Déclaration de M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, sur l'action de l'Etat vis-à-vis des DOM, Paris le 11 janvier 2005.

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Circonstance : Voeux à la presse, aux élus, aux associations, aux personnalités d'outre-mer, à Paris le 11 janvier 2005

Texte intégral

Je voudrais tout d'abord vous dire la très grande fierté qui est la mienne de m'exprimer devant vous ce soir, à l'occasion de cette traditionnelle cérémonie des v?ux en ma qualité de ministre de l'Outre-mer. Je suis très heureux de vous accueillir ici et que nous commencions symboliquement cette année ensemble. J'adresse donc à chacune et chacun d'entre vous, pour cette nouvelle année, mes v?ux les plus chaleureux de réussite et d'épanouissement sur le plan professionnel comme personnel.
La mission que le Président de la République et le Premier Ministre ont bien voulu me confier en me nommant m'a déjà beaucoup apporté et beaucoup appris. C'est un honneur pour moi que d'être le porte-parole le plus convaincu et, je l'espère le plus convaincant, de la défense de ces outre-mers qui participent intimement de notre communauté nationale, qui en symbolisent la diversité géographique, culturelle et humaine.
J'ai voulu faire de cette mission un pacte de confiance. Plus qu'une notion, c'est une valeur essentielle. Rien ne peut avancer sans elle. La confiance ne se décrète pas, elle s'impose encore moins : elle se vit et se partage?
Je suis donc heureux de vous voir réunis ici aujourd'hui :
Mesdames Messieurs les Parlementaires ;
Les Présidents et journalistes de presse écrite et audiovisuelle ;
Les Présidents et représentants des principales associations ultramarines métropolitaines ;
Mesdames Messieurs les membre du Conseil Economique et Social d'outre-mer ;
Les personnalités du monde culturel, artistique et sportif?
C'est grâce à vous tous que l'outre-mer puise toute sa force représentative. C'est vos efforts quotidien qui font vivre l'outre-mer. C'est l'énergie que vous mettez à défendre l'outre-mer qui m'aide dans mes missions. C'est sur vous que je peux m'appuyer pour me faire l'écho de la richesse et de la diversité des outre-mers.
Je voudrais saluer chacun d'entre vous, pour la qualité de votre travail dans vos domaines respectifs.
Un mot également pour la presse nationale qui nous a fait le plaisir de répondre à notre invitation. Dès mon arrivée au Ministère, j'ai été très attentif aux problématiques liées à la représentativité des « minorités visibles », comme on les nomme, dans les médias. Après les événements qui se sont produits récemment dans nos banlieues, le Président de la République a légitimement demandé aux responsables de chaînes de télévision que cette représentativité soit plus effective. Je resterai particulièrement vigilent et je ne ménagerai pas mes efforts à ce sujet. Je souhaite également que l'outre-mer soit plus souvent abordé « spontanément » dans nos médias, sans que l'on en parle uniquement lorsqu'il y a une catastrophe, ou simplement au moment des vacances.
Sur un autre plan, mais en restant dans le même domaine, je voudrais dire combien il est essentiel ?même si cela reste perfectible- que l'intégration de RFO au sein du groupe France télévisions ait réussie. Le gouvernement avait voulu donner un véritable contenu à l'égalité audiovisuelle entre la métropole et l'outre-mer. Je constate que c'est un choix pertinent. Et je souhaite vivement que cette intégration permette de dégager les moyens nécessaires au profit de la production audiovisuelle.
L'année qui vient de s'écouler nous amène tout naturellement à nous tourner vers celles et ceux qui ont perdu un ou plusieurs membres de leur famille dans le dramatique accident aérien qui a endeuillé la Martinique, la France tout entière. Je voudrais avoir une pensée toute particulière et très affectueuse à l'égard de ces familles. A travers ce drame, c'est aussi un élan de solidarité incroyable qui est né. Personne ne l'oubliera, ni en outre-mer, ni en métropole.
Ma mission à la tête de ce ministère s'inscrit bien sûr dans le respect des engagements pris par le Président de la République et dans l'action du gouvernement de M. Dominique de VILLEPIN. Elle aura pour objectif d'essayer d'orienter les efforts de l'Etat aux côtés des élus, quelque soit leur sensibilité politique, quelque soit leur engagement personnel, pour améliorer le quotidien de nos concitoyens ultramarins.
C'est le cas en matière d'emploi bien sûr, qui, vous le savez, est une priorité pour le gouvernement. L'outremer n'est pas, dans ce domaine, loin s'en faut, en reste. Grâce à la loi de programme dont les effets se font désormais sentir, grâce aux mesures gouvernementales pour l'emploi, notamment le contrat nouvelle embauche. Les résultats sont encourageants : fin novembre 2005, le taux global de chômage dans les départements d'outre-mer a diminué de 3,6% par rapport à l'année dernière. Dans le même temps, l'emploi salarié a progressé de 2,4%. Ces résultats sont autant d'encouragements. Je ne doute pas que 2006 verra l'accomplissements de nos efforts communs.
Autre priorité pour l'outre-mer : le logement social. Un effort financier particulier a été effectué au profit du logement social avec le dégel de 40 millions d'euros de crédits supplémentaires en 2005. Un véritable plan d'urgence du logement social destiné à traiter les difficultés rencontrées outre mer est en cours d'élaboration. 2006 sera une année décisive en la matière. Mon ambition est en effet de redresser le mouvement stagnant de construction et de réhabilitation dans les DOM où le problème du logement est d'autant plus sensible que nous devons faire face à une démographie importante et à la résorption d'un habitat parfois insalubre, parfois inapte à faire face aux risques naturels et notamment aux risques sismiques dans les Antilles.
Troisième priorité : la sécurité et l'immigration clandestine. Une action globale de lutte contre l'immigration clandestine a été engagée. La Mission parlementaire, dont j'avais demandé la création à l'Assemblée nationale, doit me remettre ses conclusions dès le début du mois prochain. Nous examinerons naturellement l'ensemble des propositions qui seront formulées et nous déterminerons quelles suites nous leur donnerons. Par ailleurs, l'Etat mène actuellement un réflexion approfondie sur l'adaptation du droit destinée notamment à améliorer l'action publique et à réduire l'attractivité des territoires. Enfin, il est essentiel de travailler à une plus grande coopération entre les Etats voisins et nos terres ultramarines. Ce sont là des chantiers engagés qui nous attendent en 2006.
Sur les plans juridique et institutionnel, mon Ministère continuera de poursuivre un important effort de modernisation du droit de l'outre-mer ; il s'agit là d'un effort de sécurité juridique indispensable au bon fonctionnement de l'Etat, des services publics et de l'économie, mais aussi à l'exercice de la citoyenneté et des libertés dans l'égalité avec la métropole. Les évolutions statutaires concernant st Barthélémy et St Martin seront menées à leur terme, conformément au v?u émis par les électeurs de ces deux îles. La réforme communale sera mise en ?uvre en Polynésie, dans le sens d'une plus grande décentralisation et responsabilisation des collectivités locales.
Sur le plan budgétaire, l'adoption par le Parlement du budget de l'Etat, avec la consolidation des crédits destinés à l'outre mer, d'un montant global de 11 milliards d'euros en 2006, permettra de respecter les engagements de la solidarité nationale. Grâce à une forte mobilisation des parlementaires ultramarins, l'année qui s'est écoulée a permis de préserver la défiscalisation et les exonérations de charges sociales outre-mer. Il conviendra, cette année, comme je m'y suis engagé devant les deux assemblées, de mettre en place la commission d'évaluation de ces dispositifs. Ses conclusions devront être remises pour juin 2006 ; j'insiste sur l'utilité d'une telle commission car les débats vont reprendre avec force au Parlement.
L'Etat poursuivra son action de poursuite du rattrapage du retard de développement outre-mer. Dans certains de nos départements et collectivités, plus de la moitié de la population a moins de vingt-cinq ans, ce qui exige une adaptation des politiques publiques : il faut construire des écoles, des collèges, des lycées, il faut anticiper sur l'évolution du marché de l'emploi. Nous devons également développer les infrastructures et mieux assurer la continuité territoriale, afin que ces jeunes puissent ensuite poursuivre des études supérieures s'ils le souhaitent et là où ils le souhaitent, c'est-à-dire souvent dans leur collectivité ou leur département. Voilà encore une exigence à laquelle il nous faut répondre.
Un grand chantier pour 2006 sera celui des discriminations. Trop de nos concitoyens ultramarins en sont malheureusement victimes. Discrimination à l'emploi ou au logement sont, entre autres, monnaie courante. Il n'est bien évidemment pas normal que des français se sentent étrangers dans leur propres pays. Nous allons travailler activement en étroite collaboration avec la Haute Autorité pour la Lutte contre les Discrimination et pour l'Egalité dans ces domaines.
Par ailleurs, je souhaite que les choses avancent concernant le transport aérien. La perspective de développer en 2006 une offre de transport aérien plus conforme aux aspirations de nos concitoyens ultramarins passe par un renforcement de la politique de continuité territoriale engagée depuis 2003. Une réflexion est engagée en concertation avec les élus, les associations et les compagnies aériennes.
Enfin, l'année 2006 est celle du 60ème anniversaire de la loi sur la départementalisation pour les 4 DOM. Au lendemain de la deuxième guerre mondiale, cette loi a bien sûr été une étape cruciale pour les collectivités concernées. Elle signifie le pacte renouvelé d'une pleine intégration politique dans notre république. Elle est une nouvelle forme de décolonisation, cette longue marche de tout homme vers la liberté. Il existait deux voies possibles pour y accéder : l'indépendance ou l'égalité. Les « 4 vieilles » ont choisi la voie de l'égalité républicaine. Cette loi a sonné le glas de l'époque post-coloniale. Il est essentiel, cette année, que nous prêtions une attention particulière à cet anniversaire si symbolique.
Pour terminer, je voudrais dire à quel point j'ai pu me rendre compte et partager les valeurs qui sont celles de l'Outre-mer : solidarité, courage et respect. Il existe dans ces valeurs un « modèle ultramarin » dont la Métropole devrait plus souvent s'inspirer tant, souvent, elle en oublie la réalité. Ce sont ces valeurs qui fondent notre pacte républicain auquel nous sommes tous attachés.
Je suis honoré de partager et de défendre ces valeurs avec vous.
Excellente année à tous !
François Baroin(Source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 13 janvier 2006)