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© Jerome Gilles / NurPhoto / NurPhoto via AFP

Viol, consentement, soumission chimique : le point en neuf questions

Temps de lecture  18 minutes

Par : La Rédaction

Les violences faites aux femmes constituent la manifestation la plus aiguë de l'inégalité hommes-femmes. Parmi ces violences, le viol est sans doute l'une des plus graves et réduit ses victimes, principalement des femmes, à des objets sexuels. Alors que se déroule le procès des viols de Mazan, le point sur les notions de viol et de consentement.

Une violence sexiste s'exerce contre une personne en raison de son genre, de son identité de genre ou de son orientation sexuelle. Une violence sexuelle s'exerce lorsqu’une personne impose à autrui un propos (oral ou écrit), un comportement, un contact à caractère sexuel.

Cela porte atteinte :

  • aux droits fondamentaux de la personne (notamment à sa dignité) ; 
  • à son intégrité psychologique ; 
  • à son intégrité physique.

Les statistiques montrent que 85% des victimes enregistrées pour violences sexuelles hors cadre familial sont des femmes, dont plus de la moitié sont mineures. Les auteurs sont quasi exclusivement des hommes (96%). Il existe ainsi une violence des hommes à l'égard des femmes.

Les violences sexuelles et sexistes sont sanctionnées pénalement.

Elles recouvrent : 

  • l'outrage sexiste et sexuel (articles 222-33-1-1 et R625-8-3 du code pénal), qui impose à une personne tout propos ou tout comportement à connotation sexuelle ou sexiste soit portant atteinte à sa dignité en raison de son caractère dégradant ou humiliant, soit créant à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
  • l'agression sexuelle (article 222-22 du code pénal), constituée par toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise ou, dans les cas prévus par la loi, ou commise sur un mineur par un majeur ;
  • le voyeurisme ou atteinte à l’intimité de la personne (article 226-3-1 du code pénal), qui est le fait d'user de tout moyen afin d'apercevoir les parties intimes d'une personne alors qu'elles sont cachées à la vue des tiers, à son insu ou sans le consentement de la personne ;
  • l'exhibition sexuelle (article 222-32 du code pénal), imposée à la vue d'autrui dans un lieu accessible aux regards du public. Même en l'absence d'exposition d'une partie dénudée du corps, l'exhibition sexuelle est constituée si la commission explicite d'un acte sexuel, réel ou simulé est imposée à la vue d'autrui, dans un lieu accessible aux regards du public ;
  • le harcèlement sexuel (article 222-33 du code pénal), qui est le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste, soit portant atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créant à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. L'infraction est également constituée dans le cas de l'usage de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, même non répété ;
  • le viol (article 222-23 du code pénal), caractérisé par tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d'autrui ou sur la personne de l'auteur par violence, contrainte, menace ou surprise ;
  • les mutilations sexuelles, qui sont punies par l'article 227-24-1 du code pénal ;
  • l'exploitation sexuelle, constitué par :
    • le recours à la prostitution : sollicitation ou obtention de relations de nature sexuelle d'une personne qui se livre à la prostitution, y compris de façon occasionnelle, en échange d'une rémunération, d'une promesse de rémunération, de la fourniture d'un avantage en nature ou de la promesse d'un tel avantage (article 611-1) ;
    • le proxénétisme : aide, assistance ou protection de la prostitution d'autrui (article 225-5) ;
    • le tourisme sexuel : recours à la prostitution et proxénétisme commis à l'étranger par un Français ou par une personne résidant habituellement sur le territoire français (articles 225-11-2 et 225-12-3).

Par ailleurs, le mariage forcé constitue une atteinte aux droits humains fondamentaux, notamment à la liberté et à l’intégrité physique. Selon l'article 146 du code civil : "Il n’y a pas de mariage lorsqu’il n’y a point de consentement."

La prévalence de violences sexuelles en France est considérable : selon l’enquête Virage, 14,5% des femmes et 3,9% des hommes ont subi des violences sexuelles au cours de leur vie, parmi eux, 3,7% des femmes et 0,6% des hommes ont subi une tentative de viol ou un viol. La majorité de ces faits reste sans poursuites.

Au cours de l’année 2023, 114 000 victimes de violences sexuelles ont été enregistrées par les services de sécurité, dont 74% ont subi ces violences en dehors du cadre familial ou conjugal (soit près de 84 000 victimes). Ce nombre a progressé de 17% depuis 2021. Trois quarts des violences sexuelles enregistrées hors cadre familial sont des violences physiques (viol ou tentative de viol, agression ou atteinte sexuelle).

En 2023, 94 femmes ont été victimes d'homicides liés aux violences au sein du couple. Le nombre de féminicides était de 122 en 2022 (267 femmes ont été victimes d’une tentative de féminicide). Au total, près de 240 000 femmes victimes de violences commises par leur (ex-)partenaire ont été entendues par les forces de sécurité.

Une forme particulière de violence sexuelle est la soumission chimique. Au total, sur 2 197 déclarations en 2022, 1 229 agressions facilitées par les substances (AFS) ont été retenues dans l’enquête nationale marquant, une augmentation de 69,1% par rapport à 2021.

Si la prévalence est importante, les données montrent également un faible taux de poursuites et de condamnation, les affaires sont majoritairement classées au motif de manque de preuves, bien que l’auteur soit souvent connu et identifié. 37 800 condamnations ont été prononcées entre 2017 et 2022, soit environ 7 500 par an :

  • 76% concernent les agressions sexuelles ;
  • 17% des viols ;
  • 4% des atteintes sexuelles sur mineurs ;
  • 3% du harcèlement sexuel.

Ces dernières années, la réponse judiciaire à l’égard des violences conjugales s’est durcie. 3 586 ordonnances de protection ont été délivrées en 2022 contre 1 392 en 2017. Le nombre de condamnations pour violences conjugales a augmenté de 123% entre 2017 et 2022 (94% sont des hommes), celles pour violences sexuelles ont augmenté de 14% dans cette même période. Les mineurs représentent 23% des condamnés. 31% des viols et agressions sexuelles sur mineurs sont commis par un autre mineur. Si on prend l’ensemble des auteurs majeurs de viols, 93% ont été condamnés à une peine privative de liberté ferme et, pour 69% d’entre eux, celle-ci est supérieure ou égale à 10 ans. 

Les politiques menées contre les violences sexuelles et sexistes relèvent à la fois du droit pénal, de la connaissance des phénomènes, de la prévention et de la protection des victimes, notamment : 

  • la création d’une infraction d’outrage sexiste (harcèlement de rue, par exemple), les sanctions contre le cyber-harcèlement et l’allongement du délai de prescription de 20 à 30 ans pour les crimes sexuels commis sur mineurs ;
  • les études spécifiques, comme l’enquête Virage ; 
  • les dispositifs facilitant la libération de la parole et l’accompagnement des victimes : la plateforme numérique de signalement des atteintes aux personnes et d'accompagnement des victimes (PNAV) permet de signaler des violences sexistes et sexuelles et de s'entretenir avec un policier ou un gendarme 7 jours sur 7 ;
  • les dispositifs de prise en charge globale et de protection des victimes (centres régionaux de psycho-traumatismes, par exemple).

Au travail, les employeurs doivent informer leurs salariés en matière de harcèlement sexuel et choisir un référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes. Dans la fonction publique, les employeurs ont l'obligation de mettre en place un dispositif de signalement, de traitement et de suivi des violences sexuelles, du harcèlement et des agissements sexistes (loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019).

Les violences conjugales font l'objet de mesures spécifiques : 

  • un numéro national d’écoute téléphonique, anonyme et gratuit le 3919 "Violences Femmes info" ;
  • les actions de la justice : bracelet anti-rapprochement, ordonnances de protection, Téléphone grave danger (TGD), suspension de l'autorité parentale... Depuis le 1er janvier 2024, les plaintes pour violences conjugales sont traitées sous le pilotage des pôles spécialisés dans la lutte contre les violences intrafamiliales ;
  • des dispositifs d'accompagnement et de prise en charge, notamment hébergement pour les femmes victimes de violences conjugales (une plateforme de géolocalisation des places d’hébergement d’urgence est mise à disposition des forces de l’ordre), les accueils de jour, les lieux d’accueil, d’écoute et d’orientation (LAEO), les "référents pour les femmes victimes de violences au sein du couple" qui ont une mission de coordination de proximité.

Quant aux violences sexuelles sous emprise de drogue, la loi du 3 août 2018 a qualifié de circonstance aggravante l’usage de drogue lors d’une agression sexuelle. L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) réalise chaque année, depuis 2003, une enquête "Soumission chimique" pour identifier les substances en cause dans l’usage criminel et délictuel, définir les types d’agression associés et le modus operandi des auteurs notamment.

En 2022, la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) a lancé une campagne d'information, de prévention et de réduction des risques liés au GHB (produit anesthésiant) et au GBL (solvant industriel précurseur du GHB) dans les établissements de nuit (bars, discothèques...). 

Outre les produits illicites, des mesures préventives portent sur l'utilisation détournée de certains médicaments, notamment une prescription restreinte et surveillée.

Le code pénal définit deux infractions pénales :

  • "constitue une agression sexuelle toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise ou, dans les cas prévus par la loi, commise sur un mineur par un majeur" (article 222-22 du code pénal) ;
  • "tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d'autrui ou sur la personne de l'auteur par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol" (article 222-23 du code pénal).

La notion de violences sexuelles a été introduite par le code napoléonien de 1810 dont l'article 3 dispose : "Quiconque aura commis le crime de viol, ou sera coupable de tout autre attentat à la pudeur, consommé ou tenté avec violence contre des individus de l’un ou de l’autre sexe, sera puni de la réclusion. "

À cette époque, le viol n’est considéré possible qu’en dehors du mariage.

L’arrêt Dubas de 1857 introduit les éléments de contrainte et de surprise. La Cour de cassation décrit le viol comme "le fait d’abuser une personne contre sa volonté, soit que le défaut de consentement résulte de la violence physique ou morale exercée à son égard, soit qu’il résulte de tout autre moyen de contrainte ou de surprise pour atteindre, en dehors de la volonté de la victime, le but que se propose l’auteur de l’action".

C'est ensuite la loi du 23 décembre 1980 qui reconnait le crime de viol.

Le viol conjugal est reconnu par la loi du 4 avril 2006. Le viol entre conjoints devient une circonstance aggravante. La présomption de consentement des époux est supprimée par la loi du 9 juillet 2010.

Par ailleurs, depuis la loi du 21 avril 2021, une relation sexuelle entre une personne majeure et une personne mineure est reconnue comme un viol.

Les définitions du viol et de l'agression sexuelle dans le droit pénal français se suffisent en elles-mêmes et caractérisent ces infractions pénales sans avoir à évoquer le comportement de la victime. L'infraction repose sur le seul comportement de l'auteur du crime ou du délit. 

La notion de consentement doit-elle entrer dans les définitions de l’agression sexuelle et du viol ? Les deux ont en commun d'être caractérisés par le fait d'être commis "avec violence, contrainte, menace ou surprise".

Le mouvement #MeeToo a amené la question du consentement au centre des débats en 2017. La libération de la parole des femmes s'est accompagnée d'une affirmation : "Non, c'est non." Les femmes ont ainsi recentré le débat concernant les violences sexuelles sur leur expérience et leur point de vue. Ce point de vue de la victime, le non-consentement, ne doit-il pas dès lors être intégré à la définition du harcèlement, de l'agression sexuelle et du viol ?

Les détracteurs de l'intégration de la notion de consentement à la définition de l'agression sexuelle et du viol arguent que cela reviendrait à évoquer le comportement de la victime, voire à faire reposer sur elle la charge de la preuve. Une femme agressée sexuellement ou violée devrait prouver qu'elle n'était pas d'accord. 

Les promoteurs d'une définition de l'agression sexuelle et du viol intégrant la notion de consentement argumentent que de toute manière cette question est au centre des débats dans les tribunaux, donc autant lui donner une existence juridique. Il est peut-être plus aisé de prouver le non-consentement d'une victime que de prouver des faits de "violence, menace, contrainte ou surprise" de la part d'un auteur. La définition juridique du consentement pourrait reprendre celle de l'article 36 de la convention d'Istanbul : "Le consentement doit être donné volontairement comme résultat de la volonté libre de la personne considérée dans le contexte des circonstances environnantes."

Dans le cas de violences sexuelles sur mineurs, la loi du 21 avril 2021 a reconnu un double seuil pour le non-consentement sexuel.

Si l'intégration de la notion de consentement dans la définition des violences sexuelles reste en débat, le statut quasi exclusivement féminin des victimes et le statut quasi exclusivement masculin des auteurs rendent nécessaire une définition du consentement bien en amont du droit, qui relève avant tout et entre autres de l'éducation.

Toutefois, la notion de consentement souffre de plusieurs lacunes, voire de connotations relèvent philosophes et féministes.

Philosophes et féministes relèvent la connotation patriarcale de la notion de consentement, puisque la femme est mise dans la position de devoir apporter une réponse au désir de l'homme : "L'homme propose, la femme dispose." Là encore, la réponse de #MeToo, "non, c'est non", est apportée face à l'immédiateté et à l'effectivité des violences faites aux femmes. Le débat sur la notion de consentement reste un moment essentiel de la lutte contre les violences faites aux femmes.

L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) définit la soumission chimique comme "l’administration à des fins criminelles (viols, actes de pédophilie) ou délictuelles (violences volontaires, vols) de substances psychoactives à l’insu de la victime ou sous la menace".

L’ANSM recense chaque année depuis 2003 les molécules utilisées par les agresseurs et leur mode opératoire, en s’appuyant principalement sur les plaintes. Elle dénombre 1  229 agressions facilitées par des substances en 2022, soit une hausse de 69,1% à mettre en perspective avec les mouvements de libération de la parole, la réouverture des discothèques et le déploiement du plan gouvernemental anti-GHB (acide gamma-hydroxybutyrique, appelé aussi drogue du violeur) .

Les produits utilisés sont :

  • des médicaments sédatifs (56,7% des cas) : des benzodiazépines et apparentés (25,2%), des antihistaminiques (12,6%), des opioïdes (11%), d’autres sédatifs comme des neuroleptiques ou des antidépresseurs (7,9%) ;
  • des substances non médicamenteuses (43,3%) : MDMA (méthylène-dioxyméthamphétamine ou ecstasy), cocaïne, cannabis, GHB/GBL (acide gamma-butyrolactone, qui se transforme en GHB dans l’organisme), alcool… 

La plupart des agressions se produisent dans des lieux festifs. Les agressions sexuelles constituent la majorité des signalements (58,4%), suivies par les tentatives de soumission chimique (9,6%), les vols (7,1%) et les violences physiques (5,1%). Les cas recensés ne représentent sans doute qu’une partie de la réalité, le dépôt de plainte étant difficile en matière d’agression sexuelle, et plus encore quand la victime souffre d’amnésie.

L’expression "soumission chimique" ne figure pas dans le code pénal. Mais la loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes prévoit que "le fait d’administrer à une personne, à son insu, une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes afin de commettre à son égard un viol ou une agression sexuelle est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende" (article 3). La peine est alourdie (sept ans de prison et 100 000 euros d’amende) "lorsque les faits sont commis sur un mineur de 15 ans ou une personne particulièrement vulnérable".

L'égalité entre les femmes et les hommes et la non-discrimination sont des valeurs fondamentales de l'Union européenne. Des engagements plus précis concernant les violences sexistes et sexuelles sont pris par l’UE depuis une dizaine d’années.

L'UE est signataire de la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique, dite "Convention d'Istanbul". Celle-ci exige des parties qu'elles élaborent des lois, des politiques et des services de soutien pour mettre fin à la violence à l'égard des femmes et à la violence domestique. La convention d'Istanbul est entrée en vigueur en avril 2014 et a été signée par l'UE le 13 juin 2017. En février 2023, le Conseil a demandé l'approbation du Parlement européen en vue de l'adoption de la décision relative à la conclusion de la convention par l'UE. Le 1er juin 2023, le Conseil a adopté une décision relative à l'adhésion de l'UE à la convention. 

En 2021, le Parlement européen a adopté une résolution sur la stratégie de l’Union européenne en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes. Un paragraphe y consacre expressément la volonté d’éliminer la violence visant les femmes et la violence sexiste. Le Parlement a souligné la nécessité de prendre des mesures spécifiques pour remédier aux disparités existantes entre les États membres en matière de lois, de politiques et de services, et à l’augmentation de la violence domestique et sexiste pendant la pandémie de COVID-19. 

La directive du 14 mai 2024 relative à la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique vise à protéger les femmes victimes de violences et harmoniser les sanctions à l’encontre de ceux qui les commettent. Cette directive vise à fournir un cadre global pour prévenir et combattre efficacement la violence à l'égard des femmes et la violence domestique dans toute l'Union. La directive prévoit des lois plus strictes contre la cyberviolence, une meilleure assistance aux victimes, des mesures de prévention du viol et une meilleure compréhension du consentement sexuel. Toutefois, la directive ne donne pas de définition commune du viol. 

La définition juridique du viol doit-elle être harmonisée au niveau européen ? 

Le 8 mars 2022, la Commission européenne présente un projet de directive qui instaure, pour la première fois, une définition du viol au niveau européen. Son article 5 propose une définition du viol fondée sur l'absence de consentement en s'inspirant de la convention d’Istanbul ("seul oui veut dire oui"). Pour caractériser le viol, il suffit d’établir le défaut de consentement de la victime, que le violeur ait, ou non, utilisé des moyens de coercition.

Dans le texte présenté le 8 mars 2022, la Commission juge que "l'absence de consentement devrait être un élément central et constitutif de la définition de viol, étant donné que fréquemment, le viol est perpétré sans violence physique ni usage de la force". "Un consentement initial devrait pouvoir être retiré à tout moment durant l'acte, dans le respect de l'autonomie sexuelle de la victime, et ne devrait pas signifier automatiquement le consentement à de futurs actes", poursuit le texte.  

En juin 2023, les États membres ont finalement décidé d'exclure des négociations l'article 5 du projet de directive. Le Parlement européen et plus d'une dizaine de pays (dont l'Espagne, la Belgique, la Grèce, la Suède et l'Italie) ont adhéré à la définition du viol proposée. En revanche, une dizaine d'autres pays, notamment la France, la Hongrie ou l'Allemagne, se sont opposés à l'intégration du viol dans la législation européenne au motif que l’UE n’a pas de compétence en la matière et que le texte risquait d’être retoqué par la justice européenne en cas de recours.

Pour les pays opposés au texte, le viol n'a pas la dimension transfrontalière nécessaire pour être considéré comme un "eurocrime" susceptible de donner lieu à une harmonisation de la législation au niveau européen. Seules les infractions mentionnées dans l'article 83 du traité sur le fonctionnement de l'UE sont concernées : le terrorisme, la traite des êtres humains et l'exploitation sexuelle des femmes et des enfants, le trafic illicite de drogues, le trafic illicite d'armes, le blanchiment d'argent, la corruption, la contrefaçon de moyens de paiement, la criminalité informatique et la criminalité organisée. Le Parlement et la Commission considèrent, pour leur part, que le viol peut entrer dans le cadre de l'exploitation sexuelle des femmes.