Texte intégral
Monsieur le Ministre de lIntérieur,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Préfets et Sous-préfets,
Mesdames, Messieurs,
Il est dans lEtat des fonctions qui donnent un visage à la République et bien sûr votre fonction en fait partie.
Représentants de lEtat dans nos départements, il vous appartient dexpliquer à vos interlocuteurs la raison et le sens de laction de la France.
Cest pourquoi vous comprendrez que jévoque ce matin lépreuve de force dans laquelle notre pays est engagé au Kosovo. Car cest une épreuve difficile qui doit être bien comprise par nos compatriotes.
Cette action était nécessaire. Le choix nétait pas entre la paix et les frappes aériennes, mais entre des frappes maintenant ou la guerre plus tard, plus lourde, plus globale, sans aucun doute plus meurtrière. Une guerre qui aurait pu déstabiliser lensemble des Balkans et porter une grave atteinte à nos valeurs, à notre sécurité.
Cette action était légitime. Notre objectif de paix est évident. Il demeure notre impératif. Il y a quelques mois, après le massacre de Racak, malgré le massacre de Racak, nous avons refusé les frappes pour donner une dernière chance à la paix. Ce fut la Conférence de Rambouillet, largement initiée par la France et sa diplomatie et ses partenaires européens. Ce fut, pour la première fois, la définition dun accord agréé par toute la communauté internationale. Un accord respectueux de la souveraineté serbe et respectueux des droits de lHomme. Cet accord soutenu par les Européens, par la Russie et par les Etats-Unis, cet accord signé par les Albanais du Kosovo, il fut refoulé, je dirais même, aux pieds par le Président Milosevic. Au-delà de ce refus politique, on a assisté au cours des dernières semaines au développement des actions militaires serbes au Kosovo, en violation flagrante des résolutions du Conseil de Sécurité des Nations unies adoptées lautomne dernier.
Ces frappes ne signifient pas la guerre. Elles visent des infrastructures militaires, elles visent les instruments armés qui permettent loppression du Kosovo et qui risquent de se propager dans toute la région. Ces frappes nont quun but : faire comprendre au Président Milosevic que le chemin de la paix est préférable à celui du totalitarisme, à celui de la violence contre les populations civiles. Laccord reste sur la table. A tout moment le Président Milosevic peut interrompre ces frappes, en acceptant une solution qui respecte pleinement lintégrité de la Serbie et garantit la stabilité des Balkans. Cet accord, vous le savez, nest pas un accord occidental imposé, mais un accord qui a le soutien de toute la communauté internationale et en particulier de tous les Européens, de la Russie et des Etats-Unis.
Enfin, vous pourrez faire valoir le devoir de solidarité. Au moment où des pilotes français mènent une action que la France a décidée en pleine souveraineté, avec la totalité de ses alliés, au service de ses idéaux de paix, je souhaite que la Nation tout entière se montre solidaire. Ce sont les valeurs universelles de notre tradition républicaine que nous défendons.
De la République, vous incarnez lunité, limpartialité, et lengagement au service de lintérêt général. Dépositaires de lautorité de lEtat, il vous appartient de veiller à lapplication des lois.
Sur lensemble de notre territoire, en métropole comme outre-mer, vous devez protéger les libertés et garantir lordre public. Préserver la cohésion sociale, assurer la continuité et lefficacité des services publics, les adapter aux besoins des Français et de leurs entreprises. Vous devez aussi - cest là lune des priorités de votre action - contribuer au développement de lactivité et de lemploi en favorisant linnovation et en soutenant toutes les bonnes initiatives.
Votre mission est parfois difficile. Mais je connais votre engagement et votre disponibilité car vous vivez chaque jour avec conviction votre rôle de vigie donnant lalerte sur tout ce qui menace ou peut menacer le corps social.
Au plus près des réalités, vous êtes en permanence au contact de nos compatriotes, et notamment de ceux dentre eux qui sont les plus impliqués dans les évolutions de notre société : élus en priorité bien sûr, mais aussi cadres et agents des services publics, chefs dentreprise, partenaires sociaux, responsables associatifs. Encouragez les énergies nouvelles, soyez des facilitateurs de projets, cest ainsi que la France avance.
Notre pays est désormais entré dans une phase, chacun le sait, de mutation rapide. Le passage à leuro ne fera quamplifier ce mouvement. Par vos fonctions, par votre rôle dans la société, vous savez les espérances que suscitent les progrès de la construction européenne. Mais vous percevez aussi les interrogations et les inquiétudes qui se font jour à ce sujet.
Sans cesse, vous devez plaider pour la modernisation et conduire les transformations nécessaires. Dans le mouvement du monde, le changement, raisonné et maîtrisé, est notre meilleure assurance.
Cest dans cette perspective que je voudrais, ce matin, vous entretenir des principaux défis quil nous faudra relever pour permettre à la France daborder le siècle prochain avec encore plus de confiance.
Jen retiendrai trois : moderniser notre organisation territoriale. Construire une administration de proximité. Assurer la sécurité de nos concitoyens.
A Rennes, en décembre dernier, jai dit devant des élus ma conviction que la démocratie locale devait trouver un souffle nouveau. Jai dit ma conviction que lorganisation des collectivités territoriales devait être modernisée et que leur armature devait être renforcée. A vous, aujourdhui, je veux redire quil sagit là dune attente profonde de nos concitoyens.
Nos compatriotes savent que, dans les domaines qui touchent à leurs principales préoccupations, la sécurité, lemploi, léducation, les solutions ne peuvent venir uniquement des politiques nationales. Elles passent aussi, on serait tenté de dire quelles passent dabord par une libération des initiatives locales.
Bien sûr, avec la création des régions en 1972, puis avec la décentralisation engagée en 1982, une partie du chemin a déjà été parcourue. Un profond rééquilibrage sest opéré entre lEtat et les exécutifs locaux. Grâce au rapide essor de lintercommunalité, dans lequel votre rôle a été déterminant, notre organisation territoriale sest largement recomposée, témoignant de laptitude au changement dont peuvent faire preuve les collectivités et leurs élus.
Mais cette évolution sest faite, il faut le dire, dans un certain désordre, peut être sans vue densemble. On a superposé les centres de décision sans se rendre compte quon les éloignait ainsi des Français. Une distance excessive sest créée entre citoyens et décideurs.
Les conséquences de cette situation ne doivent pas être sous-estimées. Ce qui est en jeu, cest le fondement même du pacte politique et social. Comment parler de démocratie lorsque limbrication des pouvoirs rend impossible toute identification des responsabilités ? Vous-mêmes, je le sais, faites souvent cette analyse.
Un vaste mouvement de modernisation de notre organisation territoriale est nécessaire. Le territoire français nest plus habité, exploité, vécu de la même façon quau siècle dernier.
Nous devons êtres guidés dans ce domaine par deux objectifs :
simplifier et démocratiser.
Simplifier, cela signifie démêler lécheveau des multiples syndicats, établissements publics et autres structures de coopération qui se superposent sur notre territoire.
Démocratiser, cest donner une expression politique aux nouvelles communautés de vie qui se sont formées progressivement, dans les agglomérations comme dans les pays ruraux. Pour cela, il faut partir des acquis de lintercommunalité, sans, bien entendu, créer déchelon supplémentaire. De nouvelles collectivités doivent pouvoir se constituer librement à partir des communes et de leurs groupements, en maintenant au niveau municipal les services les plus directement au contact du public.
Les départements et les régions doivent participer à cette modernisation. Le département, bien enraciné dans notre organisation territoriale, est appelé - je pense - à demeurer un lieu privilégié de coordination et de synthèse de certaines politiques locales.
La région doit, quant à elle, voir consacrer sa mission daménagement du territoire et de développement économique. Cest à léchelle des régions que se jouera et que se gagnera la compétition des territoires. Nos régions doivent être armées pour y faire face.
Que lon me comprenne bien. Il ne sagit pas de procéder à une réorganisation autoritaire de la carte territoriale. Une telle démarche serait vouée à léchec. Nos traditions étant ce quelles sont, lobjectif de simplification et de modernisation ne pourra être atteint que par la concertation et sur la base du volontariat.
Plutôt que dimposer demblée, par voie dautorité, un cadre uniforme pour tous, il sagit dimaginer des instruments juridiques et financiers nouveaux afin de permettre aux acteurs locaux de prendre eux-mêmes, à leur rythme, linitative du changement. Votre mission sera daider, par votre savoir-faire, par votre conseil, à ce mouvement nécessaire.
Parce quil ny a pas dorganisation territoriale idéale et parce que la diversité, loin dêtre un handicap, est une richesse, il est temps aussi de reconnaître que plusieurs formes dorganisations territoriales différentes peuvent coexister harmonieusement dans notre pays. Il est temps de reconnaître que lorganisation administrative de lEtat ne doit pas nécessairement être uniforme.
A une démocratie de proximité doit correspondre une administration de proximité. Les préfets et membres du corps préfectoral ont un rôle majeur à jouer. Je lai souvent constaté : le couple préfet-élus, sa bonne entente, sa complémentarité, sont essentiels.
Cest vrai pour les actions de lEtat, qui requièrent un concours croissant des collectivités territoriales, quil sagisse de la lutte contre le chômage, de la réalisation des équipements publics ou des aides aux entreprises.
Cest vrai aussi pour les collectivités locales, qui ont besoin du soutien technique et financier de lEtat, de sa capacité dexpertise et danimation, de sa présence active pour assurer lordre public et la sécurité.
Cest pourquoi il est si nécessaire que le préfet puisse engager directement lEtat auprès de ses interlocuteurs, sans réserve, dans la seule limite des lois, des règlements et des instructions quil reçoit du Gouvernement. Cest ainsi que pourront se fédérer toutes les énergies et quelles contribueront à un meilleur aménagement de notre territoire, porteur dactivités nouvelles et demplois.
En 1996, un pas important a été franchi avec la déconcentration et la globalisation des crédits de la politique de lemploi. Vous y aviez trouvé de nouvelles marges de manoeuvre, de nouvelles possibilités daction. Cest la méthode à suivre, en sachant résister aux tentations de reconcentration, qui sont toujours très fortes au sein des administrations centrales.
Si, comme je le souhaite, un véritable droit à lexpérimentation est reconnu aux collectivités locales, de nouveaux champs daction souvriront pour coopérer et innover avec elles. Vous devrez avoir les moyens de cette coopération et la capacité dorganiser les services de lEtat en conséquence.
Construire une administration de proximité, ce nest pas seulement se rapprocher des élus et des collectivités locales, cest aussi se tourner davantage vers les usagers. Cela induit de nouveaux comportements, de nouvelles pratiques. Aujourdhui je voudrais insister sur lapport des technologies de linformation qui ouvrent à ce sujet des voies prometteuses.
Vous aurez dans les années qui viennent à superviser la conception de grands réseaux de communication interne, qui relieront lensemble des services administratifs de lEtat dans vos départements, dans vos régions. Certains dentre vous ont dores et déjà pris des initiatives en la matière. Je voudrais les en féliciter.
Partager linformation et le savoir-faire, approfondir la pratique du dialogue interministériel, comparer les expériences dune préfecture à lautre, faciliter la prise de décision, ces réseaux permettront dans bien des domaines daméliorer lefficacité de ladministration territoriale.
Mais lapparition de ces nouveaux outils peut saccompagner dinterrogations et aussi dinquiétudes. Des remises en cause sont inévitables. Il faudra donc expliquer et former. Convaincre et surmonter les réticences. Vous vous trouvez en première ligne pour assurer cette transition vers une administration en réseau, plus souple, plus transparente, plus cohérente.
Il faudra ensuite aller plus loin. La modernisation de lEtat ne serait pas complète si elle ne se traduisait pas par lamélioration du service offert au public. Mettre ladministration en réseau cela suppose aussi dutiliser lInternet afin de renforcer au niveau local le dialogue avec les usagers, simplifier les procédures administratives, éviter les déplacements inutiles et contribuer au désenclavement des zones isolées.
A vous de tirer le meilleur parti de ces nouvelles technologies de communication et den faire un véritable atout pour le service public. Il est nécessaire que votre formation prenne mieux en compte cet objectif afin que vous soyez prêts à animer et à amplifier ce mouvement.
Enfin, lune des principales tâches de lEtat, que vous représentez, cest de répondre rapidement et complètement aux attentes des citoyens. Parmi ces attentes, lune mérite tout particulièrement notre attention parce quelle est la plus naturelle et la plus légitime. Il sagit de laspiration à la sécurité.
Aujourdhui, la sécurité des biens et des personnes est devenue en France, en Europe, partout dans le monde, lune des premières préoccupations des Français. Vous le constatez chaque jour sur le terrain : face à la montée des violences, en zone urbaine mais aussi en zone rurale, face au développement de la délinquance des mineurs, nos compatriotes, et notamment les plus faibles dentre eux, manifestent un réel désarroi. Ils doutent de la capacité de lEtat à faire respecter la loi.
Vous vous trouvez, là encore, en première ligne. Responsables de la sécurité des habitants, cest à vous quil appartient de garantir non seulement lordre public mais aussi la tranquillité quotidienne de nos concitoyens.
Dans lexercice de cette tâche difficile, il faut veiller à restaurer entre la prévention et la sanction un équilibre qui a été trop longtemps altéré.
Mais les véritables enjeux de la politique de sécurité vont bien au-delà. Il est essentiel dassurer une véritable intégration sociale, économique et citoyenne.
Il y faut de la fermeté. Il y faut aussi de louverture, de la générosité et de la considération notamment pour ces jeunes dont lavenir est nécessairement dans la communauté nationale. A défaut, nous prendrions le risque de voir apparaître des fractures plus importantes encore. Je vous demande dy être très attentifs.
La sécurité concerne tous les services de lEtat, par-delà les différences de missions et donc de culture et dapproche. Là encore, cest à vous quil appartient de coordonner les initiatives et les projets. Comme je lai déjà dit, vous devez le faire avec les élus, et dabord avec les maires qui appréhendent mieux que personne les difficultés dans leur commune. Appuyez-vous aussi sur les relais associatifs. Quand il sagit de lutter contre linsécurité, il ne faut négliger aucune piste. Il ne faut écarter aucune aide. Même si le représentant de lEtat demeure lultime recours, ce sont toutes les composantes du corps social qui doivent unir leurs efforts pour venir à bout dun mal qui menace la collectivité dans son ensemble.
Mais il y a une autre attente des Français : celle de la sécurité quotidienne notamment à légard des risques naturels et technologiques. Lincendie du tunnel du Mont Blanc en est le tragique exemple. Là encore les Préfets, avec lensemble des services de lEtat et des collectivités territoriales, doivent exercer une vigilance et une rigueur de tous les instants pour prévenir ces enchaînements dramatiques. Mais je voudrais redire aux familles des victimes toute ma sympathie et à tous les personnels français, italiens et genevois, engagés dans les secours, ma reconnaissance, mon soutien et ma solidarité.
Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais, pour terminer, saluer vos conjoints, qui, à vos côtés, prennent aussi - je le sais - leur part des responsabilités dans celles qui vous incombent. Je sais toute limportance de leur rôle et je suis heureux de pouvoir en témoigner aujourdhui.
Je souhaite également rendre un hommage tout particulier à celles et ceux dentre vous qui servent dans les départements et les territoires doutre-mer. Ils témoignent de ce que la France, dans luniversalité des principes de la République, est un pays aux multiples visages, riche de son unité comme de sa diversité.
Je vous remercie.
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Préfets et Sous-préfets,
Mesdames, Messieurs,
Il est dans lEtat des fonctions qui donnent un visage à la République et bien sûr votre fonction en fait partie.
Représentants de lEtat dans nos départements, il vous appartient dexpliquer à vos interlocuteurs la raison et le sens de laction de la France.
Cest pourquoi vous comprendrez que jévoque ce matin lépreuve de force dans laquelle notre pays est engagé au Kosovo. Car cest une épreuve difficile qui doit être bien comprise par nos compatriotes.
Cette action était nécessaire. Le choix nétait pas entre la paix et les frappes aériennes, mais entre des frappes maintenant ou la guerre plus tard, plus lourde, plus globale, sans aucun doute plus meurtrière. Une guerre qui aurait pu déstabiliser lensemble des Balkans et porter une grave atteinte à nos valeurs, à notre sécurité.
Cette action était légitime. Notre objectif de paix est évident. Il demeure notre impératif. Il y a quelques mois, après le massacre de Racak, malgré le massacre de Racak, nous avons refusé les frappes pour donner une dernière chance à la paix. Ce fut la Conférence de Rambouillet, largement initiée par la France et sa diplomatie et ses partenaires européens. Ce fut, pour la première fois, la définition dun accord agréé par toute la communauté internationale. Un accord respectueux de la souveraineté serbe et respectueux des droits de lHomme. Cet accord soutenu par les Européens, par la Russie et par les Etats-Unis, cet accord signé par les Albanais du Kosovo, il fut refoulé, je dirais même, aux pieds par le Président Milosevic. Au-delà de ce refus politique, on a assisté au cours des dernières semaines au développement des actions militaires serbes au Kosovo, en violation flagrante des résolutions du Conseil de Sécurité des Nations unies adoptées lautomne dernier.
Ces frappes ne signifient pas la guerre. Elles visent des infrastructures militaires, elles visent les instruments armés qui permettent loppression du Kosovo et qui risquent de se propager dans toute la région. Ces frappes nont quun but : faire comprendre au Président Milosevic que le chemin de la paix est préférable à celui du totalitarisme, à celui de la violence contre les populations civiles. Laccord reste sur la table. A tout moment le Président Milosevic peut interrompre ces frappes, en acceptant une solution qui respecte pleinement lintégrité de la Serbie et garantit la stabilité des Balkans. Cet accord, vous le savez, nest pas un accord occidental imposé, mais un accord qui a le soutien de toute la communauté internationale et en particulier de tous les Européens, de la Russie et des Etats-Unis.
Enfin, vous pourrez faire valoir le devoir de solidarité. Au moment où des pilotes français mènent une action que la France a décidée en pleine souveraineté, avec la totalité de ses alliés, au service de ses idéaux de paix, je souhaite que la Nation tout entière se montre solidaire. Ce sont les valeurs universelles de notre tradition républicaine que nous défendons.
De la République, vous incarnez lunité, limpartialité, et lengagement au service de lintérêt général. Dépositaires de lautorité de lEtat, il vous appartient de veiller à lapplication des lois.
Sur lensemble de notre territoire, en métropole comme outre-mer, vous devez protéger les libertés et garantir lordre public. Préserver la cohésion sociale, assurer la continuité et lefficacité des services publics, les adapter aux besoins des Français et de leurs entreprises. Vous devez aussi - cest là lune des priorités de votre action - contribuer au développement de lactivité et de lemploi en favorisant linnovation et en soutenant toutes les bonnes initiatives.
Votre mission est parfois difficile. Mais je connais votre engagement et votre disponibilité car vous vivez chaque jour avec conviction votre rôle de vigie donnant lalerte sur tout ce qui menace ou peut menacer le corps social.
Au plus près des réalités, vous êtes en permanence au contact de nos compatriotes, et notamment de ceux dentre eux qui sont les plus impliqués dans les évolutions de notre société : élus en priorité bien sûr, mais aussi cadres et agents des services publics, chefs dentreprise, partenaires sociaux, responsables associatifs. Encouragez les énergies nouvelles, soyez des facilitateurs de projets, cest ainsi que la France avance.
Notre pays est désormais entré dans une phase, chacun le sait, de mutation rapide. Le passage à leuro ne fera quamplifier ce mouvement. Par vos fonctions, par votre rôle dans la société, vous savez les espérances que suscitent les progrès de la construction européenne. Mais vous percevez aussi les interrogations et les inquiétudes qui se font jour à ce sujet.
Sans cesse, vous devez plaider pour la modernisation et conduire les transformations nécessaires. Dans le mouvement du monde, le changement, raisonné et maîtrisé, est notre meilleure assurance.
Cest dans cette perspective que je voudrais, ce matin, vous entretenir des principaux défis quil nous faudra relever pour permettre à la France daborder le siècle prochain avec encore plus de confiance.
Jen retiendrai trois : moderniser notre organisation territoriale. Construire une administration de proximité. Assurer la sécurité de nos concitoyens.
A Rennes, en décembre dernier, jai dit devant des élus ma conviction que la démocratie locale devait trouver un souffle nouveau. Jai dit ma conviction que lorganisation des collectivités territoriales devait être modernisée et que leur armature devait être renforcée. A vous, aujourdhui, je veux redire quil sagit là dune attente profonde de nos concitoyens.
Nos compatriotes savent que, dans les domaines qui touchent à leurs principales préoccupations, la sécurité, lemploi, léducation, les solutions ne peuvent venir uniquement des politiques nationales. Elles passent aussi, on serait tenté de dire quelles passent dabord par une libération des initiatives locales.
Bien sûr, avec la création des régions en 1972, puis avec la décentralisation engagée en 1982, une partie du chemin a déjà été parcourue. Un profond rééquilibrage sest opéré entre lEtat et les exécutifs locaux. Grâce au rapide essor de lintercommunalité, dans lequel votre rôle a été déterminant, notre organisation territoriale sest largement recomposée, témoignant de laptitude au changement dont peuvent faire preuve les collectivités et leurs élus.
Mais cette évolution sest faite, il faut le dire, dans un certain désordre, peut être sans vue densemble. On a superposé les centres de décision sans se rendre compte quon les éloignait ainsi des Français. Une distance excessive sest créée entre citoyens et décideurs.
Les conséquences de cette situation ne doivent pas être sous-estimées. Ce qui est en jeu, cest le fondement même du pacte politique et social. Comment parler de démocratie lorsque limbrication des pouvoirs rend impossible toute identification des responsabilités ? Vous-mêmes, je le sais, faites souvent cette analyse.
Un vaste mouvement de modernisation de notre organisation territoriale est nécessaire. Le territoire français nest plus habité, exploité, vécu de la même façon quau siècle dernier.
Nous devons êtres guidés dans ce domaine par deux objectifs :
simplifier et démocratiser.
Simplifier, cela signifie démêler lécheveau des multiples syndicats, établissements publics et autres structures de coopération qui se superposent sur notre territoire.
Démocratiser, cest donner une expression politique aux nouvelles communautés de vie qui se sont formées progressivement, dans les agglomérations comme dans les pays ruraux. Pour cela, il faut partir des acquis de lintercommunalité, sans, bien entendu, créer déchelon supplémentaire. De nouvelles collectivités doivent pouvoir se constituer librement à partir des communes et de leurs groupements, en maintenant au niveau municipal les services les plus directement au contact du public.
Les départements et les régions doivent participer à cette modernisation. Le département, bien enraciné dans notre organisation territoriale, est appelé - je pense - à demeurer un lieu privilégié de coordination et de synthèse de certaines politiques locales.
La région doit, quant à elle, voir consacrer sa mission daménagement du territoire et de développement économique. Cest à léchelle des régions que se jouera et que se gagnera la compétition des territoires. Nos régions doivent être armées pour y faire face.
Que lon me comprenne bien. Il ne sagit pas de procéder à une réorganisation autoritaire de la carte territoriale. Une telle démarche serait vouée à léchec. Nos traditions étant ce quelles sont, lobjectif de simplification et de modernisation ne pourra être atteint que par la concertation et sur la base du volontariat.
Plutôt que dimposer demblée, par voie dautorité, un cadre uniforme pour tous, il sagit dimaginer des instruments juridiques et financiers nouveaux afin de permettre aux acteurs locaux de prendre eux-mêmes, à leur rythme, linitative du changement. Votre mission sera daider, par votre savoir-faire, par votre conseil, à ce mouvement nécessaire.
Parce quil ny a pas dorganisation territoriale idéale et parce que la diversité, loin dêtre un handicap, est une richesse, il est temps aussi de reconnaître que plusieurs formes dorganisations territoriales différentes peuvent coexister harmonieusement dans notre pays. Il est temps de reconnaître que lorganisation administrative de lEtat ne doit pas nécessairement être uniforme.
A une démocratie de proximité doit correspondre une administration de proximité. Les préfets et membres du corps préfectoral ont un rôle majeur à jouer. Je lai souvent constaté : le couple préfet-élus, sa bonne entente, sa complémentarité, sont essentiels.
Cest vrai pour les actions de lEtat, qui requièrent un concours croissant des collectivités territoriales, quil sagisse de la lutte contre le chômage, de la réalisation des équipements publics ou des aides aux entreprises.
Cest vrai aussi pour les collectivités locales, qui ont besoin du soutien technique et financier de lEtat, de sa capacité dexpertise et danimation, de sa présence active pour assurer lordre public et la sécurité.
Cest pourquoi il est si nécessaire que le préfet puisse engager directement lEtat auprès de ses interlocuteurs, sans réserve, dans la seule limite des lois, des règlements et des instructions quil reçoit du Gouvernement. Cest ainsi que pourront se fédérer toutes les énergies et quelles contribueront à un meilleur aménagement de notre territoire, porteur dactivités nouvelles et demplois.
En 1996, un pas important a été franchi avec la déconcentration et la globalisation des crédits de la politique de lemploi. Vous y aviez trouvé de nouvelles marges de manoeuvre, de nouvelles possibilités daction. Cest la méthode à suivre, en sachant résister aux tentations de reconcentration, qui sont toujours très fortes au sein des administrations centrales.
Si, comme je le souhaite, un véritable droit à lexpérimentation est reconnu aux collectivités locales, de nouveaux champs daction souvriront pour coopérer et innover avec elles. Vous devrez avoir les moyens de cette coopération et la capacité dorganiser les services de lEtat en conséquence.
Construire une administration de proximité, ce nest pas seulement se rapprocher des élus et des collectivités locales, cest aussi se tourner davantage vers les usagers. Cela induit de nouveaux comportements, de nouvelles pratiques. Aujourdhui je voudrais insister sur lapport des technologies de linformation qui ouvrent à ce sujet des voies prometteuses.
Vous aurez dans les années qui viennent à superviser la conception de grands réseaux de communication interne, qui relieront lensemble des services administratifs de lEtat dans vos départements, dans vos régions. Certains dentre vous ont dores et déjà pris des initiatives en la matière. Je voudrais les en féliciter.
Partager linformation et le savoir-faire, approfondir la pratique du dialogue interministériel, comparer les expériences dune préfecture à lautre, faciliter la prise de décision, ces réseaux permettront dans bien des domaines daméliorer lefficacité de ladministration territoriale.
Mais lapparition de ces nouveaux outils peut saccompagner dinterrogations et aussi dinquiétudes. Des remises en cause sont inévitables. Il faudra donc expliquer et former. Convaincre et surmonter les réticences. Vous vous trouvez en première ligne pour assurer cette transition vers une administration en réseau, plus souple, plus transparente, plus cohérente.
Il faudra ensuite aller plus loin. La modernisation de lEtat ne serait pas complète si elle ne se traduisait pas par lamélioration du service offert au public. Mettre ladministration en réseau cela suppose aussi dutiliser lInternet afin de renforcer au niveau local le dialogue avec les usagers, simplifier les procédures administratives, éviter les déplacements inutiles et contribuer au désenclavement des zones isolées.
A vous de tirer le meilleur parti de ces nouvelles technologies de communication et den faire un véritable atout pour le service public. Il est nécessaire que votre formation prenne mieux en compte cet objectif afin que vous soyez prêts à animer et à amplifier ce mouvement.
Enfin, lune des principales tâches de lEtat, que vous représentez, cest de répondre rapidement et complètement aux attentes des citoyens. Parmi ces attentes, lune mérite tout particulièrement notre attention parce quelle est la plus naturelle et la plus légitime. Il sagit de laspiration à la sécurité.
Aujourdhui, la sécurité des biens et des personnes est devenue en France, en Europe, partout dans le monde, lune des premières préoccupations des Français. Vous le constatez chaque jour sur le terrain : face à la montée des violences, en zone urbaine mais aussi en zone rurale, face au développement de la délinquance des mineurs, nos compatriotes, et notamment les plus faibles dentre eux, manifestent un réel désarroi. Ils doutent de la capacité de lEtat à faire respecter la loi.
Vous vous trouvez, là encore, en première ligne. Responsables de la sécurité des habitants, cest à vous quil appartient de garantir non seulement lordre public mais aussi la tranquillité quotidienne de nos concitoyens.
Dans lexercice de cette tâche difficile, il faut veiller à restaurer entre la prévention et la sanction un équilibre qui a été trop longtemps altéré.
Mais les véritables enjeux de la politique de sécurité vont bien au-delà. Il est essentiel dassurer une véritable intégration sociale, économique et citoyenne.
Il y faut de la fermeté. Il y faut aussi de louverture, de la générosité et de la considération notamment pour ces jeunes dont lavenir est nécessairement dans la communauté nationale. A défaut, nous prendrions le risque de voir apparaître des fractures plus importantes encore. Je vous demande dy être très attentifs.
La sécurité concerne tous les services de lEtat, par-delà les différences de missions et donc de culture et dapproche. Là encore, cest à vous quil appartient de coordonner les initiatives et les projets. Comme je lai déjà dit, vous devez le faire avec les élus, et dabord avec les maires qui appréhendent mieux que personne les difficultés dans leur commune. Appuyez-vous aussi sur les relais associatifs. Quand il sagit de lutter contre linsécurité, il ne faut négliger aucune piste. Il ne faut écarter aucune aide. Même si le représentant de lEtat demeure lultime recours, ce sont toutes les composantes du corps social qui doivent unir leurs efforts pour venir à bout dun mal qui menace la collectivité dans son ensemble.
Mais il y a une autre attente des Français : celle de la sécurité quotidienne notamment à légard des risques naturels et technologiques. Lincendie du tunnel du Mont Blanc en est le tragique exemple. Là encore les Préfets, avec lensemble des services de lEtat et des collectivités territoriales, doivent exercer une vigilance et une rigueur de tous les instants pour prévenir ces enchaînements dramatiques. Mais je voudrais redire aux familles des victimes toute ma sympathie et à tous les personnels français, italiens et genevois, engagés dans les secours, ma reconnaissance, mon soutien et ma solidarité.
Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais, pour terminer, saluer vos conjoints, qui, à vos côtés, prennent aussi - je le sais - leur part des responsabilités dans celles qui vous incombent. Je sais toute limportance de leur rôle et je suis heureux de pouvoir en témoigner aujourdhui.
Je souhaite également rendre un hommage tout particulier à celles et ceux dentre vous qui servent dans les départements et les territoires doutre-mer. Ils témoignent de ce que la France, dans luniversalité des principes de la République, est un pays aux multiples visages, riche de son unité comme de sa diversité.
Je vous remercie.