Texte intégral
Monsieur le Président,
Messieurs les Parlementaires,
Monsieur le Président du Conseil Général,
Cher Vincent DESCOEUR,
Mesdames et messieurs les Conseillers généraux et régionaux,
Monsieur le Préfet,
Monsieur le Trésorier Payeur Général,
Mesdames et messieurs les maires et présidents d'EPCI,
Cher(e)s ami(e)s,
Permettez-moi avant de commencer de vous dire que c'est avec un très grand plaisir que j'ai accepté votre invitation pour cette 61ème assemblée générale des maires du Cantal, ici même à AURILLAC, au sein de notre Conseil général.
Comme il est de tradition, j'adresse toutes mes félicitations à votre nouveau président qui aura la tâche de faire vivre votre association, et remercie Bernard FILHOL pour son activité inlassable et dévouée durant ces 7 années et dont il vient de nous rendre compte.
J'adresse également mes félicitations aux 260 maires de notre département, dont 117 sont nouvellement élus, un taux de renouvellement très important dans le Cantal comme dans beaucoup d'autres départements.
Ce renouvellement profond traduit sans doute un passage de relais entre les générations et traduit là aussi d'autres causes qu'il faudra bien analyser.
Pour être aussi un élu local, en tant que conseiller général du canton de MASSIAC, je peux mesurer les grandeurs mais aussi les servitudes qui s'attachent au rôle d'élu de proximité.
C'est en étant en permanence sur le terrain, que l'on peut le mieux écouter les préoccupations des Français, élus et citoyens afin de construire ensemble une politique qui corresponde à leurs attentes et qui serve aussi l'intérêt général de notre pays.
Je sais que votre tâche est lourde, vos responsabilités difficiles, votre disponibilité sans relâche, et qu'en vous, on recherche tout à la fois, l'autorité que l'assistance, l'instruction que le conseil.
Monsieur le préfet me rendra compte de vos travaux de cette journée et je vais, bien entendu, en prendre connaissance avec un grand intérêt.
Pour ma part, c'est en toute franchise et en toute lucidité que je veux aborder ici, brièvement avec vous, les rapports entre l'Etat, les communes, les EPCI, les départements et les régions.
Mesdames et messieurs,
Vous le savez ces relations, notamment financières, entre l'Etat et les collectivités territoriales restent à la fois complexes et étroites.
En effet, les lois de décentralisation en transférant aux collectivités territoriales de nombreuses compétences qui étaient auparavant du ressort de l'Etat, ont accru leur dimension financière.
En contrepartie, l'Etat s'est engagé à compenser intégralement les dépenses occasionnées par ces transferts afin d'aider les collectivités à faire face à leurs nouvelles compétences.
Ainsi, l'effort de l'Etat en faveur des collectivités territoriales, en atteignant dans la Loi de Finances Initiale 2008 72 milliards d'euros, représente un cinquième des dépenses publiques totales.
Le soutien de l'Etat aux collectivités territoriales constitue désormais la première dépense de l'Etat.
Dans notre département du Cantal, les dépenses de l'Etat en 2006 s'élevaient à près de 530 millions d'euros.
Elles approchent aujourd'hui les 600 millions d'euros.
A cela s'ajoutent bien évidemment les dégrèvements et les exonérations d'impôts que l'Etat compense soit de manière intégrale, soit de manière forfaitaire comme c'est le cas pour la taxe professionnelle.
L'ensemble de ces compensations, exonérations et dégrèvements font ainsi que l'Etat est le premier contribuable local.
Par ailleurs, la loi de finances initiale 2008 a substitué le contrat de stabilité au contrat de croissance et de solidarité qui liait depuis 1999 l'Etat et les collectivités territoriales.
L'enveloppe des dotations dites « actives » de l'Etat progresse en 2008 du taux de l'inflation majorée d'un tiers de la croissance du PIB pour 2007.
Au sein de cette enveloppe, la dotation globale de fonctionnement s'élève pour notre département à plus de 40 millions 500 mille euros soit une hausse de 1,23 % par rapport à 2007.
A cela s'ajoute le Fonds de Compensation de la TVA qui avec ses 15 millions d'euros dans le Cantal constitue un véritable soutien aux investissements des collectivités territoriales.
La décentralisation a donné lieu à une juste compensation aux collectivités territoriales, et l'Etat a tenu ses engagements : la compensation a été faite à l'euro près, de façon intégrale et concomitante aux transferts.
Cette compensation intégrale est d'ailleurs devenue un droit relevant de la Constitution, c'est-à-dire de la loi suprême de l'Etat.
Mesdames et messieurs,
Je voudrais vous dire un mot sur l'intercommunalité dans notre département et répondre ainsi à messieurs les maires de LACAPELLE-BARRÈS et VÉDRINES-SAINT-LOUP.
Le premier constat que nous pouvons faire est celui d'un incontestable succès des structures intercommunales qui se sont durablement installées dans notre paysage local.
Ici dans le Cantal, 245 communes du département sont intégrées dans un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, soit près de 95 % des communes du département et plus de 97 % de la population.
Le processus de relance de l'intercommunalité a fixé des axes prioritaires pour la rationalisation des périmètres, l'exercice effectif des compétences transférées et la clarification des relations entre les EPCI et les communes.
Les perspectives d'évolution de l'intercommunalité pour notre département ont vocation à se poursuivre par la mise en oeuvre du schéma de l'intercommunalité du département, validé en 2006 par la commission départementale de coopération intercommunale.
Sur les 19 EPCI à fiscalité propre, 10 ont choisi d'adopter le régime de la Taxe Professionnelle Unique et bénéficient d'une DGF bonifiée.
La réflexion est engagée notamment avec les structures intercommunales dont le niveau d'intégration reste faible ou le périmètre circonscrit à trop peu de communes.
En ce qui concerne le classement des communes en zones de revitalisation rurale, la loi de finances pour 2007 prolonge le délai leur permettant d'en bénéficier à titre dérogatoire jusqu'au 31 décembre 2008.
Un nouveau dispositif est étudié par le Gouvernement.
Ainsi, l'enjeu du fait intercommunal pour les années à venir n'est plus d'affirmer son enracinement durable, mais de créer les conditions de son développement rationnel car l'intercommunalité assure et renforce la cohérence des politiques publiques locales.
Elle permet la solidarité au sein d'un territoire et concourt à un développement local plus dynamique en favorisant les économies d'échelle.
Dans ce cadre, le Gouvernement s'est prononcé en faveur d'une poursuite de la couverture du territoire par des intercommunalités à fiscalité propre.
Cet effort doit s'appuyer sur la concertation menée par chaque préfet comme ici au travers de l'action du préfet Paul MOURIER dans le cadre des schémas d'orientation de l'intercommunalité élaborés en 2006.
Plusieurs pistes de progrès sont envisageables et pourraient être intégrées dans un projet de loi consacré à l'intercommunalité.
Les incitations financières qui existent d'ores et déjà, notamment par le biais de la dotation d'intercommunalité, pourraient être renforcées.
Le préfet et la commission départementale de coopération intercommunale pourraient également avoir davantage de pouvoirs pour convaincre les communes réticentes.
J'ai bien dit convaincre car c'est par la conviction qu'il faut agir dans le respect du droit constitutionnel des communes à s'administrer librement.
Au-delà, le Gouvernement entend mener une réflexion plus large sur l'avenir de l'intercommunalité, la pertinence des périmètres actuels, les compétences exercées au niveau intercommunal, le recours accru à la mutualisation des services et la légitimité démocratique des intercommunalités à fiscalité propre.
Il va falloir aborder avec réalisme la nécessaire démocratisation des EPCI, poser le problème de l'élection de l'exécutif, de la parité, du cumul des mandats...autant de chantiers qui sont indispensables pour ancrer les EPCI dans le schéma républicain et démocratique de notre pays, chantiers qui feront l'objet d'une vaste concertation entre le Gouvernement et les grandes associations d'élus locaux.
Mesdames et messieurs,
Si le temps des bilans est venu, nous nous devons aussi d'adopter des lignes politiques claires pour l'avenir des relations entre l'Etat et les collectivités territoriales, au plan financier d'abord.
En effet, comme l'a rappelé le Président de la République lors de son discours de CAHORS, le 3 avril dernier les concours financiers peuvent difficilement augmenter plus vite que les dépenses que le Gouvernement consacre à ses propres politiques.
Il s'agit donc de fixer des priorités, de s'y tenir et de mobiliser les moyens financiers y afférant.
Pour le Gouvernement, en aucun cas l'aide aux communes, à travers notamment de la DGF ne doit servir de variable d'ajustement.
Notre maillage territorial actuel, même s'il doit être modernisé et dynamisé, doit continuer, et spécialement en milieu rural et semi-urbain, à faire l'objet d'une priorité absolue.
Ainsi, je voudrais vous donner l'exemple de la création de nouvelles communautés urbaines dont 4 projets sont en cours de préparation, à TOULOUSE, ROUEN, NICE et MONTPELLIER.
Compte tenu du niveau de DGF par habitant aujourd'hui dévolu aux communautés urbaines (85 euros par habitant soit 4 fois celui dévolu aux communautés de communes), ces créations entraînent un besoin supplémentaire de 100 millions par an, qui ne peut se faire qu'aux détriments des autres collectivités car nous sommes dans un système d'enveloppe fermée.
J'ai d'ailleurs eu l'occasion de soulever cette question à la dernière réunion des préfets au ministère de l'intérieur.
Sans être à priori défavorable à ces grandes concentrations de populations et de moyens que sont les communautés urbaines je suis pour ma part très attentif sur les projections financières, souhaitant préserver totalement les moyens de fonctionnement des communes rurales, éléments de base de l'aménagement du territoire, puisqu'elles représentent 70 % de l'investissement public des collectivités territoriales.
C'est la raison pour laquelle j'ai demandé à mes services d'entamer une réflexion pour revoir le montant de la DGF octroyé aux communautés urbaines.
Je pourrais prendre aussi l'exemple de la politique de la ville : la crise des banlieues justifie sans doute des efforts spécifiques mais elle ne doit pas concentrer toute l'attention de l'Etat de façon exclusive.
Ce sont là des exemples tout à fait concrets comme vous pouvez le constater, et dont l'enjeu est essentiel.
Parmi les réformes fondamentales annoncées par le Président de la République dans son discours de CAHORS, il nous appartiendra d'engager la rénovation de la fiscalité locale, notamment au travers de la réforme des valeurs locatives cadastrales.
Là aussi, nous devons agir en étroite concertation tous ensemble.
Comme vous, j'ai un peu le sentiment que notre fiscalité locale est à un tournant, et ce chantier majeur qui nous attend, nous devons le mener ensemble avec le souci de la concertation et de la justice, et d'une politique d'aménagement du territoire qui ne laisse personne à l'écart du développement.
Cette réforme évoquée par le Président de la République lors du 90ème congrès des maires de France passe en effet par la réactualisation des bases de la fiscalité locale.
Mais au-delà de cette relation financière, la présence de l'Etat se traduit également par ce que les technocrates appelleraient la « structuration du territoire ».
Je voudrais également vous dire un mot concernant la nécessité de clarifier les compétences.
Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, le rapport LAMBERT met en évidence un enchevêtrement de compétences entre chaque niveau d'administration et constate que la quasi-totalité des politiques publiques fait l'objet d'interventions et de financements par les collectivités locales mais aussi par l'Etat.
Les conséquences directes sont facilement identifiables : une inflation de la dépense publique pour cause de doublons et une source de complexité pour les citoyens : au total, une « suradministration » des dossiers qui fait sans doute partie «du charme français» mais qui nous singularise par rapport aux autres pays de l'Union européenne, et qui est, de plus, couteuse pour le contribuable.
Pour y remédier, plusieurs pistes d'actions sont envisagées telles qu'une meilleure définition des compétences de chacun, la définition de chef de file clairement spécifiés ou la mutualisation des services communaux et intercommunaux.
Par ailleurs, l'inflation normative touche les collectivités territoriales qui doivent supporter les coûts de l'application des textes et des normes, alors qu'elles sont peu associées à leur élaboration, voire pas du tout.
Pour y remédier, une commission, présidée par un élu, et qui devra être consultée, préalablement à leur adoption, sur l'impact financier des projets de textes règlementaires concernant les collectivités locales sera créée à l'automne.
C'est un élément de progrès important et un instrument de régulation tout aussi important.
Concernant l'intercommunalité, plusieurs pistes méritent également d'être explorées.
Ma première priorité, et je pense que vous la partagez, est de voir la cohérence de la carte intercommunale se renforcer.
Chaque fois que cela est envisageable, la superposition des structures de coopération locales sur un même territoire doit être évitée.
Ces situations, qui, d'une part, pèsent sur les budgets locaux et donc sur les contribuables et, d'autre part, obscurcissent la répartition des responsabilités locales ne peuvent plus être acceptées.
Si les EPCI à fiscalité propre ont vocation à regrouper la quasi-totalité des communes françaises, la création ou le maintien de syndicats de communes ou de syndicats mixtes ne doivent, quant à eux, être envisagés que lorsque qu'ils sont véritablement justifiés.
La question du maintien des syndicats qui, au fil du temps, ont vu leurs compétences s'amenuiser au profit d'autres EPCI à fiscalité propre doit donc systématiquement être posée.
De même, je crois qu'il est nécessaire de parvenir à un maillage complet de notre territoire, et qu'il faut inciter les communes isolées à adhérer à une intercommunalité.
Le regroupement est devenu une nécessité absolue, et donc une priorité du Gouvernement.
Enfin, je voudrais vous dire un mot sur le statut de l'élu, « serpent de mer » qui donne l'impression de rester un sujet d'études et un thème d'assemblées générales.
Faut-il réformer le statut de l'élu local ?
Je sais combien l'adoption d'un nouveau statut pour les élus est, selon le rapport de Jean PUECH, sénateur et président de l'observatoire de la décentralisation, indissociable d'une relance de la démocratie locale, base de notre système républicain et de son esprit citoyen.
Le Gouvernement partage tout à fait cette volonté.
Tout d'abord, je rappelle que les dispositions mises en place, bien qu'incomplètes, constituent déjà un statut de l'élu local, je pense ici aux aspects financiers du statut de l'élu local, à la formation des élus ou encore aux garanties accordées dans le cadre d'un mandat local.
Je suis cependant favorable à ce que nous accélérions la réflexion sur le statut de l'élu local.
Bénéficier d'une sécurité matérielle et professionnelle, d'une formation et d'une clarification de son statut juridique et de ses responsabilités, sont des conditions indispensables pour garder un tissu électif diversifié et davantage à l'image de la société.
Mesdames et messieurs,
C'est un discours de franchise que j'ai souhaité vous tenir à l'occasion de cette assemblée générale.
Ces rendez-vous doivent être pour nous le moyen d'un échange ouvert et constructif.
C'est comme cela que nous construirons l'avenir...et que le Gouvernement remplira ses obligations :
1. les obligations qu'il a envers lui-même et l'exigence première d'atteindre l'équilibre de ses comptes à l'horizon de 2012.
Un effort de l'ensemble des acteurs publics est une nécessité ;
2. les obligations qu'il a envers vous, communes de vous permettre d'assumer vos responsabilités au service de nos concitoyens et de vous accompagner dans les transferts de compétences.
Je vous l'ai dit : aucune des idées que j'ai amorcées, n'est figée...
Nous devons en débattre au cours des prochains mois dans un esprit ouvert et constructif, mais en état de cause, ce processus devra déboucher en 2009 dans une loi de modernisation et de démocratisation.
Elle mérite d'être discutée ensemble afin de dégager des solutions de manière consensuelle.
La démocratie locale à la française est un exemple pour beaucoup de pays notamment grâce au formidable réseau d'élus que vous constituez et qui marque une sorte d'exception à la française.
A nous, a vous de la faire vivre, de la faire prospérer.
Pour ma part, et pour revenir à notre département, je vous redis toute ma disponibilité et ma mobilisation pour que nous fassions avancer ensemble nos dossiers au plan national.
En 2007, j'ai eu l'occasion de rendre visite à toutes les communes de la 2ème circonscription et à bon nombre de la 1ère.
Depuis le début de cette année, je me suis déjà rendu dans plus de 40 communes cantaliennes.
L'année n'est pas finie.
Je reste à votre disposition.
Tous ensemble, soyons mobilisés pour le Cantal !
Je vous remercie.Source http://www.interieur.gouv.fr, le 23 mai 2008