Déclaration de M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire, sur le bilan de la couverture territoriale des réseaux de télécommunications à haut débit (dont l'ADSL)et le projet de création d'un observatoire du haut débit, Paris le 15 mars 2006.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Réunion plénière du Comité des réseaux d'initiative publique (CRIP)à Paris le 15 mars 2006

Texte intégral

C'est un très grand plaisir d'être parmi vous ce matin pour clôturer cette matinée consacrée aux réseaux d'initiative publique. J'en suis d'autant plus heureux que la couverture numérique du territoire constitue l'une des toutes premières priorités que je me suis fixées dès mon entrée au Gouvernement en tant que Ministre délégué à l'Aménagement du territoire, aux côtés du Ministre d'Etat, Ministre de l'Intérieur et de l'Aménagement du territoire, Nicolas SARKOZY. L'objectif du Gouvernement à cet égard est simple : ne laisser aucune commune du territoire à l'écart des technologies de l'information et de la communication, que ce soit l'accès au haut débit, mais aussi la couverture en téléphonie mobile et l'accès à la télévision numérique gratuite.
Je tiens à remercier l'ARCEP sous l'impulsion de son Président Paul CHAMPSAUR et de l'ensemble des membres du Collège, d'avoir pris l'initiative de regrouper collectivités et opérateurs au sein de ce comité des réseaux d'initiative publique, véritable lieu d'échange et de réflexion. La forte affluence de ce matin et la présence de collectivités venues de toute la France, non seulement à cette réunion plénière mais aussi lors des groupes de travail, montre s'il en était besoin la pertinence de cette démarche et l'intérêt pour les acteurs publics comme privés. Je salue à cet égard la présence des élus des collectivités régionales, départementales et même municipales. Vous montrez par votre présence que sous des abords techniques, la réflexion menée dans ce comité constitue en fait un enjeu essentiel pour le déploiement du haut débit, et donc pour l'attractivité et le développement économique de nos territoires. Je salue également les représentants des opérateurs qui se sont eux aussi, je le sais, fortement impliqués dans les débats.
L'explosion du haut débit en France est tout à fait remarquable. La Commission européenne l'a elle-même souligné récemment. Fin 2005, on recensait 9,5 millions d'abonnements haut débit, principalement sur l'ADSL. Nous avons ainsi aujourd'hui très vraisemblablement dépassé, avec près de 2 ans d'avance, l'objectif que nous nous étions fixés pour 2007 d'atteindre les 10 millions. Les recettes du succès sont bien identifiées : une offre attractive en termes de services et de tarifs, stimulée notamment par le succès du dégroupage, et un déploiement territorial massif. La demande est loin de faiblir, y compris en zone rurale et je dirais même surtout en zone rurale où l'accès au haut débit constitue un véritable outil de désenclavement. Il est maintenant de notre responsabilité collective de répondre à cette demande, et ce dans n'importe quelle commune du territoire.
Ce n'est pas à cette assemblée que je l'apprendrai, avec la loi du 21 juin 2004 sur la confiance dans l'économie numérique et l'introduction de l'article L1425-1 dans le code général des collectivité territoriales, nous avons donné à celles-ci la possibilité de s'impliquer pleinement dans l'aménagement numérique de leur territoire. Je me réjouis de voir le dynamisme que cela a suscité dans un grand nombre de collectivités, avec une soixantaine de projets de grande envergure aujourd'hui recensés, dont la moitié sont déjà entrés en phase opérationnelle. Je mesure ce phénomène régulièrement à l'occasion de mes déplacements sur le terrain, par exemple en Corse, dans le Limousin ou encore dernièrement dans La Manche. Je visiterai en outre samedi prochain le « Netcenter » alsacien.
L'objectif généralement assigné à ces projets est double. Il s'agit d'une part de faciliter l'investissement des opérateurs alternatifs dans le dégroupage afin de permettre aux habitants et aux entreprises d'un territoire de bénéficier de la plus grande diversité des offres haut-débit des opérateurs. Je me réjouis à cet égard de l'offre de location de fibre noire qu'a récemment proposée France Télécom qui a pour vocation d'optimiser l'utilisation des ressources existantes. Cette offre conduira également, en complément des projets des collectivités, à développer le dégroupage. Le deuxième objectif, qui ne doit pas être oublié, est l'extension de la couverture en haut débit, notamment grâce aux technologies alternatives à l'ADSL. J'y reviendrai.
Je tiens en outre à souligner qu'avec le soutien de l'Union européenne, l'Etat accompagne le développement des projets des collectivités qui représentent plus de 800 millions d'euros pour les seuls projets en phase opérationnelle. Près de 130 millions d'euros de fonds européens FEDER ont ainsi été fléchés sur des projets haut débit. En complément, l'Etat a inscrit au titre de l'aménagement du territoire plus de 65 M euros sur la période 2000-2006 pour accompagner des projets haut débit, dont une grande partie dans le cadre des contrats de plan. Il s'agit là d'un effort très substantiel.
La mise en place de ces réseaux par les collectivités et leur gestion par les délégataires était pour tous quelque chose de nouveau. Quels objectifs se fixer, en termes de couverture, en termes de débits, en termes de développement de la concurrence ? Comment mettre en place son réseau en s'appuyant de la façon la plus intelligente possible sur l'existant pour en limiter les coûts ? Quels modèles et quels tarifs choisir pour mettre ces réseaux à disposition des opérateurs ? Comment traiter le cas des zones blanches, qui resteront hors d'atteinte de l'ADSL ? Quels aménagements spécifiques faut-il prévoir pour les entreprises, en particulier dans les zones d'activités ? Autant de question auxquelles chacun a eu à répondre sur son territoire, même si aucun n'ignorait complètement ce que faisaient ses voisins. La création du CRIP, en mettant autour de la table de façon transparente les retours d'expérience des uns et des autres a eu le grand mérite de faire partager par tous les premiers enseignements qui s'en dégageaient.
Permettez-moi à cet égard de vous féliciter pour la qualité du travail accompli dans les différents sous-groupes. J'ai parcouru avec un grand intérêt le compte rendu de vos travaux. Les conclusions que vous avez tirées et les pistes de développement que vous avez suggérées me paraissent tout à fait pertinentes.
Vous êtes ainsi arrivés à analyse très complète sur les questions du catalogue de services des délégataires, de la commande publique, et sur l'équipement en très haut débit des zones d'activités. Ce dernier point est crucial pour le développement économique territorial et je me réjouis de l'ouverture réalisée par France Télécom sur la question de l'accès aux fourreaux installés en zones d'activités.
Mais je souhaite revenir plus particulièrement sur un autre sujet majeur en termes d'aménagement du territoire sur lequel vous vous êtes impliqués, qui est celui des zones blanches.
Un premier point positif que je veux souligner concerne les entreprises. Elles disposent en effet désormais sur tout le territoire sans aucun exception d'offres à 2Mbits/s symétrique à un tarif homogène. Certes ce tarif, de l'ordre de 400 euros par mois reste élevé, ce qui signifie que les initiatives permettant d'améliorer la desserte des entreprises, notamment celles qui sont situées en zones d'acitivités, restent pleinement pertinentes. Mais la question de l'accessibilité peut être considérée comme résolue.
La situation des particuliers est plus mitigée. France Télécom, et je l'en remercie, s'est engagé dans le déploiement de l'ADSL sur la totalité de ses répartiteurs d'ici la fin 2006. Grâce à cet effort, près de 98 % de la population devrait être éligible à cette technologie. Pour autant, les zones rurales resteraient insuffisamment desservies. On estime ainsi que près de 5 000 communes garderaient une couverture ADSL inférieure à 80 % de leur population. Parmi ces communes, la moitié pourraient être considérées comme de véritables zones blanches. L'objectif du Gouvernement est d'apporter d'ici 2007 une solution adaptée d'accès haut débit à chacune de ces communes.
Le premier souci que vous avez exprimé dans vos travaux est de disposer d'un état des lieux de la localisation des zones blanche à un niveau suffisamment fin. Les cartes publiées par France Télécom au niveau de la commune constituent une première avancée d'importance.
Je souhaite que nous allions au-delà. C'est pourquoi j'ai décidé de demander à la DIACT, en liaison, et avec la participation de l'ARCEP et des collectivités intéressées de mettre en place un véritable observatoire du haut débit. L'Etat y consacrera dès cette année 50 000 euros en crédits d'étude. Cet observatoire pourra s'appuyer sur les ressources existantes et notamment le site www.territoires.gouv.fr, mais a pour vocation d'aller plus loin en fournissant des données agrégées multi-technologies (ADSL, mais aussi Wifi, Wimax, CPL, et autres), factuelles mais aussi dans la mesure du possible prospectives, à un niveau infra-communal. La prise en compte des engagements de couverture des opérateurs retenus dans le cadre des licences WIMAX sera notamment particulièrement utile.
Cet outil sera une aide précieuse à la décision pour l'intervention publique, qui sera en général d'autant plus efficace qu'elle sera coordonnée à l'échelle d'un département ou d'une région. Pour faciliter cette intervention, je souhaite que nous répondions dans les tous prochains mois à deux préoccupations des acteurs souhaitant s'engager dans une démarche de résorption des zones blanches.
La première concerne les modalités juridiques de l'intervention des collectivités. C'est pourquoi j'ai demandé à la DIACT de préparer à l'intention des porteurs de projets, notamment quand il s'agit de très petites communes ou de groupements de communes isolées, un guide simple et pratique, qui devra permettre à des non spécialistes de mener à bien la procédure en quelques mois.
La seconde concerne la technologie à retenir, qui plus est dans un environnement en constante évolution. Vous présentez un certain nombre de pistes, que ce soit pour la technologie d'accès ou la technologie de collecte. J'ai demandé là aussi à la DIACT de présenter un guide simple facilitant la prise de décision sur le choix technologique. Je souhaite que les collectivités mais aussi les opérateurs, y compris les petits opérateurs locaux, soient associés à sa préparation.
Ces mesures permettront, je le souhaite, de disposer d'un panel complet des outils nécessaires à l'action. Je n'exclue pas toutefois de prendre de nouvelles décisions qui s'avéreraient nécessaires à une dynamique massive de résorption des zones blanches.
Depuis quelques années, la France a su rattraper son retard dans le haut débit, au point d'être aujourd'hui citée en exemple en Europe. Il est aujourd'hui essentiel de capitaliser sur ce succès pour aller encore plus loin.
Il nous faut encore progresser en termes d'extension géographique pour gagner les quelques % qui nous font encore défaut et dont nous savons tous qu'ils sont les plus difficiles à atteindre. Il nous faut également progresser dans la couverture du dégroupage pour faire profiter le plus grand nombre de la richesse des offres commerciales que connaissent aujourd'hui les grandes agglomérations. Il nous faut enfin anticiper les besoins de demain. D'ores et déjà, un nombre croissant d'entreprises ont besoin de très haut débit pour rester compétitives, et pas uniquement dans les grand centres urbains. J'étais dernièrement dans l'Aveyron, dans le Causse Comtal, où un groupe d'informatique a besoin d'accès à 100 Mbits/s, et envisage à terme des besoins de l'ordre du gigabit/s. Au-delà des entreprises et même si les usages restent encore à préciser, la montée vers le très haut débit pour les particuliers, notamment en agglomération, apparaît comme une dynamique inéluctable, qu'il nous faut dès à présent anticiper.
C'est dans ce contexte que je vous encourage vivement à poursuivre vos travaux, notamment dans ces trois directions complémentaires et je vous assure du soutien de l'Etat et du gouvernement pour faire de la France de 2007 un territoire « tout numérique ».
Je vous remercie.Source http://www.diact.gouv.fr, le 17 mars 2006