Déclaration de Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, sur le projet de loi relatif à la présomption d'innocence et aux droits des victimes, Paris le 30 mars 1999.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Vote solennel sur le projet de loi relatif à la présomption d'innocence et aux droits des victimes à l'Assemblée nationale le 30 mars 1999

Texte intégral

A loccasion du vote de ce texte essentiel de la réforme de la justice, je tiens à remercier votre assemblée pour la qualité des débats.
Les interventions ont toutes été riches, précises et constructives. Toutes les questions soulevées par le projet du gouvernement ont été abordées, et le texte sort amélioré de cette discussion, sur de nombreux points.
Je salue, à cette occasion le travail remarquable qui a été conduit par votre commission, sa présidente Catherine TASCA, et votre rapporteur Christine LAZERGES qui a, par sa grande connaissance de ces sujets, largement contribué à lamélioration des principales dispositions du texte. Je remercie aussi les députés qui, sur tous les bancs, ont proposé des amendements qui ont amélioré le texte et lont enrichi.
Je constate que lensemble des groupes parlementaires se sont prononcés de manière unanime, en faveur dune réforme de notre procédure pénale. Cette unanimité conforte le gouvernement dans sa volonté de conduire la réforme globale de la justice quil a engagée.
Nous avons eu un débat de fond sur le type de procédure pénale que nous souhaitons pour la France, et nous avons abordé, sans détour, les principes supérieurs qui doivent guider le procès pénal.
Je souhaite revenir sur le coeur de la discussion qui a porté sur le choix entre procédure accusatoire et procédure inquisitoire. Ce débat, nous lavons vu a été transversal et a guidé notre discussion. Le choix résolu du gouvernement de confiance dans le juge dinstruction et de maintien de la procédure inquisitoire, a été contesté par lopposition, qui, et je men félicite, na pas été suivie par votre assemblée.
Le choix de la procédure accusatoire, et donc de la suppression du juge dinstruction, aurait conduit à une diminution des garanties apportées à nos concitoyens les plus faibles. Ce choix aboutirait, aussi, jen suis convaincue, à un affaiblissement de la répression, notamment pour la criminalité organisée, et chaque fois quun investissement lourd simpose pour permettre la manifestation de la vérité.
La procédure accusatoire souffre aux yeux du gouvernement dun double défaut :
un risque damoindrissement de lEtat, et des garanties quune République forte et démocratique doit apporter à tous les citoyens en assurant à tous la protections des libertés et la sécurité.
Ces propositions qui allaient dans le sens de la procédure accusatoire étaient, également inspirées par des critiques à légard des magistrats et notamment des juges dinstruction. Je tiens à rappeler la confiance du gouvernement dans la magistrature qui exerce une mission difficile et sensible, et qui doit avoir notre soutien.
Avec ce projet, les juges dinstruction seront renforcés dans leur rôle darbitre, protégés des critiques sur lambiguïté de la mission qui est la leur actuellement, entre placement en détention et enquête à charge et à décharge. Grâce à cette réforme et aux moyens nouveaux qui leur sont donnés, ils pourront maintenant mieux assurer la double mission de gardien des libertés et de fer de lance de la lutte contre la criminalité la plus grave.
Mais surtout, les choix que vous avez faits apportent des améliorations considérables, à la fois aux personnes mises en cause et aux victimes.
La présomption dinnocence sort renforcée du débat. Vous venez dadopter un texte qui :
donne plus de garanties au cours de la garde à vue, améliore le statut de témoin assisté, élargit les droits de la défense tout au long de la procédure : de lenquête à laudience devant le tribunal, limite la durée de la détention provisoire correctionnelle et criminelle, accélère le jugement des affaires dans lesquels des personnes sont détenus, créé un dispositif permettant dindemniser les personnes qui sont déclarées innocentes par la justice, pour les aider à régler les frais engagés pour leur défense. Il sagit dun apport essentiel de nos débats, ouvre des possibilités nouvelles au débat contradictoire par une information équilibrée.
Mais cest dans le domaine des droits des victimes que les améliorations ont été les plus sensibles. Je remarque que le souci des victimes a été partagé par lensemble des groupes, majorité et opposition confondue. Cette convergence démontre limportance du besoin à satisfaire. Des améliorations pourront être trouvées au cours de la navette, notamment grâce aux travaux de Marie Noëlle LIENEMAN, qui a rendu son rapport, au Premier ministre, vendredi dernier. Je souhaite saluer les importantes avancées qui résultent des amendements tant de votre commission que du groupe communiste sur linformation des victimes, et sur leur accueil par les services de police et de gendarmerie.
En conclusion, je remercie lassemblée pour son soutien à laction du gouvernement dans la rénovation de la justice. La réforme est très largement engagée. Le vote daujourdhui démontre la détermination de la majorité de la voir mise en oeuvre rapidement. Nous aborderons prochainement le texte sur les alternatives aux poursuites, et le texte sur les rapports entre la chancellerie et les parquets. Avec ladoption par le Congrès de la réforme constitutionnelle, qui permettra le dépôt du projet de loi organique sur le statut des magistrats, nous aurons, je le crois prochainement, tenu nos engagements.
(Source http ://www.justice.gouv.fr, le 31 mars 1999)