Publié début avril 2025 par l’Assemblée nationale, un rapport sur les manquements des politiques publiques de protection de l’enfance fait état d’une action publique "structurellement dysfonctionnelle" et appelle à agir pour y remédier.
De graves dysfonctionnements
Le rapport pointe en particulier :
- un "système qui craque de toutes parts". Trois lois sur la protection de l’enfance, votées en 2007, 2016 et 2022, restent peu appliquées. L’aide sociale à l’enfance (ASE) suit 396 900 jeunes fin 2023 (dont 56% par une mesure de placement et 44% par une mesure éducative à domicile). Depuis 1998, ce nombre a crû de 44%, alors que la population des moins de 21 ans augmentait de 1,6% dans le même temps. Les mesures judiciaires prédominent. Le recul de l’accueil familial depuis 14 ans va à rebours de la volonté du législateur. Un enfant victime de violences qui n’est pas pris en charge rapidement risque de perdre 20 ans d’espérance de vie. Les jeunes relevant de l’ASE sont plus exposés au chômage et à la pauvreté et font moins d’études secondaires et supérieures ;
- un pilotage déficient. La protection de l’enfance est décentralisée. L’État, chargé de définir une stratégie nationale et de garantir la bonne application des lois, n’assume pas son rôle. L’implication variable des départements et des services déconcentrés de l’État induit des inégalités de chances selon les territoires. En outre, les données sur le parcours des jeunes font défaut ;
- des lacunes dans le repérage et la prévention des cas de mise en danger de l’enfant. La prévention, qui devrait être une priorité, est négligée ;
- une prise en charge inadaptée. Les délais d’exécution des décisions de justice, très longs, soulignent les carences de l’offre, en particulier pour les enfants handicapés. Les conditions d’accueil sont défaillantes et indignes (violences institutionnelles). Le contrôle des antécédents judiciaires des personnes au contact de l’enfant n’est pas encore généralisé. Le secteur privé à but lucratif se développe, de même que l’intérim. Aucun décret ne fixe les normes et les taux d’encadrement dans les structures de l’ASE ;
- la crise d’attractivité des métiers de la protection de l’enfance (faibles rémunérations, conditions de travail dégradées).
Comment refonder l’aide sociale à l’enfance ?
Le rapport préconise :
- de rénover sa gouvernance (élaboration d’une loi de programmation quinquennale, création d’un fonds pluriannuel et d’une commission nationale de réparation pour les enfants placés qui ont été victimes de maltraitance en institution) ;
- d’investir dans la prévention et le repérage des situations de danger ;
- de renforcer les moyens de la justice ;
- d’améliorer les conditions d’accueil ;
- de favoriser les actions à domicile et d’intensifier les contrôles ;
- de placer les besoins de l’enfant au cœur des décisions ;
- de décloisonner les politiques de la santé, du handicap et de l’éducation pour répondre à ses besoins ;
- de garantir un accompagnement vers l’autonomie ;
- de rendre le secteur plus attractif.