVOYANTS) ENTRETIEN AVEC JEAN PREVOST, DIRECTEUR DE L’INNOVATION, THIBAULT DE POMPERY, DIRECTEUR DE CRÉATION ET JEAN-LUC FECHNER, CHARGÉ DES RELATIONS EXTÉRIEURES
IV. CHRONODRIVE (MAGASIN DE BRIE-COMTE-ROBERT), ENTRETIEN AVEC JULIEN MAQUAIRE, DIRECTEUR DE MAGASIN ET LUDOVIC DUPREZ, DIRECTEUR GÉNÉRAL ET COFONDATEUR DE CHRONODRIVE
COMPTE RENDU DE L’ATELIER DE PROSPECTIVE SUR LE COMMERCE ÉLECTRONIQUE
GLOSSAIRE E-COMMERCE
Les achats électroniques de biens et services par les particuliers sont estimés à 37 milliards d’euros en 2011, dont sept pour les courses de Noël. Ils ont triplé en 5 ans, si bien que la France se détache de la moyenne européenne pour se rapprocher de l’Allemagne, voire du Royaume-Uni. La Délégation à la prospective s’est interrogée, à un horizon de 10 ans, sur la durabilité et les conséquences de la croissance d’un secteur si bien-portant malgré la crise.
I. DES « VARIABLES CLE » FAVORABLES À L’E-COMMERCE
L’e-commerce a déjà surmonté le handicap structurel de la distanciation physique et de prestations différées. A court et moyen terme, la puissance et la fiabilité de ses moteurs devraient le propulser en France à des niveaux inédits.
Comportement des consommateurs
Résultante de contraintes économiques, temporelles et géographiques, et d’aspirations à des offres nouvelles ainsi qu’au développement durable, le comportement des ménages est un facteur de croissance pérenne à l’horizon de l’étude.
Attractivité du commerce électronique
Avec une pondération variable, l’attrait de l’e-commerce résultera de sa compétitivité-prix, déjà acquise et qui augmente avec le coût des transports, et de sa compétitivité hors prix, qui repose sur de nombreuses sous-variables, plutôt bien orientées, tenant à la pertinence, à la diversité et à la qualité des services associés, des solutions d’acheminement et de paiement ainsi que, d’une façon générale, des innovations techniques ou de marketing.
Accès à l’e-commerce
On s’attend à une démultiplication de l’accès au commerce électronique avec une diffusion et une mobilisation accrue d’Internet et des technologies de l’information et de la communication (TIC), de nouveaux biens et services disponibles en ligne, une certaine perméabilité du commerce physique à l’ e-commerce, de nombreuses perspectives d’hybridation avec une sociabilité électronique (forums, réseaux...) florissante et, enfin, une complémentarité émergente avec les transactions électroniques entre particuliers
Facteurs de risque
Certains modèles économiques apparaissent comme fragiles : la logistique est exigeante et coûteuse, l’accès au marché, de plus en plus onéreux. Maintes ressources sont problématiques, avec des conditions imposées par les fournisseurs parfois discriminatoires et des difficultés à pourvoir certains emplois. En focalisant l’attention sur les prix, la crise constitue un facteur aggravant. S’ajoute le risque, plus ténu, d’un cumul local de contraintes juridiques et fiscales favorisant les acteurs étrangers.
Mais, si certaines positions sont exposées, seule une altération de la confiance des consommateurs serait susceptible de stopper la croissance globale de l’e-commerce. Plus improbable, elle pourrait résulter des craintes, aujourd’hui en reflux, de tromperie et de vol de données personnelles, ou de la prise de conscience graduelle d’une sorte d’envahissement de la sphère cognitive par la sphère mercantile.
II. DES INTERACTIONS NOUVELLES DANS LA DYNAMIQUE DE LA DISTRIBUTION
Envol du commerce électronique
La croissance annuelle du secteur, de 28 % en moyenne de 2006 à 2010, s’établirait encore à 20 % en 2011. Le ralentissement paraît inexorable à mesure que les volumes augmentent et que s’approfondit une crise qui, toutefois, n’entame pas forcément le différentiel de croissance entre commerce électronique et autres commerces. Les acteurs de la distribution prévoient une expansion rapide de la part de l’e-commerce dans le commerce de détail : de moins de 5 % en 2010 à 24 % en 2020.
Erosion des parts de la grande distribution et besoin de proximité
La résilience du commerce de proximité se confirme. Son rebond est attendu. En contrepoint, la part de marché des grandes surfaces d’alimentation générale (GSA) décroît depuis 2004. Celle des hypermarchés a reculé de 35 % à 32 %, de 1999 et 2009. Le chiffre d’affaires des grandes surfaces spécialisées (« high tech », électroménager, vêtements, bricolage...), après avoir rogné celui des GSA, est maintenant aspiré par l’e-commerce qui devrait bientôt, avec le succès prévisible des « drives », mordre significativement sur l’activité de ces mêmes GSA.
Toutes ces évolutions sont cohérentes avec le rejet d’une consommation chronophage et énergivore ainsi qu’un besoin prosaïque d’économies. Déjà, les grandes enseignes adoptent des stratégies « multi-canal » de distribution, physique et électronique, et diversifient leurs gammes et leurs surfaces de vente afin de s’adresser, partout, à tous les consommateurs. La coordination de ces canaux de vente implique une « électronisation » du commerce
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III. 2022 : UN COMMERCE ÉLECTRONIQUE LIBÉRATEUR ET PROCYCLIQUE
Le déploiement de l’e-commerce paraît inéluctable, mais relativement indéterminé dans ses modalités. Les axes de son développement dépendront, pour une large part, du revenu des ménages et donc du cadre macroéconomique, donnée plutôt exogène en raison de la mondialisation. Ce contexte est l’élément différenciateur des trois scénarios ici proposés
Le premier scénario est le socle de notre réflexion prospective. Il est basé sur une croissance économique moyenne de 1 % jusqu’en 2022. Les deux autres scénarios sont des variantes de ce scénario central. Le premier se déploie sur fond de stagnation économique et le second, sur la base d’une reprise tangible. Dans ces variantes, l’e-commerce se révèlera « procyclique », accentuant l’orientation spontanée de l’activité, ici défavorable, là favorable.
Scénario central- Croissance économique moyenne de 1 % (2012-2022)
Un commerce « électronisé », des ménages « libérés »Internet, d’un accès toujours plus général, devient le préalable à toute acquisition, dans une quête d’optimisation budgétaire et afin de consulter des tiers ou des proches, notamment dans le cadre centrifuge des sociabilités électroniques. Ce faisant, les ménages renoncent plus volontiers à leurs marques ou à leurs enseignes habituelles.
Une consommation polarisée - Le spectacle de la profusion cesse de fasciner. Les grandes surfaces de vente se démodent au profit d’offres plus proches, plus personnalisées, plus élaborées et riches en services, soutenues par des publicités célébrant une liberté recouvrée, ou flattant la spécificité des goûts de chacun. Les biens supérieurs (livres, musique, films, tourisme...), souvent proposés en « bouquets » numérisés, font l’objet d’une appétence accrue. Pour certaines dépenses, les ménages privilégient alors le bas de gamme ou des rachats sur Internet à des particuliers, afin de mieux accéder, ailleurs, à l’artisanat, au luxe, aux voyages, au « sur-mesure » ou à des biens et services culturels, techniques ou innovants...
Concurrence et turbulences pour les enseignes - Les consommateurs sont de plus en plus en confiance avec les e-commerçants. Or, leurs moyens stagnent. Ils se focalisent alors sur les prix, renforçant la concurrence sur un marché qui tend, en outre, à s’internationaliser. Les « pure players », dont la profitabilité est souvent problématique, en souffrent, tandis que les « click and mortars », mieux autofinancés pour leurs activités de vente sur Internet, peinent alors à redimensionner, relocaliser ou adapter des surfaces à l’attractivité déclinante.
Avec des marges réduites, une demande volatile, mais aussi des opportunités de conquêtes, adopter une stratégie optimale s’avère crucial et ardu. Les fonctions d’intermédiation propres à l’e-commerce compliquent encore l’équation d’un positionnement réussi dans un circuit que les marques à forte notoriété peuvent d’ailleurs chercher à contourner. Les restructurations d’activité s’accélèrent, sauf pour le grand luxe, porté par certains marchés émergents.
Un commerce « électronisé », des clients cernés - La distinction entre commerce physique et électronique s’estompe avec les stratégies « multicanal » de diversification des accès à une même offre. Nulle enseigne ne peut négliger la visibilité et les ventes que permet Internet, tandis que les « pure players » veulent des ancrages (magasins, « show-room », stands...) pour multiplier les forces de rappel sur une clientèle volage.
La part de l’e-commerce stricto sensu (ventes via Internet) devient moins signifiante. Grâce aux TIC, les séquences d’achat, du renseignement au paiement et à la livraison, s’articulent sur différents canaux en synergie : supports connectés - ordinateurs et mobiles, les seconds prenant le pas sur les premiers - et magasins ou relais physiques signalés électroniquement.
De nombreux consommateurs, « tracés » par leurs mobiles géolocalisables, conçoivent alors une certaine défiance pour ce commerce « électronisé », protéiforme et omniprésent ...
Une offre toujours plus en phase avec la demande - ... mais la souplesse qu’il procure finit par le rendre incontournable. Avec une logistique de livraison optimisée (grâce à des avancées en termes de mutualisation et d’intermodalité), l’offre et la distribution s’adaptent rapidement et à moindre coût aux évolutions spontanées de la demande.
Ces dernières résultent d’aspirations hédonistes, de contraintes économiques et temporelles, ainsi que d’une mauvaise conscience environnementale. La population en vient à partager un désir accru de proximité et de contact, une certaine frugalité énergétique et une indisposition marquée pour les courses redondantes, jugées trop chères, trop longues et trop rébarbatives.
Des ménages « libérés » grâce au commerce électronique puis de proximité
Le commerce électronique poursuit une croissance globale au profit d’acteurs à forte compétitivité-prix, ou aux offres ciblées ou novatrices, parfois rattachables à l’« économie de la fonctionnalité » (cf. variante haute).
La progression est notable pour les biens culturels, dont la numérisation se généralise, et pour l’alimentaire, longtemps à la traîne : les drives sont plébiscités par les ménages bi-actifs, bientôt séduits, pour certains, par des solutions inédites d’approvisionnement automatisées, concomitante à la diffusion de l’« Internet des objets ».
Les commerces de proximité se renforcent progressivement dans les villes, puis dans les campagnes. Les petits commerces deviennent souvent les postes avancés de grandes enseignes. Ils s’« électronisent » à leur tour : outre l’avantage d’une présence sur Internet, on peut y effectuer de nouvelles commandes, des réservations, y récupérer des achats, même effectuée sur des sites partenaires, voire concurrents. L’offre de proximité s’enrichit en services tels que la livraison, l’installation ou l’entretien de biens faisant l’objet de mise à disposition ou de commandes électroniques, sans stocks préalables. Par ailleurs, les propositions commerciales, physiques et électroniques, se multiplient sur les lieux de transit.
Le volume d’affaire des grandes surfaces diminue corrélativement et les friches commerciales se multiplient. Même les grandes surfaces spécialisées, malgré un rapport prix/conseil favorable, cèdent du terrain aux sites de vente (qui sont parfois les leurs) où présentation, conseil et service après-vente ne cessent de s’améliorer. Pour préserver leur chiffre d’affaires, les enseignes de la grande distribution poursuivent la diversification de leurs canaux de vente, mais tentent aussi de préserver l’attractivité de leurs surfaces traditionnelles en adoptant une orientation « low cost », voire, à l’inverse, en les « réenchantant » avec de nouveaux services, des « univers » thématiques...
Les ménages jouissent d’une nouvelle liberté : bientôt, le très haut débit se généralise et l’ubiquité d’un commerce totalement « électronisé » rejoint celle du télétravail, dont la pratique se répand, et de nombreux services publics disponibles en ligne. Après certains centres-villes, les ménages réinvestissent, en partie, les milieux ruraux pour réduire leurs frais de logement avec une qualité de vie parfois améliorée.
Variante basse- Stagnation économique puis déflation
Un -commerce « low cost », amortisseur puis amplificateur de la crise
Avec une contrainte économique renforcée, l’e-commerce cultive surtout sa compétitivité-prix.
On assiste à une perte de valeur généralisée - Les ménages, dont le temps disponible augmente avec la baisse du taux d’emploi, peuvent se livrer aux arbitrages les plus fins, écumant les remises et « bons plans » qui pullulent sur la Toile, et se jouent tant bien que mal de politiques tarifaires toujours plus subtiles.
Le volume des transactions entre particuliers explose, non seulement pour les ventes, mais aussi pour de simples locations ou du troc, y compris pour des services. L’autoproduction agricole connaît une progression marquée. La demande finale se tasse car on parvient à un même degré d’utilité globale avec une moindre production marchande.
Alors, une concurrence exacerbée comprime à l’excès les marges des vendeurs et les tarifs des fournisseurs, si bien que l’e-commerce contribue à l’amorce d’un mouvement durable de déflation (rémunérations et prix orientés à la baisse).
L’offre se recompose brutalement - La moindre erreur de positionnement stratégique est sanctionnée ; de nombreux « pure players » font faillite et les enseignes généralistes misant sur un certain confort d’achat se révèlent brusquement inadaptées à une clientèle budgétairement laminée.
Certes, le commerce électronique poursuit sa croissance globale, mais elle se concentre sur les acteurs pouvant s’appuyer sur une forte compétitivité-prix (qui, tel Amazon, peuvent se prévaloir de volumes de vente très importants pour accéder aux meilleures conditions des fournisseurs) ou sur des marchés de niche, orientés vers des clientèles spécifiques ou aisées.
Pour sa part, la grande distribution « low cost » ou, du moins, « orientée prix », reprend dans un premier temps sa croissance. Dans un second temps, l’automatisation progressive du traitement des commandes, la mutualisation des transports ainsi qu’une baisse du coût de la main d’œuvre, permettent une « électronisation » massive du « low cost » ainsi qu’un essor, plus lent dans ce scénario, des drives, voire des livraisons à domicile pour l’ensemble des consommables domestiques.
Variante haute - Croissance moyenne de 2 %
Un e-commerce plus « hédonique », une croissance plus forte et vertueuse
Dans un contexte de reprise économique générale, l’hédonisme des consommateurs s’exprime davantage, ce qui incline les e-commerces à améliorer leur compétitivité hors prix. De même, la sensibilité écologique se renforce, cela d’autant plus que le coût de l’énergie et des transports suit l’orientation, plus ascendante, de la demande mondiale.
Les offres créatrices de valeur et respectueuses de l’environnement se multiplient
- Offres globales, « bouquets » de biens et services apportant des « solutions » aux divers « problèmes » - s’approvisionner, concevoir/créer/entretenir une cuisine, gérer le linge, se déplacer etc. - rencontrent un succès grandissant, soutenu et complété par la politique publique d’aide aux services à la personne, onéreuse mais encore finançable.
L’« économie de la fonctionnalité » émerge : les biens font plus souvent l’objet de mises à disposition successives, vertueuses sur le plan environnemental, au bénéfice de services sollicités pour la conception, le suivi et la fourniture de prestations complexes. Sous un autre angle, la cherté des transports particuliers soutient la compétitivité-prix de l’e-commerce.
La croissance potentielle se renforce
- Toutes choses égales par ailleurs, ces innovations commerciales sont créatrices de valeur ajoutée. En outre, au sein des ménages avec enfants, les gains de temps permis par un recours résolu au commerce électronique, aux diverses « solutions » intégrées qu’il propose, ainsi qu’aux purs services à la personne, décident un nombre croissant de parents à rejoindre la population active, ou à s’y maintenir.
- Autre titre : Commerce électronique : l'irrésistible expansion
- Type de document : Rapport parlementaire
- Pagination : 228 pages
- Édité par : Sénat
- Collection : Les Rapports du Sénat
- Numéro dans la série : 272