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Intelligence artificielle : des ingérences étrangères amplifiées

Temps de lecture  4 minutes

Par : La Rédaction

La France est le pays de l'Union européenne le plus exposé aux ingérences étrangères. L'intelligence artificielle (IA), par ses capacités à transformer et à manipuler l'information pour un moindre coût, rend cette menace encore plus prégnante. Un rapport parlementaire alerte sur la situation et appelle à trouver des réponses adaptées.

Le rapport de l'Assemblée nationale sur l'irruption de l'intelligence artificielle (IA) dans les ingérences étrangères, remis le 3 décembre 2025, fait le constat d'une démultiplication des ingérences étrangères par le biais de l'IA. Dans le contexte de la guerre menée par la Russie en Ukraine, le rapport cite pour exemple, les 3,6 millions d'articles de propagande russe postés sur internet en 2024 et le budget d'un milliard d'euros investis par la Russie dans la stratégie d'influence et d'ingérence à travers les médias Russia Today et Sputnik.

Le rapport analyse les moyens déployés au niveau national et européen face à une "révolution industrielle des ingérences" par le biais des outils de l'IA. Devant ce niveau de menace accru, les rapporteurs formulent 18 recommandations.       

Une menace qui vise en particulier la France

La France, à plusieurs titres, compte parmi les États les plus menacés par des ingérences reposant sur l’IA : 

  • en tant que puissance internationale (membre permanent du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies, pays doté de l’arme nucléaire) ;
  • en tant que pays d’accueil de communautés étrangères et de diasporas ;
  • en tant qu'acteur dans les domaines de l’économie et de la recherche ;
  • en tant que régime démocratique.

"L’intelligence artificielle est en train d’acquérir une place centrale dans les rapports conflictuels interétatiques, au point de devenir un enjeu majeur de géopolitique" observe le rapport. 

Comme le souligne le rapport, trois tendances caractérisent l'usage de l'IA comme menace informationnelle : 

  • un changement d'échelle dans la génération de contenus potentiellement inexacts ou trompeurs ;
  • des capacités décuplées pour la réplication et la publication coordonnée de contenus erronés à grande échelle ;
  • une aide pour la génération et la gestion de comptes inauthentiques sur les plateformes en ligne. 

Des réponses insuffisantes

Pour les rapporteurs, au-delà du cadre juridique européen (DSA, AI Act, obligations de contrôle et de transparence des très grandes plateformes et des très grands moteurs de recherche), l'Union européenne (UE) doit déployer elle-même ses propres technologies pour plus d'indépendance mais ce développement est rendu difficile par :

  • une absence de marché numérique commun ;
  • une forte hétérogénéité normative ;
  • des difficultés d'accès au financement ;
  • un recul des politiques publiques nationales et des ambitions de puissance nationale dans un contexte de politiques d'inspiration néolibérale démarrées dans les années 1970 ;
  • une Commission européenne qui s'est appuyée sur une relation partenariale privilégiée avec de grandes entreprises, notamment américaines, en vue d'affirmer "une position dominante face aux États membres".  

Outre un renfort en moyens humains et matériels des outils étatiques de contre-ingérence comme Viginum, le rapport formule une série de recommandations, parmi lesquelles :

  • l'institution d'une majorité numérique pour l'accès aux réseaux sociaux ;
  • l'obligation de consentement aux algorithmes dans les suggestions de contenus sur les plateformes ;
  • l'instauration d'une réserve algorithmique pré-électorale sur les plateformes permettant d'éviter toute manipulation et de préserver la sincérité des votes ;
  • une labellisation informationnelle des sites internet sur le modèle de nutri-score ;
  • un renforcement de l'audiovisuel public à l'étranger avec France Médias Monde ;
  • un score d'artificialité des contenus sur les réseaux sociaux (notifiant la présence de contenus issus de l'IA) ;
  • des campagnes de sensibilisation aux risques de désinformation.