Déclaration de M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales, sur les grandes orientations du projet de loi de finances 2006 en faveur des collectivités locales, à Paris le 27 septembre 2005.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : réunion du Comité des finances locales, à Paris le 27 septembre 2005

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs les membres du CFL,
Monsieur le Ministre, cher Collègue,
Pour ce qui concerne les mesures fiscales présentées par le Ministre délégué au Budget, permettez-moi tout d'abord, Monsieur le Président CARREZ, de souligner votre clairvoyance.
Les grandes lignes de cette réforme avaient déjà été esquissées par vos soins lors de votre audition devant la commission Fouquet il y a quelques mois, en tout cas s'agissant des mesures concernant la taxe professionnelle auxquelles j'ai été plus particulièrement associé.
En tout état de cause, à l'annonce de ces réformes, et au vu de leur ampleur pour les collectivités, je souhaitais vous rappeler que mon rôle, en tant que Ministre délégué aux collectivités territoriales, est notamment de veiller à ce que soit préservée l'autonomie financière des collectivités locales, exigence constitutionnelle depuis la révision de mars 2003.
Et, Jean-François tu le sais, ces réformes n'aboutiront qu'à la condition d'un juste équilibre entre l'attente forte et légitime des contribuables, et la préservation des ressources des collectivités territoriales.
Le volet du projet de loi de finances 2006 qui concerne les concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales est marqué par la volonté du Gouvernement, et en son sein du Ministère de l'Intérieur et de l'Aménagement du territoire, de poursuivre l'effort de l'Etat en faveur des collectivités territoriales.
Car aucun de nous n'ignore que ce sont elles qui réalisent 70 % des investissements publics sur le territoire national ; ce sont elles encore qui rassemblent à ce jour plus de 1,7 millions de Fonctionnaires Territoriaux et dont le rôle dans notre politique de l'emploi devient de ce fait incontournable.
C'est pourquoi notre premier objectif, dans la préparation de ce projet de loi de finances, a été :
- de maintenir, malgré la contrainte budgétaire évidente qui est la nôtre, l'effort particulier de l'Etat que constitue le contrat de croissance et de solidarité,
- et de consolider la réforme de la DGF qui figure dans la loi de finances pour 2005 et que votre comité avait d'ailleurs très largement préparé (I).
Nous avons souhaité également rénover le soutien de l'Etat à l'investissement des collectivités locales, à la fois en tenant compte de la nécessité de concentrer cet effort, mais aussi en libéralisant les choix de gestion des collectivités locales (II).
En outre, alors que l'effort de solidarité continuera de s'accroître en faveur des zones urbaines, dans la continuité du plan de cohésion sociale, j'ai souhaité que ce PLF contienne des mesures particulièrement adaptées au monde rural (III).
Enfin, 2006 sera la seconde année de mise en oeuvre des transferts de compétences prévus par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés. Vous savez le travail accompli dans le cadre de la commission consultative sur l'évaluation des charges, sous l'égide de son président Jean-Pierre FOURCADE. Dans ce cadre, nous sommes également attachés à vous fournir les outils financiers les plus adaptés afin d'exercer au mieux ces nouvelles compétences (IV).
I. Des concours financiers de l'Etat durablement consolidés
L'effort financier de l'Etat en faveur des collectivités locales s'élève cette année à plus de 64,9 Mds d'euros. Il représente environ un cinquième du budget de l'Etat. Ces concours doivent être consolidés. A ce titre, une attention particulière doit bien entendu être portée aux dotations incluses dans le contrat de croissance et de solidarité.
1. La reconduction du contrat de croissance et de solidarité
En effet, le principe d'une contractualisation pluriannuelle des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales a été posé dès 1996 avec le pacte de stabilité financière. Maintenu au travers du " contrat de croissance et de solidarité ", il est prorogé annuellement depuis 2002.
Malgré les restrictions imposées aux finances de l'Etat dans un contexte budgétaire difficile, je vous confirme que les règles d'indexation du contrat de croissance et de solidarité (inflation plus 33 % du PIB pour l'enveloppe normée) seront de nouveau reconduites en 2006. Avec une hypothèse d'inflation pour 2006 de 1,8 % et une hypothèse de progression du PIB en 2005 de 1,75 %, l'enveloppe du contrat de croissance progressera de 2,38 % en 2006, et même de 2,49 % après la révision des indices d'indexation du contrat pour 2005. Pour mémoire, le contrat avait progressé de 2,83 % en 2005, 1,7 % en 2004 et 2,3 % en 2003.
Au total, cette enveloppe qui regroupe entre autres la DGF, la DGE, la DGD atteindra près de 44 Mds d'euros en 2006, après prise en compte des ajustements de périmètre. La DGF à elle seule progressera de 2,73 %, ce qui, en monnaie sonnante et trébuchante, représente plus d'1 milliard et 10 millions d'euros.
La DGF des communes et des EPCI progressera ainsi de plus de 577 M d'euros, celle des départements de 297 M d'euros, et celle des régions de 135 M d'euros.
Les collectivités territoriales bénéficient donc cette année encore d'un traitement particulier et le Ministre du Budget ainsi que le rapporteur général du budget pourront vous le confirmer. La péréquation pourra atteindre en 2006 un niveau jamais égalé à ce jour. Ainsi, la péréquation départementale pourra progresser, en fonction des choix de votre Comité, entre 9,2 et 11,2 %. Pour les régions, elle pourra augmenter jusqu'à 37,2 %.
2. Une croissance équilibrée et solidaire pour les communes et leurs groupements
S'agissant plus particulièrement des communes, cette reconduction du contrat de croissance vous permettra de procéder à la répartition de la DGF dans des conditions à la fois équilibrées et solidaires.
Je m'explique.
a) Une évolution maximale de la dotation forfaitaire des communes et EPCI
D'abord, la reconduction du "contrat" permettra à votre Comité, s'il le souhaite, de "caler" l'indexation des différentes parts de la dotation forfaitaire des communes sur la limite haute de leurs fourchettes respectives. Ainsi, compte tenu d'un taux de progression de la DGF de 2,73 % cette année, les différentes composantes de la dotation forfaitaire pourront progresser à leur tour au maximum :
- pour la dotation de base, de 75 % du taux de croissance de la DGF, soit 2 % ;
- pour la part superficiaire, de 2 % également ;
- pour la "compensation de la part salaires", de 50 % du taux de croissance de la DGF, soit 1,34 % ;
- pour le complément de garantie, de 25 % du taux de croissance de la DGF, soit 0,67 %.( Le complément de garantie est la part de la dotation forfaitaire qui a permis de garantir à toutes les communes, lors de la réforme de la dotation forfaitaire en LFI 2005, de bénéficier d'une dotation forfaitaire totale au moins égale à la dotation forfaitaire perçue en 2004, augmentée de 1 %)
b) La consolidation de la réforme de la DSU
Cette indexation de la dotation forfaitaire, si vous choisissez de l'utiliser, ne remettra pas en cause l'alimentation de la dotation de solidarité urbaine telle que prévue par le plan de cohésion sociale : la DSU progressera donc, à nouveau, de 120 M d'euros. En outre, la réforme de la DSU sera consolidée par une série de 3 mesures :
Tout d'abord la consolidation de la majoration de 20 M d'euros de l'enveloppe des communes de 5 000 à 10 000 habitants intervenue en 2005 en application de la loi de programmation pour la cohésion sociale.
En l'absence d'une telle mesure en LFI 2006, l'enveloppe aurait été calculée l'année prochaine au prorata de la population éligible à chaque enveloppe (communes de + de 10 000 habitants et communes entre 5 000 et 10 000 habitants). Ceci se serait traduit par une chute brutale des dotations des communes de 5 000 à 10 000 habitants.
La mesure introduite conduira au contraire à ne pas revenir sur l'avantage qui leur a été conféré en 2005 en instaurant une évolution identique du montant par habitant des deux catégories démographiques ;
Ensuite, afin de répondre à l'attente de certains d'entre vous, le Gouvernement proposera d'étendre aux communes de plus de 200.000 habitants les deux coefficients multiplicateurs proportionnels à la population en ZUS et en ZFU.
Cela devrait permettre d'augmenter nettement la DSU perçue par les grandes métropoles confrontées à d'importantes difficultés urbaines, notamment Strasbourg, Lille, Marseille, Toulouse, sans pour autant revenir sur la progression dont ont bénéficié en 2005, les villes de moindre importance.
La troisième et dernière consolidation proposée est relative à la mise en place d'une deuxième tranche de garantie pour les communes ayant perdu leur éligibilité en 2005.
En effet, les communes " sortantes " en 2005 ont perçu une garantie à 100 %. En l'absence de disposition législative, elles ne percevraient aucun crédit en 2006. Il est donc proposé de leur attribuer 50 % du montant perçu précédemment.
Ces trois aménagements n'épuiseront probablement pas les débats sur la DSU. Le rapport sur le bilan de la réforme de la DGF permet d'ailleurs au Parlement comme au CFL de disposer des informations nécessaires pour améliorer les effets redistributifs de la réforme.
c) L'utilisation de la régularisation 2004 au profit de la péréquation
Voici ce que permet, à elle seule, la progression de la DGF des communes et des EPCI telle qu'elle résulte du contrat de croissance.
Je souhaite aller plus loin dans l'équilibre et dans la solidarité. Et pour ce faire, je vous propose, en accord avec Jean-François COPÉ, d'abonder la DGF 2006 du montant de la régularisation 2004. Celle-ci s'établit à 92 M d'euros. Il ne s'agirait pas de l'allouer aux communes et EPCI au prorata des attributions 2004, mais d'en faire une utilisation plus dynamique et conforme à l'esprit qui a présidé, l'an dernier, à la réforme de la DGF.
D'abord, le projet de loi de finances prévoit d'allouer un montant de 4,2 M d'euros au financement d'une garantie de sortie sur deux ans pour les communes ayant perdu en 2005 le bénéfice de la dotation élu local.
Cette garantie, versée au titre de 2005 et 2006, permet la mise en place d'un mécanisme de sortie en sifflet assurant la première année deux tiers du montant perçu en 2004, soit 1 525 euros, puis un tiers la deuxième année, soit 763 euros.
Ce mécanisme correspond au scénario pour lequel votre comité avait manifesté sa préférence, lors de sa séance du 17 mai dernier. Je sais que certains membres de votre comité ne s'en satisfont pas pleinement. Je veux donc leur dire que je suis pour ma part ouvert à la discussion, étant entendu qu'il ne me paraît pas souhaitable de revenir sur le passage du potentiel fiscal au potentiel financier. Mais l'élu rural que je suis est sensible au souhait manifesté par certains de voir cette garantie consolidée, dans son montant ou dans sa durée.
Le solde de la régularisation, soit près de 88 M d'euros, sera affectée à la DGF 2006, en vue de permettre une évolution satisfaisante de la péréquation communale.
Cette mesure facilitera les choix que votre Comité devra effectuer en 2006. Elle permettra en effet d'assurer, parallèlement à la croissance de la Dotation de Solidarité Urbaine (DSU), une croissance similaire de la Dotation de Solidarité Rurale (DSR). Elles connaîtront toutes les deux une progression de l'ordre de 15 %. L'affectation de la régularisation permettra également de consolider la croissance de la Dotation Nationale de Péréquation (DNP). Sans cela, la DNP ne pourrait pas progresser.
II. La rénovation du soutien à l'investissement des collectivités territoriales
Le deuxième grand axe de ce projet de loi de finances concerne la rénovation du soutien à l'investissement. Cette rénovation répond à la fois au souhait de rationaliser les interventions de l'Etat, dans un souci de maîtrise des finances publiques, et à la volonté d'assurer leur neutralité par rapport aux choix de gestion des collectivités.
1. Une réforme de la DGE des départements nécessaire et Accompagnée
La première mesure concerne la réforme de la DGE des départements. Vous le savez comme moi, le taux de concours de la fraction principale de la première part de la DGE des départements est très faible : en 2005, le taux de concours "de base" est de 2,77 % (La DGE des départements (490 M d'euros en 2005) comporte deux parts. La première part se répartit en une fraction principale, une fraction "voirie" et une fraction "potentiel fiscal" ; la fraction principale est attribuée par calcul et application aux investissements des départements d'un taux de concours ; des seuils de garantie et d'écrêtement fixent les montants minimum et maximum que chaque département peut recevoir : ceci explique que, si le taux de base est le même pour tous les départements (2,77 % en 2005), certains départements bénéficient de taux de concours réels beaucoup plus importants. La fraction principale de la deuxième part ne concerne pour sa part les seuls investissements d'aménagement foncier et d'équipement rural ; d'où son taux de concours plus élevé). A titre de comparaison, le taux de concours de la 2ème part s'élève à 14 %.
Alors que la LOLF place la logique de la performance au cur des politiques publiques, la fraction principale de la 1ère part DGE apparaît donc inefficace pour la plupart des départements puisque son effet de levier pour soutenir l'effort d'investissement est particulièrement faible.
Le ministère des finances a donc souhaité que la 1ère part de la DGE des départements soit supprimée, dans un souci de rationalité.
Je vous rappelle d'ailleurs que c'est une analyse similaire qui avait conduit à décider, en 1996, la suppression de la 1ère part de la DGE des communes.
Bien entendu, cette suppression de la première part ne se fera pas sans contreparties. Avec Jean-François COPÉ, nous nous sommes entendus pour accompagner cette réforme par les mesures suivantes :
* D'abord, les opérations en cours seront naturellement intégralement soldées, ce qui se traduit par l'inscription en PLF 2006 de 98,4 M d'euros. Cette mesure est indispensable pour couvrir les engagements pris par l'Etat en 2005 ;
* Ensuite, les crédits correspondant à l'actuelle fraction " voirie " ainsi qu'à la majoration " potentiel fiscal ", à hauteur de 54 M d'euros, seront basculés dans la dotation de compensation de la DGF des départements ;
Surtout, tous les départements dont le taux de concours réel, sur les années 2002 à 2004, dépassait 3,25 %, verront leur DGF abondée d'un montant équivalent au montant de la DGE qui dépassait ce seuil. 70 départements sont concernés, pour un montant total de 74 M d'euros.
Le dispositif retenu permettra d'associer tous les départements à l'effort d'économie tout en limitant l'impact des effets de seuils.
* Pour finir, nous mettrons en place une compensation de 15 M d'euros spécifique aux SDIS. Ces services ont bénéficié de 15,4 M d'euros de DGE en 2004. La compensation allouée en 2006 en contrepartie de la suppression de la fraction principale de la première part sera répartie entre les départements au prorata de la moyenne des attributions de DGE perçues par le SDIS en 2002, 2003 et 2004. J'ajoute, s'agissant des SDIS, que l'Etat tiendra les engagements pris s'agissant du financement de la prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires : ainsi, l'abondement de la DGF des départements figurant en loi de finances pour 2005 sera porté de 20 à 30 M d'euros.
2. Des règles d'attribution de FCTVA clarifiées
Si c'est un souci de rationalisation qui nous conduit à réformer la DGE de la manière indiquée, j'ai souhaité que la rénovation du soutien à l'investissement des collectivités territoriales passe aussi par une mesure plus positive, attendue par tous, et à laquelle j'ai été particulièrement attentif : la clarification des règles d'attribution du FCTVA.
Les règles d'éligibilité au FCTVA ont fait l'objet au fil du temps de nombreux aménagements visant à répondre à telle ou telle situation particulière, mais qui de ce fait ont progressivement remis en cause le lien entre FCTVA et patrimoine de la collectivité. Au total, le régime juridique du FCTVA s'est complexifié, devenant propice à de nombreuses incompréhensions.
Par ailleurs, l'application de ces règles pose d'importantes difficultés, du fait de décisions récentes du juge administratif qui remettent en cause l'esprit des textes s'agissant des biens mis à disposition de tiers non éligibles.
Le Conseil d'Etat a ainsi considéré, à rebours de l'interprétation de l'administration, que la mise à disposition n'excluait la mise à disposition du FCTVA que dans les seuls cas où elle constituait pour le tiers un avantage, au demeurant bien difficile à définir et à identifier. Il convient donc d'en tirer les conséquences dans une nouvelle disposition législative.
Dans un souci de clarification et de mise en cohérence, la réforme proposée ouvre le bénéfice du FCTVA, quel que soit le mode de gestion retenu par la collectivité, dès lors que l'utilisation, la gestion ou l'exploitation de l'équipement par le tiers constitue une simple modalité d'exécution d'un service public ou répond à un besoin d'intérêt général.
Très concrètement, une collectivité pourra désormais bénéficier plus sûrement du FCTVA lorsqu'elle construit une maison de retraite et en confie la gestion à un tiers, ou encore lorsqu'elle met à la disposition d'une association dépourvue d'activité concurrentielle les locaux dont elle propriétaire.
Ce projet de texte règle également le cas des biens confiés par les collectivités territoriales à l'Etat pour l'exercice de ses missions de service public en les rendant éligibles au FCTVA.
Dans le même esprit, deux autres modifications du régime du FCTVA permettront de ne pas pénaliser les collectivités qui décident de transférer des compétences à un EPCI ou de recourir à une délégation de service public.
Au-delà de l'intérêt financier que cette mesure présente pour les collectivités, et de l'assouplissement des contrôles préfectoraux particulièrement lourds qui accompagnera les demandes de reversement, il s'agit de vous réapproprier les choix de gestion de vos collectivités. Les conditions d'intervention du FCTVA ne viendront plus interférer dans ces choix, que seul le souci de l'utilité et de l'efficacité doit conduire.
3. Concours particulier des bibliothèques
Enfin, en collaboration avec le Ministère de la Culture, nous allons rationaliser l'architecture des concours particuliers relatifs aux bibliothèques en fusionnant les deux concours particuliers existants. Les crédits consacrés aux bibliothèques départementales de prêt basculeront dans le concours particulier afférent aux bibliothèques municipales.
L'objectif est d'avoir un seul concours doté d'environ 75 M d'euros et destiné au financement de l'investissement dans les Bibliothèques municipales et les bibliothèques départementales de prêt, et ce afin de pouvoir mobiliser des financements plus conséquents en faveur des équipements structurants. Là encore, c'est le souci de renforcer l'effet de levier des interventions de l'Etat qui a guidé notre démarche.
III - Un effort marqué en faveur des espaces ruraux
Comme je l'ai déjà dit à certains d'entre vous lors de nos différentes rencontres, la solidarité doit figurer en 2006 au centre des préoccupations gouvernementales. Ministre délégué aux collectivités, je n'en reste pas moins élu d'une région rurale et demeure à ce titre préoccupé de l'équilibre entre l'ensemble de nos territoires. Plusieurs mesures viennent donc accompagner cette volonté.
1. La péréquation en faveur des collectivités rurales
D'une manière générale, et comme vous n'avez pas manqué de le remarquer, l'affectation des 92 M d'euros de la régularisation 2004 des communes à la péréquation 2006 favorisera prioritairement les communes et EPCI ruraux en permettant de garantir une progression de la Dotation de Solidarité Rurale (DSR) de l'ordre de 15 %.
Enfin, l'attention que nous portons aux communes rurales nous a conduit, je l'ai dit, à mettre en place le mécanisme de garantie de sortie de la dotation élu local qui vous avait été présenté en mai dernier. Je n'ai pas besoin de vous répéter, parce que je pense que vous l'avez très bien entendu, que je suis ouvert à la discussion sur cette garantie.

2. Un soutien spécifique à l'investissement
Le soutien spécifique que nous souhaitons apporter à l'investissement aura également une répercussion toute particulière sur les territoires ruraux.
* la réforme de la DGE préserve les territoires ruraux
Cette compensation de 74 M d'euros de la suppression de fraction principale de la première part que je vous ai annoncée bénéficiera notamment à 23 des 24 départements métropolitains bénéficiant de la dotation de fonctionnement minimale (DFM) avant son élargissement en 2004. Et en tout, à 57 des 64 départements actuellement éligibles à la DFM.
Le monde rural et notamment les départements ruraux les plus défavorisés bénéficient donc d'un accompagnement financier particulier pour la mise en oeuvre de cette réforme.
* le FCTVA
Comme je vous l'ai indiqué, par souci de simplification et de cohérence, la réforme proposée ouvre le bénéfice du FCTVA, quel que soit le mode de gestion retenu par la collectivité, dès lors que l'utilisation par le tiers constitue une simple modalité d'exécution d'un service public ou répond à un besoin d'intérêt général.
A ce titre seront notamment et bien évidemment visés les investissements que réalisent les collectivités locales pour maintenir et développer les services de proximité en milieu rural: épiceries municipales, points postes, etc.
Cette mesure contribue à la politique d'ensemble que je souhaite développer en matière de services publics en milieu rural.
* la Dotation de Développement Rural
Dans cette même logique, la Dotation de Développement Rural est un vecteur adapté à la création d'un dispositif de maintien des services publics en milieu rural, tant pour les dépenses d'investissement que pour celles de fonctionnement.
Dans ces conditions, j'ai souhaité que soient redéployés 20 M d'euros au sein de l'enveloppe globale de la DDR qui s'élève à près de 124 M d'euros.
Ce nouveau dispositif sera ouvert aux communes isolées éligibles à la seconde fraction de la dotation de solidarité rurale et pas seulement réservée aux EPCI traditionnellement éligibles à la DDR. Il sera opérationnel dès 2006 et permettra donc de soutenir les projets structurants qui sont d'ores et déjà prêts ou qui émergeront de la concertation menée en ce moment par les préfets à l'initiative du Ministre d'Etat.
Compte tenu du rythme actuel de consommation des crédits de paiement de la DDR, l'affectation de ces 20 millions d'euros restera sans incidence sur le financement des projets au titre de la part principale de la DDR.
L'élargissement de l'éligibilité des projets à la DDR et à de nouvelles communes permettra au contraire de dynamiser l'utilisation de ces crédits.
Le maintien et le développement dynamique des services publics en milieu rural seront ainsi garantis par cette enveloppe spécifique, conformément aux vux de Nicolas SARKOZY d'assurer un effort proportionnel aux besoins de chacune des différentes collectivités.
IV - La poursuite des transferts de compétence
Enfin, le projet de loi de finances 2006 sera l'occasion de poursuivre la mise en oeuvre des transferts de compétences prévus par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.
Vous le savez, ces transferts de charge sont évalués de manière contradictoire et transparente, dans le cadre de la Commission consultative sur l'évaluation des charges. Elle s'est réunie à 7 reprises au cours du premier semestre 2005 afin d'examiner la compensation des transferts intervenus en 2005. Elle examinera, durant les prochains mois, les projets d'arrêtés interministériels établissant de manière définitive le droit à compensation au titre des transferts opérés dès 2005 et travaillera également sur l'évaluation des compétences transférées en 2006.
Il subsiste encore des sujets de divergence sur les charges transférées mais qui sont hors du champ légal fixé par la loi du 13 août 2004. Ils ont été rappelés dans le bilan des travaux de la CCEC établi par son président, M. FOURCADE. Ce n'est, chacun en conviendra, ni le moment, ni le lieu de les évoquer en détail. Ils le seront lors des prochaines réunions de la CCEC, et pour certains d'entre eux, dès la semaine prochaine puisque la CCEC se réunit le 6 octobre prochain.
Je veux néanmoins vous donner quelques précisions sur les évolutions des transferts de taxe sur les conventions d'assurance (TSCA) et de taxe intérieure sur la consommation des produits pétroliers (TIPP) qui figurent dans le projet de loi de finances.
1- TSCA
Ainsi, dans le cadre de la loi de finances pour 2005, chaque département s'est vu attribuer une fraction du produit national de la TSCA. La TSCA attribuée constitue donc une "ressource propre" au sens de la loi organique sur l'autonomie financière des collectivités territoriales.
La fraction de taux de 0,91 % avait été fixée de manière provisoire en LFI 2005. Elle sera donc réévaluée en conséquence et les attributions de TSCA à chaque département corrigées.
Pour 2006, le droit à compensation des départements est estimée à 240 M d'euros. Il intègre 131 M d'euros au titre des transferts de 2005. Les transferts de 2006 concerneront le transfert la gestion des routes nationales de métropole (160 M d'euros) et le transfert du STIF.
Le montant de la TSCA attribuée aux départements en 2006 intègre également la suppression de la vignette, à hauteur de son montant 2004, soit 133 M d'euros. La suppression de la vignette associe, au maintien de l'autonomie financière des collectivités locales, le souci d'une simplification administrative. Cet impôt départemental est devenu résiduel depuis les exonérations votées en loi de finances pour 2001 et 2002 au profit des personnes physiques. Son contournement le rendait désormais inefficace, ainsi que cela a été déjà souligné en comité des finances locales et son rendement était devenu décroissant. Le PLF 2006 en tire les conséquences en en proposant la suppression et en y substituant une fraction supplémentaire de la taxe sur les conventions d'assurance.
Pour l'ensemble des ces évolutions, le dispositif retenu conduit à faire bénéficier les départements de la croissance 2005 de l'assiette de la TSCA non seulement pour les transferts intervenus en 2005 mais également pour ceux de 2006. On peut estimer le gain effectué par les départements au titre des transferts de 2006 à 5 M d'euros. Au total, et compte tenu des prévisions de croissance de l'assiette de TSCA en 2005 et 2006, le produit attendu de TSCA est évalué dans le PLF à 264 M d'eurospour un droit à compensation de 240 M d'euros.
Je souhaite enfin devancer vos interrogations concernant la modulation départementale de la TSCA : nous ne vous la proposerons pas, parce que nous avons considéré, avec les élus avec qui nous avons eu l'occasion d'en débattre, qu'elle serait difficilement conciliable avec la garantie de la compensation "à l'euro l'euro", et qu'elle ne constituerait pas un vrai progrès en termes d'autonomie financière. Les mécanismes de péréquation à mettre en oeuvre pour compenser la répartition très inégale de l'assiette de la TSCA seraient tels qu'on serait bien loin d'une véritable autonomie financière des départements sur la TSCA qui était l'objectif initial de ce projet.
Dans ces conditions, la sécurité d'une TSCA ajustée au droit de compensation de chaque département, et bénéficiant, dans des conditions identiques pour tous, d'une assiette dynamique, nous semble préférable et vous en conviendrez, j'en suis sûr.
2- TIPP
S'agissant de la TIPP, pour 2006, le droit à compensation des régions est estimé à près de 962 M d'euros, dont 945 en TIPP. Il intègre 406 M d'euros au titre des transferts de 2005 et 556 M d'euros au titre des transferts 2006. Les transferts de 2006 concerneront l'organisation du réseau et des centres d'information sur la validation des acquis de l'expérience, de la commande publique à l'AFPA et de la rémunération des stagiaires de l'AFPA.
Le PLF procède comme prévu à la régionalisation des fractions de tarifs. Les dispositions qui permettront aux régions de moduler à la hausse comme à la baisse le taux régional à compter du 1er janvier 2007 figureront en loi de finances rectificative. Je vous rappelle en effet que cette possibilité est subordonnée à l'accord unanime des vingt-cinq Etats membres de l'Union européenne. J'ai bon espoir de voir aboutir désormais assez rapidement la procédure qui nous permettra d'accorder aux régions, pour une première période, cette capacité de modulation.
Voilà, Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les membres du CFL, Monsieur le Ministre et cher Collègue, les quelques réflexions que je souhaitais soumettre à votre Comité concernant le projet de loi de finances 2006.
Dans toute la préparation de ce projet de loi de finances, Jean-François Copé et moi, avec les services du ministère du budget et ceux de la direction générale des collectivités locales, nous avons veillé à tenir compte et à préserver ce que votre comité a contribué à construire.
Je sais la part qu'apporte chacun d'entre vous à la richesse des travaux de votre comité : Gilles CARREZ et Jean-Pierre FOURCADE bien sûr, qui président les travaux du CFL et de la CCEC, vos vice-présidents respectifs Didier MIGAUD et Charles de COURSON pour le CFL, Augustin BONREPAUX et Michel SAPIN pour la CCEC ; je veux citer également Joël BOURDIN et André LAIGNEL, dont le rapport de l'observatoire des finances locales nous permet de mettre nos choix en perspective ; et également Yves FREVILLE, qui a je crois jouer un rôle très important, aux côtés de Jean-Pierre FOURCADE, dans le rapport qui a servi de base à la réforme des dotations, et Jean-Claude FRECON, qui veille attentivement sur les règles budgétaires et comptables des collectivités - sans oublier bien sûr Michel CHARASSE dont les réflexions viennent toujours à propos à défaut d'être toujours aimables pour l'administration. Je veux donc remercier chacun d'entre vous. Vous me permettrez d'associer à ces remerciements François LUCAS, que vous avez vu participer au CFL de manière quasiment continue depuis 1992, et qui a rejoint il y a dix jours son poste de préfet délégué à la sécurité auprès du préfet de la zone de défense Ouest à Rennes.
Je veux vous dire en conclusion que c'est en ayant pleinement conscience des difficultés budgétaires de l'exercice 2006 dont mon collègue du Budget vous a fait part, que les orientations de ce projet de loi de finances ont été retenues, d'un commun accord.
C'est à la lumière de ce contexte, que le rapporteur général du Budget connaît bien, que doivent être appréciées les avancées que contient ce projet de loi de finances, comme la réforme du FCTVA, et les acquis qu'il préserve, comme le contrat de croissance et de solidarité, reconduit cette année encore.
Mais c'est aussi avec la préoccupation constante, que nous partageons Jean-François et moi, de continuer à soutenir les collectivités qui structurent jour après jour notre territoire national. C'est pour ces raisons que je souhaite qu'avec ces mesures, 2006 soit pour l'Etat une année d'efforts, de solidarité et d'équilibre envers les collectivités.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.dgcl.interieur.gouv.fr, le 3 octobre 2005)